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  • Chavagnes revisited

    Moi, ma préférée, au pensionnat de Chavagnes, c’est Charlotte. Parce que c’est une rebelle, qui essaye de faire tourner les profs en bourriques. C’est la moindre des choses, quand on est enfermé dans un bahut avec des profs qui vous transforment en bons petits soldats gavés comme des oies de savoir pasteurisé. Et c’est la seule de cette trempe-là, Charlotte. Tous les autres, c’est que fayots, pleurnichards et cancres mous courant après leur certificat d’étude.

    Internet ne donne que très peu de renseignements sur Charlotte, on apprend juste qu’elle aime bien s'occuper de son rat et faire des bêtises. Aussi qu’elle voudrait entrer dans l’armée. Rien de dirimant là-dedans. À part ça, elle a une sacrée bouche à pipes ; ça, c’est une observation personnelle, bien sûr.

    Le mien, de bahut, dans les années quatre-vingt, n’était pas sans ressemblance avec celui de Charlotte, mais en mieux. D’abord parce que des “châtiments corporels” y étaient encore administrés, et que ça nous évitait ainsi de longs sermons pour nous expliquer que tout ça, ces longues journées mornes passées derrière un pupitre, et à tourner en rond dans une cour entre quatre murs, c’était pour notre bien au fond, d’ailleurs les profs n’étaient là que pour le bien des élèves, pour faire d'eux des adultes responsables, et patati et patata… l’horreur ! Je n’aurais pas supporté ça ! Donc mon surgé n’avait pas besoin, comme Monsieur Navaron du Pensionnat de Chavagnes, de rodomontades pour se faire respecter.
    Une fois par semaine, il pénétrait tranquillement dans la classe, interrompant un cours, de préférence, afin de châtier le plus indiscipliné d’entre nous. Il avait de la concurrence, mais souvent c’était Frédéric, un petit Vietnamien très turbulent qui multipliait les incartades, qui décrochait le pompon. Le châtiment manquait de raffinement : deux taloches, un simple aller-retour. Mais magistral. La légende voulait que le chaton de la chevalière de Monsieur Hervé restât imprimé quelques jours sur la joue de sa victime.

    Nous admirions tous Fred le Viet, non seulement pour l’audace de ses défis, il n’hésitait pas à maculer de crachats la blouse du prof d’histoire-géo, l’atteignant avec une précision diabolique, entre les omoplates, sur le postérieur, où il voulait, de n’importe quel coin de la classe, mais surtout pour son courage. Car il n’hésitait jamais plus d’un quart de seconde à se dénoncer lorsque planait la menace d’une punition collective.

    «- Qui a fait ça ?
    - C’est moi, M’sieur !»
    , il se dressait sur ses ergots et revendiquait ses droits d’auteur crânement. En général, Fred le Viet ne cillait pas. Sauf une fois où la chevalière avait dû heurter sa pommette et lui faire mal, il esquiva le retour, glissa au sol avec souplesse et tenta de s’échapper entre les rangs. C’était sans compter sur l’allonge de Monsieur Hervé, qui le chopa par la tignasse d’une main sûre, et, le maintenant en place d’une main, appliqua la correction derechef de l’autre. Nous observions la scène dans le silence le plus complet et le bruit bizarre des coups nous faisait sursauter.

    L’autre avantage de ma pension sur celle de Chavagnes, c’est que nos banals exploits n’étaient pas filmés. En revanche, la mixité, j’ai connu ça. C’est très dur. Quand on est avec des filles de treize, quatorze ans, attendues par des types de dix-sept, dix-huit ans devant le portail, à califourchon sur leurs motos, qu’on a soi-même que onze ans, ouais, c’est très dur d’attendre.

    Dans la classe, y’avait que Ronan, le mieux bâti, il avait redoublé plusieurs fois, qui en profitait. Cette fille, Valérie, s'asseyait à côté de lui au premier rang, il lui mettait la main dans la culotte en plein cours, au nez et à la barbe du prof d’histoire-géo aux trois quarts cacochyme. D’abord, elle tortillait du cul sur son banc, puis elle se mettait à pousser des petits gémissements… Bon Dieu, y’avait que le prof qui les entendait pas ! Les filles gloussaient en voyant ça, les mecs restaient babas. Celle-là, au moins, elle se fichait du BEPC comme de son premier tampon, une vraie femme…

  • Suzanna au bain

    Il m’a fallu quelques instants pour reconnaître un Cranac’h. Le temps de faire abstraction du décor, des néons, du bonnet en plastique et du maillot vert pomme de la fille… L’eau chlorée à 24 °C de la piscine a perdu d’un seul coup son pouvoir sédatif. Plus je l’observais, plus je m'emballais pour cette peau nacrée et ces yeux d’agate. Un vrai chef-d’œuvre !
    Une carnation comme ça, c’est du travail, je vous prie de croire, des glacis subtils à n’en plus finir… Tout ça paraît fragile, mais quelle résistance au temps !

