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darwinisme

  • D'Orwell à Simone Weil

    J'ai des scrupules à contredire feu Simon Leys, car il fut un des rares intellectuels français à ne pas boycotter Georges Orwell. Faire le procès de l'intelligentsia française (1950-2023) ne sert d'ailleurs à rien, car elle s'est condamnée elle-même à l'oubli.

    Contrairement à S. Leys, néanmoins, je crois que "1984" a valeur de bréviaire antitotalitaire, qu'il est conçu comme une arme de défense contre les intellectuels, pourvoyeurs de chair à canon pour le compte de Big Brother. Si Julian Assange avait lu "1984", il ne serait sans doute pas tombé dans le piège de la "Fraternité".

    Orwell définit la mentalité totalitaire de la façon la plus concise comme le dégoût de la vérité. Il y aurait de longs développements à faire pour compléter cette définition ; par exemple : par quoi la Vérité est-elle remplacée ? Réponse : l'Amour.

    Mais cette note porte plus spécialement sur les conséquences du totalitarisme sur la vérité scientifique. Orwell étant athée, on peut penser qu'il parle de vérité "scientifique" ou "philosophique", non comme un chrétien d'une vérité "révélée".

    Sur le plan scientifique, Darwin ou le darwinisme a entraîné un changement épistémologique important, puisque l'on a pu déduire de la thèse transformiste le concept de vérité ou de science "évolutive". Il est admis par certains scientifiques que ce qui est vrai ou scientifique en 2023 ne le sera pas forcément en 2030. Paradoxalement ce sont souvent les mêmes qui s'offusquent que l'on puisse critiquer la thèse transformiste - se demander par exemple si elle ne contient pas un biais anthropologique.

    Cette évolution épistémologique n'est pas à proprement parler "scientifique". On ne s'étendra pas ici sur la différence entre Darwin et le darwinisme ; il s'agit seulement de faire remarquer que la conception scientifique de la "vérité" n'est pas stable. Le darwinisme introduit aussi le hasard dans la science, hasard dont l'effet a toujours été reconnu dans le domaine technique, dans le même temps qu'il a toujours posé problème sur le plan scientifique. La découverte de la loi de gravitation par I. Newton "par hasard" relève de la légende dorée. C'est un pieux mensonge intéressant.

    On comprend en lisant "1984" que le régime de Big Brother est technocratique ; comme le régime totalitaire décrit par A. Huxley auparavant, il use de moyens techniques pour asseoir le gouvernement de quelques-uns sur la masse, sans qu'aucun scrupule moral ne l'arrête. Huxley a ainsi décrit les méthodes de la médecine nazie darwiniste avant que Hitler ne remporte les élections.

    Abordons maintenant un aspect de la mentalité totalitaire que Simone Weil s'est attachée à combattre. L'idée m'est venue d'en parler en constatant, lors de discussions sur les "réseaux sociaux", que cette mentalité assez couramment répandue, sous la forme du préjugé : Il n'y a aucun lien entre la morale/l'éthique et la science. Autrement dit, la science et l'éthique relèveraient de domaines séparés. J'avoue avoir été stupéfié en entendant une telle affirmation pour la première fois, et m'être demandé quel genre d'enseignement on pouvait avoir reçu, dans quelle école pour tenir des propos aussi aberrants ?

    De la thèse transformiste darwinienne, on a déduit diverses doctrines sociales darwinistes, qui sont autant de théories éthiques et politiques. L'éthique de la supériorité de la race aryenne est loin d'être le seul exemple. Il existe des versions économiques, communistes, et même une combinant racisme et féminisme, du darwinisme. On pourrait se demander si la conception contemporaine de l'élitisme n'est pas elle aussi marquée par le darwinisme. L'élitisme est encore une idée morale.

    Mais encore les religions antiques ont véhiculé des préceptes moraux reposant sur la médecine. Le jeûne, précepte répandu dans presque toutes les religions, a des bienfaits médicaux attestés depuis l'Antiquité.

