Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

athéisme - Page 2

  • L'imposture laïque

    J'entends un laïc athée se plaindre que les religions, musulmane, chrétienne, juive, etc. le dérangent parce qu'elles sont une insulte à la raison.

    D'une certaine manière c'est une bonne chose dans ces temps de spéculation intensive, de politiques hasardeuses et de nombres irrationnels, que cette défense typiquement française de la raison. Bon, le type ne dit pas si sa raison est celle du plus fort, la raison d'Etat, ou bien encore une autre ? Personnellement je préfère le terme de bon sens à celui de raison ; le bon sens qui permet aux Français de se méfier unanimement de leurs hommes et de leurs femmes politiques, pas franchement des exemples d'athéisme puisqu'ils se disent tous de bonne foi.

    Et ne parlons pas de R. Descartes, père fondateur allemand de la raison raisonnante française, qui a largement ouvert la porte à l'hypothèse scientifique, au lieu de la certitude expérimentale, et qui était persuadé que l'âme est une glande cervicale. D'ailleurs Descartes n'a pas voulu exclure la religion, mais seulement que les questions de science et les questions de religion soient traitées séparément, tout en sachant qu'elles peuvent difficilement l'être (tout ça est un peu confus, mais je rappelle que Descartes n'était pas français).

    Mais surtout mon plaignant, pour qui la religion insulte la raison, affirme tout haut ce que les tenants de la laïcité dissimulent habituellement, à savoir qu'elle n'est pas un principe de neutralité. On peut blasphémer contre la raison, et donc contre la laïcité. La laïcité situe la raison au-dessus de la religion. La raison vise à réduire la superstition, à moins qu'on ne veuille garder sa raison pour soi, et dans ce cas le principe de laïcité est parfaitement inutile ; pourquoi ne pas laisser plutôt cours à la libre-pensée ? D'ailleurs c'est bien mal connaître les doctrines athées les plus avancées que de croire qu'elles sont neutres et peuvent elles-mêmes se plier au principe de laïcité. La laïcité n'est donc pas un principe raisonnable, c'est un principe ubuesque, dépourvu de fondement juridique, scientifique ou religieux, qui débouche directement sur le principe totalitaire de la garantie des libertés publiques par l'Etat.

    La réalité du principe de laïcité, c'est que c'est un décret d'inviolabilité de la morale publique édictée par les élites françaises. La chasse aux sectes ? Elle n'empêche pas les jeunes Français de s'enrôler dans l'armée française, où sont appliquées des méthodes d'embrigadement typiquement sectaires. On ne peut pas accorder foi aux philosophes démocrates-chrétiens qui fournissent leur caution au principe de laïcité : pour un strapontin dans la République, un fauteuil à l'Académie, une chaire à la Sorbonne ou le commandement d'une place-forte militaire, ils seraient prêts à tous les parjures, même les plus astucieux. Ces démocrates-chrétiens font une concurrence déloyale à tout le monde - aux serviteurs de la raison d'Etat républicaine, en même temps qu'aux véritables chrétiens qui expriment la moins intime des convictions possibles qu'on ne peut servir deux maîtres à la fois.

    Avocats de la laïcité, soyez sérieux deux minutes. Le devoir religieux actuel n'est plus tant d'aller à la messe que de se rendre à la boulangerie acheter des oeufs de Pâques, ou d'être vêtu de façon sexy, c'est-à-dire de consommer ou d'être consommé (si vous êtes en bas de l'échelle). C'est à peine s'il reste assez de prêtres pour assurer la mission touristique de mise en valeur du patrimoine ! Les Français regardent la télé, ils vont au cinéma, ils sont largement affranchis des vieilles litanies et des vieux dogmes. A la limite, s'il n'y avait plus un seul chrétien, plus un seul musulman, plus un seul juif pour incarner la superstition, vous ne seriez plus aussi rassurés sur le fait que vous êtes dotés de la raison et des Lumières.

    Donc c'est faire bonne mesure de prévention contre la superstition en prohibant la publicité commerciale dans l'enceinte des écoles et des lieux publics. Cela indique que la raison se situe au-dessus de la superstition. Mais peu de religions s'opposent à une telle sobriété. Et puis cette précaution est aussitôt défaite par la presse, la télévision, qui n'hésitent pas à s'affirmer aussi laïques que l'institution scolaire.

