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Lapinos - Page 43

  • Dialogue avec l'Antéchrist

    - Volonté de Nitche étrangler la philosophie moderne dans les serres de l'art. Ultime tentative de sauver le monde.

    - Le monde prisonnier de Satan = christianisme/Satan prisonnier du monde = Nietzsche.

    - Modernité = victoire du sous-homme sur le surhomme, prélude à la fin du monde. Victoire de la quantité et de la masse indistincte sur l'art et les biens de qualité. Victoire de la physique quantique sur la physique égyptienne. Mais la quantité et la masse sont instrumentalisés par les élites.

    Mon dialogue avec l'antéchrist progresse.

  • Dans la Matrice

    Avant d'être autorisé à publier des poèmes faisant l'éloge de la condition humaine, un stage de quelques mois dans une mine de charbon, un champ de coton ou un bordel africain devrait être obligatoire. On serait alors débarrassés de 99% des curés qui chantent : "Y'a d'la joie, bonjour-bonjour les hirondelles..." Il ne resterait plus qu'1% de masochistes, pas de quoi fonder une Eglise.

  • Très grande bibliothèque

    La littérature est le signe le plus significatif du caractère essentiellement hérétique de l'homme. Si les anthropologues avaient des couilles, ils diraient ce qu'ils sont : les tenants de l'hérésie, qui lui doivent leur fortune et leur position dans le monde.

    Prenons un homme en quête de vérité. Mettons que ce soit le cas de Marx, et qu'il soit sincère dans sa démarche. Dans ce cas cet homme devra nécessairement affronter les serpents de l'anthropologie, que la caste infâme des anthropologues enverra contre lui.

    Il y a sans doute encore des jeunes gens qui espèrent que les vastes bibliothèques leur permettront de découvrir une vérité, au moins sous la forme d'un point d'appui, pour pallier les effets écoeurant du mouvement erratique du monde moderne.

    En fait d'expérience, les vieux tocards qui se permettent de donner des leçons de morale à la télé, n'ont appris que l'écoeurement et les méthodes pour se faire vomir afin de pouvoir en croquer encore un peu avant de mourir. Ils demandent le respect, alors qu'ils ne se respectent pas eux-mêmes.

    Les jeunes gens qui espèrent dans les vastes bibliothèques doivent être avertis qu'interroger l'anthropologie, c'est comme de demander son chemin au minotaure dans le labyrinthe. L'anthropologue ne connaît que l'hérésie et le moyen de s'en servir pour son propre usage, qui consiste essentiellement à occuper une position morale dominante, et à la conserver en posant le talon sur le visage de celui qui voudrait l'en déloger.


  • L'imposture chrétienne-libérale

    Mgr Dagens, membre de l'épiscopat français et de l'académie française, a le don de cumuler sur sa tête les plus vaines gloires mondaines qu'on puisse faire. Il ne lui manque plus qu'à présider le Rotary-club de son diocèse pour compléter le déguisement.

    - Sur son blog, il fustige l'attitude du parti catholique intransigeant ou réactionnaire, qu'il caractérise comme une volonté de reconquête d'une position dominante au sein de la société française. La sienne, d'attitude, consiste à lécher le bâton merdeux de l'éthique démocratique-libérale. Opposer la servilité à la rébellion, voilà en quoi consiste la tactique du démocrate-chrétien, sur la base d'un existentialisme que Bouddha inventa bien avant le sieur Dagens.

    - Disons deux mots du parti "intransigeant" ou réactionnaire. D'abord, s'il était réellement aussi intransigeant que ça, il y a belle lurette qu'il serait allé botter le cul de Mgr Dagens, ou qu'il lui aurait rappelé que tout porteur de bicorne exprime par-là son allégeance à Satan. Le christianisme de son prédécesseur Jean Guitton, est d'ailleurs le plus diabolique qui se puisse faire - une sorte de bénédiction de la technocratie et des technocrates.

    - Le christianisme libéral justifie toutes les réactions violentes contre lui, non pas chrétiennes mais politiques, en raison de l'infâmie qui consiste à indexer l'éthique sur les valeurs boursières. Et les Juifs qui se croient sous la protection de la démocratie-chrétienne feraient bien de se méfier, s'il n'y a pas derrière leur adhésion quelque motif du même genre que celui de Shylock.

