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  • Par paire

    Le premier est français, ou presque, et se déplace entre les rayons en biais comme un ours timide et maladroit. Impossible d’arriver d’où je suis à lire le titre du bouquin qu’il a pris pour son quatre-heures. La seule certitude, c’est que ce n’est pas le dernier Harry Potter. Et dire qu’on a voulu faire de moi un journaliste d’investigation dans une sorte de Voici intello ! (le projet a capoté)
    « Vendredi 28 octobre, 16h00, Patrick Besson achète le dernier roman de X. à la Fnac Montparnasse, il est sapé comme un prof de philo existentialiste ; nulle belle intellectuelle ne l’interpelle - est-ce pour cela qu’il a l’air inquiet ? »

    Le second a pour seuls points communs avec le premier, je crois, d'être un grand écrivain de plus d’un mètre quatre-vingt et de se trouver à la Fnac au même moment, en tournée de promotion. Une centaine de fans qui se poussent du coude sans faire de bruit pour le voir en vrai, mais pas de quoi envier Bret Easton Ellis, car ce sont surtout de jeunes mâles vaguement lettreux ; peu de jolies filles, à part celle à qui je cède finalement ma place. Peut-être même un peu de pitié pour cet écrivain (qui ressemble à un banquier) tant les questions de la journaliste du Monde sont ineptes.

    Je prends la ligne 12 sans avoir rencontré Beigbeder et monte dans la même rame que Dick Chesney, le secrétaire d’État de George Bush… Pas le vrai, son sosie. C’est dingue le nombre de sosies qu’on peut croiser à Paris ! C'est-à-dire pas seulement des gens qui achètent les mêmes vêtements, les mêmes journaux, les mêmes livres, les mêmes yaourts, les mêmes maisons, les mêmes meubles, les mêmes téléphones, les mêmes i-pods, les mêmes sex-toys (sous l’influence de Bret), non, des gens qui ont au sens propre la même figure trait pour trait.

    Ceux qui me connaissent un peu savent que ça a commencé avec Natasha Hentsridge (tombée enceinte depuis, mais pas de moi, hélas), puis ce fut George Bush dans la tribune du défilé du 14 juillet ; ensuite François d’Aubert, dans le métro - là j’ai cru de longues minutes que c’était le vrai, du moins le plus connu -, et maintenant Dick Chesnay !
    Je mettrais les couilles de Michel Onfray à couper qu'il ne s’agit pas d’autosuggestion, au moins pour les trois derniers.

    Au fait, comment fait-on pour différencier un clone d'un sosie ?

  • Interlude

    Un bruit de bottes chics martelant les trottoirs de Paris m’avait fait frissonner. C’était l’automne mélancolique et bientôt les frimas vasoconstricteurs de l’hiver feraient battre tous ces jolis cœurs au ralenti.

    Quand un rayon de soleil inespéré m'a accordé un petit sursis. Je n’ai fait ni une, ni deux, j’ai laissé Diderot en plan dans sa prison de Vincennes, et foncé là où mon instinct me disait d’aller, chez H&M aux environs de midi.

    Je ne pouvais mieux choisir mon heure…

    Shopping chez H&M, Faubourg Saint-Honoré, au Bon Marché, à la Samaritaine, aux Galeries Lafayette,
    Toute cette succession et cette répétition de féminité agglutinée…
    Ces corps nubiles, ces corps vils

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  • Abstinence

    J’ai mal dormi. J’ai rêvé que Chirac révélait à la télévision l’existence de son frère jumeau caché ; qui s’empressait aussitôt d’ajouter qu’il serait candidat à la présidentielle 2007 ! Un vrai cauchemar dont je me serais bien passé.
    Je ferais bien de regarder un peu moins la télé…

    Devoir traiter mon pied d’athlète à sept heures du matin en me massant l’entrejambe avec de la pommade n'a fait qu’accroître ma mauvaise humeur.

    Et je décide, pour m’éviter des maux de tête, de m’abstenir aujourd'hui de faire des mots d’esprit.

  • Pauvre Anastasie !

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    Evelyn Waugh, tout en raillant les fonctionnaires chargés de son application, n’hésite pas à préconiser une censure intelligente. Que ce soit à propos de la peine de mort, du colonialisme, des journalistes, etc., Waugh n’est pas du genre à hésiter en général… On dirait qu’il est effrayé à l’idée qu’on puisse le confondre avec un de ces gras moutons de Panurge. Même si je ne suis pas Anglais, je peux comprendre ça.
    Et puis Waugh est un auteur comique, il sait que l’humour c’est un peu comme une fiente de pigeon qui s’écrase sur un chapeau melon ou comme un pet qui éclate au beau milieu d’un café-philo bobo : imprévu, discordant, absurde, troublant…

    La Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à la jeunesse, aujourd’hui, ne peut pas faire son travail sereinement. On se moque d’elle, dans un numéro spécial d’ Art Press consacré à la bédé que j’entrouvre en espérant y glaner quelques infos sur un artisan que j’admire, Christian Hincker dit "Blutch" (mais que dalle).

    En effet, cette commission a rendu un avis de première interdiction de l’album de Riad Sattouf intitulé : Ma circoncision. Sattouf est Syrien, il raconte de manière drôle et réaliste son enfance syrienne, l’éducation qu’il reçut de son père et de ses maîtres.
    Outre l’emploi de quelques mots crus tels que "bite", "couille", "ou fait chier", qui affligent la Commission mais qui n’aurait pu bien sûr à lui seul faire interdire cette œuvre, la Commission relève que « les Syriens sont présentés comme foncièrement antisémites, (…) que le but des enfants est de tuer des Israéliens, (…) et qu’on y montre des hommes pendus pour être suspectés d’être des espions au service d’Israël. »
    Et Art Press de se moquer de cette brave commission qui n’a même pas saisi que l’auteur de ces propos racistes (antisyriens) était lui-même Syrien…

    C’est pas très gentil. Moi je trouve qu’on ne peut pas en vouloir à cette commission de censure de s’être pris les pieds dans l’antiracisme. C’est un terrain vachement glissant.

