Avec un siècle et demi de retard sur les observations de Marx, des voix s'élèvent dans les médias pour dire leur inquiétude de la vitesse moderne ou du caractère de plus en plus virtuel des relations sociales ; je dirais : du caractère cinématographique de l'existence, pour souligner le rapport de la morale nationale-socialiste ou républicaine dominante avec la science-fiction, mélange de technologie et de rêve.
En effet la force d'entraînement des cartels bancaires serait nulle sans la puissante courroie de transmission de la culture.
On peut signaler ici la tartufferie, non seulement du pape Benoît XVI, mais de tous les apôtres de la "décroissance" économique, qui en somme contrairement à Marx continuent de faire croire que l'argent peut être neutre, utilisé intelligemment, alors qu'il traduit un culte opposé aux idéaux d'égalité et de partage dont certains le parent cyniquement ou bêtemennt.
La tartufferie actuelle revient à répéter la doctrine libérale puritaine originale, qui ne peut se passer du blanchiment de l'argent. On voit ici que la culture et ses acteurs adhèrent parfaitement aux mouvements de capitaux. Comme Shakespeare le démontre, en faisant un axe essentiel de l'histoire, la purification des relations sexuelles est opérée simultanément. La "main invisible", qui dans la foi libérale d'Adam Smith sert à purifier l'argent et les transactions, a nécessairement un corollaire sexuel ésotérique. Parfaitement démoniaque au regard du christianisme, comme Shakespeare s'emploie à la souligner, l'exaltation de la cupidité sexuelle a joué un rôle dans la mécanique capitaliste.
Il n'y a donc que des hypocrites à se plaindre simultanément des ravages causés par l'argent, tout en peignant la possession sexuelle sous un jour pur. Autrefois l'Eglise romaine, aujourd'hui ceux qui imputent la folie criminelle capitaliste aux seules erreurs des comptables, esprits robotiques ou cartésiens irresponsables.
+ En tant que chrétien, je suis bien placé pour voir que le cinéma a le caractère démoniaque. Il fut un des facteurs de développement du satanisme aux Etats-Unis, dont la version la plus sournoise et fréquente est celle du satanisme au nom du Christ. Il n'est pas difficile de trouver sur internet des blogs de "chrétiens" yankees qui prônent le port d'armes, aveu pathétique d'un culte authentiquement démoniaque, qui n'a rien selon moi à envier à la doctrine nazie.
Le cinéma est sans doute un opium assez fade comparé à d'autres, mais sa dilution est tributaire de la taille du troupeau de moutons qu'il faut mener à l'abattoir ; de plus le cinéma a un effet de sidération progressif ; il commence avec le viol de la conscience de jeunes enfants qui sont encore au stade animal et chez lesquels la visée pédo-pornographique du cinéma a un impact particulier, les maintient dans l'obsession sexuelle et le désir incestueux qui excitent la peur. Avant de le condamner, il faudrait examiner combien de films Anders Breivik a ingurgités pour devenir un Norvégien chrétien+franc-maçon paranoïaque* ?
Un attentat contre la part spirituelle, quand la société ne feint de s'offusquer que des atteintes à la chair et au porte-monnaie (dont elle est elle-même la principale cause, ne sachant s'organiser autrement que par le sang et son emblème monétaire, prédestinés à noircir).
Car la tuerie sanglante est bel et bien le projet sous-jacent au cinéma. C'est à travers ce genre artistique méprisable et incitant au cannibalisme qu'on discerne clairement la suite donnée par les Etats-Unis au régime de l'Allemagne nazie. Probablement en pire, car on ne trouve rien dans la culture yankee, essentiellement animiste, qui résiste au cinéma et son effet d'aliénation progressive
Le plus démoniaque n'est pas de défendre le cinéma au nom de Satan ou du chaos, comme d'assez nombreux producteurs ou metteurs en scène n'hésitent pas à le faire, plus ou moins discrètement ; une imposture plus grave est la défense du cinéma au nom du christianisme. Rien dans le christianisme ne justifie l'agrégation sociale et la souffrance qui en découle.
L'agrégation sociale se faisant essentiellement sous la forme d'un sacrifice sanglant et charnel, dont l'argent est le signe le plus commun, forment les piliers de la synagogue de Satan les apôtres de la "doctrine sociale chrétienne" ou des divertissements chrétiens, ignorant tous les avertissements de l'art et de l'histoire selon lesquels cette doctrine macabre, reprise par le régime républicain, a servi à justifier les crimes les plus violents de l'Occident.
+ Le dernier en date, faux-jeton de première bourre, que j'entendais s'inquiéter ainsi à retardement de la vitesse moderne, est la starlette bobo Frédéric Beigbeder, sous-pastiche de Proust, dont le succès est emblématique du goût féminin pour les anguilles.