    Enfin pour se placer du côté de la raison, c'est-à-dire plus ou moins de la science, même si le terme reste assez vague et semble parfois dangereusement recouper l'éthique, contre la religion, il faut avoir lu les textes saints de telle ou telle religion ; or beaucoup de tenants de la laïcité ne l'ont pas fait, ou bien s'en remettent à d'autres pour le faire, voire pensent que le christianisme a un quelconque rapport avec cet autre article de foi qu'est la démocratie, dont tout le monde parle, mais que personne n'a jamais vu.

     

  • Athéisme

    Au fait, "athéisme" veut-il dire : ne pas croire en dieu, ou bien : croire en l'homme ?

  • Athéisme

    Ce que les femmes aiment, ce ne sont pas les hommes mais leur capacité à faire la guerre. Ce que les hommes aiment, ce ne sont pas les femmes, mais leur incapacité à faire la guerre bien qu'elles soient douées pour la provoquer "par amour", disent-elles.

    Si l'on s'en tient à cet examen objectif des faits, l'Amour n'est pas, mais seulement la Nature, recouverte d'une couche de confiture sociologique.

    Il y a donc une sorte de science qui mène à l'athéisme. Mais le Christ Jésus lui aussi manifeste le plus profond mépris de la société, ses contrats, ses taxes, ses fêtes, son architecture... et pourtant il n'est pas athée.

  • Matérialisme chrétien

    La confusion du matérialisme et de l'athéisme fait partie du mensonge moderne (cf. notice débile wikipédia).

    - A contrario on peut affirmer que le matérialisme et l'athéisme vont très rarement de pair. Nitche, par exemple, est bien "matérialiste", mais il n'est pas "athée" au sens moderne du terme le plus courant, où la dimension sociale et religieuse a pris le dessus sur la notion de dieu (au sens large). Autrement dit, dans la conscience de l'athée moderne, le respect de l'Etat et de la loi s'est substitué à celui de dieu. Or Nitche n'entre pas dans cette catégorie-là.

    Afin de prouver que dieu n'existe pas, l'athée moderne (l'évolutionniste Richard Dawkins) n'a qu'à faire la démonstration de la capacité scientifique de l'homme. Si les chrétiens associent la polytechnique ou les arts libéraux à Lucifer ("Science sans conscience n'est que ruine de l'âme"), c'est parce que seul dieu procure la conscience scientifique nécessaire à la science véritable, qui se situe "par-delà bien et mal", non au sens naturel de la culture de vie satanique, mais au sens historique.  

    La démonstration de la toute-puissance scientifique de l'homme ne relève pas de la science matérialiste, qui privilégie l'expérience. Pas plus que le transformisme darwinien n'est une science matérialiste. La démonstration de la capacité scientifique autonome de l'homme fait en réalité une place plus large à l'hypothèse que n'importe quelle religion un tant soit peu étayée.

    Afin de prouver que le Christ Jésus n'est qu'un homme ordinaire, et les prophètes juifs des imposteurs, Nitche s'efforce de démontrer que seul le droit naturel et la philosophie naturelle, rejetés par les apôtres chrétiens, sont rationnels et scientifiques aux yeux de Nitche, pour qui la modernité est un nihilisme judéo-chrétien débile.

    L'évangéliste de Zarathoustra-Satan a été trahi par tous ses disciples ou presque, dans la mesure où sa misogynie et son matérialisme sont inconciliables avec l'éthique, l'art et la science modernes.

    - C'est donc une science spéculative et non matérialiste que l'on peut rattacher à l'athéisme moderne.

    - Dans un récent sermon, l'ex-évêque de Rome rend hommage à Karl Marx et sa dénonciation de l'argent comme un moyen d'aliénation... avant de se démarquer du "matérialisme" de Karl Marx, sans donner de raison.

    La première chose à dire de la foi chrétienne, c'est qu'elle rejette l'animisme païen, c'est-à-dire la croyance dans le prolongement de l'existence au-delà de la mort, sous la forme d'une âme. La résurrection du corps Et de l'âme, promise par les évangiles, interdit la spiritualisation de l'âme propre à certains cultes païens. Cette spiritualisation passe en effet par une dissociation idéaliste de l'âme et du corps, et le dénigrement corrélatif de ce dernier, également typique du pire intellectualisme.