    Naguère utilisé par ce finaud de Mitterrand pour stigmatiser Le Pen et enfoncer un coin dans le parti adverse, avec le succès qu’on sait, l’antiracisme est devenue une arme à double tranchant que quiconque sur la terre peut utiliser du moment qu’il est un peu basané. C'est là que ça se complique, comme un sketch d’Elie et Dieudonné. Juifs et Palestiniens se mettent sur la gueule à tout propos. Certains Juifs tentent de promouvoir un super-racisme, et donc un super-antiracisme, mais cette tentative fait plutôt flop, etc., etc.

    Un peu agacé par l'étalage de ces querelles de voisinage, par ces échanges de noms d’oiseaux dépourvus de la moindre poésie, mais néanmoins attentif aux détails, vous aurez compris que si les éditions Bréal-Jeunesse, dirigées par Johan Sfar, ont finalement passé outre cet avis de la Commission, c’est sans doute une coïncidence.

    Sur Durandur encule tout le monde, je serais curieux de connaître l’avis de la Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à la jeunesse…

  • Vicissitudes du sevrage

    « Aujourd’hui, comme tout le monde, je m’efforce de renoncer au tabac. L’embout de pseudo-liège (“plain-tipped”) se révèle, paraît-il, d’une faible efficacité pour prévenir le cancer du fumeur. »
    Constantin Copronyme

    Comme il y a plusieurs types de fumeurs, le “fumeur jouisseur”, le “fumeur peine-à-jouir”, le “fumeur suiveur” et le “fumeur locomotive”, il est impératif d’adapter chaque méthode de sevrage à l’inconscient et au non-dit refoulé de la victime du tabac qui veut s’en sortir volontairement - ou à l’aide de béquilles psychoparapharmaceutiques (Je compte en dire plus ultérieurement dans un billet qui devrait bouleverser la lutte antitabac, mais avant de dépiauter le paquet et d’étaler toute ma typologie, je me permets de dispenser un petit conseil ou deux à mon ami Constantin qui en a besoin hic et nunc ; certes, il ne les a pas sollicités, mais Arnold Steiner, un cousin de Georges plus difficile d’accès encore, ne dit-il pas fort justement : « Les meilleurs conseils sont ceux qu’on n’a jamais demandés, ni même songé à demander. »

    La principale difficulté qui vous guette, Cher Constantin, si vous êtes un “fumeur idéologique” comme moi, ce dont je ne doute pas un instant, c'est la consternation et l'envie impérieuse de refumer chaque fois que les lyriques appels à lutter contre le vilain tabac qui menace nos vies viendront agacer vos oreilles et vos nerfs à vif. Ah, le bel idéal démocratique que voilà ! Avec les manifestations contre le dernier pantin nommé rue de Grenelle, voilà de quoi galvaniser notre jeunesse qui promet. Formons des cortèges, déplions des banderoles, et chantons :

    « Debout ! les condamnés de la terre !
    Debout ! les forçats de la pipe !
    La raison tonne en son cratère,
    C’est l’éruption, l’aviaire grippe !
    Du tabac faisons table rase,
    Foule esclave, debout ! debout !
    Le monde va changer de base :
    Nous ne sommes rien, soyons tout !

    « C’est la lutte finale, etc. »


    Le conseil est donc de se tenir soigneusement à l’écart de la radio, des journaux (sauf ceux qui ne vivent pas de la publicité), de la télé, des cinémas, mais aussi des débits de tabac où les slogans les plus crétins sont imprimés à l’encre noire sur les paquets de cigarettes, venant ainsi compléter l’abrutissante philosophie soixante-huitarde : « Il est interdit d’interdire… sauf ce qui n’a aucune importance. »

    Si malgré tout vous parvenez à vous arrêter, Constantin, je vous souhaite de ne pas éprouver comme moi le sentiment désagréable d'avoir fait un effort pour vous agréger au troupeau de Panurge. Ce sentiment vous conduirait immédiatement à en rallumer une, je vous le garantis.

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  • Rappel utile

    Je suis assez effaré qu’on puisse prendre Michel Onfray au sérieux… Ce Matthieu Baumier dont Le Stalker fait la publicité sur "Haut et Fort", par amitié sans doute, aurait dû se retenir de s’abaisser au niveau de ce sinistre bouffon, dont les pamphlets rédigés à la hâte dans un français approximatif n’ont qu’un but, permettre à leur auteur de se faire une place sur un plateau de télé.

    C’est pourtant le b.a.-ba de la dialectique de Schopenhauer. Même moi je sais ça ! Il est parfaitement inutile de combattre des arguments imbéciles avec des arguments sérieux ; un adversaire de mauvaise foi quand on est de bonne foi.
    Baumier court le risque de faire passer le Traité d'Athéologie d'Onfray pour autre chose que ce qu’il est, un ramassis d'insultes.

    Le rôle de l’Église dans l’Holocauste et son devoir non rempli de repentance (2003) : c’est ce bouquin affligeant qui sert de “référence” à Michel Onfray. Franchement, on en rigolerait presque tellement ce titre à rallonge déborde de défoulement anticlérical primaire ! Amenez le prévenu Ratzinger devant le Tribunal pénal international, le réquisitoire est déjà prêt…

    En dehors de quelques instits génétiquement programmés, quoi qu’il arrive, même si la Vierge leur apparaît en plein conseil de classe ils continueront à délibérer, et si on ajoute à ça un comique aussi subtil que Dieudonné mais moins à la mode, Guy Bedos, personne ne lit les bouquins d’Onfray de toute façon, tellement ça pue la contrefaçon à plein nez.