Contre ce type cynique, à l'humanisme aussi frelaté que le néo-colonialisme de BHL, appuyé sur la choa, disons franchement que la vitesse et le caractère virtuel sont liés. Les systèmes informatiques et robotiques fonctionnent ainsi, par la transmission d'informations de manière presque instantanée, et pour mieux dire leur but : de façon "précipitée".
"En temps réel" : l'expression décrit idéalement l'implosion d'un tel système, vu que seule une machine peut prendre le temps pour une chose "réelle", quand il a pour effet de l'altérer, exactement comme l'information.
Un modèle informatique de l'univers est ainsi un schéma erroné ou altéré de la réalité (à tel point que ceux qui prennent ainsi leur science-fiction pour la réalité depuis Copernic ou Galilée sont contraints d'en opérer la mise à jour régulière).
Ce type de modèle s'impose progressivement à tout un chacun (en commençant par les fainéants comme Beigbeder, installés dans le confort intellectuel et se moquant ouvertement de l'art et de sa gratuité, dans cette position de producteur de navets) en raison de son caractère fonctionnel. Les modèles mathématiques ou informatiques sont impropres à rendre compte de la réalité, en revanche ils sont "fonctionnels" et opératoires.
Il ne paraît pas utile de souligner plus ici le rôle de la spéculation mathématique dans la formation de l'inconscient du citoyen-robot d'un régime totalitaire "matriciel". La quête de fiction (le "graal") ou de "virtuel" est le fait d'esprits faibles qui cherchent à se renforcer. On la retrouve en science où, bien que la haute technologie constitue l'aveu d'un nivellement scientifique vers le bas, les vieilles spéculations datant de l'Egypte antique continuent de s'imposer, trempées de psychologie, à cause de leur effet sécurisant, dont le revers terrifiant est rarement envisagé, nul n'étant plus apte à s'auto-absoudre de ses génocides passés, présents et à venir, que la polytechnique et les polytechniciens imbéciles, lieutenants du désordre et de la haine, planqués derrière l'argument de la règle et de l'horloge.
+ Quand les médias et la corporation des journalistes affirment accomplir leur "devoir d'information", ils énoncent inconsciemment ainsi le caractère totalitaire de leur mission. La contre-culture médiatique par l'internet l'a ainsi dernièrement en grande partie démontré, contraignant les pouvoirs publics (Henri Guaino) à défendre l'opacité, compte tenu de ce que les internautes reprennent à leur compte l'argument de transparence et d'information des médias.
Plutôt que de déplorer comme le vieux con Beigbeder la virtualité de plus en plus grande des nouvelles interfaces et des nouveaux réseaux sociaux, mieux vaut comprendre que la relation sociale, sexuelle notamment, est essentiellement virtuelle. Autrement dit le ver est dans le fruit. Contrairement au mensonge libéral ordinaire véhiculé par F.B., la société mondialisée n'a rien d'un encouragement à l'individualisme. Elle est un hyper-socialisme ou un hyper-civisme, et le mensonge libéral vise donc à préserver le socialisme et le civisme dont ne peuvent se passer... les transactions bancaires et commerciales.
Les jeux d'enfants, qui se résument hélas presque entièrement à l'apprentissage des rapports sociaux, la branlette étant considérée désormais grâce à l'apport de la philosophie morale germanique comme le b.a.-ba de l'humanisme, ces jeux témoignent du caractère virtuel (et passionné) des liens sociaux, de même que l'attachement d'adultes mièvres - Proust, Beigbdeder -, à des objets que ce dernier est incapable de comprendre pour ce qu'ils sont : l'essence de la vertu (Proust est un peu moins débile, parfaitement conscient que le fétichisme trouve son perfectionnement dans la musique, dont l'effet est aussi rassurant qu'une peluche ou une bibliothèque.)
Que la vision chrétienne soit aussi réaliste et peu religieuse, cela explique qu'elle soit dissuasive de tout mysticisme et de fonder quoi que ce soit sur les rapports sociaux, rejointe ici par Marx et Engels. D'ailleurs on sait grâce à Shakespeare que la doctrine sociale de l'Eglise est la rançon de l'érotomanie monastique médiévale, d'après "Roméo et Juliette" notamment, dont la force pamphlétaire n'a fait au cours du temps que décupler, un acte de Bacon-Shakespeare suffisant à faire voler en éclats ce miroir de méduse qu'est le cinéma, "image animée de la bête" selon l'Apocalypse.
La virtualité décuplée des rapports sociaux indique seulement la formule d'un monde sous l'aspect d'une boule à facettes, prête à voler en éclats sous l'effet de l'accélération d'un mouvement dont la principale fonction est l'agrégation sociale.
*Il existe des doctrines maçonniques chrétiennes (J. de Maistre), et même des anarchistes "franc-maçons", aussi absurde que cela puisse paraître.