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hamlet

  • Foi et Raison

    Un catholique authentique, se réclamant de la Parole de Dieu, ne peut amalgamer la foi et la raison, ni même les juxtaposer. - Seule la foi sauve, dit justement l'apôtre Paul, et non les oeuvres. Cette mise en garde de Paul, fortement étayée, est dépourvue d'ambiguïté.

    Il faut en déduire que la "raison" n'a pas de portée universelle selon Jésus-Christ. Aucune société n'a de d'ailleurs de mérite particulier aux yeux de Dieu. Le "peuple juif" n'est pas un peuple, une société ordinaire, dont les membres seraient liés par le sang ; quant aux expressions de "France chrétienne" ou "d'Occident chrétien", elles sont entièrement dénuées de sens - ce sont des expressions sataniques, c'est-à-dire des expressions faites pour dissimuler la signification spirituelle des Evangiles.

    Quel besoin les propriétaires ont-ils de la bénédiction de leur propriété par Jésus ? Pourquoi ne la réclament-ils pas plutôt à Satan ? Ou, si le mot de Satan leur déplaît, à Bouddha ou Zarathoustra ? On voit bien, ici, que le besoin est d'abord pour Satan de régner à travers des mensonges.

    Comme l'antichristianisme procède surtout de l'enfouissement de la Parole divine sous des mensonges, le chrétien se doit de dévoiler l'antichristianisme, comme dans l'allégorie imaginée par Shakespeare, "Hamlet, Prince de Danemark".

    Dans cette tâche, le chrétien peut compter sur l'assistance de l'Esprit de Dieu (figuré dans "Hamlet" par le spectre du roi assassiné).

    Qu'est-ce qui se cache derrière l'invocation de la raison ? La philosophie. Au moyen-âge, certains clercs catholiques prétendirent s'appuyer sur Platon ou Aristote ; aujourd'hui, c'est la philosophie de Hegel qui soutient le discours des hauts dignitaires du clergé catholique.

    Or Jésus-Christ s'adresse à ses apôtres largement par le biais de l'allégorie ou de la parabole, et non comme un philosophe s'adresse à un collège de disciples. L'auteur de "Hamlet" est ainsi justifié de passer par le biais de l'allégorie.

    Si le discours philosophique de la raison peut être regardé comme désuet au regard de la foi chrétienne, autour de laquelle se jouent l'avenir et la fin de l'humanité, Jésus-Christ ne prône pas la folie pour autant. Il rend à Platon ce qui est Platon, comme il rend à César ce qui est à César.

    Quand un chrétien se mêle de philosophie ou de politique, il ne peut manquer d'établir une hiérarchie entre sa foi chrétienne et la raison qui gouverne temporairement les hommes. Ainsi firent par exemple le savant chrétien Francis Bacon ou René Descartes à sa suite, distinguant avec netteté, au contraire des théologiens dits "scolastiques", les vérités et recherches relevant de la foi supérieure, des raisonnements et sciences subalternes, c'est-à-dire "anthropologiques".

    C'est l'amalgame entre la foi et la raison qui équivaut au péché de fornication, dirigé contre l'Esprit de Dieu, et qui représente la colonne vertébrale de l'antichristianisme. Il s'agit ici, de façon sans doute plus intentionnelle et rusée, de conférer à la philosophie ou à la raison l'aura d'une parole sacrée.

    Un observateur attentif de notre société mondialisée peut mesurer à quel point le discours visant à amalgamer la foi et la raison, suivant diverses stratégies (dont l'hégélianisme n'est pas le seul exemple), est représentatif de l'idéologie dominante, que celle-ci soit confessionnelle ou laïque, voire athée.

    Ainsi l'utopie démocratique moderne n'emprunte à Platon pratiquement aucune de ses modalités pratiques ; en revanche elle est, comme chez Platon, constituée d'un mélange de foi et de raison.

    On peut mesurer aussi à quel point, non seulement la foi chrétienne se trouve altérée par cet amalgame, mais également la raison philosophique ou politique, voire la science.

     

  • Rêveuse bourgeoisie

    L'intellectuel est pris dans un rêve, comme une mouche dans une toile d'araignée. Le vrombissement que fait la réflexion de l'intellectuel, en produisant son mouvement paradoxal, attire tout un tas de petits moucherons faibles d'esprit à sa suite ; leur vol ressemble au cours du hasard.

    Je tiens la comparaison des intellectuels avec des mouches d'Aristote. Pourquoi Hamlet est-il sans pitié avec Polonius, cette éminence grise ? A cause des dégâts qu'un seul intellectuel peut causer, qui se chiffrent parfois en centaines de millions de moucherons morts ; parce que l'homme de science se doit d'être impitoyable avec ceux qui placent la folie au lieu du savoir, pour le compte de Lucifer.

  • Autour d'Hamlet

    L'étude du "Hamlet" de Shakespeare par Lise Contour-Marsan (1969) fournit plus de renseignements sur l'appareil critique extraordinairement volumineux concernant cette tragédie qu'elle ne contribue à élucider cette pièce.

    Contour-Marsan note ainsi ce paradoxe : l'accumulation des études, qui se comptent en dizaines de milliers (comparativement aux Anglais, aux Américains et aux Allemands, les Français ont peu contribué à cette accumulation), n'a pas eu pour conséquence de faire progresser de façon nette la compréhension de Shakespeare.

    J'explique ce paradoxe ainsi : Shakespeare constitue une menace pour la culture bourgeoise ; deuxième explication adjacente : rares sont les docteurs ou professeurs de littérature contemporains possédant une connaissance suffisante de la bible pour comprendre quelle est la religion de Hamlet, c'est-à-dire de Shakespeare. La science bourgeoise universitaire est par conséquent faite d'un mélange de mauvaise foi et d'ignorance, peu propice à l'élucidation de Shakespeare ; j'ai donné sur ce blogue de nombreux exemples d'interprétations aberrantes au point d'être ridicules concernant Shakespeare, son théâtre ou sa poésie.

    Pour mémoire, citons le cas de "Thomas More" : il y a tout lieu de croire que cette pièce est de Shakespeare ; le personnage de l'éminence grise, appartenant au clergé, dont le théâtre de Shakespeare fournit plusieurs exemples (Wolseley, Polonius, etc.), est toujours un personnage "noir", dont la perfidie se teinte parfois de bêtise (Polonius). On peut en déduire que Shakespeare prend dans ce cas en compte l'interdiction chrétienne formelle de servir deux maîtres, dessinant des personnages dont le mobile et la vocation sont les plus troubles, en même temps qu'ils sont caractéristiques de la culture bourgeoise et des temps à venir. Thomas More, selon Shakespeare, n'échappe pas à la règle : l'auteur nous montre ce prétendu "saint" commettre un parjure odieux ; un parjure significatif puisqu'il résulte du christianisme aberrant de T. More. Bien loin d'en faire un martyr, Shakespeare fait de T. More un "arroseur arrosé". Or le commentateur moderne, dans certaine édition écrit à peu près : Shakespeare a fait de saint Thomas More le héros d'une de ses pièces, donc cela prouve que Shakespeare est... catholique romain. Seul un mélange de mauvaise foi et d'ignorance peut fonder un tel commentaire.