    On s’est retrouvés après quelques longueurs sous les douches mixtes. C’est pas la première fois que je m’entiche d’une toile de maître, alors le pouvoir d’attraction de cette fille, je savais à quoi il tenait.
    Suzanna ôta son bonnet, découvrant des cheveux blonds coupés court. Inconsciente de l’anachronisme.

    Il y a quelques annés, j’ai mis un joli Chassériau dans mon lit. C’était après une longue aventure avec un Zurbaran magnifique. Aujourd’hui, je donnerais cher, mettons Jennifer Connelly, Kim Basinger et Eva Herzigova réunies, contre un Titien, un très long baiser avec un Titien. Voire un Boucher ou un Fragonard. En vieillissant, mon jugement s’affine. N’empêche, j’ai déjà commis des fautes de goût. Ainsi, il y a trois ans, je me suis abouché avec une rousse sortie d’un tableau d’Egon Schiele, une stagiaire de la bibliothèque du VIIe.
    Mon Cranac’h d’hier a de petits seins en forme de pommes ravissants, comme il se doit pour un Cranac’h, et des jambes qui s’incurvent légèrement vers l’intérieur à hauteur des genoux.

    De retour dans mon antre, je ne parviens pas à m’endormir ; je lis une interviou rigolote d’Emile Brami dans je ne sais plus trop quel canard. Brami, c’est un libraire juif admirateur de Céline. Il échaffaude une théorie selon laquelle Hergé aurait emprunté à Céline les fameux jurons du capitaine Haddock. Pas sûr que ça plaise à tout le monde, cette affaire. Les céliniens risquent de ne pas apprécier qu’on mélange le Dieu du style avec les aventures de Tintin et Milou. Quant à la Fondation Hergé, elle s’efforce tant qu’elle peut de faire disparaître la sous-couche des amitiés “incorrectes” de Georges Rémi, de peindre des feuilles de vigne sur les sexes.

    Selon Brami, Poulet, qui fréquentait les deux hommes, pourrait être l’initiateur d’Hergé. Brami dit que pour les dates, ça colle. Faire de "sapajou" et d'“ornithorynque" des indices, parce qu’on retrouve ces épithètes chez Céline, c’est moins convaincant. Céline n’avait tout de même pas le monopole du sapajou et de l'ornithorynque.

  • Le Gloupier a disparu

    Comme Attali et Allègre avant lui, Villepin publie. Gros tirage. La collection pourrait s’appeler : Eminences grisonnantes, ou : Ce Qu’il Faut Penser. Le titre, La Mouette et le Requin, est évocateur d’une certaine idée de la dissertation de culture générale au concours d’entrée à l’ENA. Défense de rire : « Nous voici à ce point crucial ou s’entrevoit la possibilité d’une réconciliation entre la puissance et la grâce, entre le ciel et la mer, entre le requin et la mouette. » Voilà pour la petite citation placée dans l’introduction (de René Char, poète à l’usage des étudiants à Sciences-Po).

    « Les peintres jouent des harmonies entre tradition chrétienne et antiquité classique, campant des scènes religieuses dans des décors d’arcades et de colonnades, n’hésitant plus à afficher une distance critique, parfois jusqu’à l’irrévérence. Dans l’étonnante Annonciation de Lorenzo Lotto, la Vierge tourne le dos à Dieu et à son livre de prières, tandis que l’apparition de l’ange au visage halluciné fait s’enfuir un chat terrorisé. Voici aussi Erasme, Montaigne, Rabelais, Léonard, Dürer, illustrant par la connaissance des arts et des savoirs, etc., etc. »

    Érasme, Montaigne, Rabelais, Léonard, Dürer, voilà pour les références qui montrent qu’on est un bon élève qui fait des fiches de lecture. Villepin a tout lu mais n'a rien pigé. Surtout au chat du Lotto.
    Vous les auriez vu l’autre jour, Villepin et Depardieu, chez Guillaume Durand, en tournée de propagande : le requin et la mouette ! (le butor, même).

    «- Villepin : Tu reprendras bien un peu de cirage, Gérard ! Guillaume, mon brave, passez donc le cirage à Monsieur Depardieu, vous voyez bien qu’il ne brille pas assez…
    - Depardieu : Et la vaseline Dominique, vous oubliez la vaseline, oh, oh, oh… Si vous saviez comme Dominique est un type drôôle en privé, Guillaume…

    (Tu parles ! Il a l’air sympa comme un chacal, ce mec. Le chacal et le butor, donc, plutôt.)