    Le seul intérêt qu’on peut trouver à feuilleter son Traité d'Athéologie, c’est l’intérêt que j'y trouve en tout cas, c’est que ce genre de pamphlet permet de bien prendre la température de la haine qui échauffe les milieux anticléricaux. Onfray, c’est juste la première coulée de bile.

  • Western et féminisme

    L’abnégation des dames du temps jadis était certes remarquable ! Ainsi, lorsque Simone de Beauvoir s’enticha d’un cow-boy de Chicago, brûlant comme une saucisse happée sur le barbecue, elle troqua sans pudeur excessive sa garde-robe féministe et ses grands airs de baronne protestante contre une panoplie et un vocabulaire de midinette pour s’accorder à son nouveau boy-friend
    Idem pour Jane Fonda et son cow-boy de CNN plein aux as, enrichi par ses "films de guerre" : après l’avoir rencontré, Barbarella se mit à avoir des rêves de grand-mère au foyer.

    Il me revient un cas contraire. La revue Europe consacra il y a peu un dossier à la Comtesse de Ségur, auquel Michel Tournier prêta sa plume un peu grinçante. Mais est-ce Tournier qui raconte l’étonnant prosélytisme de la mère de la Comtesse de Ségur, je ne me souviens plus.

    Elle avait épousé le Gouverneur Théodore Rostopchine qui servit accessoirement de modèle à sa fille pour camper le sympathique Général Dourakine, comme on sait. Mais surtout, le Général Rostopchine bouta le feu à Moscou pour enrayer l’avance des troupes nazies… euh, je veux dire napoléoniennes, bien sûr, c'était en 1812.

    Convertie par un des nombreux Jésuites expulsés de France, Catherine Rostopchine entreprit de faire passer la frontière entre l’orthodoxie et le catholicisme à ses filles, une à une, secrètement, avec une habileté quasiment diabolique. Au grand dam de son époux, qui adorait sa progéniture et pour qui abjurer la foi orthodoxe revenait à trahir la Sainte Russie. Il dut en piquer, des colères mémorables et pittoresques, le pauvre général. Son épouse n’en continua pas moins de le trahir avec constance.

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  • L'armée des cadavres

    Peu après avoir enfin atteint l’âge de raison, vers vingt ans, j’ai cessé de fréquenter l’homme au caniche (Schopenhauer). Mais j’ai gardé le souvenir de quelques tours désopilants. Ses conseils dialectiques, par exemple.

    Michel Onfray aussi s’en est souvenu. Dans son Journal, Le Désir d’être un Volcan, éructant la bile, notre auteur de libelles à succès brûle les étapes, tous les petits "stratagèmes" de Schopenhauer un par un, pressé qu'il est d'arriver à l’“ultime stratagème”, l’attaque ad hominem - l’arme fatale de la dialectique.

    « En plaçant son travail [Requiem pour une avant-garde] sous les auspices de l’Internationale situationniste (…), B. Duteurtre n’empêche pas qu’il se trouve servir la même cause qu’un certain Claude Autan-Lara, membre de l’Institut, ancien député du Front National au Parlement européen, accessoirement cinéaste. »

    Le chapitre est intitulé Le révisionnisme esthétique. Ça, c'est l’arme fatale lourde - je veux parler de la shoah, bien sûr. Moi j'appelle ça du détournement de cadavres.

    Schopenhauer tient à prévenir ses disciples contre les risques d’une attaque ad hominem : elle peut dégénérer en rixe, ou en procès en diffamation. Duteurtre n’a donc pas intérêt à répliquer à Onfray que ses méthodes sont celles de la Gestapo. En outre, l'époque où un homme pouvait philosopher innocemment en compagnie de son caniche est bien révolue, et en mettant de leur côté les flics et les magistrats, les nouveaux dialecticiens ont nettement perfectionné les recettes artisanales de Schopenhauer.

  • Du grand style

    Le style de certains, c’est d’avoir des choses à dire :
    « Il y a dans les campagnes une autre tradition à laquelle j’associe ce vin de la Vallée du Rhône [le Crozes-Hermitage rouge], celle de la sanguette.
    Après avoir tué une volaille, on en recueille le sang dans une assiette ou un plat en terre, au fond duquel on dispose une couche de persil et d’ail haché. Lorsque le sang a coagulé, on le fait rissoler des deux côtés pour faire une sorte de galette, puis on lui ajoute du sel, du poivre et des épices (…) »

    La mort, le stylet, le sang frais, le feu, le plaisir, c’est presque du Shakespeare.

    L’intarissable F. Weyergans, lui, n’a pas grand-chose à raconter en revanche, hors quelque virée en boîte de nuit escorté de sa femme et de sa… maman. De quel genre d’homme s’agit-il ? Disons que trois jours chez sa mère sont un sujet qu’il nous impose sans gêne particulière. C’est un auteur contemporain.

    Inutile de parler du talent subtil de Weyergans, de ses contreprousteries de Narcisse rigolo. De louer la simplicité d’un auteur pourtant passé par Les Cahiers du Cinéma. Non, le devoir d’un critique aujourd’hui, c’est surtout de résister à la corruption, car sur le fond, si le métier sert encore à quelque chose, à supposer qu’il reste des lecteurs intelligents, l’affaire Potter m’en fait douter de plus en plus, sur le fond le boulot s’est considérablement simplifié.
    Grosso modo, les nouveautés peuvent être classées en deux catégories didactiques : “Bitable”/“Imbitable”. On peut se permettre d'exagérer jusqu'à "Indubitablement imbitable" (C. Delaume, PPDA, etc., etc.), ou de nuancer jusqu’à “À demi bitable”. Ainsi le dernier Weyergans, même si ce n’est pas très pratique de réclamer un demi-livre de Weyergans à son libraire.

    Je laisse à propos du dernier Dantec mon jugement en suspens, car je me doute que certains n’attendent que ce prétexte pour venir se défouler sur mon blogue en y tenant des propos confus.

