Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

décadence

  • Chute de Rome

    "L'homme est un loup pour l'homme." : qu'est-ce qu'un chrétien peut ajouter de plus à cette description lapidaire de la civilisation ?

    Et comment décrire la décadence, quand les loups ne sont plus vraiment des loups mais des bêtes bien plus sournoises ? Un homme d'élite admiré en France (Clemenceau) a comparé la démocratie au règne des poux - ils opèrent la même besogne que les loups, mais d'une manière plus subtile.

    De la civilisation ou de la décadence, le chrétien ne doit pas trop se préoccuper mais suivre la voie que les évangiles lui montrent, viser ce chemin de crête qui surplombe la civilisation et la décadence un peu plus bas.

    Un prêtre chrétien plein de zèle (Calvin) faisait le reproche à ses ouailles de passer plus de temps à lire des ouvrages techniques médiocres qu'à lire les évangiles. En revanche, du point de vue de la civilisation, il est inutile que la plupart des hommes et des femmes sachent lire car cela ne fait que contribuer à la décadence.

  • Décadence

    La décadence n'est pas une source d'inquiétude pour le chrétien, car le Royaume de Dieu n'est pas de ce monde.

    La décadence est une source d'inquiétude pour les élites, qui sont actionnaires du monde, tandis que le chrétien s'efforce de remonter le courant de la vanité et du péché.

    Le moraliste Léopardi dit de l'homme ""qu'il tire toutes ses forces de la nature ou bien de ses illusions". Il exclut ici la Vérité, qui procura à Jésus-Christ un surcroît de force pour affronter ses assassins, ses juges et ses bourreaux.

    Des sociétés ou des civilisations, qui ne tirent aucun profit de la Vérité, on peut mieux affirmer qu'elles prennent leurs forces dans la nature ou bien dans des perspectives illusoires ; ces dernières ont le plus souvent la forme d'utopies politiques.

    Qu'est-ce que l'illusion, si ce n'est un mirage, par conséquent une force naturelle dérivée, exactement comme la puissance technologique n'est qu'un emprunt à la nature.

    Il est probable que l'illusion joue un rôle plus grand chez les femmes (généralement plus perméables à l'amour, cet apitoiement sur soi), ou dans les sociétés proches de leur naissance ou de leur agonie. Au contraire les hommes dans la force de l'âge tirent plus directement leur force dans la nature. Les civilisations, à leur apogée, se nourrissent moins d'illusions.

    L'étude de l'art permet de mesurer la part de la nature et la part de l'illusion dans telle ou telle culture, comme le nombre des anneaux permet de dater l'arbre tronçonné. La musique ne procure-t-elle pas l'illusion de l'âme et de la vie après la mort ?

  • Décadence

    A la radio qui diffuse la rumeur du monde, j'entends la voix d'un type se plaindre de la décadence ; il regrette que les écrivains n'écrivent plus comme Proust.

    La décadence est confirmée par ceux qui s'en plaignent sans savoir ce qu'elle est.

  • Exit la modernité

    Plus on est intransigeant avec soi-même, plus on l'est avec autrui et ce que certains vieillards cuits par les années font passer pour de la tolérance apparaît comme le mépris d'autrui.

    Cette intransigeance, qui contredit l'éthique de l'homme moderne, est l'expression de l'amour de soi. ll peut se traduire comme le refus de vivre pour vivre, le refus de la vie comme un but en soi.

    Ainsi Karl Marx voit-il dans l'épicurisme, et Nitche dans le bouddhisme, des religions décadentes, parce qu'elles incitent l'homme à la tolérance vis-à-vis de lui-même. Marx traduit la quête ou le calcul du bonheur (philosophie nécessairement inégalitaire), comme un désintérêt pour le progrès, c'est-à-dire une aspiration spécifiquement humaine, qu'aucune théorie biologique n'explique. Il n'y a que dans l'esprit d'un technocrate, c'est-à-dire d'un sous-homme acceptant d'être réduit à sa fonction, que bonheur et progrès sont deux notions exactement concordantes. Le progrès est réduit au mouvement, c'est-à-dire au sens mécanique du terme.