    La psychanalyse n'a-t-elle pas un double caractère éthique et scientifique ?

    On pourrait multiplier les exemples.

    Un telle dissociation de la science et de l'éthique est aussi caractéristique de la mentalité totalitaire ; elle recoupe la critique de la physique quantique par Simone Weil. Celle-ci reproche en effet aux théoriciens de la physique quantique de produire une science arbitraire, ne permettant de fonder aucune éthique, par conséquent propice à la barbarie.

    Il s'agit de la part de S. Weil d'un reproche cartésien. Disons-le autrement : il n'y a plus de philosophie, mais seulement une rhétorique maquillée en philosophie, si la philosophie naturelle n'est plus qu'un empirisme débridé, produisant des moyens technologiques mal maîtrisés.

  • Darwinisme et bestialité

    Le darwinisme est un des dogmes de nos régimes technocratiques. Il est par conséquent difficile d'argumenter contre publiquement, de faire valoir certaines lacunes de la théorie ou de faire remarquer l'appui de tel ou tel régime totalitaire sur l'idéologie évolutionniste. On mesure ici l'état véritable de la liberté d'expression.

    La cruauté de l'industrie moderne vis-à-vis des animaux peut sembler paradoxale, compte tenu de la culture darwiniste du quidam moyen. Est-ce que le rapprochement de l'homme avec le singe ne devrait pas le rendre plus indulgent vis-à-vis des espèces quadrupèdes ?

    C'est méconnaître certains aspects sous-jacent du darwinisme ; d'abord le fait qu'elle est une théorie anthropocentrée. L'intuition de Darwin est que l'homme est la finalité du processus biologique. Du point de vue de la science naturelle antique (Aristote, notamment), l'homme est aussi l'animal le plus doué de raison, ce qui assure sa supériorité sur les autres espèces ; mais l'homme est dépassé par des puissances cosmiques, tandis que le cosmos n'est du point de vue moderne qu'un territoire, un espace à conquérir.

    Si les conséquences du darwinisme sont désastreuses en termes d'éthique, c'est parce qu'il contribue à conforter le statut de démiurge de l'homme moderne. A l'homme moderne, tout est permis en théorie. Les élites modernes s'arrogent un droit extraordinaire sur la nature.

    Ici on voit d'ailleurs que la thèse de l'héritage grec est pure propagande, nazie, capitaliste ou démocrate-chrétienne, venant de régimes essentiellement technocratiques. La raison grecque n'est pas la raison moderne.

    Il est probable que la foi de l'Occident dans les capacités illimitées de l'homme - foi particulièrement dogmatique - signe son arrêt de mort.

    On ne peut s'empêcher ici de faire le rapprochement entre un arrêt aussi étrange de la civilisation et les mythes d'Adam & Eve ou de Prométhée, particulièrement riches d'enseignement sur la condition humaine, tandis que le darwinisme a eu pour conséquence de faire de la condition humaine... un hasard ou une chance.

     

  • Contre Kierkegaard

    Après avoir reçu une éducation catholique romaine, j'ai cessé de croire à la sainteté de la mission de l'Eglise romaine, persuadé que la plupart des catholiques romains adorent Satan sous le nom de "dieu", et que la parabole du figuier s'applique à cette Eglise dont le chef est à Rome.

    Je ne suis pas devenu "luthérien" ou "protestant" pour autant. Ou bien mon protestantisme se limite à rappeler que la fidélité à la parole divine, c'est-à-dire aux évangiles, prime pour un chrétien sur n'importe quelle autre espèce de fidélité.

    D'ailleurs le plus frappant pour un catholique romain qui lit Luther (j'en ai fait l'expérience), est à quel point celui-ci conserve un esprit clérical, typique du catholicisme romain. L'opposition du luthéranisme au catholicisme romain n'est pas nette, comme on l'entend dire parfois. Après tout, l'opposition au pape est si fréquente à l'intérieur de l'Eglise catholique même, depuis que cette Eglise a mis en place des tribunaux, que l'opposition de Luther ne revêt pas un caractère exceptionnel. Ce sont surtout les circonstances politiques qui furent exceptionnelles.