  • Ab uno disce omnes

    Sarah,

    Vous me reprochez de manquer de cœur, etc., mais je n’en serais pas moins, pour conclure, quelqu’un d’aimable à vos yeux - façon de parler puisque vous ne m’avez jamais vu. Et de soupirer après mes flatteries de naguère…

    Vous avez déployé les ruses de votre sexe, j’ai fait la roue comme un paon. Vous paraissez croire que j’ai assez d’orgueil pour me croire unique ? J’en ai beaucoup, je dois le confesser, mais il ne faut pas en abuser.
    N’y a-t-il pas un temps pour tout, chère amie ? Un temps pour l’amour et puis un temps pour s’attarder à l’écart de la ville, une cigarette aux lèvres, en se tenant par les épaules, et penser que ce serait un beau spectacle de la voir s’embraser tout-à-coup pour des héros qui en valent la peine… (Bien sûr je ne prétends pas vous obliger à penser.)

    Si on m’avait dit en commençant ce blogue que je devrais en arriver à cette extrémité, à cet exercice d’auto-dénigrement pour vous dégoûter enfin… (qui justifie que je publie ce courriel, j’espère que vous le comprenez, sinon je l’efface aussitôt.)
    Je croyais ma misogynie assez dissuasive mais certains la remettent en question et disent que c’est en réalité un piège à filles que je tends ainsi. Il est vrai que lorsqu’on dit : « Circulez, y’a rien à voir ! », on trouve toujours des excités pour avoir envie de zieuter un coup.

    Continuons à laisser mon physique de côté, si vous voulez bien, Sarah, et venons-en directement au fond des choses : je ne suis pas riche, j’ai laissé la plupart des filles sur lesquelles je me suis penché insatisfaites, je ne fais pas trop de fautes d’orthographe - mais si j’avais de l'étoffe, franchement, croyez-vous que je serais en train d’écrire un blogue ? Je déteste les bobos mais je n’ai pas toujours le courage de leur démolir la gueule, je ne cuisine pas si bien que je le dis, surtout les desserts, je suis de moins en moins jeune, j’ai failli devenir alcoolique et rien ne dit que ce danger soit complètement écarté (à l’instant où je vous parle, j'ai envie d'une coupe de Dom Pérignon alors que l'heure de l'apéritif est encore éloignée)…
    Que dire encore ? Je sens assez fort des pieds, je ne me lave pas tous les jours, surtout les cheveux, j’ai horreur des toubibs et des hopitaux, plus encore que des flics et des commissariats (…)

  • La conspiration HP

    Fnac Montparnasse, 13h00. Je monte la garde devant la tour d'Harry Potter, bien décidé à repérer quel genre d'individu peut bien se risquer en plein jour à acquérir cette somme ésotérique - au moins du point de vue syntaxique.

    Trois quart d'heure que je poireaute et toujours rien… Mes nerfs sont mis à rude épreuve par cette invite inlassablement répétée au micro :
    « Gaulois, Gauloises, à l'occasion de la sortie du dernier album des aventures d'Astérix, vous êtes invités à venir déguster un verre de potion magique au rayon bandes-dessinées. » Peux pas abandonner mon poste, mais le nain de jardin à moustaches ne perd rien pour attendre, m'occuperai de lui une autre fois…

    « Pour elle, faire l'amour sans risque, c'était comme faire la guerre sans tuer » : Je m'avise que ce roman de Jardin, Pascal, le père, mérite peut-être la publicité que lui fait indirectement la bluette pornographique de l'autre Jardin, le petit, quand je vois un type bizarre s'amener. Mes regards torves ne paraissent guère l'effaroucher en vérité car l'escogriffe vient s'appuyer contre la tour d'Harry Potter même, à quelques centimètres de moi. Palsambleu, je sens sur mon front son haleine fétide ! Il l'entretient en mâchonnant des gélules sucrées qu'il extirpe toutes les dix secondes environ d'un petit sachet Haribo crissant. Il tourne les pages. Je ne l'aurais même pas cru capable d'un geste aussi tendre.

    Ah, oui, ce qui est bizarre, ce n'est pas qu'à trente ans passés il porte une casquette de baise-bôle vissée sur le crâne, non, c'est qu'il en ait une deuxième pendue à son falzard. Curieux. Peut-être un signe de reconnaissance entre sorciers ?
    Soudain, il repose sa brique de papier, fait un pas de côté, pioche une courte nouvelle de Tolstoï… Un véritable tour de passe-passe vient de se produire sous mes yeux… non, c'était une manœuvre, car le voilà qui bat maintenant en retraite les mains vides. Je pense qu'il a fini par me trouver louche, avec mon mauvais œil de jeteur de sorts.

    Quelque chose d'impalpable me retient de crier victoire, d'ailleurs, cinq minutes plus tard, mon quart d'alphabète revient à la charge, retâte un peu du Potter, avant de se décider à l'emporter, Alea jacta est !

    Une jeune Asiatique vint à son tour feuilleter un exemplaire du dernier Harry Potter, mais elle repartit aussitôt après en avoir pompé toute la substantifique moelle. Bah, si elle s'était laissé tenter, je ne lui en aurais pas voulu à cette fille : il paraît qu'on mérite un peu d'indulgence quand on vient d'aussi loin.

    Mais de blond enfançon au regard innocent, point ne me fut donné d'en détourner pendant mon tour de garde. J'étais prêt, pourtant ; bien volontiers je l'aurais pris sous mon aile de phénix pour l'initier aux facéties d'Oscar Wilde, à Jack London ou à Stevenson - ou à Paul-Jacques Bonzon, pour n'être pas accusé de snobisme.

    Par quel sortilège les aventures de cet apprenti prestidigitateur en blazer se vendent-elles par millions ? On ne sera pas étonné, je pense, de me voir avancer l'hypothèse du complot.