    Le christianisme se montre donc le plus résistant à la ruse anthropologique élitiste qui consiste à exalter l'âme. Cette ruse est typique du pharisaïsme de J. Ratzinger et de la clique démocrate-chrétienne en général ; elle ne fait que renouveler la ruse platonicienne de Thomas d'Aquin. J. Ratzinger concède à Marx un jugement éclairé de l'aliénation capitaliste, tout en feignant d'ignorer que cette dénonciation de l'argent en tant qu'instrument d'aliénation entre les mains de quelques-uns est indissociable du matérialisme et du rejet de l'élitisme sournois des élites libérales.

    Ce rejet réflexe du matérialisme par l'institution ecclésiastique chrétienne n'a pas de fondement chrétien ; c'est la détermination psychologique qui est la plus antichrétienne et peut être rejetée au nom de l'évangile. Ce rejet réflexe du matérialisme s'explique par le fait qu'il est impossible de fonder une institution ecclésiastique sur une logique scientifique - d'autant moins que cette institution se réclame du Messie, dont les paraboles renversent la foi et la raison naturelles. L'Eglise romaine est la matrice des institutions occidentales les plus dangereuses pour l'humanité.

    Mais nul n'a produit une critique plus radicale de ce mouvement institutionnel et anthropologique que le tragédien chrétien Shakespeare, sur la base d'une science matérialiste clairement énoncée par Francis Bacon Verulam. Il est difficile pour le profane de comprendre que les tragédies de Shakespeare incluent et illustrent la montée en puissance de l'antéchrist au cours de l'histoire, ses diverses manifestations dont la principale est désignée comme la synagogue de Satan. Dans la stratégie d'éradication du christianisme et de son message évangélique, il n'est dévolu à Nitche qu'un rôle secondaire.

  • L'Athéisme

    "La religion en tant que source de consolation est un obstacle à la véritable foi, et en ce sens l'athéisme est une purification."

    Simone Weil

    Le propos de Simone Weil fut valable jusqu'à l'invention de la laïcité, morale fanatique et par conséquent consolatrice - tirant consolation de la puissance de l'Etat totalitaire et de ses lois.

    Le fait que des athées et des croyants puissent s'entendre sur le principe commun de la laïcité indique qu'il y a une matière plus réconfortante que la religion ou la morale laïque, sur laquelle les bourgeois cyniques peuvent s'entendre, par-delà leurs croyances ou leurs convictions, c'est l'argent.

    La sincérité et la patience de Simone Weil ne suffisent pas ; il faut trancher les gorges des rhéteurs, comme Shakespeare. La "laïcité" a pour seul but de permettre aux chrétiens de servir un autre maître que Dieu : Moloch Baal.

  • L'Athéisme

    L'athéisme n'existe pas. Car vivre, c'est avoir la foi. C'est la question du salut qui divise les hommes, non pas celle de dieu.

    Croire que le salut est impossible revient à croire qu'il n'y a pas d'amour dans le monde. De fait, cette conception ne manque pas de réalisme. D'après les évangiles, il n'y a pas d'amour dans la société, entièrement bâtie sur le rapport de force et le déterminisme. Le Messie des chrétiens oppose une fin de non-recevoir à toutes les questions sociales : perte de temps. C'est la faiblesse de l'âme humaine, son aveuglement, qui incline l'homme à considérer les questions sociales essentielles.

    Shakespeare nous montre que l'iniquité particulière de l'Occident réside dans l'ordre moral chrétien, l'assortiment de la vertu païenne à une spiritualité qui ne lui accorde pas de place.

    Francis Bacon Verulam démontre dans ses essais que l'Antiquité n'a jamais été athée, comme la culture de vie païenne le prouve, et son éloge de la vertu. Certains théologiens païens ont même été capables de concevoir le salut, c'est-à-dire une certaine forme de sagesse surnaturelle, supérieure à la vertu, permettant à l'homme d'échapper à la puissance des éléments, et non comme la vertu de s'y adapter simplement.

    Bacon contrecarre donc par avance les efforts de l'université moderne dans l'autre sens, pour découvrir dans la philosophie antique "pré-chrétienne" les prémices de l'athéisme. Effort du type de l'interrogation d'un universitaire assez minable, Paul Veyne : "L'homme antique avait-il foi dans ses mythes et sa religion ?". Question équivalente : "Le citoyen républicain moderne a-t-il foi dans l'argent ?" Réponse : "Oui, tant que le cours de sa monnaie n'est pas trop dévalué ; au-delà, il bascule dans l'athéisme." L'homme, en général, a foi dans son activité quotidienne, et fait confiance à l'élite religieuse pour les questions plus théoriques. Nouvelle question : "Le citoyen républicain moderne croit-il que la littérature républicaine est autre chose qu'un simple divertissement ? Et si oui, quoi donc ? Pour quelle raison défile-t-il dans les musées et les foires d'art moderne ?"