    Le seul des trois à ne pas avoir été nommé ministre, c’est Attali. Et il s’est vengé en mordant la main de son maître, en accusant Mitterrand d’être antisémite.
    Isabelle me dit que c’est pas une raison pour me mettre dans cet état. Le Gloupier, si tu m’entends…

  • Des perles aux pédés

    « C’est là que je découvris que les médecins étaient les rois et les malades de la merde, que les hôpitaux existaient pour assurer la fortune de médecins imbus de leur supériorité immaculée, amidonnée. En plus, ils ne s’emmerdaient pas avec les infirmières.
    - Docteur, docteur, docteur, pincez-moi le cul dans l’ascenseur, oubliez la puanteur du cancer, oubliez la puanteur de la vie. Les crétins, c’est les autres, nous ne mourrons jamais ; nous buvons notre jus de carotte, et quand nous avons du vague à l’âme, nous prenons une pilule, une seringue, toute la défonce que nous voulons. Cui, cui, cui, on se la coule douce, nous sommes les gagnants. J’entrais, je m’asseyais, et ils enfonçaient leur mèche dans ma chair. ZIRRRR, ZIRRRR, ZIRRRR, ZIR, pendant que le soleil faisait pousser dahlias et oranges, se glissait sous les blouses des infirmières, ce qui affolait les pauvres cinglés.

    (…) Sacré hôpital, mais je ne doutais pas que j’y retournerais vingt ans après, dans cette même salle des miséreux. Les hôpitaux, les prisons et les putes : telles sont les universités de la vie. J’ai passé plusieurs licences. Vous pouvez me donner du Monsieur. »


    Bukowski a raison de détester les toubibs, c’est une engeance pire encore que les profs. Cette haine du médecin, je crois qu’elle est génétique, chez moi. Tout petit déjà, j’avais mordu jusqu’au sang le Dr Le Coz, un pédiatre qui prétendait planter une grosse seringue dans le cul de mon petit frère. Et de tous les bouquins qu’on m’a demandé d’étudier en classe, celui que j’ai préféré, c’est Knock. Je crois même que j’en veux à L.-F. Céline d’avoir été médecin.
    Je suis convoqué à la médecine du travail ce matin et ça me fout les glandes. Isabelle propose de me déposer en voiture, le cabinet est près de son boulot. À la radio, l’annonce d’une chute de 9% des ventes du Monde (16000 ex. en moins pas jour) vient à point pour me redonner un peu confiance en l’avenir.

    Pas ragoûtante, la littérature qui traîne dans la salle d’attente d’un médecin. Une couverture grise fait tâche claire au milieu de magazines raccoleurs. Sexualité magazine, un truc comme ça, c’est pas un bouquin de cul, mais la revue officielle de la Fédération européenne des sexologues, pas moins. Apparemment une bande d’obsédés sexuels qui se prennent très au sérieux : Analyse rétrospective de 418 patients présentant une impuissance de la lune de miel, Existe-t-il un instinct sexuel ?, Les microperversions. Les titres sont plus ineptes les uns que les autres. Je laisse très vite tomber le papier sur l’instinct sexuel. Son auteur, un certain Brenot, écrit dans un jargon imbitable.

    Ah, en revanche, s’il y a des pédés qui lisent mon blogue, ces petites perles vont peut-être les faire rire. Elles sont signées d’un éminent chef de service du Charing Cross Hospital de Londre. Le Pr R. Green écrit, sans rire, ceci :
    «On a démontré que l’ordre de naissance chez les sujets masculins avait une forte corrélation avec l’orientation sexuelle. Plusieurs études ont montré que plus le sujet garçon a de frères plus âgés, plus il a de risque d’être homosexuel. L’une des explications est que le chromosome Y du fœtus mâle produit un anticorps chez la mère pendant chaque grossesse successive. L’augmentation du niveau de l’anticorps perturbe le développement normal du cerveau.»

    Ou, encore plus fortiche : «La littérature montre que les homosexuels masculins ont un déficit dans le nombre d’oncles du côté de la mère (les mères avaient trop peu de frères par rapport au nombre de sœurs). Nous avons évalué les profils d’arbre généalogique de 400 transsexuels masculins et 100 féminins. Les masculins avaient moins d’oncles maternels que prévu. Ceci peut s’expliquer par l’empreinte génomique. Un gène est exprimé ou non suivant qu’il vient du côté de la mère ou du père. Ainsi, un gène passé par la grand-mère maternelle peut être létal pour les mâles de la génération de la mère, et, lorsqu’il vient de la mère, peut perturber le processus de différenciation cérébrale pour les mâles de la génération suivante quand il s’agit d’un fils homosexuel ou transsexuel».