  • Sans rire

    Dans la presse, à propos d'une création à Beaubourg du mouvement de la non-danse (création inspirée de quelques lignes des Sorcières de Salem), ce commentaire inspiré d'un baveux :

    « L'ensemble est assez statique mais d'une perversité réjouissante. »

    Le même canard se fait un devoir de m'informer que quatre projets sont en concurrence pour occuper l'Île Seguin (et les dimanches des bobos), puisque finalement Pinault Le Munificent renonce à y exposer ses trésors :

    - Premier projet : deux ou trois collections privées étrangères d'art contemporain ;
    - Deuxième projet (soumis par Sarkozy) : le plus beau jardin du monde, avec des sculptures ;
    - Troisième projet : une annexe du Centre Pompidou [le Centre Chirac ?] ;
    - Quatrième projet (soumis par Villepin Le Galouzeau) : un centre européen de création artistique et une école d'architecture.

    Si je peux me permettre, en dépit de mon indécrottable ringardise, je préfère le projet de Sarkozy, mais sans sculptures (ou éventuellement des non-sculptures plates sur lesquelles on pourrait s'installer confortablement pour pique-niquer ou jouer au ping-pong).

    - Dernière minute - À l'attention de la fille pas très bien peignée qui lisait les mémoires d'Ernst Jünger dans le métro ce matin avec un sac en bandoulière bricolé à partir d'une ceinture de sécurité de Renault 5, je voudrais dire ceci : Mademoiselle, malgré ces trois détails un peu navrants, vous n'êtes pas moins charmante…

  • Demi-tranche de vie

    La scène est à la Fnac Montparnasse, cette fois, au rayon “Développement personnel”. Une femme dans mon dos parle fort à son portable :

    - Jipé ?
    - …
    - Ouais, ça y est, j’te téléphone pasque j’ai eu les résultats de l’analyse…
    - …
    - Ouais ben j’ai une hépatite B… (Je me retourne pour observer si un mouvement de foule se produit dans le rayon, mais il n’y a presque personne ; était-ce l’effet recherché ? Non, cette femme corpulente d’une trentaine d’années se comporte comme si elle était seule au monde avec son portable).
    - Ben ouais, ils m’ont dit que c’est emmerdant.
    - …
    - Ah non ! J’avais jamais rien eu jusqu’ici, moi, je sais pas d’où ça vient, ce truc, Jipé…
    - …
    - Comment ça s’attrape une hépatite B ? Ben ouais ils me l’ont dit : par le sang, la salive, ou par RELATION SEXUELLE, Jean-Paul…
    - …
    - ………
    - …
    - Je vais devoir passer quelques jours à l’hôpital, ouais, dès demain je vais à l’hôpital, ils faut qu'ils me soignent ça.

  • Tranche de vie

    La scène est à la Fnac des Halles ; deux “jeunes” d’une vingtaine d’années dont l’accoutrement imite péniblement celui d'une petite frappe de Los Angeles passent nonchalamment devant un rayon de livres lorsque l’un d’eux, le plus costaud des deux, aperçoit le Da Vinci Code sur un étal…

    - Ziva, t’as vu là c’est le Da Vinci Code !
    - Ouaip.
    - Wow, dis-moi pas que tu l’as lu !?
    - Ouais, ouais, j’lai lu.
    - Sans déconner, t’es ouf ?
    - Oh, mec, si j’te dis que j’lai lu !!
    - Paraît qu'y a des révélations là-dedans -de la bombe- c'est vrai ?
    - Ouais, ouais, c’est vrai… des révélations… des trucs zarbis… Mais aussi plein de grosses conneries !
    - Ah ouais ?
    - Ouais.
    - …Et alors, comment tu faisais pour savoir quand c’était les révélations et quand c'était les grosses conneries ??

  • Table rase

    « Après les apologies furieuses du seizième et du dix-septième siècle, les pamphlets purulents du dix-huitième et les romans humanitaires du dix-neuvième [et les slogans absurdes du vingtième siècle], l'Histoire, cette chose simple et lumineuse, « ce clair miroir où Dieu regarde extérieurement ses desseins », selon la belle expression de Donoso Cortès, la pauvre Histoire est devenue tellement obscure qu'il faut presque du génie pour y pénétrer.

    « Les philosophes de la liberté de conscience, si profondément corrupteurs, nous ont fait moins de mal que les soi-disant historiens modernes. Que dis-je ? Les philosophes n'auraient jamais pu mentir avec avantage si les historiens n'avaient enrichi l'indigence de leurs doctrines du scandale de leurs calomnies.

    « (…) Ce domaine sacré de l'Histoire que nous avions le devoir de respecter et de défendre comme un patrimoine, comme la sueur et le sang de nos pères, nous l'avons livré à tous les exploiteurs des émotions les plus vulgaires et à tous les bouffons de partis. Il est temps de réparer cette faute de laquelle Dieu finirait par nous demander un compte plus terrible qu'on ne croit. »


    L. Bloy, in : Nouveaux propos d'un entrepreneur de démolition

    Exactement. L'Histoire est une chose beaucoup trop sérieuse pour la laisser aux philosophes, aux soi-disant "penseurs de la modernité", aux cinéastes, etc.

    Bloy n'est pas lui-même historien, mais il aime l'Histoire, qui déjà n'est plus qu'une ruine dévastée, nous dit-il ; mais encore peut-il s'attacher à quelques belles colonnes, et L'Univers tire à vingt mille exemplaires.

    Bloy démolit à mains nues les faux plafonds cachant le ciel, il essuie les plâtres, mais le spectacle des bulldozers de la propagande faisant table rase de la cathédrale lui sera épargné, ces engins nivelleurs manœuvrés par les bouffons du parti communiste et du parti gaulliste.