    *

    Contemporaine de l'exégèse freudienne du théâtre de Shakespeare, L. Contour-Marsan écarte heureusement les spéculations de cette pseudo-science allemande d'un revers de main bien français, c'est-à-dire en se fondant sur le bon sens. Shakespeare à plusieurs reprises dans la pièce montre que la folie de Hamlet est une feinte. C'est le Danemark qui, de toute évidence, est aliéné du point de vue de Shakespeare ou de Hamlet.

    L'exégèse psychanalytique conduit ainsi à adopter le point de vue du Danemark, c'est-à-dire de Claudius, Polonius, Gertrude, ses actionnaires principaux. L'antimétaphysique freudienne se heurte à la méthaphysique shakespearienne, d'une manière qui n'est pas sans rappeler le heurt entre Platon et Homère.

    A travers Hamlet, Shakespeare nous dit la menace que représente Hamlet pour le Danemark, et la menace que représente le Danemark pour Hamlet. Et par "Danemark" il faut comprendre "l'Occident chrétien" ; c'est à quoi tient la dimension prophétique de Shakespeare, sa résistance au temps et aux changements de régime.

  • Ophélie, victime parfaite

    "Ophélie", forgé par Shakespeare, signifie en grec "celle qui est utile". Shakespeare a voulu montrer la "femme-objet", manipulée par le Siècle, son père, la raison d'Etat, le désir, la vie.

    "Les images du suicide, dans la culture d'Occident, oscillent entre deux types extrêmes : d'un côté le suicide accompli en pleine conscience, au terme d'une réflexion où la nécessité de mourir, exactement évaluée, l'emporte sur les raisons de vivre [cf. J. Léopardi] ; à l'opposé, l'égarement démentiel qui se livre à la mort sans penser la mort. Les deux exemples antithétiques pourraient se nommer Caton et Ophélie.

    Caton se donne la mort dans le plein éveil héroïque et viril ; Ophélie, entraînée par son rêve désolé, "comme inconsciente de sa détresse", s'abandonne et se laisse submerger. Le suicide philosophique, chef-d'oeuvre de l'autonomie volontaire, appelle sur lui l'éclat du jour, le rayon de la gloire ; fût-il accompli solitairement, il s'expose à tous les regards ; la raison qui le gouverne requiert l'approbation universelle ; nous y trouvons l'image active et mâle du fer retourné contre soi, preuve d'une liberté toujours présente au terme de la bataille perdue. L'image inverse est féminine, passive et nocturne : elle implique la défaite intérieure, la montée de l'ombre, la dépossession ; l'être fait retour aux ténèbres originelles et à l'eau primitive." Jean Starobinski

    Cette analyse psychologique est confirmée par les réflexions de Hamlet sur la mort, qui ne font que renforcer l'impression d'"innocence" d'Ophélie, dont le mobile est de consentir au sacrifice, de servir d'hostie, de chair à canon.

    Aux oreilles d'Ophélie, "tout est sexuel" ; elle ne comprend que les sous-entendus grivois, qui permettent à Hamlet de comprendre que sa fiancée n'entend rien à l'amour - c'est un petit soldat, qui ne sait qu'obéir. Une fois les fils de la marionnette Ophélie coupés, qui la retenaient au bastingage de la nef, cette jeune femme moderne, ô combien, fredonne des chants catholiques dont la connotation sexuelle est évidente pour qui sait lire entre les lignes. Shakespeare pointe ici une autre forme de manipulation, la même qu'il pointe dans "Roméo & Juliette".

    Et complétons cette analyse psychologique en disant que Hamlet est l'anti-Oedipe. Hamlet est "celui qui ne tient pas sa force de la Sphinge". Si Hamlet était "oedipien", prisonnier des lois de la nature, alors il serait Laërte.

    Hamlet ne fait pas l'apologie du suicide, mais condamne la culture de vie inconsciente, le médecin pourrait-on dire, qui veut sauver tout en laissant pendre, telle une épée de Damoclès, le problème de la condition humaine ou du péché (Freud et Nietzsche ont très mal compris et traduit Shakespeare, ce que ce dernier a fini par reconnaître). Cela fait de Hamlet un personnage étrange du point de vue de la médecine. Pour qu'une personne aussi passive et obéissante qu'Ophélie lui fasse confiance aveuglément, il est probable que Polonius est une sorte de thaumaturge.

    Plus subtilement, Shakespeare suggère donc que la religion d'Ophélie, mais aussi celle de Polonius, Laërte, Claudius, et même Gertrude, n'est qu'une superficielle "médecine de l'âme", dénuée d'esprit véritable.

    Certains critiques ont cru discerner chez Hamlet une sorte d'hésitation à se venger. Il est vrai que la caricature de la vengeance, personnifiée par Laërte, incite à ne pas voir dans Hamlet l'un de ces justiciers, dont la littérature bourgeoise est remplie, qui se vengent avant de mourir étouffés dans leur propre fiel. La culture bourgeoise se délecte de la violence gratuite ; elle y contribue, tout en étant terrorisée à l'idée d'en être la cible. Le goût de la vengeance est typiquement bourgeois.

    Hamlet semble hésiter, mais fait une hécatombe néanmoins. Hamlet n'est pas hésitant, sa volonté ne fléchit pas, mais il est prudent ; sa prudence est celle de la véritable justice, qui n'est pas aveugle et qui n'est pas vengeance. Hamlet représente la justice du jugement dernier. Ophélie est victime de la société et d'elle-même. Le Danemark étouffe sous le poids du mensonge.

    La comparaison qui vaut est celle de la tragédie de Shakespeare avec la dramaturgie de Dante, à cette différence près que Shakespeare n'est pas inquisiteur ; il ne juge que le monde - traçant ainsi les contours de l'enfer.

  • Le Prophète Hamlet

    Seul un parfait étranger à la bible peut ignorer la figure christique du prophète faisant face au complot du monde.

    Le brave Tolstoï, avec toute sa philosophie d'Allemand, ne pouvait pas comprendre ce qui différencie Shakespeare de l'antique tragédie. Si Homère met en scène la bêtise humaine, Shakespeare traite, lui, de l'Antéchrist, c'est-à-dire d'une formule renouvelée de la bêtise, dont Ophélie est la victime exemplaire. Y a-t-il personnage aussi sot ou sentimental qu'Ophélie dans la tragédie antique ?

    Le coeur du complot est représenté par Polonius et Gertrude. A travers ces personnages en particulier, qu'il nous incite à vomir, Shakespeare dévoile le stratagème de l'Antéchrist. Ophélie vit dans ses rêves - autant dire qu'elle est déjà morte ; les gifles de Hamlet ne parviennent pas à réveiller cette chair vouée par son père à la consommation.

