Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Lapinos - Page 159

  • Concours d'hypocrisie

    J’ai enregistré la dernière émission d’Ardisson. Elle n’a pas lieu en direct, de toutes façons. Je la regarde hier soir en rentrant du boulot, après m’être servi un verre de Sauterne. Isabelle m’a demandé de couper la télé vendredi alors que je m’apprêtais à regarder Tout le monde en parle. Elle ne supporte tout simplement pas le public [de bobos] qui applaudit, rit et chante sur commande derrière Ardisson. Complètement bobotomisés. On leur demanderait de montrer leur cul, ils le feraient volontiers pour passer à la télé. Elle a raison, c’est vrai qu’ils font pitié à voir.

    Concours d’hypocrisie entre Dieudonné et Ardisson, qui revient sur le sketche antisémite de “Dieudo” chez Fogiel. Ardisson, lui, choisit le camp du génocide juif bien sûr, c’est le plus sûr pour un animateur télé. Il dit “chambre à gaz” distinctement pour que tout le monde comprenne bien qu’il n’est pas révisionniste et qu’il ne ferait pas de mal à un Juif. Il fait semblant de pousser “Dieudo” à regretter. Mais on sent bien que le plus regrettable dans tout ça, pour Ardisson, c’est que Dieudonné ait fait ça CHEZ FOGIEL.

    Dieudonné, lui, va se mettre à l’abri dans le camp des gentils esclaves noirs exploités par les méchants esclavagistes blancs. Voilà nos deux compères mutuellement anihilés. Ils ne se départissent pas vraiment de leurs sourires cyniques. Dieudonné, qu’on le compare à Le Pen, il trouve ça même plutôt comique. Ce petit duel à fleurets mouchettés, ce match de catch sur fond de génocide juif et de traite des nègres devrait contribuer à faire grimper l’audimat de l’un et à remplir les salles où se produit l’autre.

  • Une pure militante

    Je fréquente le blogue d’Yris, 15 ans, qui raconte sa première sodomie : «J'aime tester, oh oui. Lick it out Honey, mhh I like it. Ooohh Sodomy how cool it is. Maintenant je fais tout ce qui se fait à deux. Je connais personne à 15 ans qui fait tout ça par choix. Ouuuhhh j’suis fière, fière. C'est tellement bien le sexe avec lui.»

    La sodomie, en soi, c'est très banal, même si c’est une pénétration marginale (parce qu’elle peut être salissante et laisser des séquelles). Bref, rien de bien nouveau sous le soleil du stupre. Et, à quinze ans, c’est normal d’être curieux, les mecs surtout le sont, mais Yrys a justement un côté garçon manqué.

    Ce qui me fascine plutôt, c’est la manière dont cette fille parle de tout ça, la sodomie en particulier et la baise en général. Je ne parle pas de cette façon un peu puérile de nous faire profiter de ses cours d’anglais. C’est une pure militante de la baise certifiée conforme par l'Éducation nationale et agréée par le ministère de la Jeunesse et des Sports. Je verrais bien cette devise en lettres d’or brodée sur sa culotte rouge : «Capote, Sodomie, Orgasme.» Je crois qu’elle ressemble beaucoup à ses parents communistes, dans le fond.

    Son mec - il s’appelle Vivien -, elle l'adore ! Plus exactement, elle pratique le culte de sa personnalité, c'est pas tout à fait pareil. Il est beau, intelligent, et, surtout : il baise comme un Dieu. Ça revient plusieurs fois, comme une antienne. D’ici qu’elle écrive une Ode à Vivien, comme Eluard pour Staline, il n’y a pas loin. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes quand elle enfourche son sexe.
    Le hic, c'est que ce militantisme sexuel est très égoïste. Les idéaux marxistes se sont retirés et il ne reste plus que la dialectique progressiste égalitaire et manichéenne, vieux préservatif percé. J’ai peur qu’Yrys ne finisse par piétiner son veau d'Or dès qu'il aura fini de bander pour elle.

    À part ça, je remarque qu’Yrys se distingue quand même un peu de ses semblables puisqu’elle est capable d’écrire plusieurs pages d’affilée sans faire de fautes d’orthographe.

  • L'esprit de famille

    L’esprit de famille, moi, c’est un truc qui m’épate. Il faut dire qu’à la maison, entre frères et sœurs, avec mes parents, on s’est toujours étripés sauvagement les uns les autres, pour un oui ou pour un non, pour avoir un peu plus de petit salé aux lentilles, pour savoir si Proust c’est vraiment chiant comme un goûter au Ritz ou pas, etc.

    Xavier Cantat, par exemple, même si c’est vraiment le type du petit-bourgeois très con qui connaît toutes les ritournelles de “Noir Désir” par cœur, eh bien je le trouve touchant quand il défend son frère. C’est touchant de l’entendre dire «Bertrand, il faut surtout pas que tu te suicides, d’abord parce que t’as deux enfants, en plus parce que ça servirait à rien, tu reverrais même pas Marie (Trintignant) de toute façon, parce que t’es pas croyant…»

    Cependant, c’est la famille Jospin qui décroche le pompon. Question esprit de famille, ils en connaissent un rayon. À part Monsieur Jospin père, bien sûr, nommé maire de son bled pendant l’Occupation, mais bon, il pouvait pas savoir, et Lionel a su pardonner.
    Inutile de redire l’abnégation du frère de Lionel, qui accepta d’endosser le passé lambertiste de son aîné, ni l’abnégation de Sylviane, qui sacrifia carrément quelques années de réflexion pour rédiger des tracts politiques et poser dans Match.

    Lionel, aujourd’hui, aimerait bien réintégrer le championnat ; face à Hollande et Sarkozy, ces béjaunes, il se dit qu’il a toutes ses chances. Pour une fois, on aurait une première dame de France capable de citer Derrida… Mais encore faut-il faire parler de soi ! Eh bien qu’à cela ne tienne, Madame Jospin mère se dévoue et met en scène sa “Fin de vie”, avec l’aide de sa fille. Noëlle Châtelet fait une piètre romancière de gauche, mais c’est une mélodramaturge tout à fait à la hauteur de l’enjeu. Un sketche très efficace, j’ai trouvé, reléguant la “fin de vie” de Madame Roger Quilliot au rang d’un suicide raté. Très sobre, très classe, très huguenot, très progressiste, vraiment les adjectifs ne manquent pas. Lionel peut se féliciter d’avoir eu une telle mère.

