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  • Anthropologie

    L'absurdité de la condition humaine justifie tous les actes contre nature. Le suicide, doctrine aristocratique, est tabou pour une seule raison : si les ouvriers se suicident, qui servira les bourgeois ?

    - Où lisez-vous, bourgeois, que le Christ a levé le petit doigt pour empêcher ce curé de Judas de se suicider ? Seule la société menace l'homme au-delà de la mort, et ces menaces sont du même calibre que les promesses des politiciens : elles n'engagent que les bonnes femmes, invariablement occupées depuis l'aube de l'humanité à répéter la même erreur qu'Eve.

    Le travail de l'anthropologue moderne, dans le régime totalitaire où nous sommes, consiste à faire passer l'absurdité pour la logique, jusqu'à proscrire l'humour. Aussi à la fin des temps, les partisans de la morale et de Satan, sont-ils aussi écoeurés par la société qu'un chrétien peut l'être.

  • Musique au coeur

    Le destin ordonne l'homme, et dans la musique je reconnais cet ordre.

    Le destin fascine l'homme, comme Eve fascina Adam, et dans la musique je reconnais cette fascination.

    Le destin se moque de l'homme, et dans la musique je reconnais son rire moqueur.

    La musique est, à l'instar de l'anthropologie, flatterie de l'homme par l'homme, qui l'entraîne au-dessous de la bête, car les animaux ont une meilleure perception de la musique.


  • Contre Bernanos

    En réponse à Fodio, qui cite Bernanos sur son blog, sincère royaliste sans doute, mais étrange cependant dans une religion qui ne reconnaît de pouvoir royal que celui de dieu, ou celui du christ, qui a défendu à ses apôtres de l'appeler "maître". Etrange Bernanos, qui semble ignorer que le XVIIe siècle des rois tyranniques est marqué dans son propre pays du sceau de Satan.

    Bernanos citant le curé d'Ars : "Ce que je sais du péché, je l'ai appris de la bouche même des pécheurs."

    Ce que les disciples de Jésus-Christ savent du péché, il ne l'ont pas appris de l'homme, qui n'en sait rien de plus qu'Adam et Eve; ils l'ont appris de Moïse et de Dieu. Le pécheur, moi, vous, tout mortel, ne peut pas regarder le péché en face, car cela reviendrait à regarder la mort en face, et non dans un miroir comme la basse condition humaine l'impose. Sauf peut-être au seuil de se résigner à mourir, nul homme n'est capable sans l'aide de dieu et ses prophètes de voir le péché en face. On a tous besoin de sentir qu'on est quelque chose, et non pas un tas de molécules en combustion. La culture de vie des païens les plus terre-à-terre charrie le péché comme le torrent charrie les gouttes d'eau. Jésus-Christ est assassiné - il est haï par Nitche, pour avoir définitivement rendue caduque la culture de vie, et il ne faut pas beaucoup plus de lucidité que des suppôts de Satan comme Baudelaire ou Nitche pour reconnaître dans l'argent moderne le dernier souffle de vie du monde.

    Donc seule la parole de dieu, qui est son Esprit, permet de voir le péché en face sans être anéanti par cette vision. L'aspiration à la connaissance de la parole divine est l'aspiration à être pur et lavé du péché - avant d'atteindre cette pureté éternelle, à être secouru par une force contraire à celle soutenant l'homme ordinaire, qui est sa foi ou son espoir, plus ou moins puissante suivant la vertu de cette homme ou de cette femme. Les rois sont faibles, nous dit le prophète Shakespeare, car ils sont appuyés eux-mêmes sur une masse mouvante, et prête à les noyer à chaque instant.

    Autrement dit : l'apocalypse ou le péché. C'est tout le crime du clergé romain (que Bernanos ignore obstinément, condamnant l'intellectualisme sans voir la part immense des clercs dans la casuistique, jusqu'à faire du catholicisme une religion de philosophes), le crime du clergé de faire écran à l'apocalypse, et de contraindre ainsi l'humanité au péché; de restaurer la mort dans ses droits en même temps que le péché, dont le Messie des chrétiens a levé l'hypothèque, rendant toutes les choses nécessaires à sa survie, inutiles pour son salut.

    Le péché et la mort confèrent au clergé un pouvoir immense sur les hommes, en particulier les ignorants, exactement celui que la maladie et la mort confèrent aux médecins aujourd'hui, en un sens plus vrai, car plus concret que celui du clergé démodé, qui d'ailleurs s'incline désormais devant la médecine, vaincu sur un terrain où aucune parabole du Nouveau Testament ne l'incitait à s'aventurer, pataugeant dans la plus barboteuse thérapie de l'âme et les syllogismes kantiens de crétins patentés, docteurs de l'Université.