    Il faut ici bien comprendre ce qui fait l'esprit du catholicisme romain : c'est le caractère juridique de la doctrine catholique romaine. Dès lors que vous avez compris qu'aucune règle de droit n'a et ne peut avoir force universelle, vous ne pouvez plus demeurer dans le sein de l'Eglise catholique romaine. Shakespeare fournit ainsi l'exemple d'une opposition bien plus profonde que celle de Luther au catholicisme romain, en même temps qu'elle est beaucoup moins polémique, et donc moins flagrante pour le béotien.

    Contre le pasteur danois S. Kierkegaard, voici ce que nous pouvons dire : opposer la foi à la raison présente un risque de malentendu. La foi ne repose pas sur le même fondement que la raison ou la volonté, qui sont des phénomènes naturels. On peut prendre l'exemple des espèces animales, dont le comportement est parfaitement rationnel, en même temps que la volonté plus ferme encore que celle des hommes. Cependant les animaux n'entendent rien à la métaphysique (si l'hypothèse transformiste-darwiniste est nulle et non avenue du point de vue chrétien, c'est pour la raison qu'elle exclut la force métaphysique, contrairement à la science physique de savants plus éminents, pour qui la physique et la métaphysique coexistent dans l'univers). Pour élucider quelque peu la notion de "métaphysique", que cette dernière soit antique ou chrétienne, on peut la rapprocher de la notion "d'individualisme".

    Métaphysique et individualisme sont proscrits dans la culture totalitaire dite "moderne". Il y a une raison humaine à cela - mais comme on ne peut pas enfermer l'homme dans les limites de la raison -, la culture moderne est vouée à l'anéantissement - ce n'est qu'une question de temps.

    Mais revenons à Kierkegaard. La foi n'est pas la raison ; hélas, les spéculations de Kierkegaard tendent à rapprocher la foi de la folie, c'est-à-dire de l'ignorance de la philosophie naturelle. En cela, Kierkegaard est très moderne, suivant la caractéristique de la culture moderne qui consiste à remplacer quelque chose (la raison naturelle) par rien, tour de passe-passe où L'EGLISE CATHOLIQUE A JOUE UN RÔLE DECISIF. Il faut dire précisément : la philosophie médiévale ; mais comme l'Eglise romaine revendique cette philosophie bancale comme la pierre angulaire de son architecture doctrinale, on peut dire "l'Eglise romaine".

    Pour les chrétiens, la foi est une force supérieure à la raison. Le chrétien n'est pas un aliéné, privé du secours de la raison, un "masochiste" ainsi que le décrit l'antéchrist Nietzsche, non loin de décrire ici la morale kierkegaardienne. Le chrétien est un sage, qui connaît les limites de la raison et que celle-ci, en soi, est sans issue.

     

    Pas plus que la foi ne peut se définir comme le revers de la raison, la "vie intérieure" et les mouvements de l'âme ne sont les territoires ou le cadre de la foi chrétienne. Il s'agit là d'une casuistique entièrement platonicienne. Les évangiles ne permettent nullement de croire l'artifice intellectuel de la division de l'âme et du corps essentiel. La foi chrétienne, contrairement à la religion de Platon, ne va pas à l'encontre de la science. Il s'agit-là, de la part des moines du moyen-âge et de leurs délires théologiques, d'un emprunt aux mystères de l'ancienne religion égyptienne. Comme Kierkegaard reprend ces spéculations platoniciennes à son compte, on ne peut tenir sa philosophie pour chrétienne.

    En consacrant sur le plan juridique cette division, c'est-à-dire en limitant les effets de la foi et de la religion à la vie intérieure ou à l'intimité, l'évêque de Rome J. Ratzinger dans ses encycliques ne paraît pas s'apercevoir de la différence entre le christianisme et le bouddhisme - l'exigence scientifique du christianisme, et l'indifférence quasi-complète de cette dernière religion à l'égard de la science.