    Avec le physique qu’ils ont, je verrais bien Lionel et Noëlle incarner un couple de vampires modernes dans une comédie atroce et déjantée, comme les frères Coen savaient faire. C’est d’ailleurs très branché de faire tourner des hommes politiques. Mais le cinéma français n’a pas d’imagination. Et Lelouch de pleurnicher parce qu’il n’arrive plus à payer les pensions alimentaires de ses actrices fétiches… Lamentable !

  • Impossible métissage

    Je viens de me prendre un râteau. Un vrai.
    Quand on demande à une parfaite inconnue repérée dans la rue, dans une soirée, à la piscine, ou au Luxembourg, tout de go si elle peut pas vous faire une petite place dans son pieu pour la nuit, et qu’elle répond : «Non !», ça ne compte pas comme un râteau. Parce qu’il fallait s’y attendre.

    Petite parenthèse : c’est un truc d’ancien timide d’aborder les filles comme ça. Au début, c’était pour me soigner. Comme escalader la Tour Eiffel pour vaincre le vertige (jusqu’au premier étage seulement, après j’ai craqué).
    Le VRAI râteau, on ne le voit pas venir, on se promène dans l’herbe grasse à souhait, on fait la course avec les papillons, euphorique, et puis… bing ! on se prend le manche en pleine figure au moment où on s’y attend le moins.

    La fille, je l’ai repérée dans les douches à la piscine. Joli maillot bordeaux, et surtout, une paire de fesses et de jambes harmonieuses (un grain de beauté sur la fesse droite). Ressemblant à la Pandora d’Hugo Pratt, dans La balade de la Mer salée. La référence est un peu triviale, mais j’ai pas trouvé mieux. On se frôle dans le bassin, puis on cause un brasse coulée, papillon, crôle, tout ça. C’est ELLE qui m’invite à boire un verre après. Je biche. Facile… Trop ? Non, c’est jamais trop facile.

    Devant les mousses, la partie se complique. Car Pandora est ressortie sapée comme une bobo branchée de sa cabine. Et malgré ma tenue de camouflage, j’ai peur qu’elle me démasque : adieu galipettes, cochonneries, couvée, je pourrai aller fourrer mon nez ailleurs, ça ne fait pas un pli. Elle me pose beaucoup de questions. J’ai l’impression d’être le nègre blanc dans ce polar de Boris Vian que ma prof de français m’avait fait étudier en quatrième : J’irai cracher sur vos tombes. Le nègre qui séduit des poules blanches pour les sauter, les humilier, puis les buter. Y faut surtout pas qu’elles se rendent compte qu’il est noir, sinon la vengeance tombe à l’eau. Tout ce mic-mac rocambolesque afin de venger son frère assassiné par de sales blancs.

    Sauf que moi, j’ai pas tant de haine raciste, je veux juste baiser avec cette fille, la palper au chaud. Sa peau satinée m’excite. Elle doit sentir bon.

    On se quitte en bons termes. J’aurais dû la raccompagner. Aujourd’hui, je reçois ce courriel en réponse à une relance un peu audacieuse : «T'emballe pas Bonhomme, je ne suis pas en mesure d'être draguée, même si mon comportement pourrait faire penser le contraire.»
    Il sonne le glas du métissage entre une bobo et un lapinos.

  • J'accuse !

    Au sortir de ma migraine, je me suis plongé dans le feuilleton Raphaël Juldé. Celui-ci vient en effet de connaître un rebondissement spectaculaire à l’échelle des pannes d’ordinateur et autres excursions à la Médiapole de notre héros. Evidemment, je me sens concerné, je n’oublie pas que c’est à Juldé que je dois mon propre Journal, exutoire commode à ma haine des bobos, qui m’évite de devoir leur régler leur compte un par un.

    Juldé a donc été convoqué au commissariat de Laval, quelques petits commerçants cités dans son Journal en ligne n’ayant guère apprécié les portraits réalistes qu’il peint d’eux et déposé réclamation. Aucune diffamation ni atteinte sérieuse à la vie privée là-dedans, non, ce n’est pas le genre de Juldé, simplement les petits commerçants ont dans notre pays un pouvoir de nuisance invraisemblable, presque égal à celui des profs et des journalistes.

    Je suis déçu. Car Raphaël Juldé me paraît tout de même avoir manqué dans cette affaire d’un minimum de présence d’esprit. S’il m’avait consulté, je lui aurais conseillé de saisir la perche qu’on lui tendait, bien sûr. De transformer l’audition chez les flics en interpellation. Pour percer la croûte lavalloise et paraître enfin dans le monde des lettres, il pourrait payer un peu de sa personne ! Qu’on songe seulement au temps perdu tous les jours par Adrien Zeller à se coiffer ! On ne débarque pas comme ça un jour sur le plateau d’Ardisson à la seule force de son talent. Même Houellebecq, qui n’en n’est pas complètement dépourvu, sait faire le guignol quand il faut. Il me semble que quelques jours de cabane n’auraient pas été trop cher payer un peu de publicité.
    Et puis quelle erreur d’accepter de masquer les noms des plaignants. Ce qui est génial dans le Journal de Nabe, Juldé le sait bien, c’est son index pléthorique.

    Le moyen de se faire flanquer au trou quelques semaines, quelques mois ? Facile : d’abord Juldé aurait dû s’abstenir de répondre à la convocation des poulets. Mieux, les traiter tous sans distinction de «Sales SS !». C’est pas très original, j’en conviens, mais sacrément efficace. Combien de carrières artistiques ne seraient pas ce qu’elles sont, encore aujourd’hui, sans l’insulte aux flics ? D’autant que Juldé a toutes les qualités requises pour supporter la captivité. Il est érémiste, écrivain, et il peut se passer des femmes. Sûr que ses fans se seraient volontiers cotisés pour lui offrir un ordinateur portable afin qu'il puisse continuer la rédaction de son Journal en prison (la prison peut être une chance pour un écrivain, c'est Soljénitsyne lui-même qui l'affirme).

    J'accuse ! J'accuse donc Joseph Vebret, le conseiller littéraire de Juldé, bien au fait des mœurs "germanopratines", comme il dit, d'avoir fait preuve dans cette Affaire du plus pur amateurisme, voire de l'incompétence la plus totale. Je l'accuse même, et je pèse mes mots… de sabotage !

  • C'était une migraine !