    Ce pouvoir immense sur les foules, il a été ôté au clergé par le Messie, s'affranchissant lui-même de la chair et du péché. Niant que dieu réclame à l'homme des sacrifices, quand il ne lui demande que de l'aimer, ce qui n'est pas un sacrifice mais une libération. Celui qui réclame des sacrifices, et procure en échange certaines récompenses plus ou moins illusoires, maintenant l'homme dans un cercle infernal de douleur et de plaisir, de labeur et de fruit de ce labeur, n'est autre que Satan. Et la confiance en lui est comme naturelle et spontanée. Elle l'est chez le paysan, plus encore que chez l'intellectuel, qui croit pouvoir rivaliser par ses propres oeuvres avec le diable. Satan et le monde vacillent de la concurrence que les intellectuels font à Satan.

    Confronté à la philosophie, le paysan a souvent le pressentiment que la métaphysique est une imposture, une pure casuistique, qui parle moins vrai que la nature. En quoi il n'a pas tort, le plus souvent, car la culture est toujours inférieure à la nature. Plus elle prétend surmonter la nature, plus la culture est amère et médiocre - au bout du compte il ne reste plus dans la vaste porcherie bourgeoise que la gastronomie à l'intérieur, et les missiles en direction des affamés à l'extérieur.

    Mais, de ce que la nature est toujours supérieure à la culture, il ne faut pas déduire que la métaphysique n'est que du vent. Que les intellectuels simiesques en sont les plus éloignés, ne prouve pas que les choses surnaturelles n'existent pas. Homère, Shakespeare qui trucide des intellectuels dans ses pièces, Molière, ou même Balzac, ne sont pas des intellectuels. Molière sait que la charité véritable est toujours une insulte pour les cacouacs.

    Bernanos, lui, est un intellectuel, qui reconnaît la vanité de l'intellectualisme. Mais c'est Shakespeare qui mène la bataille contre la race de fer, la plus vaniteuse de tous les temps.

     
  • Le Siècle des Dévôts

    J'indique souvent Malraux comme le sommet de l'imbécillité en matière d'art. On peut facilement démontrer -d'autres que moi l'ont fait-, qu'il n'y a que la rhétorique et le sophisme qui intéressent vraiment Malraux. Quel genre d'artiste, je vous le demande, peut accepter un ministère du Culte, et consentir ainsi à aligner l'art sur la fonction publique ?

    Malraux est emblématique du jugement sans appel porté par Bernanos sur les factions qui ont pris le pouvoir à la Libération, et qui ont imposé l'idée de "modernité" dans le pays le moins prédisposé à accepter cette idéologie, constitutive du négationnisme de l'histoire.

    La haine du clergé à l'égard de l'art réaliste, et sa passion parallèle pour le cinéma en revanche, s'explique simplement par le fait que l'effort vers le réalisme, en art, a pour effet de dissoudre la propagande et la foi commune dans quelque paradis artificiel. Les historiens d'art qui s'attachent au style pour écrire l'histoire de l'art s'obligent à écrire l'histoire de la propagande et non de l'art ; il faut les requalifier en esthéticiens. Leur science se moque de l'ouvrage des artistes qui entendent au contraire se soustraire au style, à commencer par Shakespeare, le moins stylé ou dévot de tous les auteurs, pour qui la fiction a une odeur de merde.

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    Chaque changement de régime politique coïncide en art avec un retour au réalisme, et la modernité avec la folie, latente, dans l'uniformité. Cela ne veut pas dire que l'artiste réaliste souhaite nécessairement le changement de régime, puisque la foi dans le changement révolutionnaire, à elle seule, indique le manque de réalisme ; mais l'art réaliste a pour effet de soulever les jupes de la religion et de dévoiler ainsi ses varices, la privant ainsi de son principal argument : la séduction.

    L'éloge de la folie dans l'art -Nitche, par exemple- trahit le ministre du culte, si ce n'est le gauleiter, dont l'effort est pour couper le peuple de l'émancipation permise par l'art, jusqu'à faire de la gastronomie, comme c'est le cas aujourd'hui, un art premier.

    Statutairement, c'est-à-dire sur le plan de la fonction publique quand ils acceptent de s'y soumettre, les artistes se retrouvent désormais dans la position d'envier les grands pâtissiers de ce monde. On peut prendre la pratique contemporaine de l'entartage de courtisans comme l'un des derniers et rares manifestes d'art populaire, et observer combien le carnaval, aujourd'hui, est encadré, dès lors qu'il ne cible plus des idoles démodées. En décrétant le peuple souverain afin de le flatter, les Républiques bourgeoises ont sapé le carnaval pour lui substituer de grandes messes sportives, ce qui revient à priver la démagogie de limites et à encourager les pulsions criminelles dans le peuple. On peut donc poser l'équation du ministère du Culte et du populisme.