    La casuistique de J. Ratzinger est si débile que, non seulement elle est antichrétienne, mais de surcroît elle est même, sur le plan juridique seul, et de ses bénéfices en termes de vertu publique, facilement contestable. Quel païen, tenant d'une philosophie naturelle un tant soit peu sérieuse, osera prétendre que la foi est du domaine de l'intimité ? Aucun. Car ce serait comme prétendre que l'écologie est l'affaire de chacun, c'est-à-dire que chacun peut décider de ce qui est bon en matière de gestion des ressources naturelles.

    Que la foi chrétienne n'ait aucune implication politique et morale ne signifie pas qu'elle relève du domaine fictif de l'intimité. En revanche, l'enlisement catastrophique de la culture moderne dans la fiction vient de là : de la nécessité pour les élites bourgeoises chrétiennes de se justifier, ce que la parole divine leur interdit.

    Satan est derrière cette doctrine pontificale "la plus débile de tous les temps", présentée "urbi et orbi" sous l'apparence de la foi chrétienne.

      

  • Tout est sexuel

    Le fameux axiome de S. Freud est exemplaire de la mentalité germanique (il ne faut pas oublier que Freud est explicitement antisémite comme Nietzsche ; c'était, comme on a coutume de dire, un juif "assimilé", c'est-à-dire qu'il n'était pas juif au regard de la Bible).

    - Exemplaire aussi de la mentalité bornée de certains savants biologistes du XIXe siècle ; bien sûr il n'est pas difficile d'établir que le sentimentalisme n'est que l'illusion de l'amour, et qu'il est, lui aussi, enfermé dans le cadre biologique ; le sentimentalisme est la sexualité des impuissants sexuels ; mais le sentimentalisme n'en constitue pas moins une faiblesse ou une tare, du point de vue biologique, difficilement explicable par les lois de la biologie.

    - bien sûr l'hypothèse de l'évolutionnisme et du transformisme n'est pas loin, car pour avaler cette science peu expérimentale, il faut effectivement penser que "tout est sexuel", pour l'homme autant que pour l'animal.

    La psychanalyse et le darwinisme sont donc deux philosophies naturelles qui contribuent au totalitarisme et, contrairement à un préjugé répandu en France, la psychanalyse et le darwinisme sont très loin d'être des sciences "athées" ou même "anticléricales". La doctrine antichrétienne et néo-païenne de Nietzsche fournit ainsi peu d'appui au darwinisme. Dans de nombreux discours, le pape allemand Ratzinger a apporté sa caution à la psychanalyse, quand bien même la drogue et l'alcoolisme ravagent les Etats-Unis, nation la moins suspicieuse dans le caractère véritablement scientifique de la psychanalyse.

    Il est important pour les authentiques juifs ou chrétiens, au contraire de la racaille des faux témoins soi-disant "judéo-chrétiens", de se démarquer de la psychanalyse, morale néo-païenne adaptée à nos régimes technocratiques, et par conséquent peu dissuasive contre l'aliénation de l'individu à des systèmes grégaires technocratiques.

    Si l'idée de "liberté sexuelle" est répandue par le clergé dans les régimes totalitaires libéraux, c'est précisément parce qu'il n'y a pas de liberté sur le terrain sexuel ou biologique, et que c'est une méthode efficace pour faire obstacle à la liberté d'inciter à la chercher là où elle n'est pas.

     

  • Démocratie et darwinisme

    L'esprit français est, selon moi, le moins propice à accepter la science évolutionniste comme une science. Pourquoi ? Parce que l'esprit français est le plus apte à discerner le caractère religieux du mobile démocratique, appuyé sur l'intellect le plus subjectif.

