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Lapinos - Page 158

  • Le péril jeune ?

    Rue de Sévigné, pas moyen de passer. Tant que “Victor Hugo” n’aura pas été évacué. Le lycée “Victor Hugo”. Les poulets font barrage à hauteur de Carnavalet. En aval, un détachement de CRS attend son heure, tranquillement. C’est que le quartier offre des distractions : de belles poupées qui font du lèche-vitrine, inquiètes de ce qu’elles vont bien pouvoir porter l’été qui vient, qui affleure bon, même, aujourd’hui.
    Je suis au moins aussi contemplatif qu’un garde mobile, je crois, néanmoins ce barrage ne fait pas mes affaires. J’ai un rendez-vous important au 37.

    Mais eux, ils se font pas de mouron, mes potes en bleu, pour quelques fils à papa qui ont campé cette nuit dans leur bahut – leurs duvets moelleux s’entassent sur le trottoir – et qu’il va juste falloir renvoyer chez eux goûter gentiment. Pour les filles à papa, c’est un peu plus compliqué, certaines poussent des cris stridents pour exciter leurs mâles, atones : « CRS, SS ! CRS, SS !! »
    -« Ben faut du courage pour dire ça ! », je lance au vol à une petite en mini-jupe qui me regarde fièrement, mais cette conne le prend au pied de la lettre et se rengorge. Ce jeu de rôle commence à me taper sur le système, j'ai l’impression désagréable d’être un figurant dans un film de Klapisch. J’enfilerais bien une combinaison bleu marine pour aller commettre dans ce lycée quelques bavures, histoire de combler un peu le déficit de coups de pied au cul qui grève cette génération douillette.
    À un petit minet barbu qui ressemble à Brad Pitt, en mieux, et qui me prend à partie - il voudrait que je compatisse sur son sort parce que les vilains SS l’empêchent de retourner prendre ses affaires dans sa classe, je réponds que j’en ai rien à branler de son cartable, qu’il demande à ses parents de lui en acheter un autre, merde ! Il me dévisage, étonné.
    Un autre paltoquet au teint jaune se fait la voix en prévision d’une carrière au PS et tente de galvaniser ses troupes en lançant contre Fillon et sa réformette des slogans poussiéreux, les mêmes que contre Devaquet, Ferry, Bayrou et tutti quanti. De l’Éducation nationale, je vois pas ce qu’on peut encore sauver, moi, au contraire, faudrait tout brûler, les cahiers, la maîtresse et tous ces fayots au milieu.

    Une qui voudrait sans doute tâter du gourdin se met à invectiver un policier isolé, sous son nez, toujours sur le même thème récurrent des CRS qui valent pas mieux que des SS. Mais elle ne récolte qu’un sourire gêné du CRS, pas de coup de gourdin.
    Un autre type, la cinquantaine, vient protester auprès du même flic (isolé) que les flics le font chier à l’empêcher de passer, qu’il a autre chose à foutre, qu’il a des relations, qu’il voudrait voir le ministre de l’Intérieur, etc. Je m’approche pour mieux entendre. Le flic s’excuse, il dit que si ça ne tenait qu’à lui, il serait bien pépère dans son jardin, que ça ne l’amuse pas spécialement, qu’il ne fait que faire son boulot, vous comprenez… « Mais, je le coupe, votre boulot, vous l’aimez au moins ? La Compagnie, vous l’aimez ? Et la République ? Et la Sécurité ? » Toutes les questions n’appellent pas de réponse et le bougre le sait qui se tient coi en attendant les renforts.

    Je suis dégoûté. Finalement je ne vais pas m'engager dans les CRS.
    Bientôt les distractions habituelles, chichon, télévision et playstation, reprendront le dessus. Je serai juste en retard à mon rencard.

  • Trois cents grammes par jour

    Moi, j’étais là pour la gonzesse. Trente kilomètres par jour par monts et par vaux avec un sac sur le dos, à dormir à la belle, je crois bien qu’elle m’en aurait fait avaler de plus raides si elle avait voulu.
    Même les trois cents grammes de riz par jour, rien d'autre à bouffer, que dalle, strictement prohibé, je m’en foutais. Faut dire que la gastronomie et la randonnée ne font pas bon ménage. Quand on cavale toute la journée, l'estomac vous tombe pas dans les arpions.
    Mais prier en marchant toute la sainte journée, ça, j’étais pas sûr d’y arriver. C’était le meilleur moyen de se vautrer dans la pierraille.
    Merde, quand j’ai vu que l'aumônier portait une guitare en bandoulière, je me suis mordu la lèvre pour pas faire de mauvais esprit. C’était pas le moment… et si la fille me surveillait ? Elle avait l’air naïve, mais sait-on jamais avec les filles ?

    Au départ, le soleil commençait tout juste à réchauffer Saint-Guilhem, les mecs étaient équipés comme pour sauter sur Dien Bien Phu, en BJA (brodequins à jambières attenantes). Ils zieutaient mes tennis fluos avec commisération. Ils avaient torts. Car on n’allait pas sauter sur Dien Bien Phu, et, en dehors de quelques crapahuts à l’assaut d’une pente rocailleuse, ils allaient regretter leurs rangers de plomb. Et leurs gamelles en fonte qui brinquebalaient bruyamment.

    Quant à la fille, c’est des regards admiratifs qu’elle s’attirait, en coulis. Mais là, comment leur donner tort ? Elle était grande, brune, bien charpentée. La ridicule gandoura rayée que le chef venait de nous demander d’endosser n’altérait même pas sa beauté sans apprêts. Je songeai à une odalisque de Chassériau, déguisée en mamelouk du même atelier. Bref, c’était le genre de fille à qui on n’hésite pas un quart de seconde à faire un enfant. Quitte à sacrifier d’abord à ce rite initiatique, ce pèlerinage par-dessus les Causses.
    Au bout de ce voyage sans âne à travers les Cévennes, en effet, je comptais bien rafler le trésor…

    Une île de solitude ; car nous étions les seuls dans ces montagnes érodées. Les seuls à avoir abandonné nos appartements en ville, tous les seize, nos bagnoles, nos facs, nos boulots, nos plumards, nos thunes, nos papelards, pour faire cette promenade inutile.