    Le Dr Lombroso, qui vient me chercher pour m’ausculter, est une femme d’une cinquantaine d’année, la même que l’année dernière, très laide et qui s’efforce de dissimuler que son travail n’en est pas un. Elle me repose les mêmes questions vaines que l’année dernière : «Est-ce que vous fumez ? Est-ce que vous avez des douleurs quelque part ? Est-ce que votre travail vous plaît ?, etc. Je réponds au pifomètre, par monosyllabes, si possible, pour écourter l’entretien. Pendant qu’elle note dans son registre mes réponses et qu’elle me fait remarquer sur un ton aigre-doux que ça ne concorde pas avec ce que je disais l’année dernière, je repense à Bukowski. À ce morceau de bravoure :

    «Jamais vu personne supporter l’aiguille comme ça ! - Regarde-le, aussi impassible qu’un rat mort !» Nouveau rassemblement de baiseurs d’infirmières, d’hommes nantis de grandes villas, ayant le temps de rire, de lire, de s’intéresser au sport, d’acheter des toiles de maîtres, et d’oublier de penser, d’oublier de ressentir quoi que ce soit. Amidon immaculé, ma défaite. Le rassemblement.

    - Comment vous sentez-vous ?

    - En pleine forme.

    - L’aiguille ne vous fait pas mal ?

    - Va te faire enculer.

    - Quoi ?

    - J’ai dit : va te faire enculer.

    - Ce n’est qu’un gamin. Un gamin désespéré. On peut pas le lui reprocher. Quel âge avez-vous ?

    - Quatorze ans.

    - Je vous félicitais pour votre courage, le courage avec lequel vous supportiez l’aiguille. Vous êtes un dur.

    - Va te faire enculer.

    - Vous ne pouvez pas me parler comme ça.

    - Va te faire enculer, Va te faire enculer, Va te faire enculer.

    - Allez, ne vous laissez pas abattre. Vous pourriez être aveugle, après tout !

    - Ça m’éviterait de voir votre sale gueule.

    - Ce gamin est cinglé.

    - Complètement, laisse-le tranquille.»

  • La crème de l'élite

    Quand je ferme les yeux dans le métro, ligne 4 à 8h30 du matin - inutile de s’accrocher -, je revois en rêve le déhanchement sensuel de Julie de Gouy, arpentant le Ritz avec le manque de naturel qui sied sur un podium. Julie, que les courbes fragiles de ta jeune croupe soient jetées ainsi en pâture à des dizaines de journalistes, à travers une robe de Jean-Paul Lacroix en mousseline, rose ou amande, je ne sais plus, ce n’est pas grave, car je ne suis pas jaloux. Prends quand même garde de ne pas tomber dans la fosse aux lions, chérie. De chez moi au Ritz, il n’y a pas loin, mais le temps que j’accoure ces vampires t’auront déjà toute sucée.

    Samedi après-midi je suis tombé amoureux de cette créature, la gagnante du concours “Elite Modèle 2004”, diffusé en différé sur France 3 et présenté par un gland, forcément (qui ressemblait à Yann Moix ; il n’y a pas de hasard mais il y a quand même des coïncidences !). Je voulais juste régler mon magnétoscope, mais un seul coup d’œil sur l’écran a suffi. Mon cœur a fait boum-boum. La victoire de Julie quelques minutes après mon coup de foudre n’a pas douché mon enthousiasme, malgré mon net penchant pour les perdants en général.

    On est beaucoup plus sérieux à trente et un ans qu’à dix-sept et, à mon âge, tomber amoureux ne devrait pas trop m’empêcher d’être attentif aux autres, et je ne vais pas vous bassiner davantage avec les qualités de la nouvelle élue de mon cœur d’artichaut. Un détail quand même, Julie est complètement sourde. Exactement mon genre.

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  • Pitié pour les bobos !

    Qu’est-ce qu’un bobo, au juste, me demande un mec l’autre jour, parce que j’ai parlé de “bobos de droite” dans un billet ?? La colle. Ce mec cherche en fait à me coincer parce que j’ai donné une connotation politique à mes propos et que la politique, droite-gauche, tout ça, les jeunes ils aiment pas beaucoup qu’on en parle, beurk, ça pue la politique, j’en veux pas de ton ragoût, je préfère le coca avec de la vache-qui-rit, na !

    Autant je pourrais facilement trouver des exemples, des adresses de blogues tenus par des bobos, pas de problème, autant donner une définition bien balancée et concise du bobo, comme dans le Larousse, eh bien je sèche. Le concept n’est pas si facile que ça à cerner. Il faut dire qu’il a vachement été galvaudé depuis son apparition il y a quelques années dans le champ lexical des sociologues. C’est bien des sociologues, ça, de balancer des mots bizarres à la va que je te bourre ta petite cervelle d’étudiant de Paris X-Nanterre, et démmerde-toi pour la définition !