    Je sursaute en lisant la prose d'un type soi-disant anarchiste ; celui-ci s'interroge s'il n'y aurait pas un retour du phénomène religieux dans la société française en ce moment ? Un retour !? La réalité est qu'en lieu et place de la neutralité religieuse républicaine, c'est la méconnaissance du principe qui anime les religions qui a été inculquée. Les exemples de dévotion et d'attachement au ritualisme de la société abondent. A commencer, je le répète, par l'argument de la modernité sans cesse répété, qui ne fait qu'exprimer un sentiment religieux.

    A commencer par la musique, synonyme de religion, qui a désormais tous les droits. Et l'imagerie pieuse, c'est-à-dire les clichés ? Ils n'ont jamais été aussi envahissants. Qui ne possède un appareil photographique, lui permettant de se fabriquer ainsi autant d'images pour conforter son narcissime, quand le soupçon lui vient que son existence pourrait bien être parfaitement vaine ?

    Tous les gadgets technologiques activent une fonction religieuse essentielle, et sans laquelle il n'y a pratiquement pas de religion possible : la croyance dans une âme séparée du corps. Sondez l'âme d'un tueur en série ou d'un soldat, et vous y retrouverez cette dichotomie. Un charlatan moderne, qui se fait passer pour un "mage" auprès de ses fidèles, énonce à juste titre que le paradis est au coeur de l'inconscient. Ce qu'il oublie de dire, c'est que cet inconscient est entièrement hypothétique, d'une part, et d'autre part qu'il reflète chez ceux qui s'y soumettent une pulsion religieuse dans laquelle on reconnaît aisément l'effet secondaire de la technocratie. Un mécanicien ou un juriste sera le plus persuadé de l'autonomie de l'âme, puisqu'il fabrique des machineries ou des systèmes sur ce modèle.

    A ce niveau d'aliénation consentie, il est possible d'admettre les robots dans le genre humain. A ce niveau, le mage ou le programmateur a tout pouvoir de manipulation. C'est ce qui rend d'ailleurs les hommes plus réticents à la psychanalyse que les femmes : ceux-ci ont une meilleure conscience du caractère de viol, rituel dans le meilleur des cas, que l'intrusion du psychanalyste dans l'âme du patient constitue. On peut dire que la patiente du psychanalyste a raté ses noces avec la vie, et que le médecin de l'âme, s'il est honnête et efficace, lui permettra de faire de nouvelles épousailles.

    On se situe là encore, bien sûr, sur un terrain religieux. La raison qu'ont les hommes d'être réticents au mariage comme à la psychanalyse est même historique : à l'origine, le mariage n'est pas conçu principalement pour eux. L'Eglise catholique romaine est sans contestation possible l'institution qui a le plus oeuvré en faveur du féminisme, en "christianisant" cette institution païenne, ce qui a eu pour effet de soumettre les hommes à un principe auquel ils n'étaient pas soumis auparavant, dans la religion païenne. Achille, qui incarne chez Homère une religion existentialiste démodée selon cet historien, a le choix entre le mariage et le bonheur d'une part, ou la guerre et la gloire de l'autre ; sans hésiter il choisit la seconde alternative, qui lui permet de s'accomplir en tant qu'homme.

    L'idée que les femmes sont plus pures et chastes que les hommes, contredisant parfaitement la mentalité païenne voire juive, qui identifie les femmes au sexe, cette idée est le produit de l'idéologie catholique romaine, dans la continuité de laquelle s'inscrit l'éthique républicaine. Bien sûr il n'est plus question de vanter la chasteté des femmes, suivant la littérature cléricale la plus médiocre, mais plutôt l'indépendance sexuelle de la femme, aussi hypothétique que la chasteté féminine dans un monde régi par l'argent : ce changement ne tient qu'à des raisons économiques, et au fait qu'on ne capture pas les mouches avec du vinaigre.

    Enfin, à ceux qui ne sont pas convaincus par mon propos de la mise entre parenthèses de l'histoire au cours du XXe siècle (forcément provisoire), tous régimes politiques confondus, et l'aliénation religieuse que ce phénomène implique, j'aime bien en faire "la preuve par Cabu". En effet, je tiens ce caricaturiste pour le plus éloigné de la fabrique d'images pieuses, dites encore d'Epinal, à quoi l'art moderne s'applique au contraire, avec un scrupule religieux qui force parfois le rire, puisque Louis XIV en personne l'aurait trouvé beaucoup trop conventionnel pour l'agréer. Bien qu'abstraits et faits pour méduser le peuple, les jardins de Lenôtre sont une coupure moins grande entre la culture populaire et celle de l'élite que les colonnades tronquées de Buren.