    *


    L’accident ne se fit pas attendre longtemps. Après une heure de marche à peine, dans l’ascension d’un chaos rocheux.
    J’assistai à la scène, comme au cinéma ; j’avais gravi prestement la chirouze en tête, tel un chamois ou presque, sautant légèrement de bloc en bloc, à droite puis à gauche, et surtout en prenant bien soin de n’avoir personne sur les talons.
    Juste le temps de le dire au chef, parvenu au faîte à son tour : « Sûr qu’il va y avoir un accident, Chef ! », et l’accident se produisit, comme le chef était en train de me suggérer de laisser la Providence jouer un plus grand rôle dans ma vie…

    Ce type avait donc de l’humour derrière son air sérieux… Je m’abstins de répliquer car le spectacle à mes pieds était captivant et que je ne voulais pas en rater une miette.
    Travelling : ébranlé par un pied maladroit, le rocher entame mollement la descente. Droit sur ma brune, dix mètres plus bas. Sans élan, comme hésitant d’abord - ça va être un jeu d’enfant pour elle de se jeter sur le côté, de laisser passer le boulet. Un rapide calcul mental : il doit bien peser dans les trois cent kilos. Après elle, le déluge, comme on dit… Mais, au lieu de ça, l’odalisque tend le bras pour barrer le passage au bloc.

    « Non, pas ça !!! » J’ai envie de lui crier qu’elle est trop conne de faire ça ! De croire qu’elle peut l’arrêter. Ça tourne pas rond chez elle ou quoi ? Elle n’est pas bien consciente, apparemment, que nos destins sont liés, et que je n’ai aucune envie de pousser le restant de ma vie une beautée brisée dans un fauteuil roulant…
    Mais c’est pas un ralenti, je n’ai pas le temps de dire tout ça, bien sûr. Juste un cri de rage qui ressemble à un jappement de cocker. Le rocher écrase son bras. Il dévie ensuite légèrement sur la gauche, frôle deux autres randonneuses avant de disparaître à mes yeux dans les taillis. Les rescapées sont livides ; quelques-uns s’empressent pour les aider à se hisser jusqu’en haut.

    Par chance, notre chef était médecin. Il établit donc, après quelques palpations corroborées par quelques grimaces, un diagnostic de fracture du coude. Comme chacun avait déposé son téléphone portable d’un air grave dans une grande caisse destinée à recueillir toutes nos vanités avant le départ, nous dûmes renoncer à appeler le SAMU. On décida plutôt de faire comme si de rien n’était et de laisser la Providence (bis repetita) continuer à œuvrer pour nous. Après tout, ne venait-elle pas justement de nous gratifier d’un miracle en épargnant les vies de trois d’entre nous ? « Bienheureux les culottés, ils obtiendront le beurre et l’argent du beurre ! » dit la béatitude égarée.
    Le beau visage de ma vénus (de Millau), qui souffrait encore trop pour parler, fut déformé par un rictus douloureux signifiant qu’elle acceptait ce surcroît de mortification.

    On se relesta des sacs et on s’ébranla vers le but. Au fond de moi, l’espoir renaissait. Alors que je craignais d’être assailli par l’ennui au milieu de cette désolation, tandis que nous nous échauffions à peine sur le sentier pierreux mais tout tracé de la Vérité, un accident inespéré venait d'interrompre la morosité qui menaçait de s’abattre sur mes épaules…

    (À SUIVRE)

  • Apologie du nègre

    Quelles épaules, quel vit, quelles fesses, quelles cuisses ! je me dis en regardant ce nègre magnifique grimper sur la table pour s’exposer à nos yeux scrutateurs. Que j’aimerais avoir des cuisses comme ça, moi, longues et puissantes ! Il n’y a guère que ses pieds, massifs et écrasés, que je ne lui envie pas. Son visage un peu trop lisse aussi.

    Ah, Quillard, Pater, que je vous envie aussi : j’aimerais tellement être Antoine Watteau, comme vous, mêler la pierre noire à la sanguine à l’exemple du maître. La raideur souple de son trait me convient tellement.
    À l’exemple du maître… Mais les instituteurs ont remplacé les maîtres et les bobos ne s’extasient plus que sur le dessin assisté par ordinateur du dernier coupé Mercedes. Parfois ils vont méditer le dimanche sur quelque rotkhonnerie au musée d’art moderne, inquiets de savoir combien ça peut coûter. L’art pompido-giscardo-mitterrando-chiraquien passe son temps à justifier en longues périphrases abstruses son néant peu profond.

    Le nègre me sourit, mais il ne faut pas bouger, justement je dessine la bouche. Nul mieux qu’un peintre ne peut jouir de l’inégalité entre les hommes.

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  • Le laquais et le bouffon

    La réponse du berger à la bergère, de Jean-Pierre Elkabbach à Dieudonné, ce matin sur Europe 1 ne s’est pas fait attendre longtemps. Le célèbre et fringant journaliste, proche du pouvoir, avait invité un historien révisionniste sur son antenne pour remettre les pendules à l’heure. À propos de la traite des nègres. Celle-ci n’aurait pas existé sans la complicité de chefs de tribus africains et de négociants arabes, nous explique Monsieur l’Historien de service. D’autre part, la traite des nègres aurait eu lieu également entre… Noirs (vous avez vu, je ne suis pas tombé dans le piège).
    Bref, tout n’est pas tout blanc ou tout noir dans cette histoire, M. Dieudonné, tenez-vous le pour dit ! Comme dans beaucoup d’autres histoires, M. Elkabbach.

    Quand je dis "révisionniste", il n’y a aucun a priori de ma part vis-à-vis des travaux de cet historien – dont je ne connais que ce que la maïeutique de Jean-Pierre Elkabbach m’a délivré alors que j’avalais mon bol de café noir (sans sucre ni lait) ce matin.
    D'ailleurs, le révisionnisme ne devrait-il pas être un réflexe d'historien ? Quand on n’est pas pionnier, on ne peut qu’être révisionniste, sinon autant être journaliste, non ?