    Je crois qu’il faut commencer en posant des jalons, délimiter en quelque sorte le territoire géographique, culturel, spirituel, sexuel, social, etc. du bobo. Y’a que comme ça qu’on parviendra à l’acculer dans un coin et à lui faire sa fête. Vous me trouvez agressif ? C’est que je viens de passer une heure chez Gibert-Jeune. En moins d’une demi heure, tac, trois gonzesses successivement - dont une bien roulée !- s’emparent du dernier bouquin d’Eric-Emmanuel Schmitt et repartent avec, sans même l’avoir ouvert. Puis relaps de temps de vingt minutes, et tac, encore deux ! La dernière est même obligée de demander de l’aide à un vendeur, forcément, pour qu’il aille puiser dans le stock, y’en a plus sur l’étalage…

    Quand on dit bourgeois-bohême, on n’a encore rien dit. Surtout quand on dit bohême, d’ailleurs, car c’est pas de la bohême à moins de 3000 euros par mois dont on cause ici. Non, on peut pas être rangé dans la catégorie des bobos sans avoir des revenus d’au moins 3000 euros par mois, ça me paraît un minimum. Car la bobohême, c’est des frais, l’air de rien. Pas moyen d’attendre la sortie en format de poche du dernier Amélie Nothomb, du dernier Chloé Delaume, du dernier Delerm ou du dernier Beigbeder. Beigbeder, surtout, c’est tellement excitant de lire un auteur qui a lu les pamphlets de Louis-Ferdinand Céline… Se peigner comme Biolay, s’attifer comme Keren Anne, se casser la voix comme Brigitte Fontaine, c’est plus coûteux qu’il n’y paraît. En tapinois, tout doucement, je crois m’être approché du cœur existentialiste du bobo. Claquer du fric, oui, mais en douce.

    Ah, un détail qui a son importance : oui, le bobo est jeune, forcément. L’âge venant, il mue, il accepte d’endosser peu à peu la carapace du banal bourgeois qu’il est dans le fond ; à quarante ans, il craque pour un 4x4 Land Rover - ou Mercedes, selon ses origines ethniques (comme il dit) -, et la partie de cache-cache est finie. Oui, mais pourquoi forcément de gauche ? C’est tout simple, je vais vous expliquer : le bourgeois n’aime pas perdre. Et, en votant à gauche, à tous les coups l’on gagne. Eh bien oui, Jospin est élu, et c’est la victoire des idéaux de justice, de paix et de démocratie du bobo. Et si Chirac gagne ? eh bien, mais les impôts baissent, c’est toujours ça de gagné.
    À ceux que ma démonstration laisse sceptiques, je demande : avez-vous entendu la longue plainte qui s’est élevée au dessus de la place des Abbesses le 21 avril 2002 vers neuf heures du soir, puis qui est retombée en pleurs, cris et grincements de dents ? Moi, oui ; j’y étais. C’est le beauf qui est de droite.

  • Dans un ghetto d'ivoire

    Quelqu’un a laissé un vieux “Figaro littéraire” daté du 2 septembre traîner à la station Notre-Dame de Lorette, sur un banc à baquets. Profitons-en ! Je vais rester un peu. Quand je dis profitons-en, c’est pas rapport au “Figaro littéraire”, dans lequel y’a jamais rien à racler, pire que le “Le Monde des Livres”, non, c’est rapport à Notre-Dame de Lorette, une de mes stations préférées. Dans mon “Guide du Métro sexy”, je la place sans hésitations dans le Top 10 des stations les mieux fréquentées. Z’êtes toujours à peu près sûr d’y trouver une ou deux jolies gonzesses à reluquer. Et vu que c’est une petite station, l’ambiance est assez intime, pas comme à Franklin-Roosevelt ou La Motte-Piquet Grenelle, où l’on croise aussi de jolies gazelles. Bon, bien sûr, c’est le genre bobo-métro-boulot-dodo, ces filles, on peut pas tout avoir non plus, mais je n’ai parlé que de reluquer, voire de peloter un petit peu, et puis s’en va.

    Menue de partout, un souffle de ventre et de tous petits tétons qui pointent sous une sorte de pyjama de jour blanc, l’atout majeur de cette poupée c’est sa cambrure, qui soulève à hauteur d’homme une mignardise de petit cul arrondi… Mon “Figaro” baissé au maximum, je laisse cette miniature me filer sous le nez avec un petit sourire au coin des lèvres… Quatre heures, c’est l’heure creuse, Notre-Dame de Lorette réprime un bâillement. Faute de mieux, j’entame la chronique d’Angelo Rinaldi (Angelo, quel prénom bandant !).