  • Svastika et crucifix

    « On connaît les rapports entretenus par le Vatican avec le national-socialisme depuis les travaux de Saul Frielander (…), Daniel Jonah Goldhagen, W.O. Desmond (Le rôle de l'Église catholique dans l'Holocauste et son devoir non rempli de repentance, 2003).
    L'Église peut difficilement répondre à cette somme de faits avérés, de prises de position, d'analyses, etc.
    (…) On connaît moins bien la défense faite par Hitler de Jésus-Christ, du christianisme, de l'Église…
    (…) La lecture de
    Mon Combat suffit pour constater de visu [?] la fascination du Führer pour le Jésus chassant les marchands du temple et pour l’Église capable d’avoir construit une civilisation européenne, voire planétaire.
    (…) Albert Speer rapporte, par exemple, l’attachement d’Hitler au christianisme et à son Église, il désespère également de n’avoir pas un interlocuteur de qualité à la tête de l’Église avec lequel il puisse envisager de faire de l’Église évangélique l’Église officielle. »

    Traité d’Athéologie, Michel Onfray.

    D'ailleurs Staline et François Léotard ont été séminaristes, deux preuves supplémentaires que l'Église catholique est à l'origine de toutes les calamités, cataclysmes, pestes brune, jaune et noire, la mafia, le sida… Oups, j'ai failli oublier la Saint-Barthélémy et l'Inquisition (je précise que cette liste n'est pas exhaustive mais ouverte à toutes les suggestions*.)
    Écrasé par le poids de ces faits avérés, en dernier recours, il ne me reste plus qu'à rétorquer : « Nazi Toi-Même ! » - c'est beaucoup plus efficace que le familier « Nique Ta Mère » des banlieues.

    Mais attention, il faut savoir que celui qui lance : « Espèce de sale nazi ! » le premier, a un net avantage dialectique sur son ennemi, qui devra se contenter des insultes conventionnelles pour répliquer. Si on veut, on peut vérifier cet axiome en fac, sur le premier histrion barbichu de l’UNEF venu. Je ne vous cache pas qu'il faut être hyper rapide.

    *Les tremblements de terre ne sont pas communément imputés à l'Église catholique, mais quand on a deux sous de philosophie on ne peut pas s'empêcher de se demander : « Mais c'est terrible, comment Dieu a-t-il pu permettre ça ? » On manque de preuves contre Dieu, mais il n'a pas d'alibi, en quelque sorte.

  • Le Principe de Précaution

    Avant d’ouvrir le gros volume, le ministre de la Culture et des Cultes caressa la couverture illustrée d’un air satisfait. Isis l’observait. Son Assistante attendait de lui qu’il se comporte en oracle 24/24h. C’était même un peu agaçant parfois ; vu qu'ils étaient quand même amenés à se tenir ensemble dans le même bureau 14/24h, le ministre aurait souhaité un peu moins de révérence de temps en temps…
    Comment s'en plaindre, les nouveaux QCM conçus pour recruter le personnel ne laissaient plus de place à l’erreur. Tous les fonctionnaires du ministère étaient irréprochables désormais. D'ailleurs aucun écart de conduite n’avait été signalé depuis septembre 2012. Ensuite tout le monde au ministère s'était empressé d'oublier cette histoire de main aux fesses d’un autre âge.

    C’était le treizième tome de la série, le risque d’être déçu par la suite était faible, les douze précédents avaient fait la preuve de leur conformité.
    À voix haute pour sa collaboratrice, le ministre lut en détachant bien les syllabes : Harry Potter et la Poussée d'Archimède. Ça ressemblait presque à un oracle, justement.

    Le ministre se souvenait qu’Isis ne savait pas lire. Du moins, comme tout le monde, elle avait obtenu son baccalauréat, mais avait ensuite perdu peu à peu l’usage de la lecture. Le ministre devait bien admettre que son Assistante parvenait cependant à accomplir les tâches administratives qui lui étaient confiées sans trop de gêne. Elle disposait évidemment de logiciels très performants.

    « - Mais, dans tes loisirs, tu n’as jamais l’occasion de lire des livres ? s’était tout de même enquis le ministre, légèrement ému par l’aveu de sa plus proche collaboratrice.
    - Tu te doutes bien que j’ai d’autres distractions ! », avait-elle rétorqué sans le moindre clin d’œil. Cette réponse, pleine de bon sens, avait suffi à calmer le ministre.

    Par vanité néanmoins, l'homme d'État ne put s'empêcher de déclamer quelques lignes de plus, prises au hasard dans cette nouvelle mouture soumise à l'appréciation de ses services :

    « À l'extérieur, le ciel restait incertain, comme depuis le début de l'été. Ils traversaient les habituelles nappes de brume froide puis arrivaient sous un soleil timide mais dégagé. Ce fut durant une de ces éclaircies, alors que le soleil brillait à la verticale, que Ron et Hermione entrèrent enfin dans le compartiment… »

    Au moins, se dit le ministre, pour ce qui était du quota de vocabulaire, les normes étaient respectées. Et puis la beauté du texte ! Ce climat que l'auteur savait si bien installer !
    Mais le ministre préféra interrompre sa lecture car Isis était visiblement à bout de nerfs et venait de se fourrer son Ipod-supermini dans les oreilles.

    Par acquis de conscience, le ministre ferait quand même contrôler intégralement ce Harry Potter par l'Afnor ; en pure perte, sûrement, mais « Trois précautions valent mieux que deux » était la nouvelle devise du ministre depuis qu'un collaborateur un peu franc-maçon mais imprudent avait autorisé la remise sur le marché du Livre de la Jungle.
    Le ministre était en vacances à la Réunion. Et ce qui était prévisible arriva… Dès le lendemain Libération s’emparait de l’affaire et dénonçait le sexisme superlatent de Kipling, sans compter un soupçon de fascisme, par conséquent le danger pour les 8-20 ans de lire le Livre de la Jungle en dehors du système scolaire. Le pataquès ! Il avait dû rentrer précipitamment. Et failli perdre son fauteuil de sénateur à cause de cette bavure.