    Faudrait pas que le film que Dieudonné réclame sur la traite des noirs participe d’une forme de “pornographie mémorielle”, pour piquer cette expression un peu snob à Dieudonné, qui l’a piquée lui-même à Idith Zertal (?). Pour cela, on ne peut qu’engager Dieudonné à creuser ce sujet cher à son cœur à demi-nègre (si je disais “à demi-noir”, ça pourrait être mal interprété), à lire des bouquins d’Histoire sérieux.

  • Feuilleton

    Florian se leva tard ce matin-là, son réveil électrique rouge en forme de bite indiquait 09:47. Il avait bien songé à se débarrasser de ce cadeau d’assez mauvais goût, mais ce réveil était vraiment très pratique.

    S’il pouvait se permettre d’émerger à une heure aussi indue pour honorer un rendez-vous important à l’autre bout de Paris – dans à peine une heure –, c’est que, depuis le coup d’État du 22 avril, Florian passait beaucoup moins de temps dans sa salle de bains. Naguère, il lui fallait bien compter deux bonnes heures rien que pour s’habiller. C’est pas simple de se coiffer comme Léonardo di Caprio ou Brad Pitt quand on a le cheveu qui frise.
    Il n’y avait aucune obligation professionnelle là-dedans ni rien, non, Florian aimait juste plaire, se plaire, quoi de plus légitime ?

    Choisir une chemise, un pantalon, un boxer, pouvait prendre de longues minutes, à tergiverser devant le dressing les bras ballants. Il en essayait plusieurs. Un dimanche sur deux, c’était repassage ; l’autre, il mettait Dalida ou Brigitte Fontaine à fond les manettes de la platine, et il se curait les ongles des mains et des pieds avec la manucure électrique que sa sœur Laeticia lui avait offert pour son anniversaire, ses trente-et-un ans (déjà).

    Elles ne faisaient chier personne, Dalida et Brigitte Fontaine, parce que Florian vivait seul ; un grand loft, qu'il n'aurait pas supporté de devoir partager avec quiconque, même pas pour une émission de télé-réalité.
    Mais qu’est-ce que c’était qu’un “loft” au fond, exactement, Florian ne savait pas bien.

    *


    « Eh, meeeerdeuuuh !! », Florian venait de se rendre compte qu’on était dimanche et que le dimanche le métro ne circulait pas. Ne circulait plus. Ni le bus. Il abandonna donc son bol de thé rouge fumant et ses biscottes sur la table, enfila une vieille veste de jean passée de mode en vitesse, se passa une main un peu grasse dans les cheveux - beuuurrk ! -, et, après avoir soigneusement refermé la porte derrière lui, dévala l’escalier parce que l’ascenseur était pris. Il détestait être à la bourre, il détestait sentir la transpi !

    Cette mesure, la suppression du métro le dimanche, le nouveau régime l’avait prise sous prétexte de favoriser l’exercice physique et de lutter contre l’obésité galopante. En réalité, il s’agissait de financer l’achat d’un nouveau sous-marin nucléaire ; tous les journaux d’opposition s’étaient empressés de dénoncer la supercherie. À commencer par Liberté, j’imprime ton nom, qu’on pouvait se procurer gratuitement dans certaines stations de métro comme République ou Bastille. Florian était fier d’écrire de temps en temps dedans.

    Dans un premier temps, la résistance passive s’organisa contre le diktat. Les Parisiens décidèrent de rester chez eux devant leur poste de télé le dimanche. Mais, du coup, par-dessus le marché, ces salauds-là décrétèrent qu’aucune chaîne de télévision ne pourrait plus diffuser de programme le dimanche. Même les dessins animés pour les enfants avaient été supprimés !

    Au bas de la rue de Maubeuge, en nage, à la hauteur de l’ex-Place Kossuth, rebaptisée Place Sanders (?), Florian se fit la réflexion que, s’il ne montait pas dans l’un des rares taxis rouges et noirs autorisés exceptionnellement à circuler, il serait sûrement à la bourre. Ces taxis coûtaient bonbon, mais bon, cette fille, Virginie, il ne pouvait pas se permettre de la faire attendre. Il n’était sûrement pas le seul mec sur le coup et il risquait de trouver porte close s’il se pointait après 11h00 chez elle. Si ça se trouve, elle enquillait les rencards toute la matinée, la salope, pour être sûre de tomber enceinte !

    *


    Avant que la Présidente de la République ne soit contrainte de quitter le territoire avec son mari (le ministre de l’Intérieur) et ses enfants, avant que les fascistes ne s’emparent du pouvoir par la ruse et que ne s’abatte sur le pays comme une chappe de plomb, Florian était plutôt un mec cool, à qui tout réussissait. Financièrement, d’abord : en ce temps-là, sûr qu'il n’aurait pas mégoté sur le prix du taxi. Même s'il ne roulait pas sur l’or, c’était ce qu’on pouvait appeler un “bobo”.

    Il était écrivain. Et son premier roman, autobiographique, avait fait un carton, au point qu’il avait pu s’acheter, avec les royalties, 150 mètres carrés Place Saint-Georges, avec vue sur le jardin de l’Hôtel Thiers. Et il menait le train qui allait avec. Son agenda et son lit étaient bien remplis !

    Autant dire qu’il pouvait être fier de ce premier bouquin. Son pote Didier, lui-même pote avec Marco Fogiel, lui avait permis d’en faire la promotion dans la toute nouvelle émission “en prime time” de Fogiel et Ardisson, Coup double. Quel souvenir ! Coup de pouce supplémentaire du destin, alors que les jurés du Fémina s’entendaient pour remettre cette année-là pour la première fois leur prix à un homme, c’était sur lui, Florian Werner, que ça tombait ! (Son vrai nom de famille, c’était Wagner, il avait dû prendre un pseudo.)