    Ça commence par cette sentence absurde : « Où Francis Bacon – encore plus intelligent que Picasso – déclare-t-il à un ami, et peut-être davantage : “Et maintenant je voudrais vous demander de partir car je veux peindre votre absence” ? (…)» Il me faut deux minutes pour comprendre la phrase et puis je me marre. Tout seul dans la station, ça résonne. Ça y est, Rinaldi est touché par le syndrome de Dominique Fernandez : tout ce que font les pédés est mieux, ce sont les plus beaux, les plus intelligents, etc. Pourquoi Francis est-il plus intelligent que Pablo, ce qui au fond ne veut rien dire, à votre avis ? Eh bien mais c’est parce qu’il est pédé, bien sûr, tandis que Pablo, lui, n’est qu’un banal hétéro. Mmmouais, moi je préfère dire que Picasso, ça n’est que du talent gâché, et Bacon de la peinture gâchée, carrément…

    Notez que souvent c’est comme ça que ça se passe : voyez les Bretons, les Juifs, le complexe d’infériorité se transforme souvent en complexe de supériorité. Le genre de complexe insupportable chez un minus habens, qu’il aime se faire enculer ou pas.

  • Ma conversion à l'islam

    Sur un blogue voisin, quelques versets du Coran sont cités, tel celui-ci : «Tuez les infidèles où que vous les trouvez, capturez-les et assiégez-les et préparez pour eux chaque genre d'embuscade.» (Sourate 9, verset 5) - Pour dénoncer le discours hypocrite des hommes politiques français sur l’islam.
    C’est plutôt louable de jeter un petit coup d’œil sur le Coran, de ne pas se contenter des exégèses vaseuses qu’on nous sert à la télé, c’est sûr. Moi, il m’est arrivé un truc bizarre lorsque j’ai voulu m’en procurer un exemplaire, du Coran, en librairie. Le rayon propose un choix relativement restreint, je veux un exemplaire tout simple, parce que je ne suis pas sûr que je dépasserai les deux premières sourates, alors je choisis ce petit volume noir peu encombrant, une édition libanaise. Bon, je passe ensuite à la caisse, et là, étonnement de la caissière :

    «- Ben vous avez trouvé ça où, Monsieur ?
    - Ben au rayon “Religions-Spiritualité”, Mademoiselle !
    (j’ai tendance à m’imprégner très vite des tics de langage de mes interlocuteurs, c’est très agaçant).

    - Ah non, Monsieur, ça je peux vous garantir que ça vient pas de chez nous, y’a même pas de code barre, regardez…

    - Ah oui, en effet. Tiens, comme c’est curieux…»


    Je repars donc avec mon petit Coran sous le bras, sans avoir bourse déliée.
    Abordons maintenant le problème des citations tronquées, extraites de leur contexte. On ne peut nier que le Coran est, dans l’ensemble, une harangue assez violente à l’encontre des Juifs et des chrétiens, doublée d’un catalogue de prescriptions assez obtuses. Cela dit, on a commis bien plus de meurtres dans le monde jusqu’ici au nom de la République, du communisme et du national-socialisme, que de l’islam. Bien que toutes ces thèses homicides soient beaucoup plus mesurées que le Coran. Les colonnes infernales de Tureau se cachent bien derrière la Déclaration des Droits de l’Homme.

    L’Imam Lapinos vous livre donc en toute simplicité ses conclusions : le Coran est sans doute un amalgame assez hétéroclite de sourates, plus mesurées lorsqu’il est encore envisageable de transformer les Juifs et les chrétiens en bons mahométans :

    «S’ils avaient appliqué la Thora et l’Evangile et ce qui est descendu sur eux de la part de la part de leur Seigneur, ils auraient certainement joui de ce qui est au-dessus d’eux et de ce qui est sous leurs pieds. IL Y A PARMI EUX UN GROUPE QUI AGIT AVEC DROITURE ; mais pour beaucoup d’entre eux, comme est mauvais ce qu’ils font !» dit par exemple la sourate Al-Ma’idah, ou :

    «Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez. capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la Salat et acquittent la Zakat, ALORS LAISSEZ-LEUR LA VOIE LIBRE, CAR ALLAH EST MISÉRICORDIEUX.» ; sourates qui se font plus vindicatives lorsque l’espoir de convertir rapidement ces “infidèles” s’évanouit.

    De là à parler de la poésie qui émanerait des sourates du Coran, il y a un pas qu’on laisse ce snobinard lèche-cul de Yann Moix franchir seul. Moi, je suis plutôt d’accord avec Houellebecq pour dire que tout ça est très chiant à lire. Ma conversion à l’islam n’est donc pas à l’ordre du jour.

  • Avis de recherche

    Elle ressemble à une actrice américaine. Le genre qu’on voit dans des films de cascades. Me fait penser à Natacha Henstridge, pour être plus précis, avec une paire de nibards extra mûrs qui la tirent vers l’avant. Blonde, avec des yeux bleus durs. Elle a le don d’apparaître toujours au moment où le souvenir de sa plastique et de son regard de tueuse commençait à s’estomper dans ma mémoire.