    Bref, Cabu, tout en faisant une part bien moins grande à la religion et aux conventions, ne semble pas voir l'obscénité religieuse des valeurs républicaines qui l'environnent, un peu comme s'il ôtait ses oeillères pour dessiner, et faisait l'âne tout le reste du temps. Pire, il participe aux attaques contre l'islam, dont le principal objectif n'est pas d'attaquer l'islam, selon moi, mais d'affirmer la liberté d'expression, de la poser comme un dogme. Alors même qu'il est difficile de faire de la religion musulmane en France, autre chose qu'une contre-culture. Le besoin d'une contre-culture se fait sentir dans les jeunes générations, dès lors que le culte dominant ne donne plus satisfaction, c'est-à-dire qu'il ne joue plus son rôle rassurant. Comment peut-on faire passer les caricatures danoises de Mahomet pour une double manifestation de la liberté d'expression et de la critique religieuse ? La tactique ressemble à s'y méprendre à celle qui consiste pour les Etats-Unis à ménager la possibilité d'un "choc des cultures", manière moderne de prêcher la croisade, sous le couvert de l'étude sociologique. Il n'y a pas que la guerre qu'on prépare sous couvert de la paix, mais aussi la mobilisation générale, à quoi sert la culture.

    Si l'on veut comprendre pourquoi il n'y a pas de blasphème dans le christianisme, à tel point que Jésus et les apôtres sont traqués comme des blasphémateurs, la réponse est simple : il n'y a pas de culture chrétienne possible. Autrement dit le christianisme, contrairement à la plupart des religions ou des cultures, ne justifie pas le chrétien. Comme Job se plaignait à son dieu qu'il se montrait bien peu secourable et coopératif, comparé à d'autres dieux païens (sur le modèle desquels la Marianne du culte républicain est copiée), les chrétiens pourraient interroger leur dieu afin de savoir pourquoi il se manifeste aussi peu, par comparaison à la puissance nucléaire ou la sécurité sociale de tel ou tel Etat gigantesque, si la réponse n'était pas écrite noir sur blanc dans le nouveau testament, d'une manière qu'on peut résumer ainsi : ce qui nous rassure finit toujours par nous tuer.

    L'invincibilité de la religion et celle de la mort sont identiques. Défier la mort ou la religion revient au même. Le calme, le luxe et la volupté que promet la culture, n'ont jamais régné que dans les cimetières.

    Si le serpent figure la culture de vie païenne dans la Genèse, c'est-à-dire la religion, comme certains peintres de la Renaissance l'ont bien compris, c'est bien sûr qu'il ne peut pas exalter autre chose que l'éthique ou la vertu, principes les mieux faits pour éprouver la jouissance. Montrer le revers de la médaille (la rançon de la chute), aurait dissuadé Adam et Eve de se frotter à l'épreuve de l'incarnation. Quel médecin avouera à son patient qu'il ne fait que retarder le moment de sa mort, pour la raison la plus religieuse possible, c'est-à-dire parfaitement obscure.

    Si Samuel Johnson attribue l'invention du libéralisme au diable, c'est précisément parce que le libéralisme, sur le plan psychologique, inculque la culture de vie comme jamais auparavant aucune religion ne l'avait fait, persuadant ceux qui le subissent qu'ils sont déterminés par la vie, quand c'est dans un puissant mouvement macabre que l'économie libérale trouve son impulsion. Le libéralisme est con comme un toubib. Si le libéralisme a triomphé du nazisme et de l'empire soviétique, c'est pour la raison qu'il est un socialisme plus puissant, qui dissimule mieux les devoirs qu'il impose en échange des droits qu'il accorde. Mais Satan n'en demeure pas moins maître de ce genre de pacte.

  • Confirmation

    Confirmation dans un des documents retrouvés dans les grottes de Qumrân -attribués généralement à la secte juive des Esséniens, concurrente des Pharisiens, que l'arbre d'Adam et Eve est bien un figuier, et, partant, le fruit défendu une figue-, ce que je subodorais. Peut-être cela est-il confirmé ailleurs dans la peinture ?

    Cela soutient l'exégèse de Léon Bloy qui voit dans le figuier une métaphore de la religion juive, dont Jésus fait usage dans sa parabole. Comme quoi de l'étude de la nature ressort des matériaux plus intéressants que les branlements de calotins autour de la loi naturelle ou autres colifichets gothiques.