Le rapport d'enquête Sauvé sur la pédocriminalité dans l'Eglise catholique en France vient d'être rendu public par les enquêteurs (CIASE). S'appuyant sur la méthode statistique, ce rapport évalue à 300.000 le nombre des crimes commis sur des enfants par des prêtres et des laïcs catholiques au cours des soixante-dix dernières années (1950-2020).
L'ampleur de cette criminalité est-elle surprenante ?
- Le rapport Sauvé ne fait que répéter l'enquête de Frédéric Martel ("Sodoma"), menée à l'échelle internationale, qui exhibait déjà toute la gangrène.
Ce journaliste décrit, plus utilement que le rapport Sauvé, le procédé de "l'omerta" à l'oeuvre au sein de l'Eglise catholique, ainsi qu'une forme d'angélisme de la part de certains prêtres, non au sens spirituel du terme, mais au sens « d'imbécillité », propice aux exactions des prêtres sournois.
Ajoutons ici que la dépravation sexuelle d'une partie du clergé trouve dans les malversations financières un prolongement logique. crimes sexuels et crimes d'argent sont des crimes cupides. Bien qu'ils frappent l'imagination moins durement que les crimes sexuels, les crimes financiers ont aussi toujours des conséquences atroces.
- Le monde dans lequel nous vivons est ultra-violent. On pourrait citer de nombreux exemples de cette violence que la France ne veut pas regarder en face. La violence touchant les enfants choque particulièrement, mais c’est loin d’être la seule. Cette violence, Georges Orwell l’a très bien décrite dans « 1984 » comme une violence contributive à l’organisation sociale, dont l'Etat ne peut se passer ; or les représentants officiels de l’Eglise catholique représentent une des cautions morales du monde moderne dans de très nombreuses nations.
L’ampleur des crimes n’est pas surprenante, mais le déguisement du prêtre catholique ajoute à l’horreur du crime. Il s’agit ici d’abus au nom de l’Amour. L’Antiquité considérait les crimes commis au sein de la famille, le parricide ou le fratricide, comme particulièrement odieux ; cette mesure semble dépassée ici.
En conséquence, faut-il dissoudre l’Eglise catholique ?
Souvenons-nous de cette parabole de Jésus-Christ, faisant écho aux prophètes : "Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre porter de bons fruits. Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits est coupé et jeté au feu." (Mt. 7:18-19)
Jésus-Christ condamne ici la religion des pharisiens hypocrites, qui ne donna pas les fruits escomptés. Plus largement, il enseigne que la Foi se situe au-dessus des affaires et des institutions humaines. L’engloutissement de la Cité du Vatican dans une faille sismique, avec tout son personnel, laisserait la Foi intacte. On ne doit pas confondre, comme les prêtres juifs, le Temple et la Foi.
Mais je suis mal placé pour parler de dissoudre l’Eglise catholique, en étant déjà sorti moi-même il y a plusieurs années, sans esprit de vengeance, comme on s’écarte d’une ruine branlante sur le point de s’écrouler.
D’ailleurs ne peut-on tenir l’Eglise catholique pour d’ores et déjà dissoute ? Je m’explique : elle est partout et elle est nulle part. Le catholicisme imprègne en effet tellement la culture des nations occidentales, qu’il est très difficile de dire où le catholicisme commence et où il s’arrête. Même laïques, de nombreuses cultures sont déterminées par le christianisme ; quant à l'islam, il paraît souvent entièrement déterminé par le rejet des "valeurs occidentales". Le catholicisme EST la culture occidentale (Je ne m’étends pas ici sur cette imprégnation, comme je l'ai déjà longuement évoquée par ailleurs).
L’Eglise catholique est donc déjà « dissoute » comme le sucre est dissout dans le thé chaud.