    Lorsque La poussée d'Archimède aurait subi tous les tests avec succès, le ministre pourrait apposer un large IMPRIMATUR sur la page de garde, avec son tampon rouge (le ministre y tenait beaucoup, ça n'avait pas de valeur légale mais lui rappelait son grand-père préféré, qui avait étudié le latin au collège et qui disait toujours, en débouchant les bouteilles de Bordeaux : « Carpe Diem ! Carpe diem ! »)
    L'Imprimerie nationale qui avait maintenant l'exclusivité d'Harry Potter pour la France - grâce au coup de génie du ministre -, mettrait en branle ses rotatives et, d'ici deux ou trois semaines, après une bonne campagne de pub, les Fnac pourraient en distribuer environ douze millions d'exemplaires dans tout l'hexagone - sans oublier les DOM et les TOM, bien sûr…
    Douze millions d'exemplaires ! « Et dire qu'il y a encore des lepénistes aigris dans ce pays pour se plaindre que les enfants ne lisent plus ! »

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  • Sous hypnose

    Dans le rayon "Farces et attrape-bobos" – puisque j'y suis, autant m'enfoncer –, pour un coût inférieur à une séance chez le psy, j'ai essayé le "Love-calculator", dont les résultats m'ont d'abord laissé sceptique :

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    Mais comme je sais bien qu'on ne peut espérer gagner le beau petit lot du premier coup, je consulte de nouveau le Dr Love :
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    C'est nettement plus convaincant cette fois ; un peu euphorique, je vais chercher au fin fond de mon inconscient et des mes fantasmes les plus secrets, et je ne suis pas déçu :
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    Bon, cela dit, le Dr Love n'est pas infaillible non plus, voyez plutôt :

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    À demi satisfait seulement, je décide donc d'aller me soulager du côté de Lahaie, Brigitte - quel joli patronyme !
    Elle n'a pas prêté le serment d'Hippocrate, certes, mais qu'importe le serment pourvu qu'on ait le diagnostic, et Brigitte sonde les reins à son tour, et les étoiles en prime, comme pas une :

    « Taureau : l’être est compliqué et à des tendances perverses marquées, sa sensualité est grande et ses besoins insatiables. Il est d’abord plutôt agréable mais son égoïsme inconscient peut devenir insupportable. Sa jalousie maladive le pousse à vouloir diriger la vie des autres dont il est très dépendant.

    « Bélier : cultive une fascination pour la mort et ses appétits sexuels sont intenses. Le sexe l’aide d’ailleurs à canaliser ses angoisses mortifères. Caractère passionné, absolutiste, il peut devenir sadique. Il a du mal à accéder au bonheur, sauf s’il trouve un métier ou une cause qui lui permet d’assouvir cette soif de pouvoir.

    « Cancer : une vie fantasmatique habite le sujet, son univers ténébreux est fait de rêves morbides qui ont tendance à le rendre pessimiste et l’isolent du reste du monde. Sa capacité à percevoir l’autre n’est pas toujours utilisée à bon escient car son anxiété permanente brûle les pistes. Il aura tendance à s’entourer de personnes qui ne lui conviennent pas.

    « Balance : aime comme on regarde un tableau de maître et elle caresse comme on touche une belle sculpture, le raffinement se cultive jusque dans l’alcôve, pas de fausse note ni de mot cru, ni de geste vulgaire. Le décor a une importance énorme, le rapport sexuel ne se fait pas dans un endroit en désordre.

    « Vierge : elle a du mal à aborder le domaine amoureux puisque celui-ci échappe au rationnel. C’est le signe où figure le plus grand nombre de célibataires. Sa peur d’être déçue la pousse souvent à rester seule. Pourtant l’affect est puissant, mais elle le ressent comme dangereux car il peut faire perdre tout contrôle. Autant dire que la vierge fuit la passion qu’elle trouve ridicule. »


    Assez ! assez ! Je me suis reconnu… c'est fort gênant d'être ainsi déballé, même par une professionnelle.

  • Martingale

    Un gros livre noir sous la direction du professeur Mikkel Borch-Jacobsen pour nous dire que la psychanalyse repose sur l'imagination de Freud et d'un aréopage de patientes et de confrères plus coincés du cul les uns que les autres, bref, que la psychanalyse n'est que littérature. Ce que Borch-Jacobsen oublie de démontrer, c'est qu'en plus c'est de la mauvaise littérature. Lisez plutôt A. Huxley :

    « La pseudoscience qu'est la psychanalyse est l'un des plus beaux spécimens du genre jamais conçu par l'esprit humain. Sa prodigieuse popularité, touchant toutes les classes, sauf celle des scientifiques, en atteste suffisamment. Et quand on vient à l'approfondir, on découvre qu'en effet elle possède toutes les qualités qu'une pseudoscience se doit idéalement d'avoir.

    (…) Quiconque est capable d'accepter des déclarations infondées comme des faits, quiconque se sent une affinité particulière avec la symbolique et une attirance pour le coup de force logique que représente la déduction analogique peut étudier la psychanalyse.

    Mais cette science a bien d'autres attraits et de plus positifs encore. Aux dépressifs elle propose des cures. À ceux qui veulent connaître les affriolants mystères du sexe - et qui, après tout, ne le veut pas : elle offre tout un lot d'anecdotes et de théories fascinantes. Si elle pouvait seulement s'incorporer une méthode pour prédire l'avenir ou encore une recette miraculeuse pour gagner des millions sans travailler, la psychanalyse deviendrait une pseudoscience aussi complète que le furent l'astrologie, la magie ou l'alchimie.

