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voltaire - Page 2

  • Pour un art communiste

    Ce qui frappe d’emblée le profane chez Marx, à condition d’aborder ce pan plus discret, c’est la pertinence de sa critique littéraire. Le contraire d’un gugusse foutraque comme Sollers dont les seules lumières consistent à braquer les projecteurs sur sa rotonde personnalité et sa prose éthique (L’éthique du bourgeois est une enflure).
    Il faut ranger un tel fumiste du côté de l’obscurantisme romantique. Au moins Edern-Hallier avait ce geste classique de trier le bon grain de l’ivraie avec solennité, d’appeler un écrivain un écrivain et un maquignon un maquignon.
    Ainsi Marx résout la contradiction apparente entre un Rousseau “positiviste” et un Rousseau “païen”.
    Pour comprendre la façon dont le marxisme s’articule avec la Révolution française, d’ailleurs, la meilleure façon est sans doute de passer par la critique littéraire de Marx.
    Energique contempteur de la religion des Droits de l’homme, Marx a une façon d'envisager Rousseau ou Voltaire beaucoup plus nuancée. Candide, c'est "voyage au bout de la bourgeoisie".
    Pour Marx, Voltaire est fourvoyé dans une impasse, mais il est aussi le premier à s’en rendre compte, c’est-à-dire à explorer cette impasse. Chateaubriand, lui, n’est qu’un menteur, un fuyard. Tous les efforts de la critique bourgeoise consistent d’ailleurs à tenter de justifier les mensonges de Chateaubriand par des sophismes tels que : “Un artiste est forcément un menteur”. Non, l’artiste bourgeois est forcément un menteur : nuance.

    *

    Un autre aspect positif de Marx, c’est qu’il s’abstient de parler de peinture. La critique, qui contraste avec le journalisme, consiste aussi à ça. Marx est un esprit beaucoup trop “renaissant” pour broder sur des métiers qu’il ne connaît pas. Le contraste est saisissant avec Diderot, dont l’ignorance encyclopédique des tenants et des aboutissants de cet art solide, ne l’empêche pas de pisser des litres de copie afin de divertir la bourgeoisie.
    La différence entre Baudelaire et Diderot, c’est qu’au moins le premier fait des efforts pour comprendre, même s’il y a des contradictions chez Baudelaire, à commencer par son ami Delacroix, pas d’accord sur tout.
    Degas se mettait en rogne dès que Paul Valéry s’avisait de causer de peinture. Que resterait-il de Paul Valéry, si on le passait au tamis ?
    Et même Claudel s’est compromis à ce genre-là.

    Proust, cet imbécile heureux, ni critique ni peintre, n’hésite pas à s’en prendre carrément à Fromentin, critique et peintre. Comme si Sainte-Beuve ne suffisait pas ! On a parfois l’image exclusive du Philistin en bras de chemise qui pue la sueur et réside forcément dans un cul de basse-fosse. Proust est la version gazeuse et parfumée - démocratique - du Philistin. Ni images ni critères chez Proust, mais des stimuli et de la pataphysique. Le principe de “lire pour lire” ne dérange pas le bourgeois qui a l’éternité devant lui. Chirurgie esthétique, psychanalyse et euthanasie ne sont là que pour corriger les mensonges de la réalité, le temps, le progrès et la mort.

    *

    Reste à vaincre un léger paradoxe. Si Marx a l’honnêteté de ne pas parler de peinture, cet art n’en est pas moins l’art communiste par excellence. De fait c’est le plus populaire, celui qui permet la meilleure communication. C’est en tant qu’iconoclaste que le régime soviétique condamne Malévitch ; c’est tout à son honneur.
    Il faut prendre “populaire” dans le bon sens. Céline est un auteur “populaire”. Ne sont pas “populaires” Johnatan Littell, Harry Potter ou Simenon, au seul prétexte qu’ils sont faciles et bâclés.

    Tout ce qui relève en général presque exclusivement du procédé mécanique : le cinéma, la photographie, les romans d’Agatha Christie, ne relève pas de l’art populaire, ni de l’art du tout.

  • Téléscopage

    La théologie de Benoît XVI me fait penser à ces canards à qui on a coupé la tête et qui continuent sur leur lancée.