    Ça me prend presque d’un coup en regardant Noëlle Châtelet l’autre soir à la télé. Des maux de tête. Je me masse les tempes comme un con en appuyant trop fort, et, dix minutes plus tard, la douleur devient difficile à supporter. C’est comme si ma cervelle s’était mise à mijoter doucement dans mon crâne-cocotte minute. Je coupe la télé, l’ordinateur, le téléphone, la lumière. Avec des gestes lents, très lents, les plus lents possibles, en fait, car le moindre mouvement, le moindre effort, et c’est une goutte supplémentaire dans ce lac de douleur, là-haut, dans ma tête.
    J’avale un cachet d’aspirine, sans conviction : j’aurais dû en mettre un peu plus, car le résultat est nul.
    Me traîne jusqu’à mon lit. J’y reste collé trois jours. Sans parler, sans manger.
    Je me lève quand même deux ou trois fois pour boire puis pour pisser. J’aimerais bien gueuler un peu de temps en temps pour me soulager, mais je sens bien que ça ne ferait qu’aggraver les choses.
    Envie de rien, ni de lire, ni de manger, ni de baiser, ni de prier. L’enfer, c’est de n’avoir plus envie de rien, même pas de mourir.

    C’était une migraine. Avec internet, plus besoin de toubib, on tape la liste des symptômes dans Google, et hop, le tour est joué. Ce qui m’a cloué sur place pendant trois jours, mon “affection”, comme ils disent, c’était une migraine ! J’aurais bien aimé un truc plus sophistiqué, mais ça sert à rien de se mentir… La migraine, ben mince, je pensais pas que ça pouvait durer aussi longtemps sans répit ! Jusqu’à 72 heures, lis-je sur internet. Suit la liste des “facteurs de risque” : je les avais tous ! Un sommeil décalé : ça faisait au moins deux ans que j’avais pas fait la grasse matinée. Le chocolat : je venais de m’en taper une demi-tablette. Le sevrage brutal du café : ça faisait trois jours que j’avais pété ma cafetière. Le stress : Noëlle Châtelet.
    La migraine, c’est vraiment “Aux petits écarts la grosse punition”. Et il n’y a pas de remède vraiment efficace.

  • L'enfance d'un sexe

    Ma vie sexuelle a commencé lorsque j’avais huit ans. J’ai gardé un point de repère précis. Mes parents m’avaient permis d’inviter trois copains, dont deux des quatre frères Chaland, Wilfried et Baudoin, à jouer autour du château. On pourchassait une bande d’Indiens imaginaire lorsqu’on est tombés en arrêt devant cette fille, derrière une grosse souche. C’était dans la pente raide plantée de sapins, sur le flanc ouest du château. Stoppés net dans notre élan, on s’est rattrapés les uns aux autres pour pas déraper sur les aiguilles glissantes.
    Assise, la fille, qui devait être Russe ou Tchèque, ouvrait les cuisses, pas du tout gênée d’exposer comme ça sa jolie motte frisée châtain clair en plein milieu de Penthouse magazine. Complètement à poil dans un manteau de fourrure moelleux de la même couleur, mais coiffée quand même d'un bonnet… Silence quasi-religieux des moutards babas.
    Après un examen balistique sommaire, nous conclûmes que quelqu’un avait dû se débarrasser en catastrophe de l'illustré conpromettant en le balançant par-dessus le grillage ceignant la propriété. Un chemin étroit en surplomb descendait en pente douce du bourg jusqu’à la plage. En tombant, le magazine s’était ouvert sur cette fille slave de joie.

    Le premier réflexe de Wilfried, il avait repris sa respiration le premier, fut de bouter le feu à la poupée russe avec son zippo. Il venait juste de repérer l’étoile rouge sur la chapka noire et n'était pas décidé à laisser passer un truc pareil ! À son âge, il connaissait les meilleurs pamphlets d’Hergé par cœur, bien sûr, à commencer par les "Soviets" !
    Son prénom exotique et sa pyromanie étaient ce que je préférais chez Wilfried, mais j’eus le réflexe, ce coup-là, de le dissuader d’aller au bout de son idée :
    « - T’es fou, Will, je lui dis, si ça fume mes parents vont radiner ! » Je suis désolé de donner ici de moi l’image d’un rabat-joie, mais c’est comme ça que les choses se passèrent. Nous enfouîmes délicatement sur place, sous une couche d’humus, la fille à poil.

    De ce jour, je ne fus plus tout à fait le même. Jamais j’avais croisé une fille d’une telle prestance - ni offrant de telles prestations. Mon mépris pour la gent féminine se nuança donc.
    Mais, en me refilant des goûts de luxe, elle retarda pas mal l’éclosion de mon sexe. Ce n’est qu’à dix-sept ans, en effet, que, désespéré de croiser un jour la Russe de Penthouse en chair et en os, je me décidai enfin à franchir le pas avec une Normande. Certes, elle avait aussi de longues jambes, mais elle ne les écartait pas avec autant de naturel. Déception. Je ne lui offris pas de manteau en vison.

    Le lendemain, je revins vérifier, seul, que la fille à scandale n’avait pas été découverte. Il n’avait pas plu et elle n’était pas souillée. Et le surlendemain encore jusqu’à la fin de l’été. Je ne tournai pas la page.

  • Le seul qui a du talent

    Impossible de faire comprendre à un collègue de travail (qui achète Le Monde), espèce de brute positiviste, qu’un logiciel de traduction ça ne sert à rien, que c’est un PUR ATTRAPE-COUILLON. C’est le genre de crétin à croire que Kasparoff a VRAIMENT été battu par une machine. «Certes, me dit-il, c’est pas encore tout à fait au point, mais c’est qu’une question de temps…».

    À force de traverser les saisons sans attraper une de ces grippes, bronchites ou autres courantes qui sèment l’apathie dans le métro parisien, je commence à me prendre pour le surhomme Nietzschéen. Je trouve même là un prétexte à mes tendances polygames, car cette immunité coïncide avec une activité sexuelle assez intense. Quand un frisson me parcourt l’échine. De mauvais augure, vu qu’il fait 35 degrés à l’ombre dans mon bureau, rapport aux bécanes qui pédalent dans la semoule. Je me mets à claquer des dents et ça me ramène à la précarité de ma condition de Lapinos.