    Les passages un peu sulfureux de son bouquin avaient bien fonctionné, notamment le chapitre où il imaginait l’évasion de Saddam Hussein grâce à la complicité d’un jeune GI américain homosexuel raide dingue du Raïs – tout n’était pas DIRECTEMENT autobiographique. S’ensuivait une sorte de road movie à dromadaire dans le désert, entrecoupé habilement de quelques parties de jambes en l’air. Après de longs mois passés à l’isolement, Saddam n’avait pas fait la fine gueule, et le jeune GI avait, qui plus est, un petit cul canon…

    (TO BE CONTINUED)

  • Carré blanc

    On nous dit tout, on nous dit rien. C’est plus malin. Tu veux connaître la Vérité ? Mais la Vérité, mon ami, c’est une aiguille dans une botte de foin, aujourd’hui, voyons ! Goebbels est mort, mais la Propaganda Staffel se porte bien, elle, merci.

    Pourquoi ne pas inviter Faurisson à venir s’expliquer en direct avec un Historien digne de ce nom sur un plateau de télévision ? Allez, qu’on en finisse avec ce révisionnisme abject, qu’on le réfute à la face du monde une bonne fois pour toutes…
    De fait, la choa est une affaire bien trop sérieuse pour qu’on la laisse à des journalistes, à des metteurs en scène qui nous ont fait croire à des charniers à Timisoara, rappelez-vous, dur comme fer. Et ces témoins qui n’ont rien vu et qui confondent parfois les chambres à gaz et les fours crématoires. La crémation n’est pas criminelle en soi, elle est même très à la mode aujourd’hui, le côté hygiénique.

    La métaphysique de Mgr Lustiger - je préfère vous épargner celle de Jacques Chirac -, est très séduisante. Pour l’archevêque de Paris, le plan d’extermination des Juifs cache une volonté d’Hitler de détruire le message de Dieu. Staline, Lénine, Trotski, Pol Pot, Mao, l’ONU (eh oui, l’ONU, ne me dites pas que vous avez déjà oublié le génocide rwandais, sous le nez des Casques bleus), ne seraient à côté d’Hitler que de vulgaires bandits de grand chemin. Mais la vie n’est pas un film de Steven Spielberg, Éminence. Votre métaphysique dissimule mal que, dans le fond, la choa est une question politique. C’est pourquoi la ruche est en effervescence et la télévision déverse son flot d’images creuses.

  • Ras-le-cul

    Rimbaud par-ci, Rimbaud par-là, c’est à vous dégoûter. Rimbaud, "mystique contrarié" ? Inverti, même. Rimbaud du temps où la pédérastie sentait le soufre, avant de sentir l’eau de toilettes…

    Sonnet du trou du cul

    Obscur et froncé comme un œillet violet,
    Il respire humblement tapi parmi la mousse,
    Humide encor d’amour qui suit la fuite douce
    Des fesses blanches jusqu’au cœur de son ourlet.

    Des filaments pareils à des larmes de lait,
    Ont pleuré sous le vent cruel qui les repousse,
    À travers de petits caillots de marne rousse,
    Pour s’aller perdre où la pente les appelait.

    Mon rêve s’abouchera souvent à sa ventouse,
    Mon âme, du coït matériel jalouse,
    En fit son larmier fauve et son nid de sanglots.

    C'est l'olive pâmée et la flûte caline,
    Le tube d'où descend la céleste praline,
    Chanaan féminin dans les moiteurs enclos.


    Bref, pas étonnant qu’Arthur ait fini abscons…

  • Le jour et la nuit

    Déjà dans Pauline à la plage, Arielle n’est guère sensuelle, une vraie poupée de porcelaine froide, elle promène sur la plage blanche de Rohmer un regard reptilien de bête à sang froid. L’injection de diverses substances destinées à lui conserver un air de jeunesse éternelle et un régime sévère n’ont fait qu’accentuer sont côté serpent.

    Mais dans le fond, je l’aime bien, Arielle, car il n’y a pas que la beauté physique qui compte chez une femme. Et qu’elle est belle dans son dévouement à son époux. Non contente d’avoir consenti à tourner dans l'assommante fantaisie filmée de son mari, elle le défend du mieux qu’elle peut contre son biographe, Philippe Cohen. Sans trop s’emporter, sans jamais citer le nom de l’auteur, comme le lui a conseillé Bernard ; mieux vaut feindre l’indifférence pour ne pas faire résonner la grosse caisse médiatique. On n’apprend pas au vieux singe à faire la moue !

    Ça vaut le coup, non, d’essuyer quelques critiques fondées, si c’est pour être défendu avec autant de passion amoureuse par sa femme ? Pourtant, j’ai senti BHL un tantinet désarmé, comme un flic poursuivant un voyou qui s’aperçoit tout à coup qu’il a oublié de charger son 9 millimètres. Car, même si BHL n’est pas philosophe à reculer devant un aussi petit paradoxe, ça va pas être facile d’accuser Cohen d’antisémitisme.

    J’ai consulté le menu proposé par Cohen et je l’ai trouvé plutôt alléchant, en voici un aperçu :
    - Né avec une cuiller en bois dans la bouche ;
    - Un homme de paroles ;
    - “Le plus beau décolleté de Paris” ;
    - La République des lettres expliquée à ma fille (fictienquête) ;
    - Justine, ou la vertu de la littérature pipolisée.

  • La pêche au caviar

    Avant-hier soir, je me couche comme tous les autres soirs sans me brosser les dents et après avoir bu un verre de rouge, vers deux heures - bref, rien de spécial ne laisse présager ce songe que je fais au milieu de la nuit, où la trame de mon roman m’est révélée d’un seul coup.
    Pulvérisés, les grains de sable qui bloquaient la mécanique. Jusque-là, je ne disposais que d’une vague intrigue que mon pote Erwan m’avait gentiment soufflée. Depuis trois mois, je mâchais et remâchais un fil conducteur un peu ténu, cogitant pour essayer d’étoffer cette trame - en vain.

    Au réveil, je m’empresse de noter tout ça quelque part dans mon ordinateur, pas tant par peur de laisser s'effilocher cette histoire que pour vérifier qu’elle résiste à la transcription (les rêves sont souvent comme des mirages). Content comme un pêcheur iranien qui vient de prendre dans son filet un esturgeon de vingt livres. La pêche au caviar, c’était le sujet d’un reportage dans Thalassa rediffusé la veille fort tard qui m’avait aidé à m’endormir.