    Quant à Claudius, c'est un tyran de l'ancien régime à l'instar d'Oedipe - on voit qu'il est dépassé, en proie au doute ; sa couronne ne tient qu'à une ruse grossière, à la fornication de Gertrude et au poseur de lacets Polonius.

    Et pour Laërte, s'il n'est faible comme sa soeur, c'est un jeune homme plein de promesses, un point c'est tout.

    Hamlet : - Ô Jephté, juge d'Israël, quel trésor tu avais !

    Polonius : - Quel trésor avait-il, monseigneur ?

    H. : Eh bien

    Une jolie fille et nulle autre,

    Laquelle il aimait très fort. (Acte II, scène 2)

    Pourquoi cette comparaison avec Jephté ? Le "Livre des Juges" indique que Jephté offrit involontairement en sacrifice sa fille unique au Dieu d'Israël, en échange de la victoire. C'est une manière pour Shakespeare de souligner l'archaïsme de la religion de Polonius, et que l'amour de Polonius pour sa progéniture est "cousu de fil blanc".

    On sait à quel point Jésus-Christ s'est élevé contre l'holocauste, chassant même les marchands du temple de Jérusalem qui le pratiquaient pour le compte du clergé.

    Mais encore le "Livre des Juges" évoque les trahisons répétées d'Israël, rebelle à son dieu, et sauvé in extremis par l'intervention de juges successifs mandatés par dieu. A l'imperfection des Juges d'Israël succède le message d'amour parfait du Messie Jésus, annonciateur de la fin des temps. Comme le dit bien Henri Rossier dans cette lecture guidée du "Livre des Juges" : "Un mot, un seul mot caractérise le déclin d'Israël : la mondanité. Ce mot signifie la communauté de coeur, de principes ou de marche avec le monde."

    Or c'est exactement ce que Polonius incarne : la mondanité du juge chrétien ; ou, comme on dit aujourd'hui afin de dissimuler cette mondanité : la "doctrine sociale de l'Eglise".

     

  • L'Etoile de Hamlet

    Bernardo : La toute dernière nuit,

    Quand cette étoile tout là-haut à l'ouest du pôle

    Eut parcouru son trajet pour éclairer cette partie du ciel

    Où elle flamboie en ce moment, Marcellus et moi-même,

    Alors que la cloche frappait une heure... (Acte I, scène 1)

    L'arrière-plan cosmologique de "Hamlet" est manifeste dès la première scène du premier acte. Shakespeare (i.e. Francis Bacon) situe son épiphanie sur le chemin de vigie du château d'Elseneur au Danemark, symbole de l'Occident pourrissant (comme tous les personnages honnêtes de la pièce s'accordent à le reconnaître).

    Plusieurs fois de suite, Bernardo, Marcellus et Horatio vont voir apparaître un guerrier, revêtu des attributs de l'ancien Danemark, père du jeune héros (et mage) Hamlet assassiné par Claudius traîtreusement ; puis Hamlet rencontrera lui-même ce père qu'il croyait défunt, et dont on comprend qu'il figure désormais au ciel comme une étoile, "à l'ouest du pôle".

    De quelle étoile s'agit-il ? Plusieurs astronomes ont essayé de fournir une réponse, mais la plupart du temps sans tenir compte de la signification apocalyptique de la pièce. L'étoile de l'épiphanie de Hamlet est la nouvelle étoile très brillante aperçue à l'ouest de l'étoile polaire en novembre 1572 par l'astronome danois Tycho Brahé (dont le père possédait le château d'Elseneur).

    Cet événement est l'événement astronomique le plus important de l'histoire de l'Occident moderne. Il a part aux bouleversements ultérieurs de science en Occident. Non seulement Tycho (1546-1601), qui commenta l'apparition de l'étoile en détail, mais quelques autres savants en firent l'observation, dont John Dee (1527-1609), alchimiste, théologien, astrologue et conseiller de la puissante reine Elisabeth Ire. Rien d'étonnant à ce que les savants de la Renaissance, pour qui la vérité était d'ordre cosmologique, et non anthropologique comme aujourd'hui, aient accordé toute leur attention à ce phénomène astronomique extraordinaire.

    Aussi surprenant que cela puisse paraître aujourd'hui, l'astrologue John Dee, au cours de séances de spiritisme, tenta de dialoguer les anges afin de leur réclamer assistance (cf. "Liber Mysteriorum Primus", 1582-83). En effet, Dee était parvenu au stade où ses expériences chimiques, faute de résultats probants, le décevaient. Mais ces pratiques sont-elles si étonnantes, compte tenu de la foi persistante dans la psychanalyse ou la statistique comme dans des sciences véritables, plusieurs siècles plus tard ? De même certains rituels de loges maçonniques, encore en activité, peuvent sembler aussi ridicules que les séances de spiritisme de John Dee. Mais surtout, le changement de représentation du cosmos joue bien un rôle de charnière entre la fin du XVIe siècle et notre époque "ultime".

    Comme tout récit mythologique, qu'il s'agisse du conte de la Genèse ou bien des travaux d'Hercule, "Hamlet" a un sens caché. L'auteur a semé des indices à l'attention des personnes instruites, afin de les mener, par-delà l'apparence du drame, au sens tragique plus profond de la pièce.

    On reconnaît les grandes caractéristiques du projet apocalyptique de rénovation de la science de Francis Bacon (1561-1626) dans la trame de "Hamlet", ainsi que son mépris chrétien de la société. F. Bacon a placé son entreprise de rénovation de la science sous l'égide du prophète Daniel ("Novum Organum"). D'ailleurs le point de vue scientifique discrédite le point de vue social, selon Bacon comme selon Hamlet. La société peut s'accommoder de vérités relatives, mais non d'une vérité supérieure, explique en substance Bacon, plaçant ainsi le savant authentique dans une situation délicate, semblable à celle des prophètes qui sont une pierre d'achoppement pour les affaires des hommes (Hamlet revendique comme Bacon une "âme de prophète").

    Mais poursuivons sur le terrain de l'astronomie et de la cosmologie, en évoquant la cosmologie chrétienne mentionnée dans l'apocalypse de Jean, à laquelle on peut relier l'épiphanie prise par Shakespeare pour thème principal de sa pièce.

    "Un autre signe parut encore dans le ciel : tout à coup on vit un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes, sept diadèmes ; de sa queue, il entraînait le tiers des étoiles du ciel, et il les jeta sur la terre." (Apocalypse, XII,3)

    La grande constellation "circumpolaire" du dragon, qui se dresse contre l'épouse de Jésus-Christ (l'Eglise des saints), et l'affrontera jusqu'à perdre sa place dans les cieux, est le serpent ancien appelé diable et Satan. Cette constellation observable de l'hémisphère nord est proche de Cassiopée, autre constellation où l'étoile très brillante observée en 1572 apparut. La vision divine précise : "Michel et ses anges combattaient contre le dragon". Ange ou démon, Hamlet tranche en faveur de l'ange, dont l'apparence de guerrier s'explique ainsi.