    Heureuse inspiration ! Grâce au site de Vebret, je découvre le site de Nabe et ses deux galeries de portraits, les renégats d’un côté, Vebret en tête, et les amis de l’autre. C’est très drôle, très potache, ce truc. En un mot, nabien. Ça serait encore plus chouette si on pouvait passer d’une catégorie à l’autre. Dès que Juldé dirait du bien d’un bouquin de Nabe, hop, il marquerait des points et changerait de catégorie. Pour l’instant, Juldé fait partie des renégats. Et il a raison de dire que ça vaut mieux que de faire partie des amis. Dans un jeu comme ça, les “amis”, ça fait un peu lèche-cul, non ? D’autant que dans le lot des amis, il y a Sollers, face de rénégat s’il en est ! Normal aussi, quand on fait le grand écart comme Nabe entre les Prs Arveiller et Choron, d’avoir besoin de faire des listes pour s’y retrouver (ce serait faire de l’humour facile que de prétendre que ces deux-là se ressemblent beaucoup plus qu’il y paraît).
    Un petit regret quand même, lorsque je vois le nombre de potes que Nabe s’est fait à Charlie-Hebdo, que n’y figure pas le seul qui a du talent, je veux parler de Cabu bien sûr.

    Charlie-Hebdo, la dernière fois que je l’ai ouvert, je me suis rendu compte que c’était devenu l’organe officiel du parti bobo. Sous l’impulsion de Philippe Val, champion pour mener sa barque dans le vent. Il en vend environ 60000 exemplaires par semaine, chapeau bas ! Récemment, Johan Sfar et Riad Sattouf ont été enrôlés, y manque plus que Titeuf et Trondheim ! Riad Sattouf, il est Syrien. C’est pratique, ça lui permet de dire leurs quatre vérités aux Arabes sans qu’on puisse le traiter de nazi. D’où des bédés nettement moins politiquement correctes que celles de ses comparses. J’ai bien aimé Le Pays de la soif, par exemple.

    Avec cette fièvre, je ne sais pas si je vais aller à la piscine ce soir relever mes filets.

  • Le cœur au bord des lèvres

    Loin de moi l’idée, en feuilletant l’Abécédaire Schopenhauer, d’apporter de l’eau au moulin de la germanophobie ambiante. Non, je ne mange pas de ce pain-là, mais il est certain que quelqu’un qui bâtirait toute une théorie sur l’épaisseur de l'esprit germanique trouverait dans ce bouquin matière à l’étayer.
    Certaines “entrées” ont en effet de quoi faire ricaner :
    PHILOSOPHER : «Pour philosopher, les deux premières conditions sont celles-ci : premièrement, qu’on aie le courage de se poser toutes les questions ; et deuxièmement, qu’on prenne clairement conscience de tout ce qui va sans dire pour en faire un problème (P II, par. 3,4)»
    Ça en dit long sur la hauteur de vues de Schopenhauer. Je ne m’y connais guère, mais je comprendrais qu’on prenne Bergson à côté pour un extra-lucide.

    Celle-ci n’est pas mal non plus, sur KANT :
    «Kant est peut-être l’esprit le plus original que la nature ait jamais produit (PI, 181)», quand on la rapproche avec : «Nous connaissons les choses non pas comme elles sont en soi, mais seulement comme elles apparaissent. Voilà la grande leçon du philosophe Kant (PII, par. 30,47).» Bigre.
    Et je referme l’Abécédaire, sans regretter de m’être contenté, pour toute formation philosophique, de lire les Fables de La Fontaine.

    Jongler avec des concepts, c’est plutôt lassant à la longue, quand il y en a pas un qui vient choir lamentablement, entraînant tous les autres. Tandis que l’Histoire, ça c’est une école de précision ! C’est plein de détails avec lesquels on ne triche pas impunément. Aussi Simone Veil a-t-elle su capter mon attention. Avec un petit livre-interviou, dans lequel Madame le Ministre revient sur son engagement féministe en faveur de la libéralisation de l’avortement. La loi Veil fut votée en 1975, sous Giscard, elle raconte dans quel contexte. Prenant son témoignage à la barre de l’Histoire contemporaine au sérieux, je relève quelques lignes assez édifiantes.

    A la question : « L’Eglise a-t-elle constitué un obstacle majeur ? », Simone Veil répond : « Beaucoup moins qu’on aurait pu le craindre. Elle aurait pu être beaucoup plus agressive, mais sans doute a-t-elle senti qu’une réforme était inévitable et que, plutôt que de s’y opposer par principe, il valait mieux insister sur quelques points qui lui tenaient à cœur. Il est vraisemblable qu’un pape comme Jean-Paul II, qui intervient très souvent sur cette question, aurait montré plus d’intransigeance que Paul VI et fait davantage pression sur les catholiques français (…) quant aux rabbins, ils étaient je pense plutôt hostiles, mais ils ne sont pas intervenus et je n’ai jamais eu aucune démarche de leur part. »

    De toute évidence, Simone Veil fournit là à l’Eglise de France un motif de repentance en béton, lorsque celle-ci aura épuisé les autres. 200000 avortements par an en France, cela fait qu’on approchera les six millions en 2005. Ces calculs vertigineux peuvent peut-être laisser insensible quelqu’un qui n’aurait pas vu un “amas de cellules” de quelques semaines se tordre de douleur pendant qu’on s’acharne à lui broyer le crâne avec une pince. Moi pas, je suis sans doute trop émotif.
    A part ça, la ministre se souvient d’avoir été chahutée à l’époque par deux ou trois députés forts en gueule, oublieux de la plus élémentaire galanterie. Les députés Feit et Hammel ont ainsi sorti chacun un magnétophone pour faire entendre dans l’hémicycle les battements de cœur d’un fœtus, dénonçant un “génocide légal”.
    Mais la question la plus insolente fut posée par Jean-Marie Daillet, qui lui demanda si elle accepterait de jeter les embryons au four crématoire. Là-dessus, indignation de Simone Veil, qui rappelle à ceux qui ne le sauraient pas qu’elle est d’origine juive et tout ça… Justement, elle va quand même pas nier l’existence des fours crématoires !?

    Bon, j’espère ne pas avoir trop perturbé votre digestion. Pour ma part, j’ai le cœur au bord des lèvres.

  • Le Palindrome divers

    Il n’y a pas de discipline plus noble que le pastiche. On s’y exerçait au lycée du temps où celui-ci n’engendrait pas que de moroses paraphraseurs voués au Prix Interallié, pour prendre un exemple récent (Beigbeder, lui, au moins, a une “gueule” - et c’est important quand on fait de la figuration, curieuse erreur de casting du jury que ce Zeller qui ne ressemble à rien…).