    Mais le lendemain, pschitt, j’ai tout oublié, comme dirait l’autre… C’était dessiné si nettement sur mon plafond, pourtant ! J’allume donc ma bécane, à demi rassuré, m’autocongratulant pour ma prudence. Et là, stupeur, que dalle, nada, impossible de retrouver mon plan. « Was ist denn los ???? » J’ai écrasé le fichier ou quoi ? Quelqu’un a fouillé dans mes dossiers ? Retour à la case départ. Je suis furax, comme un pêcheur iranien qui vient de laisser sauter par-dessus bord l’esturgeon qu’il venait de pêcher, en voulant le sortir du filet.

    J’en viens même à me demander si TOUT ÇA n’était pas un rêve. Vérification faite dans le programme, aucun reportage sur la pêche avant-hier à la télé…

    Le polar est un genre exigeant. Il y a un public pour ça, les librairies lui consacrent généralement un rayon entier, un public qui attend qu’on le mène en bateau en tenant le cap jusqu’à bon port. Pas question que la barque prenne l’eau au milieu de la traversée à la première incohérence. Aujourd’hui, les bons artisans se font de plus en plus rares. Besson cite Demouzon. C’est plus facile d’être essayiste, de prendre un billet pour Bagdad ou Karachi, et de broder en partant de quelque attentat islamiste un scénario entrecoupé de bons sentiments.

    J’ai pas tout Simenon chez moi, j’ai donc pas pu vérifier que les deux derniers Maigret avec Bruno Crémer étaient fidèles au texte. Ça ne tenait pas debout. De toute façon, Maigret, ce n’est pas un rôle pour Crémer. Il est trop distingué, trop imposant pour jouer un flic. Je préférais Jean Richard.

  • Le pompon

    Pierre Murat, critique à Télérama, a rarement de l'intuition. Dans sa critique de La Chute, pour une fois, il fait preuve de sagacité :
    « Le pompon, c’est les Goebbels. Madame, surtout, qui endormira puis empoisonnera ses cinq enfants, afin qu’ils ne survivent pas à la chute du national-socialisme. Une folle ? Ok, si ce n'est que le réalisateur filme son geste dément comme un rituel glaçant et funèbre. À cinq reprises, on verra cette femme, au masque ravagé de douleur, introduire une capsule de cyanure entre les lèvres de ses enfants endormis. Et surveiller qu’ils s’endorment en paix pour l’éternité. Une Médée moderne… Il est des maladresses qui font peur et qui font mal. »

    Passons sur le style de Murat (« Le pompon, c’est les Goebbels »). Que vient foutre Céline dans Télérama ?
    Qualifier Mme Goebbels de "moderne”, en revanche, ça c'est bien senti ! Pierre Murat, à sa manière un peu maladroite, a compris une des caractéristiques essentielles du nazisme : la Modernité. Madame Goebbels et son mari marquent l'Histoire par leur modernité, c'est évident, les nazis étaient des gens très en pointe dans des tas de domaines. Ils nous ont légué toutes leurs inventions, même si on a préféré faire l’inventaire, brûler les casquettes et les bottes.

    Médée, elle, ne tue que deux enfants, et tout bêtement pour se venger de Jason, pas pour leur éviter d’affronter un futur difficile. La pauvre Médée n'avait pas lu Heidegger.

    Une chose est sûre dans tout ce chaos, c'est que si La Chute devait avoir plus de succès qu’un film de Desplechin ou d’Alain Resnais, la Critique le prendrait comme une déclaration de guerre des Boches.

  • Good bye Hitler !

    Pour une fois, je suis d’accord avec les bobos, s’il y a bien un truc profondément abject, c’est la nostalgie des régimes totalitaires, véhiculée par le goût des uniformes un peu tape-à-l’œil, napoléoniens, hitlériens, etc., ou par certains films ambigus, sans compter l’inclinaison des adolescents à faire la nique à leurs parents (moindre dans les milieux bourgeois/petit-bourgeois, où la rébellion se doit d’être plus souple afin de ne pas se couper complètement de l’héritage - on se contentera bien souvent d’écouter Manu Tchao en fumant des pétards et en soufflant dans des capotes).

    Ainsi, même si nos voisins allemands semblent plus touchés par cette Sehnsucht, comme qui dirait, dont un cartésianisme de bon aloi a su nous préserver, il convient de rester vigilants, pour éviter que nous, Français, garde-fous de l’Europe, soyons à notre tour contaminés par ce qu’il est convenu d’appeler “L’Esprit de Munich” (der Münchner Poltergeist).

    Or, une certaine presse ne se gêne vraiment pas non plus pour entretenir le mythe, et je crois qu’il est de mon devoir de la dénoncer ici et maintenant : je veux parler de l’hebdomadaire Télérama. S’emmêlant complètement dans son politiquement correct et son politiquement incorrect correct et son politiquement correct incorrect, il a en effet cru bon de réserver lors de sa sortie un accueil chaleureux à ce film, Good Bye Lenin, du cinéma carrément, et, je pèse et soupèse mes mots, NAU-SÉ-A-BOND.

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  • Chasse au sorcier

    Le parti socialiste peut-il remporter des élections sans l’appui de Jean-Marie Le Pen ? Loin de moi l’idée de faire à Le Pen un procès d’intention, mais il aurait voulu mettre Chirac et sa clique de politiciens gominés à la Perben dans l’embarras, il ne s’y serait pas pris autrement…

    Ce qu’il y a de bien avec les blogues, c’est qu’on peut s’élever au-dessus du niveau des querelles politiciennes, des slogans éculés du Monde, de Libé ou du Figaro.
    En effet, les propos de Le Pen, que tout esprit désireux d’être éclairé entièrement aura pris soin de lire in extenso dans l’hebdomadaire Rivarol, ne se démarquent guère des études historiques sérieuses, un peu CHIFFRÉES, sur l’Occupation allemande… Là, je sens qu’un certain nombre de bobos se désabonnent de mon blogue… mais n’était-ce pas inéluctable ?