    Le "Christ de la fin des temps" revêt lui aussi, comme l'archange Michel, l'apparence d'un guerrier, assumant le combat spirituel contre les rois et les nations alliées avec la bête : "Puis je vis le ciel ouvert, et il parut un cheval blanc ; celui qui le montait s'appelle Fidèle et Véritable ; il juge et combat avec justice. (...) De sa bouche sortait un glaive à deux tranchants, pour en frapper les nations (...)" (Ap. XIX, 11-16)

    Fait non négligeable quand on sait que F. Bacon avait pris pour emblème de son combat le casque d'Athéna, l'affrontement décrit dans la mythologie chrétienne réitère celui qui opposa la déesse vierge de la sagesse Athéna au dragon dans la tragédie grecque (Ladon, gardien du Jardin des Hespérides, situé en Occident).

    Rien de moins anodin pour un astronome, par conséquent, que la position dans le ciel de la nouvelle étoile de Tycho. Le discrédit de la mythologie dans la culture moderne est lui aussi sans aucun doute lié à la conception héliocentrique copernicienne. De sorte que la philosophie, la spiritualité si particulière incarnée par Hamlet, Shakespeare la sait condamnée pour un laps de temps - cela explique la mort du héros à la fin de la pièce.

    Par un autre indice, Shakespeare nous ramène à la région du ciel où se joue le dernier acte de l'histoire. A l'acte III, scène 2, un dialogue entre Polonius et Hamlet interpelle le connaisseur de symboles mythologiques :

    - Hamlet : Voyez-vous ce nuage [cloud] là-haut, qui a presque la forme d'un chameau ?

    - Polonius : Par la messe, c'est vrai, tout à fait pareil à un chameau.

    - Hamlet : Je crois bien qu'il ressemble à une belette [weasel].

    - Polonius : Il a le dos d'une belette.

    - Hamlet : Ou à une baleine [whale].

    - Polonius : Beaucoup à une baleine.

    En effet, Cassiopée est une constellation de la voie lactée (qui ressemble à une masse nuageuse), englobant la constellation dite du "chameau" dans la mythologie arabe (Al Sanam al Nakah/Beta Cassiopeia). En outre, Cassiopée, est reconnaissable à sa forme de M, ou bien de W si on la regarde dans l'autre sens. Baleine et belette commencent en anglais par un W, et un sens péjoratif est attaché à ces deux animaux. La baleine a le sens de léviathan ou de nation ; quant à la belette, elle est symbole de ruse ; la prostituée de l'apocalypse n'est pas loin (ni la "Dark Lady" des "Sonnets").

    On relève en outre trois détails à propos de Polonius. Outre la loi de son intérêt, ce conseiller très spécial ne suit aucune doctrine constante. Il ne saisit pas l'allusion à la voie lactée. Il croit dans la messe, sur laquelle il jure, en cela représentant typique du monachisme médiéval (sur lequel Shakespeare jette le discrédit tout au long de son oeuvre). Toute l'alchimie de l'art moderne "post-apocalyptique" se retrouve d'ailleurs concentré dans la mystagogie de la messe romaine, au pouvoir hallucinogène. 

    (A SUIVRE)

  • Théorie du complot

    "Hamlet" ou la théorie du complot : en cette matière subtile, Shakespeare est encore précurseur.

    Pourquoi la science des uns est le complot des autres, le Danemark complotant contre Hamlet, et Hamlet complotant contre le Danemark, et encore pourquoi la liberté implique un choix difficile ? Shakespeare nous le dit.

    Un indice, si vous le voulez bien : dans le nouveau testament il est question d'un "complot de pharisiens et de veuves", et dans "Hamlet" il y a bien une veuve, Gertrude, et un pharisien, Polonius.

  • Bacon notre Shakespeare

    Peter D. Usher, astronome à l'université de Pennsylvanie, est l'auteur d'une thèse selon laquelle "Hamlet" aurait été rédigé pour célébrer la "révolution copernicienne", c'est-à-dire l'invention par Nicolas Copernic (1473-1543) du système héliocentrique. J'utilise ici volontairement le terme ambigu d'"invention", car l'héliocentrisme n'est pas une idée originale de Copernic, mais fut postulée dès l'Antiquité ; de plus l'héliocentrisme demeure pour certains savants mathématiciens modernes (H. Poincaré) une simple "méthode de calcul".

    La thèse de Peter Usher a le mérite de remarquer ce que beaucoup de soi-disant spécialistes de Shakespeare (quelle université n'a pas le sien ?) ne remarquent pas : l'arrière-plan cosmologique de "Hamlet". Il n'y a rien d'étonnant à cela ; en effet le héros de la pièce, dans une tirade restée célèbre entre toutes, se demande si la vie vaut vraiment d'être vécue ? Or cette question est centrale en philosophie, et la philosophie proche parente de l'astronomie depuis l'Antiquité.

    Les allusions à l'astronomie sont en effet nombreuses dans "Hamlet", parmi lesquelles on peut citer cette coïncidence que le château d'Elseneur où est située la tragédie, alors au Danemark, était la propriété du père du célèbre astronome Tycho Brahé, dont la renommée dépassa celle de Copernic. Tycho Brahé étudia à Wittenberg (ville d'Allemagne célèbre grâce au théologien luthérien, mais aussi homme de lettres et astronome, P. Mélanchton). Mais ici il faut préciser que Tycho Brahé fut un ferme défenseur de la conception géocentrique de l'univers (tout comme Luther et Mélanchton). C'est même le conservatisme de Tycho Brahé en cette matière qui lui vaut une moindre renommée aujourd'hui, en comparaison de N. Copernic ou G. Galilée (promoteur ultérieur de l'héliocentrisme).

    Autre élément astronomique significatif de la pièce : le spectre qui apparaît à Hamlet est une étoile (cela n'apparaît pas dans toutes les traductions françaises) ; autrement dit, Shakespeare met en scène une épiphanie. Aucun historien de la science n'ignore les réactions que pouvaient déclencher à l'époque de la Renaissance dans le monde savant la découverte d'une nouvelle étoile.

    Encore faut-il préciser que la tragédie est le "genre littéraire scientifique" par excellence, et diffère en cela du genre dramatique en vogue ultérieurement en Occident. De la même manière que le cinéma transforme en divertissement certaines théories scientifiques modernes, de nombreux mythes antiques illustrent une conception scientifique du monde.

    Volontairement ou non, l'astronome P. Usher ne fait que répéter une thèse "baconienne"* plus ancienne, dont il tire la conclusion inverse. Les Baconiens soulignent aussi les multiples références de "Hamlet" à l'astronomie, aux implications opposées des thèses héliocentrique et géocentrique. Mais les Baconiens ajoutent qu'une caractéristique de la science de Francis Bacon est d'appuyer la thèse géocentrique, d'incliner par conséquent sur ce point du côté de Tycho Brahé. Non seulement F. Bacon dans son "Novum Organum" s'oppose au système héliocentrique, mais fournit une preuve expérimentale dissuadant de se fier à la perception de la lumière des étoiles pour le calcul des distances interplanétaires. Il s'oppose donc non seulement à Copernic, mais dans son ensemble à ce qui sera qualifié bien longtemps après Copernic de "révolution copernicienne".