    Peut-on vraiment comprendre Gréco tant qu'on n'a pas copié un des ses tableaux ? Vous me pardonnerez ce ton de professeur de littérature à Sciences-po pour parler pastiche, mais on aurait tort de prendre cet art à la légère.
    Les règles en sont strictes. La recette exige avant tout d'assaisonner un écrivain de talent. Inutile de s’attaquer à Chloé Delaume, Amélie Nothomb, Yann Moix, ou autre Jean-Christophe Grangé, ils ne résisteraient pas à ce traitement : comment ferait-on la différence entre l’original et la caricature ? Jourde et Naulleau, faute de pouvoir pasticher Sollers, Angot ou BHL, ont dû se contenter de s’amuser avec leurs tics et leurs trucs.

    Je reviens juste du Palindrome, ubuesque mais téméraire blogue qui publie des pamphlets de L.-F. Céline en faisant fi de l’indifférence générale pour la littérature (et de Lucette), où Raphaël Juldé et ses amis s’amusent aussi à pasticher Dantec (le mérite-t-il ?).
    J'espère au moins qu’avant de s'atteler à la tâche, ces lascars ont invoqué les mânes du grand, du sublime Georges Fourest.

    «Moi je voudrais que tout le monde,
    connût sa "Négresse blonde"
    et malheureusement (je le sais) il est encore
    des tas de gens qui l’ignorent.
    Il n’est pas de ces littérateurs
    qui encaissèrent de forts droits d’auteurs.»

  • Passage des troupes en revue

    Il y a les hussards, Nimier, Déon, Laurent, Blondin, écrivant debout, j’ai envie de dire “droit dans leurs bottes”, mais l’expression a été galvaudée, impatients d’en finir avec les charmes chancelants d’une époque scélérate.
    Il y a ceux qui préféreraient être des spahis dans le désert, comme Patrick Besson.

    Et puis il y a les zouaves. Hier soir, n’ayant plus après une journée harassante d’autre désir que celui d’allumer la télé et de m’affaler devant, j’ai pu admirer la belle charge du zouave Tillinac dans la petite arène de Franck-Olivier Giesbert. Pontifical, le zouave, ça va de soi. On le sentait piaffer à la seule évocation des fumées de Mai 68, et, dès que le signal fut donné, il n’attendit pas pour fondre sur Wolinski, Philippe Val et François Hollande, bousculant cézigues comme un possédé. Surpris par tant de hargne sur un plateau de télévision, par ce piétinement sauvage d’éthique médiatique, les trois compères se débandèrent, rougissant et balbutiant ; oubliant même de traiter de nazi ce zouave. C'était quand même la moindre des choses de la part d’un dialecticien de la trempe de Philippe Val ! Excitée par l’odeur de poudre, Elisabeth Lévy, flanquée d’une blonde dont je n’ai pas bien compris l’usage, portait ensuite le coup de grâce aux ex-révolutionnaires.

    Comme Jacques Chirac son maître, Tillinac a des idées simples, des goûts contestables et des idéaux à la portée de tout le monde, mais mâtin quel cador !

  • L'effet Goncourt

    L’effet Goncourt, c’est que je n’aurais jamais eu envie d’ouvrir Le Soleil des Scorta s’il n’avait eu le Prix Goncourt, Laurent Gaudé.
    Ça ne change pas grand-chose puisque je l’ai vite refermé. « C’était bien lui. Elle l’observait comme on fixe le destin dans les yeux. Elle lui appartenait déjà. Il n’y avait pas à lutter. Elle lui appartenait. Puisque après quinze ans il était revenu et avait frappé à la porte, peu importe ce qu’il lui demanderait, elle donnerait. Elle consentirait, là, sur le pas de sa porte, elle consentirait à tout. » Que voulez-vous, convenez que quand on lit ça, on croit avoir affaire à un pastiche (de Guy des Cars).
    Quand on lit ça, on n’a rien lu, et pourtant, c’est comme si on avait tout lu de Laurent Gaudé.

    Mais peu importe le Gaudé, car c’est de critique et de Goncourt que je veux parler.
    C’est la mode de dire que la critique est facile. Si on le répète autant, c’est que justement c’est pas vrai. La critique, c’est un art en péril aujourd’hui. Elle est mourante, la critique, même s’il reste des critiques bien nourris et en bonne santé, des tas.

    Tenez, Assouline, par exemple, capable parfois de touchants élans de sincérité, eh bien lui aussi se sent obligé de nous seriner l’antienne des jurés Goncourt repentis (sur son blogue). Mais ça ne prend pas. Les jurés Goncourt font plutôt penser à de vieilles putes ratatinées qui essaient de s’acheter une conduite. Leur influence s’est réduite ces dernières années, comme peau de chagrin. Le Goncourt, qui n’a jamais été un gage de qualité, n’est même plus un gage de quantité ! En élisant Gaudé, qui a déjà vendu 80000 exemplaires de son roman de gare, ils se sont mis à l’abri de ce genre de remarque ironique, voilà tout. C'est qu'il y a de la concurrence entre les jurys, on digère moins peinard chez Drouant qu'autrefois.

    Quant à Patrick Besson, dont je gage, avant même de l’avoir parcouru, que le dernier recueil de chroniques paru (Solderie) est un meilleur remède pour l’esprit que tous les Goncourt - mettons de ces cinquantes dernières années -, c'est presque le dernier à tenter de jouer le jeu de la critique.

    Regardez-le bien, c’est un mec costaud et habile, Patrick Besson. À mon avis, il préfigure ce que devra être le critique post-moderne s’il veut survivre dans cette jungle, trancher la tête au crotale Savigneau d’un revers de plume, écraser du talon l’aspic Nourrissier, fendre le crâne du bœuf Durand : un mec costaud, du ciboulot comme du biceps, un vrai Rambo des lettres, d’origine yougoslave si possible, ça impressionne l’adversaire.

  • Pour qui sonnent ces gars ?

    Sans tambours ni journalistes, c’est au son de la trompette que le cercueil d’Alain Fournier remonte la très gothique nef de St-Eugène. Un ange passe entre les poteaux d’ADG, un peu intimidés par toutes ces fleurs de lys, et que l’encens saoule visiblement. Coquetèle détonnant de baccantes patibulaires et de veuves éplorées, de costards-cravates et de blousons noirs de circonstance. Ici quelque kangourou se cache sous une casquette et des ray-bans yanquis, et là un vieux dur-à-cuire médite au garde-à-vous, près d’un chouan de Paname, portant une bannière frappée du Sacré-Cœur. «Rillettes et rillons, ne rions plus». Un de la Noire, représentant la boutique Gallimard, en manteau d’alpaga crème, se pince pour y croire.