    La démocratie n'a même pas une consistance républicaine, puisque le régime républicain est un régime élitiste - elle n'a qu'une consistance publicitaire. La démocratie n'est pas non plus populaire, puisqu'elle consiste dans la transposition sur le plan éthique de l'idée de monarchie de droit divin sur le plan politique. Le culte solaire en quoi consiste la philosophie naturelle tyrannique, est réduit dans la démocratie à un culte dématérialisé sous la forme de la vitesse de la lumière. "L'Etat, c'est moi." : le mot de Louis XIV est mal traduit comme l'étalage d'un pouvoir tyrannique sans partage. Plus justement il constitue l'acte de décès du culte solaire direct en Occident, dont le roi soleil s'est fait l'artisan le plus actif. Car après Louis XIV, le souverain, y compris sous la forme la moins désincarnée et largement symbolique de la magistrature suprême, n'est plus ou moins que le produit d'un calcul statistique. Le sursis dont a bénéficié Louis XV a probablement les mêmes causes que celui dont l'oligarchie bourgeoise parisienne bénéficie aujourd'hui. On peut filer la métaphore de Shakespeare selon laquelle les rois ne sont que les acteurs d'une tragédie dont ils ignorent le déroulement connu du seul metteur en scène (Satan), et dire que les états modernes sont le jouet d'une cinématographie, c'est-à-dire d'une pièce de théâtre dont le metteur en scène est mort. Le cinéma le moins débile - et qu'on me pince dès qu'on verra un film dans cette catégorie - est condamné à faire valoir l'ironie, non pas celle du destin mais de la statistique, à savoir que le cinéma est un art entièrement préfabriqué, qui en dehors du motif ironique qui a le don de le remettre en cause, ne consiste que dans la plus vaine recherche du temps perdu. Du point de vue vitaliste artistique, le cinéma est une nécromancie. Il est bien des artistes, comme Dali, à qui la mort procure une vague érection, mais ce motif de jouissance clitoridien est plus dans la mentalité d'une nonne espagnole que dans la mentalité française. Le cinéma français compte deux grands génies en la personne de Diderot ("Jacques le fataliste"), et surtout Alphonse Allais, le plus populaire et pur de cet élitisme, qui a tendance à raidir la mise en scène de Diderot.

    Qu'on me pardonne cette longue digression ; elle était afin de mieux faire valoir le point de vue anti-évolutionniste créationniste de Nitche, qui n'est pas chrétien puisqu'il est satanique, appuyé sur une science physique matérialiste. Tandis que la science évolutionniste jette un pont entre la science et la technocratie totalitaire moderne, la science physique matérialiste jette un pont entre la science et l'art. Ce qui fait soupçonner à Nitche que le darwinisme auquel il a affaire, plus rigoureux et rationaliste que celui auquel nous sommes confrontés aujourd'hui, n'est que la transposition sur le plan scientifique du préjugé de progrès social socialiste, c'est pour la raison que le mécanisme de l'évolution proposé par Darwin comme une hypothèse, est incompatible avec l'idée de Nitche selon laquelle l'accomplissement de l'homme n'est possible que selon le destin. En conséquence, du point de vue de la physique matérialiste, qui refuse à la statistique le statut de science, ce sont les espèces vivantes les plus douée de conscience qui sont les moins susceptibles de muter. La conscience supérieure attribuée par Nitche à l'homme, ne va pas sans le constat que l'homme est, de toutes les espèces la moins bien adaptée à la nature, quoique le sexe féminin soit doté d'un meilleur instinct naturel que le sexe masculin. La physique matérialiste ne situe pas l'homme au bout de la chaîne linéaire des espèces animales, mais généalogiquement au centre. Le transformisme est donc impossible selon le rationalisme matérialiste, dans lequel les espèces mutantes sont les plus éloignées de l'homme, dans lequel les mutations sociales humaines ne fournissent en rien la preuve d'un quelconque progrès de la conscience humaine, et dans laquelle, surtout, le mouvement hasardeux est le plus relatif, interdisant absolument le raisonnement scientifique qui ne peut lui accorder que le statut de marge d'erreur la plus insondable. Nitche témoigne d'un rationalisme qui part de l'ordonnancement naturel pour aller vers l'insondable. Pratiquement la démarche inverse rend toute forme de politique, d'art ou de science impossible. La science évolutionniste n'envisage pas ou peu que les mutations naturelles puissent être le résultat de bouleversements géologiques violents.