    - Quant à la reconquête d'une position dominante, si elle n'a évidemment rien de chrétien ou d'évangélique, elle est la plus conforme à la théorie catholique romaine d'un christianisme institutionnel, hiérarchisé et militant. Sans cette position dominante, l'institution n'est plus qu'une ruine, fréquentées par ce qu'on peut qualifier de "touristes spirituels". L'Eglise romaine n'a d'ailleurs plus d'emprise, à l'instar de l'islam, que dans les nations ou sur les continents qui n'ont pas connu de véritable révolution industrielle, celle-ci ayant remis les instruments du pouvoir religieux dans les mains d'un nouveau clergé. Plutôt que dangereuse, il faut dire que la démarche des catholiques réactionnaires est vaine, semblable au combat mené par Don Quichotte, imaginé par Cervantès comme le prototype du chrétien qui se démène en dehors de l'histoire, tout en persistant à ignorer que le christianisme est la plus historique des espérances.

    Si le chrétien se détache des contingences morales et politiques, dont le monde ne peut se passer, pas plus que de conflits armés afin de régénérer sa culture, c'est pour la raison que le chrétien a sans cesse à l'esprit la fin du monde, à l'inverse du démocrate-chrétien, disposé à le prolonger le plus longtemps possible. Car le monde justifie le chrétien libéral et non dieu. Coupé du monde, de son bicorne, de sa mitre, de sa crosse et de son anneau, Mgr Dagens n'est RIEN. Qui voudra encore l'écouter en dehors d'affairistes douteux ? Qui lit encore les académiciens en dehors de rombières ?

    Dagens dénigre le don-quichottisme chrétien, mais hélas pour lui il n'est pas Cervantès, mais seulement un de ces nullibistes catholiques comme on ramasse à la pelle dans les coulisses de la culture "judéo-chrétienne".

    Quant à l'éloge par ce prélat des Etats-Unis et de leur simulacre de christianisme - les Yankees les plus honnêtes se réclament de Satan - il est une infâmie. Rien, dans le christianisme, ne justifie la démocratie, millénarisme plus frauduleux encore que la monarchie de droit divin des pharaons. La démocratie est entièrement tributaire de la tyrannie française d'ancien régime. C'est elle qui a opéré la conversion de l'ordre satanique égyptien en apparence d'ordre chrétien. Sans ce tour de passe-passe juridique, il n'y aurait aucun moyen de faire reluire aujourd'hui le mirage de la démocratie. Cracher dans la soupe de cet Hermès trismégiste incarné que fut le cardinal de Richelieu n'empêche pas le sieur Dagens de s'en délecter.

     

  • Gare à aux cyclopes !

    Par tous les canaux de propagande dont elles disposent, les élites libérales ou républicaines s'efforcent de faire passer le panurgisme pour l'individualisme. Il s'agit d'inverser la charge de la responsabilité, et de la transférer du berger incompétent au troupeau passif.

    Mettez une poignée d'intellectuels sur un plateau, de toutes les obédiences complices à la mode : un "judéo-chrétien", un "laïc républicain", un businessman, un agent culturel, un sociologue, et faites les s'exprimer sur le sujet du populisme ; ils disserteront pendant des heures, les mains croisées dans le dos pour planquer leurs sales pognes de mouches à merde.

    La fable du cyclope Polyphème et de ses moutons n'a pas pris une ride. Francis Bacon a raison de dire que le monde moderne est beaucoup plus antique que celui d'Homère. L'homme moderne vit et respire sous des bandelettes.

  • Tocards et horlogers

    Quand j'entends sonner les cloches dans mon quartier, j'ai l'impression d'être en Allemagne. Observez bien une cloche, et vous comprendrez ce que l'Allemand a dans la cervelle.

    Le projet de gouvernement mondial est l'esprit de clocher à l'échelle de la terre.

  • Au total

    Difficile de savoir ce qui est le plus nuisible à l'imagination, des vacances ou du labeur. Le déclin de l'humanité, que celle-ci nomme "progrès" semble fait d'une alternance de ces deux modes de conditionnement à l'imbécillité.

    La représentation désormais la plus courante de dieu, qui désole l'antéchrist tandis qu'elle provoque la colère des apôtres, est celle d'un comptable, d'un assureur ou d'un prêteur sur gages, c'est-à-dire le type que l'Eve moderne rêve d'épouser ; même Satan n'a plus la cote auprès des femmes.

  • La condition humaine

    Les hommes d'élite, qui alourdissent le poids de la condition humaine d'autrui afin d'alléger la leur, naturellement sont les mieux placés pour exalter cette condition, sous la forme de la plus aristocratique énergie du désespoir, ou bien sous la forme la plus cynique des lendemains qui chantent promis à la plèbe.

    La souveraineté du peuple laborieux lui permet de se réjouir de sa condition : il sera bientôt élu, et chacun pourra grimper dans sa tour d'ivoire pour y rédiger des traités de droit constitutionnel.

    A force d'être si bien conditionné, l'homme finit par être esclave de lui-même. La liberté conditionnelle finit par être de plus en plus conditionnelle et de moins en moins libre.