    On trouve dans le corpus philosophique et scientifique de Francis Bacon bien des raisons d'écrire une pièce sur le thème important de la discorde entre la science et la politique, mais surtout la thèse de P. Usher se heurte à une pierre d'achoppement de taille et qui "saute" aux yeux. Si "Hamlet" est fait pour défendre N. Copernic et son nouveau système héliocentrique, comment se fait-il que le personnage auquel le héros de la pièce se montre le plus hostile se nomme "Polonius". Comment ne pas remarquer que Copernic, d'entre tous les Polonais est le plus fameux ? Comment ne pas le remarquer quand on est persuadé de l'arrière-plan astronomique de la pièce ?

    *Les "Baconiens" prétendent que Shakespeare n'est que le prête-nom de Francis Bacon Verulam.

  • Dieu et la Science

    L'effort accompli par Francis Bacon Verulam pour promouvoir et contribuer au progrès de la science est l'oeuvre la plus admirable, impliquant le détachement de soi et faisant croire ainsi à l'éternité (car les hommes dont l'espoir n'est pas égoïste sont très rares).

    A ceux qui sont persuadés que l'éternité n'est l'affaire que de rêveurs ou d'artistes un peu fous, on proposera le contre-exemple de Francis Bacon.

    On voudrait ignorer Francis Bacon en France ; on voudrait surtout ignorer que c'est un savant chrétien. On a inventé pour cela une histoire de la science "laïque", risible sur le plan historique. Cependant il est difficile de censurer complètement Bacon, car sa révolution ou sa restauration scientifique a marqué les esprits. De très nombreux principes énoncés par Bacon comme devant permettre à la science de sortir de l'obscurantisme médiéval sont en effet devenus presque des dogmes aujourd'hui (ce qui ne signifie pas qu'ils soient largement appliqués).

    D'une part on peut qualifier Bacon de "père de la science moderne" ; mais d'autre part c'est impossible, en raison de la foi chrétienne de ce savant (qu'il est difficile de faire passer pour une simple effet de la mode de son temps), mais aussi parce que Bacon a réfuté certaines des grandes lois qui font consensus aujourd'hui en astronomie (B. n'accorde pas aux mathématiques/géométrie algébrique le pouvoir de rendre compte de manière complète des grands mouvements cosmiques.)

    La science de Bacon est aussi "énigmatique" que le théâtre de Shakespeare. Il faut dire que la science joue désormais un rôle social comparable à la théologie autrefois ; peu de monde s'avise aujourd'hui du caractère extra-scientifique des sciences dites "sociales". L'expression en vogue de "science dure", dépourvue de signification, suffit à elle seule à décrire le désordre qui règne dans la méthode scientifique aujourd'hui. Bien des ouvrages scientifiques ont le même aspect de prose impénétrable que les sommes théologiques au moyen-âge.

    Or, de la métamorphose de "l'enjeu religieux" en "enjeu scientifique", bien que ce dernier a parfois des "accents baconiens", Bacon n'est en rien responsable. Promotion de la science, le "Novum Organum" n'est en rien promotion de la technocratie, c'est-à-dire de l'usage religieux de la science par les élites politiques occidentales.

    "Notre première raison d'espérer doit être recherchée en Dieu ; car cette entreprise [de rénovation de la science], par le caractère éminent de bonté qu'elle porte en elle, est manifestement inspirée par Dieu qui est l'auteur du bien et le père des lumières. Dans les opérations divines, les plus petits commencements mènent de façon certaine à leur fin. Et ce qu'on dit des choses spirituelles, que le Royaume de Dieu arrive sans qu'on l'observe [Luc, XVII-20], se produit aussi dans les ouvrages majeurs de la Providence ; tout vient paisiblement, sans bruit ni tumulte, et la chose est accomplie avant que les hommes n'aient pris conscience et remarqué qu'elle était en cours. Et il ne faut pas oublier la prophétie de Daniel, sur les derniers temps du monde : beaucoup voyagerons en tous sens et la science se multipliera (...)"

    "Novum Organum", livre I, aphorisme 93

    La dimension eschatologique, de révélation ultime, de la révolution scientifique voulue par Bacon apparaît dans cet aphorisme ; on peut d'ailleurs penser que le livre de Daniel fournit en partie la clef du "Hamlet" de Shakespeare, pièce que la science universitaire dit "énigmatique".

    Dans "Hamlet", Shakespeare nous montre le sort réservé à un prophète par les autorités d'un pays dont il est en principe le prince - un prince à qui ces autorités auraient dû se soumettre, mais ne l'ont pas fait (Claudius incarne le pouvoir politique, Gertrude l'institution ecclésiastique, Polonius-Copernic le pouvoir scientifique).

    Bien des indices dans le "Novum Organum" laissent penser que Bacon n'était pas dupe de l'usage qui serait fait par les élites savantes de son oeuvre de restauration scientifique. En premier lieu parce que, s'il affirme l'aspiration divine de l'homme à la science, à travers sa condamnation de l'idolâtrie ce savant décrit le penchant contradictoire de l'homme au divertissement et à l'ignorance, sur lequel les pouvoirs publics s'appuient, non seulement suivant l'exemple de la Rome antique, mais bien au-delà de ce régime décadent.

  • Dans la Matrice

    Tout le monde connaît cette façon moderne de classer les études scolaires en "études scientifiques" d'une part et "études littéraires" d'autre part. Eh bien cette distinction est strictement moderne, c'est-à-dire qu'elle n'a aucun sens, ni scientifique, ni littéraire, ni même historique. Ce clivage traduit seulement un préjugé moderne. La réforme des études scolaires et universitaires n'aura jamais lieu, car elle requiert la reconnaissance préalable de la fonction religieuse remplie par le système scolaire et universitaire moderne, et que cette fonction dépasse largement le but scientifique officiel.

    L'assimilation de la technique à la science est d'abord le fait de l'université et des universitaires. La technocratie ne peut pas se remettre en cause elle-même. Les ouvrages de Hannah Arendt sont sans doute significatifs du maximum d'esprit critique dont un représentant de la technocratie peut faire preuve. George Orwell dépasse ce niveau maximum en une phrase, lorsqu'il indique que les intellectuels sont les personnes qui ont le plus de goût pour le totalitarisme. De fait, le cinéma, qui est l'art le plus totalitaire, est entièrement justifié comme un art selon un raisonnement intellectuel. La dimension rhétorique du totalitarisme convient aussi parfaitement aux intellectuels et explique que nombre de poètes modernes se soient compromis avec les pires régimes. 