  • L'Athée

    Où l'athée se montre très semblable au catholique romain, c'est par l'ignorance crasse du b.a.-ba de sa propre doctrine. Je pense en particulier à Michel Onfray, qui tient sur le matérialisme les propos les plus délirants. Matérialiste, Nitche ? Il n'y a pratiquement aucun Boche qui le soit. Bien sûr le fétichisme et la religion de l'art (la musique) sont fondamentalement animistes.

    Je n'en veux pas à cet énergumène pour son ignorance, mais il est typiquement, à l'inverse de L.-F. Céline, le type du républicain qui se fait un devoir de bourrer le mou au peuple.

    Si les valeurs républicaines sont aussi débiles, c'est historiquement parce qu'elles ne font que proroger les valeurs éthiques chrétiennes.

    Je conseille aux athées la lecture de L. Feuerbach (Nitche n'est pas athée, mais nostalgique du droit divin d'ancien régime) ; cet autre Allemand (c'est un fait historique que l'arriération philosophique allemande et l'athéisme sont liés) élucide beaucoup mieux la psychologie athée moderne, et comment pour que l'homme devienne son propre dieu (processus aussi incestueux qu'oedipien), l'étape préalable de l'invention d'une religion à sa mesure était indispensable, où le clergé latin a joué un rôle subversif décisif, nul n'étant mieux placé que lui pour ôter son caractère surnaturel au message évangélique. Il y a deux sortes de tocards ultimes en France aujourd'hui : les laïcs athées qui s'opposent à la théorie des "racines chrétiennes", alors même qu'ils en sont le prolongement ; et les démocrates-chrétiens insanes qui revendiquent ces "racines chrétiennes" impossibles selon les écritures saintes. Et cette chienlit-là est déversée sur le peuple et les gosses par des fonctionnaires qui ne méritent pas un centime. 

  • Dialogue avec l'Athéisme

    "L'athéisme n'est point. Les grands, qui en sont les plus soupçonnés, sont trop paresseux pour décider en leur esprit que Dieu n'est pas ; leur indolence va jusqu'à les rendre froids et indifférents sur cet article si capital, comme sur la nature de leur âme, et sur les conséquences d'une vraie religion ; ils ne nient ces choses ni ne les accordent : ils n'y pensent point."

    La Bruyère

    Il est vrai que l'élitisme est une des principales causes de l'athéisme. Pour les hommes d'élite qui ont la foi, Dieu n'est le plus souvent qu'un simple principe, ce qui revient au même que l'athéisme (Pascal : "Dieu est un point." ; Napoléon : "Et l'hypothèse de dieu ?").

    Le pouvoir ou la quête de puissance, à quoi les hommes d'élites sont occupés, est une fuite qui ne leur laisse pas de répit pour des choses moins vaines. Dans le peuple, l'athéisme est souvent lié à l'esclavagisme, c'est-à-dire la contribution du peuple à la gloire des élites (y compris cléricales). L'athéisme est aussi dans "la science sans conscience", c'est-à-dire la technique, assujettie elle aussi à la quête de puissance.

    A la thèse classique (dieu est un principe ordonnateur) succède la prothèse moderne (l'outil technique), car si dieu n'est pas indispensable dans le régime technocratique, celui-ci ne peut pas se passer de la transcendance du pouvoir et de l'éthique. La science technocratique ne recule devant aucun paradoxe pour la fournir, aussi dogmatique que l'est le cinéma. C'est pourquoi il n'y a pas de différence essentielle entre une théocratie et une technocratie. Dès que vous entendez parler d'éthique juive ou d'éthique chrétienne, vous pouvez être sûr d'être en présence d'un de ces bricoleurs sournois de la technocratie moderne, habiles à forger des idoles pour méduser le peuple.

  • Marx antimoderne

    La démonstration que Karl Marx n'est pas moderne tient en une phrase : aucun historien un tant soit peu sérieux n'ignore le caractère profondément religieux de la modernité. J'insiste sur le mot "profondément", car Marx est le théoricien d'un fanatisme religieux accru à mesure du temps, que le développement tentaculaire et conjoint des banques et de l'Etat prouve.