    La philosophie naturelle de Nitche lui permet de fonder d'ailleurs une morale naturelle objective, qui seule permet une hiérarchie sociale responsable ; de l'évolutionnisme on ne peut déduire qu'une morale relative et un principe de compétition illimité. Dans la doctrine de Nitche, la liberté est niée au profit de la responsabilité politique et de l'art ; dans le totalitarisme, la liberté est affirmée au profit de l'irresponsabilité politique et du commerce.

    L'artiste un tant soit peu conscient de ce qu'il fait, c'est-à-dire résolu à ne pas faire du moderne préfabriqué, comprendra d'ailleurs aisément le raisonnement anti-évolutionniste de Nitche. En effet l'activité artistique ne consiste pas dans la production d'objets plus consensuels ou mieux adaptés que ceux de la concurrence. C'est le jugement ou la conscience personnelle qui doit être, selon Nitche, sélective, afin d'échapper au conditionnement collectif le plus temporel. Si l'art ne permet pas, selon Nitche, d'échapper au temps, du moins est-il fait pour en desserrer le plus possible l'étau, et permettre ainsi la jouissance. Ainsi seulement l'art peut-il rayonner selon Nitche. L'animal, lui, ne tue, ne se bat, n'aime, ne construit que pour son profit personnel, celui de son espèce ou de sa progéniture ; le mâle dominant ne se retire du jeu social que lorsqu'il est frappé d'impuissance, tandis que c'est au contraire la puissance de l'artiste qui lui permet de s'extraire du mouvement social. Or la science évolutionniste réduit tous les actes à des comportements impersonnels ou identitaires. Ce que Nitche conçoit comme le plus indispensable à l'humanité, à savoir l'art, serait le plus nuisible aux autres espèces vivantes si elles en étaient capables. Ou bien on attribue à l'homme une conscience sans fondement dans la matière, suivant un raisonnement impossible à démontrer scientifiquement, ou bien la conscience de l'espèce humaine trouve comme celle des autres espèces vivantes son support dans la matière, et dans ce cas la science évolutionniste n'explique pas comment la matière peut susciter deux consciences aussi opposées que le combat de l'artiste contre lui-même, et la compétition sociale des animaux et des végétaux entre eux.

    L'erreur propre de Nitche est théologique ; aussi bien en ce qui concerne la théologie antique, d'ailleurs, qu'il résume à la théologie et à la cosmogonie brahmaniques, qu'en ce qui concerne la théologie chrétienne. Celle-ci n'est en aucun cas et ne peut pas être le postulat anthropologique de la liberté, n'en déplaise aux imbéciles philosophes-théologiens de l'école de Francfort. Nitche est fondé à qualifier une telle philosophie de totalitaire ; seulement aucune ligne des prophètes juifs ou chrétiens ne permet de déduire une telle philosophie.

    Etant donné que pas un seul promoteur du darwinisme ne peut s'empêcher de le promouvoir séparément d'incantations lyriques en faveur de la démocratie, on est fondé à en attendre la preuve dans les progrès futurs de la démocratie ou du socialisme, c'est-à-dire dans le sens inverse des ravages que ces politiques-fictions ont fait subir jusqu'ici à l'humanité. La remarque historique s'impose qu'aucune philosophie naturelle ne constitue une science à part entière. Il n'y a dans la correspondance de la morale et de la politique d'une part, et de la science physique d'autre part, qu'un simple renvoi d'ascenseur. Le rationalisme scientifique, aussi sérieux soit-il à l'exemple de Nitche, ne ferme pas la porte à la métaphysique parce qu'elle n'est pas scientifique, mais bien parce qu'elle l'est trop. 