    Même le curé, ancien de la Royale, met de l’argot dans son latin pour mieux se faire entendre de ses ouailles endeuillées ; il prêche que «La Providence et la Vierge Marie sont de mèche toutes les deux». «Alain Fournier est nu à l’entrée de la salle du trône. Nous avons le pouvoir, nous, les vivants, de prendre la défense des morts par nos prières !»
    Des chœurs plutôt couillus prennent le relais : «Plus près de toi, Mon Dieu, Quand sous l'effort je ploie, Quand sombre toute joie, J'espère en Toi, mon Dieu…»

    Retour d’ADG à Véretz l’après-midi, pour y reposer en paix près de son pépère. Les aminches partageront le pain et le fromage, arrosés d’un petit verre de Montlouis.

  • Pour venger A.D.G.

    La République des livres, c’est le nom du blogue de Pierre Assouline. Qui se fend d’un hommage appuyé à ADG. C’est devenu tellement rare, un homme du Monde qui sort des beaux quartiers et traverse la ligne de démarcation pour aller s’encanailler dans les faubourgs du polar réac, au risque de se mettre dans de beaux draps, que j’émets un petit sifflement d’admiration…

    Je ne sais trop quoi en penser, que la moustache d’Assouline cache un Tintin de gauche ? En moins naïf, tout de même, car quelques messages compromettants ont été effacés du blogue par ses soins (à moins qu’Assouline ait une secrétaire particulière ?).

    Pour parer à une éventuelle censure, donc, je prends la liberté de reproduire ici de larges extraits de l’hommage d’Assouline.

    Pierre Assouline : « ADG a passé l'arme à gauche. À 56 ans, des suites d'une longue maladie. L'écrivain était déjà un peu mort depuis son exil de dix ans en Nouvelle-Calédonie. Son retour n'avait pas vraiment convaincu. L'éloignement, le divorce, la dépression lui avaient fait perdre la main.

    Nul doute qu'on va voir fleurir l'épithète “facho” dans les nécrologies. C'est vrai qu'il était bien vu du côté du Front National [à ne pas confondre avec le côté de chez Swann] et qu'il avait publié nombre d'articles dans Minute et Rivarol. Mais pour être tout à fait sincère, quand je lis ses livres, je m'en tape. Avec Jean-Patrick Manchette, il incarnait le néo-polar des années 70 made in Série Noire estampillé Gallimard (…).

    ADG [pour Alain Dreux Galloux], qui adorait le pastiche, la parodie, la provocation et l'autodérision, se considérait plutôt comme un anarchiste de droite, y compris dans ses romans [?].
    La divine surprise, La nuit des grands chiens malades, Juste un rigolo, La marche truque, Je suis un roman noir se relisent avec la même saveur qu'au premier jour (…).

    Son héros étant affublé d'un nom imprononçable pour un tourangeau, il l'appelait “Machin”. Fournier était son vrai nom à lui. Ses parents lui ayant fait le sale coup de le prénommer Alain, il prit très tôt en grippe
    Le grand Meaulnes et son auteur. D'où ADG. Et son discret chef-d’œuvre au rythme, à l'atmosphère et à l'humour indécalquables : Le grand môme... »

    Assouline oublie dans sa biblio express d’Alain Fournier ce qui est sans doute son meilleur polar, à conseiller à ceux qui ignorent tout d'Alain Camille (un autre pseudo) : Pour venger pépère. ADG a raté la gloire de peu, avec Quelques Messieurs trop tranquilles, adapté par Lautner de La nuit des grands chiens malades, avec une belle brochette d'acteurs, mais qui fut un bide.

    Il oublie aussi de dire qu'ADG a travaillé à Pilote, comme Cabu, Fred, etc. Je dis ça pour souligner l'évolution rapide des mœurs. Car aujourd'hui, ce mélange des genres au sein d'une même rédaction ferait scandale.
    Autre motif de soulagement pour les adjudants de la pensée : ADG a payé pour ses fréquentations inconvenantes. La Série Noire, à qui il avait fait gagner beaucoup d'oseille pourtant, à ses débuts, s'est abstenue consciencieusement de rééditer ses polars pendant près de trente ans, malgré la demande. Il s’en plaignait car il ne roulait pas sur l’or.

  • Comment peut-on être Yanki ?

    Le Vengeur fou du Texas a succédé à l’Ogre de Saint-Cloud dans les cauchemars des Français qui aiment bien se faire peur. Et, après tout, plus on est confortablement lové dans un canapé chiné chez Habitat, à regarder Arte en sirotant un thé Mariage-Frères, plus on a besoin de se faire peur, c’est logique. D’ailleurs, c’est NA-TU-REL de se faire peur. Quel enfant ne frissonne-t-il pas, mélange d’angoisse et de plaisir, à l’évocation du Capitaine Crochet, de Cruella, de Rastapopoulos, de Dracula, d’Olrik ou de Shere Khan ?

    Quel sondage sans appel pour George Bush que celui que j’ai improvisé à la sortie d’une soirée Gloubi Boulga au Grand Rex il y a quelques jours, alors que je flânais nonchalamment dans les parages, entre chien et loup, voulant profiter d’une des dernières douces soirées de l’année. Seulement 3 % des personnes interrogées m’ont déclaré qu’elles voteraient pour George Bush aux élections américaines !! Si elles pouvaient, bien sûr. Car, faut-il le rappeler, malgré la brillante lignée de philosophes qui ont précédé Bernard-Henri Lévy, malgré la quasi-absence de rides sur le front de Catherine Deneuve, malgré la noblesse de notre attitude au cours de la dernière guerre mondiale, quand, l’effet de surprise passé, nous bottâmes vigoureusement le cul aux Boches jusqu’à ce qu’ils repassent la frontière à toute berzingue, eh bien malgré tout ça les Américains devront se passer de notre avis et choisir tout seuls entre un brillant diplômé de Yale à la dentition impeccable et un plouc texan à peine remis d'un alcoolisme chronique.