    Bien que tardive, la philosophie des Lumières elle-même ne correspond pas à ce clivage. Cela n'a pas de sens de dire les ouvrages de Voltaire plutôt "littéraires" ou plutôt "scientifiques".

    Le rapprochement par Francis Bacon Verulam de la science juridique et de la géométrie algébrique est beaucoup plus perspicace et utile du triple point de vue de l'histoire, de la science et de la politique. Soit dit en passant, il ne peut y avoir d'histoire de la science véritable, domaine où l'université moderne et la technocratie pèchent de la manière la plus flagrante, sans examen approfondi du propos de Francis Bacon. Grâce à Bacon, on sait ainsi que l'astronomie qui repose sur des modèles algébriques est nécessairement une astronomie subjective. L'univers est en proie à des métamorphoses successives à partir de son origine première, nous dit l'université. A moins que ce ne soit l'astronomie moderne qui soit une rhétorique en constante évolution ; non l'objet des études scientifiques, mais l'instrument de prédilection utilisé pour ces études.

    A propos de la pièce "Hamlet", écrite par Bacon et signée "Shakespeare" : les lecteurs les moins observateurs observent son arrière-plan astronomique pour plusieurs raisons. Non seulement Hamlet parle aux étoiles, mais le spectre son père est lui-même une sorte d'ange ou "d'Epiphane", c'est-à-dire une divinité se manifestant aux hommes. C'est un phénomène astral, puisqu'il se confond avec un étoile brillante. En outre le château d'Elseneur (Elsinborg) au Danemark fut la résidence d'un des astronomes les plus célèbres de l'Occident, Tycho Brahé, tenant de la théorie géocentrique, et auteur de calculs de positions d'étoiles non moins précis que ceux de Copernic, promoteur plus ou moins volontaire de la thèse héliocentrique. Polonius est de surcroît le pseudonyme transparent de ce dernier.

    S'il n'est pas le premier à témoigner dans ce sens, nul n'est mieux conscient que Francis Bacon de l'enjeu de la science pour l'homme. En ce sens, Bacon pourrait passer pour moderne, puisque l'antienne du progrès et de la science est une antienne que l'on entend tous les jours ou presque. Mais Bacon n'est pas moderne dans la mesure où sa science offre peu de points de correspondance avec la science actuelle, et peut-être plus encore parce que Bacon indique que l'homme est assez largement réfractaire à la science, et beaucoup plus porté à l'invention technique, domaine où il n'y a pas de progrès véritable. Bacon montre en quelque sorte que l'idée de progrès, si elle n'est pas liée à la métaphysique ou aux choses surnaturelles, n'a aucun sens.

    Bacon est conscient de l'enjeu majeur de la science, et des implications particulières de l'astronomie copernicienne dans le domaine moral ou politique (cf. "Novum Organum"). Il y a tout lieu de croire que Shakespeare exprime à travers "Hamlet" une hostilité radicale à la science copernicienne, et la vision commune du monde et de l'univers qui en découle -ou en découlera, pour être plus exact, car Copernic n'a pas manifesté une grande maîtrise de sa science et son déroulement ultérieur. On peut dire que la science de Copernic est un préalable au développement ultérieur de l'anthropologie, c'est-à-dire d'un courant scientifique qui a tendance à rapporter les différentes sciences à l'homme. Le seul profit qu'il y a à mettre en équation l'univers ou à en proposer des modèles mathématiques est, comme la cartographie de la terre, un profit pour l'homme, qui d'ailleurs de ce fait peut se sentir maître de l'univers et se bercer de cette illusion. On voit bien tout ce qui peut heurter un esprit scientifique dans cette tournure d'esprit moderne. Ce n'est pas parce que la métaphysique n'est pour l'humanité d'aucun profit, que l'on ne peut en déduire aucune loi morale ou politique, que la métaphysique n'est pas scientifique.

    "Hamlet" est donc une sorte de "Da Vinci Code", à ce détail près que le "Da Vinci Code" entretient un certain nombre de légendes qui courent à propos des rapports de l'Eglise catholique romaine et de la science moderne. L'influence de l'Eglise romaine sur la science moderne est, notamment en France, largement sous-évaluée.

    Un universitaire contemporain se demande pourquoi Francis Bacon a tant fait l'éloge de la mythologie et des mythes anciens (en tant que réceptacles durables de la science), mais n'a pas lui-même écrit de fables ou de mythes. On ne peut manquer d'observer que Shakespeare est le seul tragédien de l'ère moderne, et que ses tragédies n'ont pas le caractère "dionysiaque" que Nitche prête abusivement à la tragédie antique. Les tragédies de Shakespeare sont "historiques" - et par conséquent métaphysiques puisque l'histoire n'est pas une science anthropologique mais issues des prophéties juives de l'antiquité.

     

     

  • L'Occident sucre les fraises

    Le but de l’art occidental est d’empêcher l’apocalypse. Ainsi ne peut-il simplement exalter la vie et la beauté, l'imitation de la nature, comme les civilisations antiques.

    Mais l’art occidental ne peut que retarder l’apocalypse. Fortinbras, ton heure vient.

  • Au fil de l'Epée

    La prison dont les barreaux sont les plus solides est celle des paradoxes humains. C'est pourquoi les chrétiens ont un dieu qu'ils nomment "logique".

    L'anthropologie est l'ennemie jurée des chrétiens, à commencer par les anthropologues qui portent le masque chrétien, dont il faut piétiner les ouvrages, entièrement du domaine de l'idolâtrie. Le triomphe de l'anthropologie est celui de la bêtise humaine. Derrière chaque homme, se croyant justifié d'émettre un jugement moral sur autrui, se cache un anthropologue imbécile.

    "Ce qui sort de la bouche de l'homme -le langage humain- souille l'homme", dit le Messie à ses apôtres pour les dissuader de se fier aux diverses sortes de rhéteurs qui entendent régenter l'esprit humain.

    L'homme n'a qu'un potentiel très limité. Limité à l'érotisme ou la force vitale. Sans l'inspiration divine, sa compréhension du cosmos est quasiment nulle et se réduit à des spéculations algébriques. Ces dernières reviennent à réduire l'univers à un organisme vivant, et à lui affecter le mouvement instable et paradoxal propre à la vie.

    L'antichrist Nitche avec son "éternel retour", ne fait que reconnaître le caractère satanique de la science anthropologique occidentale, où la spéculation joue un rôle essentiel. "Voir les choses dans un miroir", selon le procédé qui définit l'entendement de l'homme d'élite, est un moyen pour celle-ci de se conforter contre la sagesse divine. L'élite ne se légitime JAMAIS selon dieu, mais toujours CONTRE lui. Quitte, s'il le faut, à le remplacer par une idole, selon le procédé des suppôts de Satan, à l'intérieur de l'Eglise chrétienne (Pascal, Joseph de Maistre).