    Je disais donc que, lorsqu’on se penche posément sur le passé de la France, de l’Europe, et que l’on COMPARE les occupations, on peut conclure en vérité que cette Occupation allemande ne fit pas tant souffrir nos grands-parents, au regard de ce que leurs contemporains polonais ou hongrois endurèrent. Si je voulais ajouter une dose de soufre à mon propos, je dirais que les Palestiniens souffrent davantage de l’occupation israélienne, les Irakiens de l’occupation américaine, ou que les Kurdes souffrirent plus de l’occupation irakienne ; mais vouloir rivaliser avec Le Pen dans la provocation ne serait pas raisonnable de ma part.

    D’abord, parce que l’occupation allemande ne fut que partielle, dans un premier temps, et puis qu’on pouvait en pères peinards aller au théâtre voir les pièces de Sartre ou les concerts d’Arletty. Si plusieurs centaines de milliers (les chiffres sont là) de jeunes Françaises copulèrent avec des feldgraus, c’est après tout parce que l’envahisseur barbare fleurait bon l’après-rasage parfumé à l’edelweiss, qu’il n’était pas si farouche que ça.

    Je parle d’autant plus à mon aise de tout ça que je n’ai aucune goutte de sang teuton dans les veines et que mes grands-parents ne furent, ni de près ni de loin, mêlés à une quelconque exaction au cours des plus sombres années de notre histoire. Pas plus que les parents de Le Pen, en fait. Précision à l’attention de ceux qui croient à l’hérédité des crimes, et, surtout, à celle des vertus.

    Avant-hier, au BHV, j’assistai à cette scène étrange : je vis un jeune homme coiffé en crête, manifestement à la pointe du progrès, essayer sur lui un ticheurte blanc et rouge estampillé CCCP, sans qu’il se trouve personne dans le bazar, pas même moi, pour venir lui cracher à la gueule en mémoire des millions de victimes du goulag.

    Maintenant que les derniers bobos ont zappé sur un autre blogue intellectuellement plus confortable, je peux me permettre cette analyse plus subtile. Le Pen n’a sans doute pas bien digéré que Gollnisch lui dispute la palme de l’incorrection, dernièrement. Il y a des gens comme ça qui ne peuvent pas s’empêcher de faire du hors-piste quand tout le monde fait la queue-leu-leu devant le télésiège.

  • Nécro bidon

    Partouze tragique à l'hôpital Necker : un mort. Je suis impatient de lire la nécro du Professeur Choron dans Le Monde, l’hommage du conformisme à l’anarchie en quelque sorte, du balai dans le cul à la flatulence. Il vont derechef déployer des trésors d’hypocrisie. Comme pour ADG. Ça leur écorche la gueule de dire un peu de bien d’un libre-penseur, mais il faut bien faire semblant.

    Hara-Kiri - et donc Charlie-Hebdo - doivent beaucoup à Choron, colporteur génial qui écoula lui-même les premiers numéros à la criée, mais il y a beau temps que Cavanna, Siné et compagnie, sont rangés des bombes sous la houlette de Philippe Val, chansonniais jospinien. Ils se contenteront donc de jeter quelques fleurs fanées sur le cercueil de leur ancien acolyte - aussi intempérant qu’imprévisible. Pensez, Wolinski vient même de se faire épingler la Légion d’Honneur au revers de sa veste en peau d’anar retournée… Pauvre Daumier !
    Qui n’a pas rêvé d’avoir un grand-père comme Choron (à part un bobo, bien sûr) ?

    Faudra donc compter sur Nabe, une fois de plus, pour rectifier le tir ; sur son site, par exemple… Au fait, pas si mal le dernier Nabe. Il invente au moins un nouveau mot : “collabeur”, qui devrait coller comme une fatoua à la peau de la racaille enrichie qui roule des mécaniques chez Ardisson, les Joey Starr et autre Djamel Debbouze.

    Le mariage homosexuel à Bègles inspire aussi à Nabe quelques bons mots, mais il fait surtout, navré, ce constat : ni les partisans, ni même les opposants sérieux de cette union débile, devant cette pantalonnade bouffonne, ne s’avisèrent un seul instant du comique de la cérémonie… Pauvre Rabelais !

  • Lourd, sucré et crémeux

    C’est seulement rendu aux trois-quarts de ce roman de Félicien Marceau que je saisis enfin qu’il est censé se dérouler aujourd’hui, lorsque le téléphone portable de François sonne dans sa poche, le trahissant. Je croyais que nous étions en 1960. C’est cette politesse dans les manières et le langage des protagonistes qui m’avait abusé. Il y a comme un hiatus.
    Dans le même genre de roman futile, je préfère celui de Patrick Besson : Lettre à un ami disparu.

    Besson s’embarrasse sans doute un peu trop de considérations psychologiques, mais certaines, à mon goût, ne manquent pas de saveur : « Il était paresseux. Il avait beaucoup de mal à se lever le matin et le chocolat, surtout quand il le préparait, lourd, sucré et crémeux, n’a jamais donné à personne le désir de conquérir le monde. Il donne plutôt celui de se recoucher. »

  • Plateau ciné

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    J’irai pas voir La Chute de Hirschbiegel au cinoche. À mon âge, on préfère peloter les filles en pleine lumière plutôt que dans une salle obscure puant le pop-corn. Et puis j’aurais trop peur de me raser. Ferdinand Céline ne manquait pas de discernement en général, mais, question cinéma, il s’est sacrément gourré, lui qui prédisait un avenir mirobolant au “septième art” ; cinquante ans plus tard, un bon bouquin reste cent fois plus concentré en émotions et en images qu’un bon film, dès lors qu’on a un peu d’imagination.

    N’empêche, sommes-nous meilleurs que les Allemands qui ont élu Hitler ? Si les films de Claude Zidi, de Gérard Oury ou de Steven Spielberg ont éclairé votre enfance, alors il y a des chances que vous trouviez cette question un peu incongrue… Pourtant, c’est J.-J. Goldman en personne qui l’a posée le premier ! Et ce faisant, même s’il ne répond pas à la question - après tout un philosophe peut-il faire mieux que poser les bonnes questions ? -, Jean-Jacques ouvre une brèche dangereuse dans le Dogme. Le Dogme, c’est : on n’a jamais et on ne pourra faire pires salauds, pires monstres, pire nazis que les Allemands.