    Mais peut-être qu'en temps voulu ces améliorations de la théorie de base pourront être faites ; les psychanalystes étant des types débrouillards et très inventifs. Pour l'instant, même en la prenant telle quelle, elle reste incomparablement supérieure au magnétisme, à la phrénologie et aux rayons N (…). »

  • Unhappy few

    Les quatre ou cinq personnes qui s'intéressent encore à la grande peinture dans ce pays peuvent difficilement se dispenser de la lecture de L'Art face à sa destruction de M. Mazo. Celui-ci ne cherche pas à se faire valoir par des métaphores de langage brillantes ou en jonglant avec des concepts comme la majorité des "discoureurs sur l'art" (dans le meilleur des cas, car la plupart sont des branques incapables d'assembler un sujet, un verbe et un complément pour en faire un truc intelligible, cf. Soulages). Mazo parle simplement, en "homme du bâtiment", et c'est parce que ces attentats ignobles l'atteignent intimement qu'il délaisse ses pinceaux. Il n'a rien à fourguer.

    « Vous savez, Les Demoiselles d'Avignon, la toile est en Amérique mais si on l'exposait à Paris, au Louvre, dans la Grande Galerie, à la Tribune, on enlèverait certainement Watteau et on mettrait Les Demoiselles d'Avignon à sa place. On en est là ! Or, qu'est-ce que c'est que ce tableau ? C'est une horreur et un truquage. Picasso a pris des moyens qui sont, en partie, sortis de l'art nègre et, pour le reste, c'est avec son culot, sa façon de rabattre, de mutiler la représentation. Aussi, pour moi, ce tableau c'est - au contraire de l'opinion des bien-pensants - un témoignage exemplaire d'impuissance.

    Guernica c'est la même chose. Ce sont des hurlements et, en même temps, des hurlements d'impuissance devant la grande tradition. (…) Les Demoiselles d'Avignon, voilà ce qu'il faisait en 1907, bon. Mais Guernica, quand vous en parlez aux gens, même aux bourgeois en critiquant, « ah, mais non, protestent-ils, Guernica c'est merveilleux ! Non, non, je vous en prie, dites ce que vous voudrez de Picasso mais tout de même, Guernica c'est vraiment l'horreur du massacre ».

    Si on arrivait à les faire avouer, il y a des moyens pour dépister la vraie pensée, on verrait bien qu'au fond de leurs cœurs, ils trouvent que c'est horrible, mais enfin ils font semblant de trouver cela génial, parce que c'est l'horreur, la hideur du fascisme, les nazis.

    Maintenant, parlons un peu du fameux mot de Picasso, quand Picasso a été visité par Abetz. Abetz, homme bien élevé et cultivé, qui était chargé des relations "intellectuelles" entre les Français et les Allemands, a dit, paraît-il, devant
    Guernica : « C'est vous qui avez fait ça ? ». Et Picasso de répondre : « Non, c'est vous ». On a trouvé ce mot-là historique. Autrement dit, « c'est vous », les Allemands. C'était insolent, je ne sais pas s'il a vraiment prononcé ce mot, mais l'abbé Morel l'a répété, en Sorbonne, en 1946. Toute la Sorbonne a croulé d'applaudissements. Eh bien, entre nous, c'est idiot ! Il faut comprendre : « C'est vous qui l'avez fait, c'est-à-dire, c'est vous, par votre inhumanité, dans cette guerre d'Espagne, en massacrant de pauvres gens, c'est vous qui avez suscité ce moyen que j'emploie. »

    Là-dedans, je vois un sophisme et une grave erreur. D'abord le sophisme, c'est d'employer pour s'exprimer en art, que ce soit en prosodie, en peinture ou en sculpture, un moyen monstrueux, un moyen destructif, pour "dire" la destruction. En vertu de cela nous devons prendre un moyen liquide pour exprimer la mer ou un moyen gazeux pour peindre un ciel. Par conséquent, pour dire l'horreur de la guerre, se servir d'un moyen, inventer un moyen, qui, dans sa texture propre, est fait de signes meurtriers, c'est un sophisme. Les plus grands maîtres, Rubens faisant des chasses violentes et sanglantes, des combats cruels,
    La mort de Decius Mus, Delacroix peignant aussi des sujets pleins de cruauté, Les massacres de Scio (…) tous ces maîtres ont usé de moyens, au contraire, très serrés, très sévères, qui exprimaient en profondeur l'horreur même de la chasse, de la tuerie, de la guerre.

    Secondement, l'erreur des dates. En 1932, Picasso a fait, rue de Sèze, chez Georges Petit, une exposition très importante, de ses œuvres de jeunesse, ce qu'on a appelé la période bleue, qui étaient figuratives et souvent faibles :
    La femme à la taie, ou encore le portrait de sa première femme (…). Ce sont des œuvres qui, du point de vue du dessin, sont néo-académiques, car Picasso avait une main extraordinaire. (…) Eh bien, c'était déjà des tableaux dans lesquels il y avait des rabattements monstrueux, inspirés par des femmes courant sur des plages, terribles à voir, et tout cela venant du souvenirs de belles Américaines à Saint-Tropez ou ailleurs. Or, en 1932, il n'était pas question de guerre d'Espagne, pourtant, déjà, à ce moment-là, Picasso, comme il l'avait fait pour Les Demoiselles d'Avignon, et d'une façon cruelle, martyrisait, torturait la forme, la détruisait.

    Alors quelle vérité particulière peut-on voir dans l'adaptation monstrueuse d'un moyen à la représentation des scènes horribles
    Guernica, puisque Picasso l'employait déjà cinq ans avant, alors qu'il n'était pas question de guerre, en pleine détente heureuse ?

    Ces choses-là sont simples ; ce que je dis là c'est du pur bon sens, mais personne n'ose l'écrire.
    Et les bourgeois font semblant - je dis font semblant - d'admirer, et c'est de cela que nous crevons !


    Maurice Mazo