    L'anthropologie est le mot sophistiqué pour vanter sournoisement la renonciation de l'homme moderne au progrès au profit de réconfortantes fictions.

    L'intransigeance vis-à-vis de soi fonde l'individualisme. Socialement, il n'y aucune raison d'aller à l'encontre du mouvement général, fût-ce le plus bestial. Ce qui permet de caractériser le raisonnement moderne comme un raisonnement fonctionnel, fondateur d'une éthique totalitaire relativiste.

    D'une manière apparemment stupéfiante, le suppôt de Satan et le chrétien rejettent ensemble l'éthique moderne. Le suppôt de Satan (Nitche) y discerne un mouvement de décadence, un abrutissement sans précédent ; le chrétien (Shakespeare) y discerne un mouvement de décadence nécessaire, c'est-à-dire inéluctable, préalable de la fin des temps. Selon Nitche la modernité est chrétienne ; selon le chrétien, elle n'en a que l'apparence.

  • Décadence

    Rares sont les hommes d'élites qui ont le courage de regarder en face le fait de la décadence, à l'instar de Nitche. Les pleutres disciples de l'antéchrist se sont efforcés de gommer le constat de la mort de l'art par leur héraut.

    A la décadence, les élites libérales et démocrates-chrétiennes opposent le retour éternel et cyclique du profit. Dans ce régime, l'inflation galopante a le don de provoquer une grave crise religieuse. Le fachisme emprunte sans doute à Nitche sa mystique, mais il doit tout pour la cause au libéralisme. On retrouve ici la mécanique sociale implacable décrite par Moïse de la provocation de l'homme par la femme. Toute tentative d'imposer l'éthique dans le judaïsme ou dans le christianisme implique de donner du mythe de la Genèse une version truquée. TOUTE DOCTRINE SOCIALE CHRETIENNE oblige à nier le péché originel. La théologie catholique romaine, à cet égard, est passée au cours du dernier siècle, du mensonge par omission qui la caractérisait auparavant, au mensonge positif. De Calvin, on peut excuser l'erreur d'une lecture trop humaine de la Genèse, à côté d'une incitation sincère et efficace à la charité et au désembourgeoisement nécessaire pour se rapprocher de l'Esprit de Dieu. Mais du psychologue démocrate-chrétien, il faut botter le fondement sans hésiter ; son erreur n'est pas une erreur mais un calcul. Il faut comme Freud renier Moïse pour pouvoir prêcher la psychanalyse comme une science.

    Dans la décadence, significative pour l'aristocrate de la perte de son droit de jouissance, il y a au contraire pour l'homme de plus basse extraction une opportunité à saisir : le genre d'opportunité que les premiers apôtres n'ont pas laissé passer ; cette opportunité n'est pas la révolution, où l'élitisme trouve encore un intérêt virtuel.

    Pour cela, l'homme ou la femme de basse condition doit s'affranchir de la souveraineté populaire, qui n'est qu'une ruse inventée par les "rois très chrétiens", et plus encore de l'égalité, que la République n'a jamais accomplie et qu'elle n'accomplira jamais, car, comme le disent Nitche et Marx ensemble, elle est juridiquement impossible. Rien n'est plus facile que de s'affranchir d'idéaux truqués : il suffit d'imiter l'écolier au début des vacances qui fait un tas de ses cahiers, ses copies et ses brouillons, et y flanque le feu, accomplissant ainsi l'autodafé de ses certitudes passées. La difficulté est surtout pour le vieillard, car son idéal est comme la troisième jambe sur laquelle il s'appuie dans sa vieillesse pour continuer d'avancer. Le danger de la moraline judéo-chrétienne ou républicaine, et en cela on ne peut que confirmer le diagnostic du docteur Nitche, c'est qu'elle incite l'homme à penser en harmonie avec la mort.