    « Si j’étais né en 17 à Leidenstadt,
    Sur les ruines d'un champ de bataille
    Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens
    Si j'avais été Allemand ?… »

    Le doute n’était pas permis jusque-là.

    Sommes nous meilleurs, même, que nos grands-parents ? Qui s’illustrèrent par leur lâcheté pendant l’Occupation. Nos grands-mères surtout, qui, au lieu de se révolter contre toute la barbarie contenue dans un seul peuple, le peuple allemand, et d’aider les Juifs à fuir en Amérique, n’ont rien trouvé de mieux que de collaborer à blouses rabattues avec les forces du Mal.

    Autrement dit, si un génocide avait lieu en ce moment, comment réagirions-nous ? Les films de Claude Lanzmann, les promenades scolaires à Auschwitz nous ont-ils fait mûrir un peu ? Si pour des raisons économiques et sociales, par exemple, car la barbarie s’avance souvent masquée derrière des raisons économiques et sociales, on décidait de nier le statut d’être humain à une catégorie de la population, voire de s’en débarrasser, nous élèverions-nous contre ce crime abominable ?

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  • Vague à lames

    Ce raz-de-marée indien, c’était vraiment de l’extrait d’apocalypse !

    J’avoue, j’ai guetté le signe de Jonas, mais il ne s’est pas passé trois jours avant que Kouchner ne débarque sur les ondes radio pour aider ses concitoyens à prendre la mesure du cataclysme – avec sa gueule d’acteur politique poudrée de riz, préparant les prochaines élections.

    Parions qu’à l’heure de la parousie, plus difficile à prévoir par nos satellites modernes qu’un cyclone, un tremblement de terre ou une journée ensoleillée à Brest, il y aura des bobos pour se saisir de leurs caméscopes et zoomer sur les quatre cavaliers de saint Jean. Comme ces touristes en slips vautrés sur les plages de Thaïlande et d’ailleurs, filmant la déferlante qui va les engloutir. Sous hypnose.

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  • Scène de ménage

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    Percutante, la campagne du Secours populaire contre la violence “maritale” ! Quel esprit ne sera pas frappé par ces affiches, dans le métro, qui disent en un ou deux dessins toute la haine d’un mari pour sa femme (ou d’un mec pour sa meuf, à la rigueur, mais c’est surtout les femmes mariées qui trinquent avec leurs moitiés alcooliques, si l'on s'en tient aux statistiques). Les dessins sont d’un certain Davis, pas de Vuillemin, comme c’est dommage…

    Je me demande si le Secours populaire vient aussi en aide aux bourgeoises battues par leurs maris, sans distinction de classe, malgré leurs sacs Hermès et leurs talons-aiguilles (qui peuvent servir à se défendre) ? Paraît-il aussi que la violence conjugale n’est pas l’apanage de la femme pauvre. Eh oui, qu’on se le dise, histoire de mettre un poing sur des cris, tous les hommes sont des salauds en puissance ! Depuis la nuit des temps, ils préfèrent la bagarre aux persiflages, c’est plus fort qu’eux, sans qu’on parvienne tout à fait à les refaire à l’image de leurs faibles femmes.

    Alors que faire, Mesdames, Mesdemoiselles ? Épouser une tapette ? Aïe, non, c’est impossible, car si cette espèce rare est aimable, cultivée et élégante, dans son immense minorité respectable, vous le savez bien, hélas, vous n’avez pas l’heur de lui plaire… Reste plus que le close-combat… ou le célibat.

    Si j’avais mis un coup de castagnettes à Isabelle le jour de son anniversaire, c’est sûr je serais passé pour un beau salaud, d’autant qu’elle n’a rien fait ce jour-là de septembre pour me déplaire, au contraire. De toute façon, comme les vraies brutes, je sais bien que c’est au ventre qu’il faut frapper – c’est très efficace et ça ne laisse pas de trace, comme une bonne lessive.

    Une fois n’est pas coutume, je prends le risque de vous choquer ; en effet, je crois qu’il y a pire qu’une femme battue, c’est, je vous le donne en mille… un homme battu ! Eh oui, car aux bleus vient s’ajouter l’humiliation de se faire tabasser chroniquement par une femme. Un homme battu, on en ricane dans les chaumières et même dans les appartements en ville, voyez-vous. Pas question d’avouer ça. L’homme battu reste seul avec sa plainte.

    J’ai longtemps douté de l’existence des hommes battus ; plus maintenant, puisqu’il en est au moins un, autour de la bibliothèque que je fréquente (le moins souvent possible), un qui placarde des affichettes poignantes sur les murs, depuis des mois sans se lasser, témoignant de son cas douloureux. Ce pauvre bougre me fait vraiment pitié et je l’inviterais bien à noyer son chagrin dans un verre en ma compagnie si je le surprenais en train de coller, mais il doit faire ça la nuit, je suppose, pour pas se faire poisser.
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  • Scène de douche

    Ah, les Parisiennes sont enfin de retour ! Il était temps ! Les jolies femmes fêtent Noël en province mais le Jour de l’An à Paname, apparemment.

    Mon frère m’a offert un joli slip de bain à Noël, aux couleurs de l’Empire prussien, car l’ancien commençait à être usé sur la raie des fesses. C’est toujours là que les slips de bains s’usent d’abord. Paradoxe qui m’interpelle.

    Je l’ai étrenné hier à la piscine de la Porte Dauphine. Où j’ai été témoin, dans les douches mixtes, d’une scène qui m’a ému.
    J’observe la fillette de quatorze ans en bikini qui se savonne en face de moi, avec son approbation muette - un grand sourire mutin -, et je m’apprête à lui adresser un clin d’œil admiratif alors qu’elle n’est pas tout à fait à mon goût, en fait, pas assez formée, mais pour étoffer un peu son capital confiance, quand je remarque que son voisin, un tout petit Hindou, bande très dur. Sous son caleçon élastique qui ne masque rien de son état, je vois sa bite se tendre à l’horizontale. Il n’éprouve aucune gêne. Il vient même quémander un peu de savon liquide, que la fillette lui verse au creux de la main, en se gardant tout de même de toucher du doigt l’intouchable, puis l’Hindou retourne sous son jet, toujours raide comme l’envie. C’est peut-être son état normal ?