    C'est ce qui explique que Hamlet passe Polonius-Copernic au fil de l'épée, et non pour une sordide histoire de cul telle que celles qui hantent le roman ou le drame bourgeois.

  • Anthropologie

    Derrière chaque anthropologue se cache un antichrist plus ou moins sournois. On peut dire aussi que l'anthropologie est un masque qui permet à des ignares de faire croire qu'ils sont savants. L'anthropologue n'a pas le sens de l'histoire, il a seulement celui de ses intérêts.

    C'est en tant qu'anthropologue que Polonius-Copernic est exécuté par Hamlet. Ce sont toujours des anthropologues qui jugent et condamnent Shakespeare.

    Qu'est-ce que l'anthropologie ? C'est une façon d'expliquer l'homme autrement que par la mythologie de Moïse.


  • Armagédon

    Il faut voir Hamlet à la bataille, comme son épée s'enfonce profond dans la jugulaire de la bête. Quelle science de la guerre sainte, mes amis ! Tâchons de soulever le glaive d'Hamlet -il est lourd, je sais, mais quand même-, pour couper les derniers tendons, tac, tac.

  • L'Armagédon

    Pendant l'Armagédon, soyons prudent comme le serpent et simple comme la colombe, à l'image d'Hamlet,  vaillant combattant dans le sillage des étoiles sacrées, contre les chevaliers en armures de l'ordre du destin.

  • Arcturus

    L'histoire de l'humanité s'achève à l'Occident, aussi Hamlet s'adresse-t-il à l'Esprit, son père, en direction d'une région bien précise de la voûte étoilée, comprenant Cassiopée, le Bouvier, les Pléiades, non loin des grande et petite Ourses et de la queue du dragon. La mythologie chrétienne selon Shakespeare est reliée au ciel, comme celle des anciens.

    - Chacun sait que la naissance du Messie coïncide avec l'apparition d'une étoile, qui guida des savants arcturus,hamlet,bouvier,shakespeare,job,saint paul,polonius,copernic,mazzarothétrangers au peuple hébreu jusqu'à Bethléem, en Judée. L'avènement du Christ de la fin des temps est lié lui aussi à un astre. Celui-ci est, dans la prophétie chrétienne, le cavalier monté sur un cheval blanc, revêtu d'un manteau teint de sang, qui dans certains contes chrétiens populaires, vient sauver l'Eglise des saints et martyrs fidèles et justes des griffes d'une mauvaise reine. Cette représentation de l'Esprit  divin et de sa parole comme un cavalier armé d'une épée ("Je suis venu apporter le glaive.", dit Jésus), n'a pas un sens moral ; la justice et la morale des hommes est, quant à elle, figurée par un cavalier noir néfaste. Les calamités de l'humanité, dit l'apocalypse, l'humanité s'y expose en s'éloignant de la vérité.

    De la bouche de ce cavalier, dont personne ne connaît le nom, si ce n'est lui-même, sort une épée pointue pour frapper les nations - les confondre, comme Hamlet confondit tous les protagonistes du royaume de Danemark.

    Avant que Polonius-Copernic ne brouille le ciel avec ses calculs de trajectoires, l'apparition d'une nouvelle étoile était un événement considérable dans la communauté des savants chrétiens. Telle la survenue de l'étoile "supernova", dite de Tycho Brahé, dans la constellation de Cassiopée, que l'astronome danois observa du château où Shakespeare a installé son propre conte, puisque les astres sont comme des dieux ou des messagers.

    La bible est émaillée de référence à l'astrologie - les prophètes en particulier. "Est-ce toi, demande dieu à Job, qui fais lever les constellations (mazzaroth) en leur temps, qui conduit Arcturus et ses fils ? Connais-tu les lois du ciel ?"

    "Il y a une gloire pour le soleil, et une autre pour la lune, et encore une autre pour les étoiles ; chaque étoile diffère en gloire d'une autre.", précise saint Paul.

    A celui qui gardera les oeuvres de dieu intactes, et vaincra, le cavalier blanc, agissant au nom de dieu, donnera "l'étoile du matin". "Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux sept Eglises". La précision est ailleurs d'une ressemblance de l'étoile avec l'astre solaire, vénéré par les anciens Egyptiens. D'autres éléments convergent encore vers Arcturus, "chasseur à l'affût de l'ours", l'étoile la plus brillante du ciel boréal (encore appelée Alpha Boötis) ; on la trouve dans le prolongement du timon de la grande ourse (queue de la grande casserole).arcturus,hamlet,bouvier,shakespeare,job,saint paul,polonius,copernic,mazzaroth

    Et ces événements se produiront, la tribulation des chrétiens fidèles prendra fin, quand l'espoir du salut aura été perdu, et que la plupart des hommes auront été séduits par les nations, puisant dans l'énergie solaire toute leur puissance et leurs miracles trompeurs.

     

     

     

     

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  • Aux captifs...

    ...la libération.

    Encore faut-il éprouver l'enfermement et le poids des chaînes sociales, tel Hamlet au Danemark. Eprouver que dire "le lien social", c'est blanchir l'argent ; éprouver que l'argent est la traduction concrète du "lien social".

    S'il y a un esprit français, divergent de ce que leurs élites ploutocratiques voudraient qu'il soit (allemand), il est bien là, dans le mécontentement de la vie. Les Français sont le peuple le moins existentialiste de la terre, c'est-à-dire le moins socialiste, le moins clérical, puisque la foi est toujours faite pour donner un sens à l'existence, qui en soi en est dépourvue.

    Tous les penseurs existentialistes ont trempé ou trempent dans le crime de l'humanité contre elle-même, et c'est un scandale qu'ils continuent d'être enseignés en France, comparable aux méthodes de séduction des pédophiles. L'Education nationale, humaniste ? C'est un repaire de pharisiens, occupés à araser le plus possible l'esprit de résistance humaniste, dissuasif du civisme, qui n'a jamais engendré que les pires catastrophes.

    Vous voulez des noms ? Rabelais, Molière, Balzac, Bloy, Allais, Céline, Bernanos, Simone Weil... la liste est longue des artistes français dissuasifs de caresser la monstrueuse mécanique sociale dans le sens du poil. Tous empruntent la voie ouverte au milieu des factieux par l'épée de Shakespeare, et le malheur des derniers cités de cette liste vient de ne pas avoir reconnu assez l'appui que Shakespeare fournit à la pensée. Sauver Shakespeare des griffes du Grand Siècle satanique est la meilleure action que les Lumières françaises ont accompli, mais l'effort du clergé n'a pas cessé depuis pour faire en sorte de priver Shakespeare de son sens véritable. 

    Entendu que l'esprit du paganisme le plus terre-à-terre est celui de la médecine, on comprend que les thaumaturges ou les utopistes réformateurs de la société ne comprennent rien à Hamlet ou le vilipendent. Hamlet a la pointe de son épée posée fermement sur le garrot du destin. Il ne reste plus qu'à appuyer.