    Soviétiques ou bien libérales, les élites se sont efforcées et s'efforcent encore de faire passer le marxisme pour un athéisme. En réalité, le reproche de Marx aux Eglises chrétiennes est de s'être servies de l'argument religieux pour conditionner le peuple. De sorte que le conditionnement au malheur, comme au bonheur, est du point de vue marxiste un signe d'aliénation religieuse, et la folie pratiquement significative de cette aliénation.

    Freud est moderne, puisqu'il se contente de pointer la cause familiale, disculpant ainsi la superstructure étatique et économique, bien qu'elle soit devenue la première cause du conditionnement, de l'Orient par l'Occident géographique, et de l'Occident par lui-même ; Marx n'est pas moderne ; il guérit au contraire de la bêtise moderniste et sait parfaitement avec quelle force l'économie et le droit modernes imposent leur condition à tous.

    De la même façon Balzac, plus ou moins l'équivalent français de Marx, lorsqu'il peint en historien la France du XIXe siècle en proie au vice juridique n'est pas moderne. Ce sont toutes les nouvelles garanties judiciaires et les corporations qu'elles animent qui sont modernes.

    L'argument religieux de la modernité est une justification. De ce fait il émane nécessairement de l'élite, dont c'est le rôle essentiel de décréter que la justice sociale est, y compris et surtout quand elle s'avère la plus virtuelle.

    Bien sûr Karl Marx n'est pas antimoderne comme cette toupie de Benoît XVI ou le Dalaï Lama, au point de vouloir maintenir un ordre religieux caduc ou le restaurer. L'histoire n'a pas de sens chronologique, ce qui lui évite de tomber dans la casuistique religieuse du voyage dans le temps ou de la science-fiction.

    Cette antimodernité là, il faut aussi en dissuader les musulmans les plus pauvres, car elle n'est qu'une niche à l'intérieur de la modernité, destinée à la renforcer. C'est le même tour de prestidigitation dans la modernité que dans le cinéma : faire croire que les choses avancent, alors qu'on nage en plein conservatisme.

    La modernité est d'ailleurs synonyme de "technocratie". On ne trouvera rien chez Marx pour la justifier. La technocratie est parfaitement statistique, c'est-à-dire nulle et non avenue. Laissez la modernité aux énarques et aux polytechniciens, robots qui vont à la casse au pas de l'oie.

     


  • Evangile de Judas

    Le socialisme en général, non seulement le nazisme, est l'idéologie la plus contraire au christianisme ; car comme Jésus le rappelle plusieurs fois, son royaume n'est pas de ce monde, et le socialisme est l'utopie politique qui se rapproche le plus de cette impasse ; compte tenu de la Genèse et de la fascination exercée sur Adam et Eve par la morale, dichotomie à l'infini, cette voie-là ressemble à une rechute.

    En outre, le communiste Paul Lafargue a souligné toute l'hypocrisie de la "doctrine sociale de l'Eglise", instrumentalisation du christianisme au profit des cartels, plus ignoble encore que la soumission du clergé médiéval à certains principes féodaux païens.

    Au-delà de la sainte diatribe de Lafargue, le chrétien observera que le socialisme chrétien du XIXe siècle coïncide avec l'éradication de la foi dans l'activité de Satan dans le monde, sans laquelle il n'est pas de christianisme, encore moins de christianisme combattant (mais éradication nécessaire au socialisme). Baudelaire, possédé et reconnaissant cette possession, est plus proche du christianisme que les papes catholiques et leur foutue doctrine sociale.

    La séduction du socialisme sur de nombreux chrétiens voire de nombreux juifs en Allemagne (le père de Marx) et en Russie s'explique facilement par le fait que l'anthropologie fondatrice des utopies socialistes est d'origine "judéo-chrétienne". C'est très net dans la doctrine nationale-socialiste de Hegel. L'athéisme socialiste moderne est ainsi plus proche du christianisme qu'il ne l'est du paganisme antique. Diderot est le seul penseur des Lumières qui peut être qualifié d'athée à bon droit, et c'est chez lui que la transition du jansénisme hérétique aux valeurs libérales est la plus flagrante.