    Peu de chance qu’ils se trompent, me direz-vous. Sauf qu’avec les Américains, cow-boys crédules élevés aux OGM, on ne sait jamais. Un journaliste américain rendait hommage l’autre jour dans notre langue à l’intelligence des Français, sur je ne sais plus quelle chaîne publique. La différence entre les Américains et les Français affirmait-il, c’est que les Américains croient d’abord en Dieu, tandis que les Français croient d’abord en l’Etat. Soyons un peu sérieux deux minutes : Kerry aurait sans doute mené à peu près la même politique stratégico-économique que Bush à sa place, peut-être aurait-il fait un peu mieux stratégiquement et un peu moins bien économiquement… qui sait ? Là n’est pas le problème, de toutes façons. Car J.F. Kennedy, lui, a eu beau enfoncer l’Amérique dans la guerre du Vietnam, où on brûlait au napalm des villages entiers, ce qui relègue la guerre d’Irak au rang de vulgaire expédition punitive, ça ne l’empêche pas d’être un Président très sympa aux yeux des Français (sa femme avait d’ailleurs des origines françaises).
    Non, le véritable problème c’est que Bush mange des bretzels en regardant la télé, et que les bretzels, qui est-ce qui les a inventés, à votre avis ? Les Allemands !! Ça ne vous fait pas penser à un autre méchant célèbre…

    Le Vengeur Fou du Texas, l’Ogre de Saint-Cloud… Et le Grand Prophète Kamikaze, me direz-vous ? Ce qui ne colle pas avec Ben Laden, pour en faire un méchant crédible, si vous voulez mon avis, c’est qu’il est Arabe et qu’il porte une chemise des mille-et-une nuits. Ça bouleverse trop les lois du genre.

  • Pour une nouvelle critique

    Ça fait beau temps déjà que le Nouveau Roman a été relégué au rayon des vieux accessoires de mode. Il ne laisse plus guère baba que quelques bobos imbus, sans vouloir faire mon dada. Alain Robbe-Grillet, à 81 ans, posa délicatement ses fesses dans le confortable fauteuil de Maurice Rheims à l’Académie française. Elle, se joue des modes. Point à la ligne.

    Je ne peux m’empêcher néanmoins de feuilleter le Journal de Catherine Robbe-Grillet. On dit que les contraires s’attirent, alors qui sait, peut-être la femme d’Alain est-elle lisible ? Ce journal ne dépasse pas l’horizon de leurs premières années de mariage. Catherine a recopié quelques cahiers qu’elle remplissait avec soin quand elle était quasi-jeune fille. La vie d’une lesbienne modérée accouplée à un bandemou sado est assez dépourvue de péripéties, tout compte fait. Trop de remous noient le bourgeois… Et son Nouveau Roman ?
    «Il pourrait rester des heures entières, allongé sur son lit à regarder les mouches voler au plafond, occupation pour laquelle il est très doué. Mais comme cela lui donne mauvaise conscience, il ne s’abandonne pas trop à ce genre d’exercice, quoi qu’il affirme que c’est dans ces moments d’inactivité complète qu’il fait ses romans, ce que je n’ai jamais essayé de contester.» Nous dit Catherine à propose d’Alain, et tout s’éclairçit.

    J’aime le charme post-soixante-huitard de cette note de bas de page : «Alain me disait hier qu’il plaisait aux pédérastes (1), qu’il avait eu des propositions non déguisée de L.-P. Q., de M.S. et de C.B.»

    (1) Maintenant on dirait plutôt “homosexuels”.

  • GRAND JEU CONCOURS

    À peine lancée, Pink-TV est déjà dans la merde. D’abord Pink-TV ne trouve pas de films pornos lesbiens à programmer, car c’est un genre qui n’existe presque pas (sans déconner ?). Hélas, pour ça, je ne peux pas faire grand-chose. Je n’ai même pas besoin de films pornos pour être excité, c’est dire mon inexpérience.

    Ensuite, Pink-TV n’a pas de slogan… Ou plutôt si, elle en a un, mais il est nul : « PINK-TV, LA LIBERTÉ, ÇA SE REGARDE ». Pour des gays, toujours à la pointe du bon goût et du raffinement, c’est un peu éculé comme devise quand même, non ? D’où l’idée que j’ai de ce grand jeu-concours, que je lance aujourd’hui, avec un gros saucisson sec bio à gagner à la clef : «Donnons un slogan (digne de ce nom) à Pink TV !»

    Propositions de slogans branchés :

    «Pink-TV, la télé sans fil (désolé)» (M.)

    «C'est quand tu recevras la facture que tu sauras vraiment qui sont les enculés...» (Laurent Ruquier)

    «Pink-TV : La Gaule aux Pédés !» (J. Lang)

    «Pink-TV, la chaîne des gens différents qui aiment les gens pareils» (Lingane)

    «Constiped today ? Watch Pink-TV !» (Rocco)

  • Eros et Lapinos

    Je sais pas si c’est la grisaille ou quoi, mais j’ai davantage le nez dans le journal en ce moment, à lire les gros titres, que l’œil au ras de la page à reluquer les filles. Méconnaissable, je suis. Victime aussi d’un phénomène curieux. D'une de ces lois injustes de la nature qui veut que plus vous êtes aimé, plus on vous adore. En ce moment, je n’ai qu’à me baisser pour les ramasser, les filles. Un peu de calcul : j’ai prolongé mon bail chez Isabelle, malgré le retour promptu de son mec de Lisbonne. Officiellement parce que mademoiselle ne se satisfait pas d’un homme harassé par un turbin aussi lucratif qu’inintéressant. Officieusement, parce qu’elle voudrait bien qu’il se décide à lui passer la bague au doigt. La concurrence peut inciter un homme de pouvoir tel que Philippe à se décider plus vite.

    Où en étais-je ? Ah, oui, il y a Diane, besogne à temps partiel, elle aussi, mais qui s’avère de plus en plus gourmande. Avant-hier, sous prétexte que je lui avais fait une remarque désobligeante sur sa tenue vestimentaire – en réalité un compliment déguisé –, elle m’attendait à la sortie du boulot, en jupe courte et porte-jarretelles, avec un petit bibi rose sur la tête. Je l’avais à peine reconnue et prise par le bras pour l’escorter vers un arrondissement plus hospitalier qu’elle me susurrait déjà des mots cochons à l’oreille.

    La dernière en date, c’est un modèle charmant, de l’Académie de peinture simpliste (APS), fondée l’année dernière avec quelques nostalgiques du Beau. Après deux heures passées à épouser fidèlement ses pleins et ses déliés émouvants, ramassé mes cliques et mes claques et balayé un peu la sciure, je m’en vais par la rue des Martyrs vers de nouvelles aventures (sous l’œil bienveillant des mânes de Géricault et de Chassériau), en sifflotant gaiement, pas mécontent d’un de mes croquis, quand ce modèle me met le grappin dessus et m’entraîne chez lui, c’est charmant mais un peu sombre, sous prétexte de poser rien que pour moi. Finalement, c’est moi qui pose pour elle, car elle manie assez bien le pinceau elle aussi. À moitié nu seulement, car je n’ai pas l’habitude. La séance est plutôt chaste, finalement, mais je gage que ce n’était pas la dernière, ni le point de vue final de notre relation toute fraîche.