    La morale janséniste de Benoît XVI a une conséquence bizarre : le téléscopage des démocrates-chrétiens supporteurs du pape et de l’islam. Le "djihad" de Tariq Ramadan, par exemple, est très proche du jansénisme de Benoît XVI.
    Tariq Ramadan ne cache pas sa sympathie pour Voltaire, qu’il semble d’ailleurs apprécier à sa juste valeur, contrairement à beaucoup de laïcs imbéciles ; et l’influence de l’idéalisme allemand rapproche beaucoup Benoît XVI de Jean-Paul Sartre et de sa morale hybride.
    Il y a aussi chez Benoît XVI une sorte de fascination (très allemande elle aussi) pour l’ingéniosité, qui le pousse à méconnaître la vraie science ; et incontestablement une partie du monde musulman est fasciné par la technologie nord-américaine d’inspiration nazie.

    Autrement dit, je crois qu’un musulman qui lirait l’encyclique “Spe salvi” de Benoît XVI n’y trouverait rien à redire, au contraire. Probablement le seul grief que Tariq Ramadan pourrait faire à Benoît XVI serait de ne pas être assez “scolastique”, quelque chose dans ce genre.

    Il est évident qu’il y a une “concurrence” entre Benoît XVI et ses partisans d’une part (en France le renouveau charismatique, une bonne partie des “vieux catholiques” dits “traditionnalistes”, et les démocrates-chrétiens “gaullistes”), et les musulmans d’autre part. Comment expliquer autrement le fait qu’on vive d’un côté comme de l’autre coupé d’une réalité première, à savoir que la religion athée et ses ministres occupent une place dominante et qu’ils exercent une répression assez nette des autres cultes.

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    Comment expliquer, diront certains, l’empressement de certains maires à faire construire dans leurs communes des mosquées pour les affecter au culte musulman, dans ce cas ?
    La première explication qui vient à l’esprit c’est que pour nos édiles l’argent n’a pas d’odeur, et que “quand le bâtiment va, tout va”. A elle seule cette raison est en béton armé, à l'époque où nous sommes.
    La deuxième explication, c’est que la religion laïque dans sa conception française, “jacobine”, “dictatoriale”, subit l’influence du modèle américain plus opaque, de type totalitaire.
    Peut-être les cervelles mathématiques comprendront mieux si je parle dans le premier cas français de PGCD, dans le deuxième de PPCM ?
    80 à 90 % des Français idolâtrent l’Etat, et ils en sont relativement conscients ; tandis qu’une proportion plus grande encore des Yankis adore aussi l’Etat, mais sans le savoir.

  • Table rase de la télé

    Pour donner la réplique à Finkielkraut, Frédéric Taddéi avait invité un universitaire communiste, Yves Quiniou. Celui-ci ne déshonore pas la pensée occidentale comme Finkielkraut, mais de là à dire que c’est une lumière…

    J’ai moi même recommandé sur mon blogue le petit ouvrage de Quiniou qui combat quelques idées reçues sur Marx ; comme initiation, pourquoi pas. Mais Yves Quiniou est resté figé dans le marxisme des origines, il n’a pas évolué, ce qui pour un marxiste est impardonnable.
    Yves Quiniou persiste contre la réalité à voir dans les religions, musulmane, chrétienne, une menace, une force d’oppression. Il est incapable de voir la réalité des faits. La plus grande religion aujourd’hui, c’est la démocratie, le républicanisme, et il l’a en face de lui : c'est Finkielkraut, imam démocratique qui diffuse ses principes décadents par tous les canaux médiatiques mis à sa disposition. Marx, vivant, n’aurait jamais fait preuve d’un tel aveuglement !
    On observe également qu’Yves Quiniou défend ses principes avec une ferveur religieuse dont bien peu de prêtres catholiques sont capables dorénavant.

    Yves Quiniou, en outre, se réclame de Marx ET des “Lumières” de la Révolution française. Ce n’est pas si simple. Marx considère Voltaire comme le sommet de la littérature… mais de la littérature bourgeoise. Un marxisme qui ignore les évolutions de l’histoire est un marxisme momifié.

    Pour l’anecdote il y avait aussi Marcel Gauchet sur le plateau. Ce Gauchet est encore pire que Finkielkraut ; à la nullité il ajoute l’insignifiance. Tout au plus il est significatif de ce que la pensée démocrate-chrétienne n’est qu’un accessoire, un sous-produit de la pensée démocratique.