    Un coup je la croise sous terre, dans la fourmilière de St-Lazare, reconnaissable entre mille. Une autre fois sur la passerelle qui franchit le cimetière de Montmartre. Sa démarche est sportive et très rapide, elle fixe un point devant elle. Pas facile de l’aborder, elle fonce toujours ! Bien sûr qu’elle m’excite, cette tigresse, malgré des sapes pas très classes : baskets, jogging, marcel kaki, casquette de baise-baul, même, la dernière fois. Mais surtout, qu’est-ce qu’elle peut bien fabriquer avec un corps pareil, à grandes enjambées sur la rive droite, comme si elle était toujours en retard à ses rendez-vous ?

    Agent du KGB, du Mossad ? Pas assez discrète pour ça. Qu’est-ce qu’elle fuit ainsi, le regard des hommes et leurs vannes vaseuses ? Lesbienne ? C’est pas trop le quartier… Son mystère et sa dureté ajoutent à son érotisme.

    Ma seule chance jusqu’ici de lui mettre le grappin dessus, j’avoue avoir été incapable de la saisir : Elle débouche soudain devant moi sur la gauche, venue du trottoir d’en face à travers les bagnoles pour s’engouffrer dans le Monoprix à deux pas des Champs-Élysées. Refus de la porte vitrée automatique de s’effacer, mon héroïne est stoppée net dans son élan. Onomatopée, coup de pied rageur dans la vitre, elle bat en retraite rapidement, cherche une autre issue. J’aurais dû me précipiter pour l’aider. La rattraper à l’intérieur. Bien sûr que j’étais à la bourre et que j’avais déjà fait mes courses, Et alors ?

    Ça ne peut pas durer. Marre de me perdre en conjectures sur cette fille. Donc, si quelqu’un a un tuyau sur cette beauté fatale, son nom, où elle crèche, pour qui elle bosse, qu’il m’écrive sans hésiter. Je saurai le récompenser. Bien sûr je m’attends pas à ce qu’on me dise : « Ben justement c’est ma grande sœur et elle crèche au 21, boulevard de Rochechouard, et elle cherche un mec en ce moment pour la rassurer ». Non, je ne m'attends pas vraiment à ça, mais sait-on jamais, Paris est un village…

  • Much Ado About Nothing

    Quand on n’a rien à dire, on ferme sa gueule… ou bien on cause télé. Nouvelle saison pour “Tout le monde en parle”, l’émission branchée d’Ardisson, qui pourrait aussi bien s’appeler “Beaucoup de bruit pour rien”. Malgré la médiocrité des invités, une ribambelle de seconds couteaux, la femme d’Alfred Sirven, Yvan Attal, Mathilde Seigner, Smaïn, Yann Moix, la fille de Choron, etc., je m’amuse quand même un peu. C’est peut-être bien parce qu’ils sont médiocres, justement, qu’Ardisson peut les manipuler ainsi à sa guise. En tirer tout le ridicule. A commencer par Agathe de La Fontaine, jolie fille à dénuder, bien qu’un peu usée, déjà – elle a été mariée six ans au joueur de foot Emmanuel Petit. Figurez-vous que la pauvre pomme a dû éventrer cinq cents ballons de foot dans une chambre d’hôtel pour dénicher sa bague de fiançaille ! Bien sûr, c’est facile de se moquer d’une actrice, mais qu’est-ce qu’Ardisson pouvait bien faire d’autre avec ? D’ailleurs, Agathe et fâchée et fronce les sourcils, ce qui lui donne l’air un peu moins con.

    Yvan Attal, lui, est venu vendre son dernier film : Ils se marièrent, etc. Il a préféré emmener sur le plateau Angie David, sa maîtresse à l’écran, plutôt que Charlotte Gainsbourg, sa femme partout. Comme je le comprends… D’ailleurs, si on voit Angie à poil dans ce film, je ferai peut-être une exception, j’irai voir ce film à l’usage des bobos.

    Et puis je découvre la tronche de puceau attardé de Yann Moix. En fait, je l’avais peut-être déjà vu une fois à la télé, mais j’y avais pas fait attention. C’est un adepte de la “littérature au culot”. Persuadé qu’il reste encore quelques pépites à gagner, il gratte tant qu’il peut ce qui reste du filon de Houellebecq, du cul et des attentats – difficile de faire plus putassier que Partouz, comme titre de bouquin, lui fait remarquer la fille de Choron.
    Et cet ingrat de Moix n’hésite pas à s’en prendre à… Houellebecq lui-même, l’accusant presque de racisme. Je sais pas si Moix connaît mieux le coran que Houellebecq, ainsi qu’il le prétend, mais en tout cas c’est difficile de faire plus tarte que son reportage dans des boîtes à partouzes parisiennes.

  • Aimer Nimier

    J’ai beau faire, je ne parviens pas aimer Nimier. Roger, pas Marie-Antoinette, bien sûr. Il a tout pour plaire, pourtant. De belles femmes, de belles saillies, de belles voitures, de belles lettres, une belle gueule, un bel uniforme (de hussard), usw. Je suis même disposé à lui pardonner son seul défaut, sa fille, Marie-Antoinette, cet écrivain gnan-gnan poussée sur le trottoir des lettres par Françoise Verny.
    Pour la troisième fois, j’ouvre Les Épées, je veux au moins essayer de comprendre ce qui ne va pas avec Roger.