    Un peu plus et je me plaindrais d’avoir des courbatures. Je me console en me disant que je passerai l’hiver au chaud, quoi qu’il arrive, sauf qu'il se peut bien qu’elles me filent toutes entre les jambes, jalouses les unes des autres, et que le cercle vertueux soit brisé. Curieux tout de même que mes yeux cernés d’homme comblé soient plus attirants que mes yeux brillants de fièvre après quelques jours d’abstinence.

    Il y a quinze ans, quand je matais les filles à la dérobée, mes roustons congestionnés s’entrechoquant douloureusement au moindre faux mouvement, j’étais loin de soupçonner une autre dure loi de la nature. Je me figurais alors que lorsqu’une de ces créatures dotées de toutes les vertus daignerait se pencher avec sollicitude et des gestes doux sur le nœud de mes problèmes, je connaîtrais enfin la sérénité, je pourrais m’adonner entièrement à des tâches plus spirituelles. Naïf que j’étais ! Plus on baise, plus on a envie de baiser, et inversement… Aujourd’hui, il n’y a que l’état de moine ou celui de lapin qui me paraît raisonnable. Et dans dix ans ? On verra bien.

  • Mon rapport sur l'antisémitisme

    Il y a d’abord eu l’affaire Marie-Léonie, brave fille qui, ne sachant trop comment attirer l’attention de son amant, simula sur elle une agression antisémite dans le RER.

    Le truc était assez grossier, mais les amateurs du genre ne peuvent s’empêcher de sursauter dès qu’une porte claque dans un film d’horreur, ainsi journaux et télés se jettèrent sur l’appât comme des morts de faim. Concert de cris d’orfraie. Depuis, Marie-Léonie s’est fait gourmander par Ivan Levaï chez Mireille Dumas, et, c’est promis, elle ne recommencera plus.

    Ensuite ce fut l’incendie criminel du centre social juif de la rue de La Roquette ; ça semblait plus sérieux, un officiel israélien fit même le tour des décombres, l’air grave. Il faut dire qu’il était écrit sur les murs : « Le monde sera plus pur quand il n'y aura plus de juifs. » Quand on découvrit que le coupable était le portier séfarade du centre, il fallut faire le deuil de tout antisémitisme, une fois encore ; ce n’était que de l’humour noir juif. La précision de l’origine séfarade du pyromane par les médias me laisse tout de même un peu songeur…

    Avant, il y eut “Phinéas”. Sous ce pseudo biblique se cachait un jeune homme dont l’éducateur regretta dans “Le Monde” qu’il n’ait pas su tirer meilleur profit de ses talents de graphiste, sans rire, bien sûr, car on ne rit pas dans “Le Monde”. Ce lascar peinturlurait de croix plus ou moins bien gammées les tombes du cimetière juif le plus proche. Mais, comme il ne se passe pas un week-end sans qu’une bande de gugusses désœuvrés ne vandalise un cimetière, qu’il soit juif ou chrétien, ça minimise un peu la portée du geste de ce Phinéas. En tout cas, grâce à la complaisance des journaux et des télés, Phinéas a obtenu enfin ce qu’il voulait, faire parler de lui, sans passer par “Koh Lanta” ni la “Star Academy”.

    Et puis, malgré tous leurs efforts, les enquêteurs n'ont toujours pas retrouvé ne serait-ce qu'un bout de l’ADN de Le Pen dans le cimetière de Carpentras.

    Comment n’en conclurerais-je pas que l’antisémitisme bat de l’aile ? Mais ne soyons pas inquiet, Dominique de Villepin se fait fort de rapiécer cette bannière effilochée pour la faire flotter de nouveau au sommet de la Chiraquie gaullienne !
    Pas mal occupé en ce moment à dédicacer son dernier livre (et à écrire le prochain, “Le Marabout et la Morue”, sur l’évolution de l’Islam en France), il a préféré envoyer Jean-Christophe Rufin se battre à sa place, le chargeant d’un rapport sur la "Lutte contre le racisme et l’antisémitisme", un vrai chantier, selon les propres termes du ministre-poète-chevalier. C’est très chic pour un homme politique, depuis Mitterrand et Orsenna, de se payer les services d’un larbin qui a obtenu le prix Goncourt. Jean-Christophe Rufin s’en est-il mieux tiré qu’un vulgaire préfet, fait-il moins de fautes d’orthographe dans son rapport que Luc Ferry naguère dans les siens ? That is the question…

  • Révisionnisme ?

    Je me réveille ce matin décidé à parler du révisionnisme et des révisionnistes sur mon blogue. Allez savoir pourquoi ? Mystères de la conscience, arcanes du cortex. À me colleter avec la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, en évitant les provocations inutiles et les faux-semblants. Quand soudain, j’entends une petite voix à l’intérieur de moi-même, une petite voix qui me dit : «Lapinos, Lapinos, tu es fou, tu te prends pour Tintin ou quoi ? Tu veux prendre des coups de bâtons comme Faurisson ?» C’est mon instinct de survie qui s’est réveillé et qui me parle avec fermeté.

    J’hésite, ne sachant pas encore très bien qui va l’emporter, de Tintin ou de l’instinct de survie, quand j’aperçois Marjolaine qui vient à ma rencontre, boulevard des Capucines. Marjolaine de Marjolaine et les Millionnaires bien sûr, je n’en connais pas d’autre.
    Sa casquette de baise-baul ne m’a pas empêché de la dévisager et de la reconnaître. Elle porte une culotte de cheval moulante et des bottes. Elle agite dans sa main quelque chose que je prends d’abord pour une cravache mais qui n’est qu’en fait qu’un gros porte-clefs. D’un pas nonchalant, on dirait qu’elle rentre chez elle. Elle n’a pas l’air pressée, s’ennuirait-elle ?

    Hélas, je n’ai pas vraiment le temps de m’arrêter, et le problème avec Marjolaine, selon moi, c’est qu’elle manque d’exotisme, elle s’est trop bien acclimatée, jamais elle n’étouffe un petit rire coquin du bout des doigts comme font les autres Asiatiques et c’est ce qui fait leur charme.

    Mais, comme je ne suis pas bégueule, je me retourne quand même sur la chute de reins du tonnerre de Marjolaine. Peut-être que sans elle j’aurais parlé du révisonnisme et des révisionnistes, après tout.