    La fillette pouffe un peu en me regardant, me prenant à témoin. De quoi ? De son innocence ? L’Hindou aussi a un petit rire aigu. Je suis bien obligé de m’esclaffer à mon tour. C’était charmant. Et si la piscine était le dernier havre de liberté ?

  • Cause toujours

    Moi qui pensais être débarrassé d’Alain Juppé pendant quelques semaines… Il n’y a guère en effet de politicien qui me dégoûte plus que cet homme de fer qui plia comme du carton, que ce Sancho Pança maigre droit dans ses bottes. À part Michel Noir, peut-être.

    Dès ce matin, je déchante en entendant la radio annoncer la création du blogue d’Alain Juppé. Et merde. Juppé est adoubé par un certain Loïc Le Meur, présenté comme une sorte de pionnier, ou comme le pape de la blogosphère, qui m’a l’air de n’être en fait qu’un bobo pontifiant de plus. Ce gugusse-là, qui a “rendu service” à Jean-François Coppé et Dominique Strauss-Kahn en les introduisant dans la blogosphère - merci bien - oublie volontairement l’essentiel sur les blogues dans son petit topo à la radio. Il oublie de dire que tout l’intérêt de ces petites tribunes, c’est qu’elles sont ouvertes à d’autres “citoyens” que ceux qui sont invités tous les quinze jours à la télévision, à la radio ou dans Le Monde, à rabâcher les vérités officielles.

    Les blogues d’Alain Juppé, de Strauss Kahn et tutti quanti, ne sont que de vulgaires tracts. Quel intérêt y a-t-il à entendre Juppé dire toute l’empathie qu’il a pour les handicapés, exprimer toute sa compassion pour les victimes des raz-de-marée, etc. ???

    Le seul intérêt de ces blogues politiques, c’est qu’ils font faire des économies de papier au contribuable. Bien sûr, je blague, car ces économies pèsent peu au regard des dépenses électorales démentielles engagées par Alain Juppé au cours de sa carrière.

    Profitons-en pour botter le cul à la casuistique éthico-juridique que les journalistes-auxiliaires du pouvoir nous resservent régulièrement sur l’absence d’enrichissement personnel. Distinguer les affaires privées des affaires publiques n’a guère de sens en général, encore moins quand il s’agit des affaires d’un politicien. Si Chirac tient la télécommande aujourd’hui, c’est grâce à son parti, doté illégalement. Toute l’ambition personnelle de Chirac depuis sa plus tendre enfance, devenir Président, ainsi l'a-t-il satisfaite.
    La corruption a toujours existé, dans tous les régimes, sous toutes les latitudes. Mais jamais auparavant on avait autant pris les Français pour des cons. Flattez le peuple et bientôt vous le méprisez.

  • Propos "comme si"

    Comme si de rien n’était, comme si les clochards ne crevaient pas de froid aux coins des rues, refusant de se faire embarquer par la milice du SAMU social.

    J’étais décidé à dire du mal du Père Noël, cet ignoble saint laïc, mais je dois avouer que le rituel des cadeaux m’amuse plutôt. Cette année, par exemple, j’ai interverti par mégarde les cadeaux de mes deux copines en les postant. Ce qui a posé un problème… de taille. Au point qu'elles m'en ont voulu, ces idiotes, refusant même de faire l'échange. Tant pis pour elles. D'ailleurs, je n'aime pas les jalouses… Adolescent, j’étais moi-même très jaloux. Au point de démolir à coups de tatane la porte d'une copine, fermée à clef, que je soupçonnais de fricoter avec un autre type à l’intérieur. En fait, il n’y avait personne, et je me suis trouvé con. D’un seul coup je me suis retrouvé vacciné contre la jalousie.

    Moi, un cadeau qui m’aurait fait très très plaisir dans ma chaussure, en dehors d’une jolie vierge bien disposée à mon égard, mais comme le Père Noël n’existe pas, je ne m’y attendais guère, c’est un dévédé des meilleurs épisodes de Strip-Tease, l’émission belge “qui déshabille ses contemporains”. Mais, la maison de production MK2, qui s’est avisée que ce serait un bon coup commercial de mettre ça sur le marché, a sélectionné les épisodes les plus mauvais, les plus politiquement corrects, alors que l’intérêt de ces reportages, c’est qu’ils bouleversent drôlement les idées reçues, le plus souvent. Surtout les premiers, de Marco Lamensch.
    Bref, au lieu d’une anthologie, c’est une vraie coprologie que ces crétins de MK2 ont déversée dans les bacs (du grec copros, le caca, et lalein, choisir).

    Pour éviter d’être tué par un tsounami, emportez toujours une planche de surf avec vous à la plage, comme moi. Et j'aimerais bien qu'on arrête de dire tsounami pour parler d’un raz-de-marée, l’exotisme a déjà fait suffisamment de morts comme ça !
    Quant à Houellebecq, s’il est en panne d’inspiration, faut qu’il se dépêche de prendre un avion pour Phuket pour récolter là-bas matière à un nouveau roman. Avant Yann Moix et Adrien Zeller, qui prendront le vol suivant.
    Quelle leçon pour Hollywood et ses films catastrophes, ce raz-de-marée indien. Je ne pourrai plus jamais regarder un de ces divertissements sans le trouver complètement bidon.

    Il y a beaucoup moins de jolies femmes dans Paris entre Noël et le jour de l’an. J’en tirerais bien des conclusions, mais je n’ai pas le cœur à ça.

    Sinon, je suis d’accord avec Patrick Besson, Brad Pitt, quarante et un ans, aurait mieux fait de s’abstenir de se faire lifter. Les chirurgiens savent peut-être retendre les tissus, mais pas sans bousiller les expressions. Avant, Pitt ressemblait à un chimpanzé (un beau chimpanzé, si vous voulez, mesdemoiselles) ; maintenant, on dirait qu’il porte un masque de chimpanzé.

    Mes propos manquent un peu de liant. Je l’impute à tous ces grands crus que je viens de boire et qui m’imprègnent encore. À moins que ça ne soit le froid ? Car le froid, c’est pas bon pour les sauces.