    Et ça recommence, il y a des phrases qui me déplaisent, comme celle-ci : «Les abstractions ne saignent pas, du point de vue hygiénique qui ne me quitte pas, quel avantage !» ou pire, cette autre : «Adieu le monde poisseux et raffiné des autres. Il est doux de sentir sa destinée à côté de soi, comme une respiration inconnue.» Qu’est-ce que c’est que cette affectation, ce style résolument moderne, je fronce les sourcils. Peut-on attendre quelque chose de bien d’un type qui lit l’Auto-Journal ? Ou alors c’est le monologue intérieur trop plein d’ironie de Sanders le milicien-résistant qui m’agace. «C’est difficile de se faire lire, dit Chardonne. «Si on a de l’esprit, l’éteindre ; et une “pensée”, tout de suite la pulvériser ; cela craque sous la dent. Pas trop de nerfs dans la phrase. Et il condamne Nimier au silence pendant dix ans. Pas assez rassis. C’est une blague ! Evidemment, Nimier prend Chardonne au mot…

    L’air de rien je viens de dépasser la page 90. Je suis sûr que je vais parvenir à l’aimer enfin, Roger, peut-être pas autant que j’aime le Jacques Chardonne des Lettres à Roger Nimier, mais tout de même un peu.

  • Traduire "kapo"

    Dans le calendrier laïc, la rentrée des classes occupe une place prépondérante. Hanifa Chérifi répond sur Europe 1 ce matin aux questions vicelardes de Stéphane Soumier. C’est son métier, elle est officiellement “Médiatrice de l’Éducation nationale”, traduisez “kapo”. Que vont dire les profs aux jeunes femmes qui se présenteront le visage voilé en cours ce matin ? Et est-ce que chaque prof ne doit pas se sentir un peu responsable de la vie des otages français ? La pauvre Chérifi est au bord de la gaffe, la patate est beaucoup trop chaude pour elle… Crime de lèse-laïcité, crime de lèse-journalisme, crime de lèse-islam, ça fait beaucoup à la fois. Kapo, c’est vraiment pas un boulot facile.

    Il faudrait vraiment être une brute pour ne pas être ému par la ferveur qui guide tous ces parents ce matin, la main dans la main de leur enfant, sur le chemin de l’école, sous un soleil déjà haut, brillant comme la Raison. Je m’écarte respectueusement pour laisser passer cette digne procession sans bannières ni cantiques. Ce petit garçon blond a des yeux bleus très sérieux qui reflètent la gravité de l’événement. Reflux de quelques souvenirs d’enfance qui ont peu à voir avec l’iconographie sulpicienne de Robert Doisneau.

    Au début, j’avais à peine trois ans, et je n’ai pas souvenir d’avoir été trop effrayé lors de ma première rentrée. Juste un petit frisson d’horreur esthétique en pénétrant dans des bâtiments, puis ma classe, décorés dans le goût soixante-huitard de mes instits – que les restaurants MacDonald s’efforcent d’imiter aujourd’hui pour des raisons commerciales évidentes. Ma sensibilité encore mal dégrossie, je dois l’avouer, s’accommoda assez facilement du orange vif et du vert fluo. Je pris l’école comme une échappatoire aux débords de tendresse de ma chère mère, qui mettaient en péril ma virilité. J’appréciais aussi beaucoup mes nouveaux camarades de jeux qui ne se faisaient pas violence, comme mon père, pour jouer aux petites voitures avec moi, et riaient de bon cœur. Combien de temps me maintins-je dans de tels sentiments, je ne sais plus, je dirais deux ou trois ans, pas plus. Cette trêve écoulée, la dimension carcérale de l’institution scolaire m’apparut enfin. Sauf que dans les prisons on se contente de faire semblant de vous réformer ; les instits, eux, s’appliquent vraiment à vous éduquer et prennent leur sacerdoce au sérieux.

    Au total, je garde un goût amer de ces longues années passées à l’école de la propagande. Après une phase d’hébétement, je me mis à résister tant que je pouvais, résistance tantôt passive, tantôt active, mais je n’étais pas assez mauvais élève pour être définitivement exclu. Je me réfugiai alors dans la lecture enivrante d’ouvrages peu recommandés, pour ne pas dire mis à l’index, et dans la contemplation concupiscente des formes adorables de certaines de mes voisines de pupitre.
    Comment n’en voudrais-je pas à l’école d’avoir fait de moi l’être infirme que je suis devenu à ce régime, à moitié cultivé, à moitié nostalgique, à moitié chrétien, bref à moitié achevé…