     



  • L'Antéchrist Benoît XVI

    Je ne crois pas que le nombre de la bête (666) désigne une personne en particulier. Benoît XVI est plutôt le type de l'Allemand prédéterminé et fier de l'être, comme l'était Hitler auparavant, avec un excédent de bêtise de la part du pape par rapport au chancelier nazi, puisque Benoît XVI prêche la "culture de vie" (sic) au nom du christianisme, tandis qu'Hitler n'ignorait pas qu'elle est l'essence du paganisme.

    La doctrine sociale nazie est d'ailleurs plus cohérente et moins hypocrite que la doctrine sociale du pape actuel (libérale et faite pour justifier le patronat). La doctrine sociale nazie peut être analysée comme l'effort pour adapter l'éthique païenne au monde ouvrier. Son échec en tant que doctrine sociale résulte de la mondialisation des échanges commerciaux. Le darwinisme social libéral prolonge d'ailleurs l'idéologie nazie - il a la même fonction - et sa caution par la démocratie-chrétienne est à la fois un motif de stupéfaction et de scandale. Les chrétiens doivent se montrer absolument intransigeants avec cette race de vipères, comme le fut le christ Jésus avec les marchands du temple de Jérusalem.

    Or, je le dis aux artisans de paix, convaincus comme moi que la démocratie-chrétienne est l'axe du mal, c'est-à-dire qu'elle contient la méthode pour assassiner son prochain en se faisant passer pour un homme juste, le meilleur antidote contre la ruse démocrate-chrétienne est dans le christianisme lui-même, dans l'évangile qui permet la confusion des traîtres et nulle part ailleurs. Autrement dit il ne faut pas se moquer des démocrates-chrétiens, il faut être inflexible avec eux, et ceux dont la conscience n'est pas encore une poutre vermoulue (il y en a nécessairement) "craqueront" ; au lieu de se croire "élus de Dieu", ils verront qu'ils n'ont été que de petits oedipes, tyrannisant autrui et se tyrannisant eux-mêmes, en vertu de principes égyptiens auxquels Jésus et ses apôtres n'ont nulle part. L'évangile est très simple, tandis que la démocratie-chrétienne, elle, traduit la complexité du monde.

    - Contrairement à ce que prétend la philosophe nazie Hannah Arendt, la bestialité sociale n'est pas une chose banale ou naturelle, elle est entretenue par les élites modernes à l'aide d'un discours pseudo-scientifique ou pseudo-artistique, bien loin d'avoir été enterré avec Hitler.

    Du point de vue de la pensée française, il est impossible de différencier un Allemand d'une femme, en raison de leur manière systématique de se croire prédestinés, qu'ils ne remettent jamais en cause, et leur donne le même air mélancolique que les animaux domestiques, qu'ils tentent de faire passer pour la pénétration des choses naturelles, alors que ce sont les choses naturelles qui les pénétrent bien plus sûrement, l'Allemand n'émettant le plus souvent que des paradoxes. Depuis Voltaire, et sans doute plus longtemps, qui a heureusement choisi Leibnitz comme l'exemple de la bêtise humaine, centrale dans la tragédie et le génocide de l'homme par l'homme, on distingue le Français de l'Allemand à ce que les paradoxes qui font rire le premier, suscitent l'admiration dévote du second - l'art contemporain, par exemple.

    - C'est bien plutôt du côté de ce qui incline l'homme à se croire prédestiné et à raisonner ainsi comme une femme ou un Allemand, selon la raison et la foi qui découle de la biologie jusqu'à former la morale pure la plus insane, qu'il faut chercher la signification du nombre de la bête (666), plutôt que dans la désignation d'une personne morale précise. Ainsi cette enquête rejoindra la fable véridique de la Genèse et l'histoire de la chute du couple originel dans l'espace-temps ou le néant.