    *

    J'entendais récemment un journaliste incompétent (de plus) s'étonner que l'"économiste" français Maurice Allais soit à la fois "socialiste" et "libéral". Mais si M. Allais n'était pas "socialiste" ET "libéral", il ne serait qu'un crétin de journaliste. Il n'y a aucune raison, ni économique, ni historique, ni scientifique, d'opposer le socialisme au libéralisme (seule la propagande cinématographique le permet).

    L'application de la doctrine libérale est tributaire depuis le début d'un Etat central fort. Les Etats-Unis sont une nation à l'échelle d'un continent ! (Compte tenu que son économie n'aurait pas été viable sans la main-d'oeuvre mexicaine "libre" de lois excessivement tatillonnes.) il n'est par ailleurs aucun Etat socialiste centralisé qui soit parvenu à se soustraire au mercantilisme libéral : ni l'Allemagne nazie, ni l'URSS.

    Socialiste et libéral Maurice Allais, comme son confrère Jacques Attali et les trois-quarts des dirigeants de la planète. Point commun du libéralisme et du socialisme, qui ne devrait pas manquer d'inspirer le dégoût aux chrétiens : le fait de présenter la guerre comme un moyen de libération.

    En fait de chrétiens "libéraux ou socialistes", de Léon XIII à Frédéric Ozanam en passant par Montalembert, Chateaubriand, toute la cohorte des vieilles chouettes pédérastiques, il n'y a que des suppôts de Satan prônant l'évangile de Judas.

  • Foi d'athée

    J'ai très tôt douté de l'athéisme de mes contemporains, dont on devine assez facilement le rôle social qu'il joue dans le capitalisme. Les Etats-Unis procèdent différemment, par une extrême segmentation, encore plus commode visiblement pour le "business". Des athées sincères il doit y en avoir encore en Chine, dans les foules d'opprimés, car il semble que l'oppression engendre aussi bien une foi naïve qu'un athéisme naïf ; ça correspond à ce que Trissotin nomme pompeusement "syndrome de Stockholm" : un réflexe sentimental.

    (Je mets de côté la folie d'intelloïdes comme Nitche ou Gombrovitch, manifestement due à l'abus de mauvaise littérature germanique ; et naturellement les suppôts de Satan, qui se recrutent plus facilement dans les milieux intellectuels anesthésiés.)

    L'étude des religions antiques prouve, elle, que l'athéisme tel que nous le pratiquons est une croyance assez neuve et isolée. La boutade de Claudel, qui vaut quand même mieux que le pari blasphématoire de Pascal : "Ce n'est quand même pas de ma faute si Dieu existe !" pourrait fort bien avoir été prononcée par d'antiques païens ne "jouant" avec Dieu que dans des limites raisonnables et non à l'infini.

    Ce qu'on observe dans l'Antiquité, c'est bien plutôt une forme de scepticisme savant à l'égard de telle ou telle religion, notamment à l'époque romaine, et qui a dû favoriser grandement la conversion rapide au christianisme. Un scepticisme plutôt comparable à la remise en cause de l'anthropologie judéo-chrétienne par Marx et Engels, dont il n'est pas paradoxal qu'elle ait contribué à allumer une flamme communiste vivace. Lucrèce n'est pas athée ; en revanche on peut dire qu'il se forge sa propre religion, prédestinée pour une raison très précise à plaire aux chrétiens du XVIIe siècle, mais c'est une autre histoire.

    On aboutit au paradoxe (et certainement ce paradoxe a sauté aux yeux de Marx avant moi) que l'athéisme, disons le plus sûr de lui-même, qui tient à peine l'espace de deux siècles sur quelques continents, contre trois mille ans de déisme, cet athéisme est typiquement un athéisme chrétien. Autrement dit, sans le christianisme, Michel Onfray ou Nitche, pour prendre des exemples bien bornés, seraient inconcevables. Sale affaire ! D'autant plus que Onfray ou Nitche ne sont pas responsables. Ils soufflent sur un foyer qu'ils n'ont pas allumé. Ils sont les avatars du piétisme et d'un recentrage -quasi mathématique-, du christianisme sur la foi, véritable vase de Pandora.

    Dans ce cas les insultes de Ben Laden et ses accusations d'impiété sont-elles justifiées ? Oui, elles le sont. D'ailleurs les conversions de jeunes chrétiens à l'islam sont beaucoup plus compréhensibles à l'heure actuelle, étant donné le cynisme presque palpable d'une majorité de peuplades chrétiennes. Reste que les musulmans feraient mieux de comprendre que le piétisme est une voie de garage.