  • Comprendre Shakespeare

    Si vous voulez comprendre Shakespeare, et non vous résoudre comme tous les parasites qui remplissent l'université à des "énigmes", comprenez d'abord que, pour un chrétien, la vérité juridique équivaut au mensonge, c'est-à-dire au blanchiment de la fornication.

    La colère de Shakespeare vise le clergé, et derrière le clergé la science juridique ou mathématique des Egyptiens. Voilà pourquoi Satan n'a jamais eu d'ennemi plus redoutable que Shakespeare dans l'Occident. Aucune imagination ne s'est élevée plus haut que la sienne depuis, et les bibliothèque sont pleines de détritus, destinés à la fornication passive des intellectuels.

    Voilà pourquoi la fin de race hyperboréenne, mâtinée des deniers de Shylock, n'en finit pas d'instruire le procès d'Hamlet.

  • 666 : l'enquête

    "C'est ici la sagesse ! Que celui qui a de l'intelligence compte le nombre de la bête ; car c'est un nombre d'homme et ce nombre est six cent soixante-six." (Apocalypse de Jean, chap. XIII-18)

    Je recopie ici un dialogue avec Fodio, qui creuse sur son propre blogue le thème de la lumière de Satan-Lucifer, opposée à la lumière divine (l'éthique hégélienne nationale-socialiste, adoptée de façon stupéfiante par la démocratie-chrétienne, tend d'ailleurs vers une lumière, dont la modélisation mathématique indique qu'elle est solaire et fonde un régime de droit analogue à celui des cultes solaires antiques).

    - La lumière luciférienne est associée à l'aurore et au réveil de la création des êtres animés, dont la Genèse raconte qu'elle fut le fruit du péché originel (chute et origine du monde vivant sont associés dans le christianisme, puisque la physique imprime le mode de raisonnement éthique ou moral, dit ("de la connaissance du bien et du mal") ; faut-il le rappeler, contrairement aux persiflages de certains démocrates-chrétiens, la biologie de l'évolution est incompatible avec la science chrétienne, pour la raison que si l'évolution explique "comment" le processus vital se déroule, suivant un déterminisme dont les mathématiciens déduisent le hasard, ou les prêtres païens "la providence" (la main magique d'Adam Smith dans le néo-paganisme capitaliste), elle ne dit jamais "pourquoi" ce processus s'est enclenché, ce qui constitue la vraie question scientifique. D'une façon qui prouve l'effet de l'inconscient, la démocratie-chrétienne, au nom du christianisme, énonce une pseudo-science bouddhiste.

    - à Fodio :

    - Le thème de la confusion entre l'épiphanie de l'esprit et l'aurore du matin (Satan-Lucifer) est au centre du "Hamlet" de Shakespeare. Comme je te l'ai déjà écrit, on lit mieux dans la version anglaise que le père de Hamlet -le spectre-, est une étoile (Chez Shakespeare, les "oiseaux du matin", comme le coq ou l'alouette, ont une connotation satanique : symboles de la culture de vie païenne, ils chantent l'éternel retour du soleil au petit matin.)

    - Le système babylonien dont tu décris la persistance dans les Etats-Unis, ou bien le système égyptien, outre leurs formulations juridiques, sont rattachés à des cultes, lunaire ou solaire. Bien sûr l'apparence chrétienne des Etats-Unis, elle, est plus étrange que le nazisme et le nitchéisme, ou les cultes païens "classiques" (même s'il n'y a pas besoin d'avoir lu et relu les évangiles pour reconnaître la bizarrerie du serment des chefs d'Etats d'Outre-Atlantique sur la Bible.)

    - Donc le 666 ne semble pas désigner un homme en particulier ; il y a plusieurs antéchrists dans l'histoire, mais ils sont animés par une puissance supérieure, d'ordre astrologique comme l'indique Hamlet, qui s'adresse non seulement aux astres, mais à certains astres en particulier. Le 666 désigne-t-il le soleil ? la terre ? la lune ? le système solaire entier ? Le secret de l'histoire de l'humanité est-il contenu dans la voie lactée, comme Dante Alighieri et Shakespeare le pense (bien que l'interprétation de Shakespeare diffère nettement de celle de Dante, puisque Shakespeare est pur de l'éthique) ? J'ai longtemps pensé au soleil, dont les systèmes anthropologiques antagonistes du judaïsme ou du christianisme traduisent le culte, proclamant la lumière "une" sans raison scientifique de le faire, mais bien juridique.

    - J'ajoute que la "meule de pierre" dont il est question dans la vision de l'apôtre Jean se rapporte elle aussi sans doute au système astrologique entier et à la rotation du système solaire (défendue par F. Bacon alias Shakespeare contre le mode de calcul égypto-copernicien). "Alors un ange puissant prit une pierre semblable à une grande meule, et la lança dans la mer en disant : "Ainsi sera soudain précipitée Babylone, la grande ville, et on ne la retrouvera plus." (Ap. XVIII, 21). 

    - Le site d'où émane la carte indique à juste titre que la révélation chrétienne fournit le point de départ à l'intelligence des hommes en indiquant le caractère anthropologique du 666. L'homme-microcosme, et non pas inscrit dans la chaînes des espèces vivantes, et le produit d'un macrocosme qu'il reflète, selon l'illustration classique des artistes de la Renaissance qui, disposant le corps humain "en étoile", révèle cette origine marco-cosmique. Dans la sagesse grecque, le combat des titans contre Zeus illustre déjà la mobilisation de l'anthropologie contre dieu.

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  • La Nuit avec Vladimir Holan

    Le poète tchèque Vladimir Holan (1932-1970), a passé une nuit avec Hamlet ("Noc S Hamletem"). Hamlet sait tout, et il guerroie contre le monde qui ne sait rien, faisant comme si "être" était "avoir", et "pouvoir" une fin. A la fin du temps, Hamlet ressuscitera, non pas en raison de la foi mais de l'histoire.

    Je viens de passer une nuit avec V. Holan.

    "Sur le chemin de la nature à l'être

    les murs ne sont pas à vrai dire très accueillants,

    ces murs couverts d'urine par le talent et mouillés de crachats

    par la révolte des eunuques contre l'esprit, ces murs,

    ces murs d'un rien plus bas que leur propre naissance,

    et ces murs où l'on voit déjà mûrir et s'arrondir tout fruit...

    Pleine et fluide, la voix de Shakespeare

    est invite à tout se permettre, et sa parole,

    qui comme l'étonnement même se devrait d'être

    une célébration, devient par la dévaluation du Temps (devant les preuves possibles de son absence),

    un impôt d'usurier sur tous les appartements,

    dans lesquels le metteur en scène s'est installé avec sans-gêne.

    Seule l'escroquerie est ici certitude. Et quant au spectateur,

    sans plus attendre il rampe vers la sortie comme le serpent de saint Georges,

    pour se chauffer à la bile des critiques..." (Trad. D. Grandmont)

    Depuis Samuel Johnson je n'avais pas entendu une parole sensée à propos de Shakespeare.