    En fin de compte, les hommes d'élites finissent par s'égorger entre eux, par manque d'imagination. Dans la démocratie, le peuple gagne le droit de jouer au même jeu que son patron.


  • La Garce Beauvoir

    Pourquoi "garce", parce que le féminisme tel que Simone de Beauvoir le prêche est cause de ravages dans les milieux populaires. C'est d'ailleurs un féminisme d'inspiration judéo-chrétienne, véhiculant cette éthique truquée. Le fait est soigneusement dissimulé de l'invention du féminisme occidental par des clercs catholiques romains, c'est-à-dire de l'exaltation du rôle social de la femme. Les métamorphoses de la société ont par la suite transformé ce féminisme ; elles l'ont laïcisé et lui ont fait perdre l'étiquette catholique romaine.

    Le féminisme permet aux bourgeoises de mettre du piment dans leur vie sexuelle. Ayant plus de ressources, elles bénéficient d'une meilleure protection sociale. Leur cas nous intéresse peu.

    A la question :

    - Niez vous qu'il y a une nature féminine propre ?

    Simone de Beauvoir répond :

    - Oui, bien sûr, nous nions même qu'il y a une nature humaine.

    A ce stade, on peut dire la réponse quasiment chrétienne, puisque la nature est, dans le christianisme, marquée par le péché originel qui précipite Adam et Eve dans la condition humaine. La force de l'esprit de Dieu permet donc dans le christianisme à la femme comme à l'homme de triompher des effets de la nature.

    Mais le christianisme ne nie pas les effets de la nature, et notamment que la volonté humaine est un moteur naturel. A cet égard, devant la nature, l'homme et la femme ne sont pas égaux. Selon les évangiles, il n'est pas possible de s'affranchir de la nature par un simple décret féministe l'abolissant, mais seulement par l'amour chrétien ; faute de quoi, Paul de Tarse ne prônerait pas le célibat seulement aux hommes qui en sont capables, comme lui, mais il prônerait un célibat absolu, pour tous les hommes et pour toutes les femmes.

    Simone de Beauvoir abolit la nature, mais elle met rien à la place qu'une idéologie hégélienne du progrès social, celle-là même qui sous-tend et a servi à blanchir a posteriori toutes les grandes catastrophes laïques et les génocides de l'Occident moderne. Il y a bien là une "culture de mort", selon le propos de l'antéchrist Nietzsche, défenseur de la culture de vie, mais cette "culture de mort" n'a contrairement à son propos aucun lien direct avec le christianisme. Il n'y a pas de doctrine sociale dans le christianisme, et il ne peut pas y en avoir, pour la raison qu'aucune doctrine sociale ne peut se passer d'effacer le péché originel. Toute doctrine sociale prend nécessairement en compte la condition humaine comme une condition insurmontable, ou qui ne peut être abolie que dans un au-delà virtuel et entièrement spéculatif. On voit ainsi le Messie et ses apôtres dénier au plan social tout caractère spirituel. Le féminisme a la tournure d'un mouvement compassionnel des femmes vis-à-vis d'elles-mêmes, qui ne peut être accepté que par des hommes imbéciles, ou des séducteurs sous la forme de propos galants à l'égard des femmes.

    Le féminisme de Beauvoir est une bonne illustration de la culture de mort moderne occidentale et de la tactique de ses agents assermentés. Cette culture emprunte au christianisme des motifs spirituels, dont elle propose une application sociale, éthique ou morale, solution impossible selon le christianisme lui-même. Et les élites occidentales s'efforcent d'imposer cette idéologie totalitaire au reste du monde comme un humanisme. Chassez la nature féminine, et elle revient au galop ; c'est sans doute pourquoi désormais certaines féministes font de la prostitution un féminisme, celle-ci étant plus significative de la détermination sociale réelle de l'Occident aujourd'hui que les grands panneaux publicitaires humanistes qu'il brandit.

  • De Maurras à Brague

    La "voie romaine" trouve son équivalent aux Etats-Unis dans l'"autoroute 66".

    A côté de la tentative burlesque de Michel Onfray d'adapter Nietzsche aux valeurs de gauche, alors que celui-ci aurait vu dans l'alternative gauche-droite une sorte de pas de l'oie de trouffion débile de la modernité, s'est développée une tentative d'adapter Nietzsche au christianisme ; elle comporte cette difficulté majeure de faire du chantre du satanisme et de la culture de vie un penseur "chrétien".

    Essentiellement, le trucage de Michel Onfray et des catholiques romains revient au même. Dans le premier cas, il s'agit de faire passer les valeurs républicaines pour des valeurs populaires, alors même que le régime républicain moderne a mis en miettes la culture populaire pour la remplacer par une culture de masse totalitaire. Jamais régime n'aura fait subir au peuple de plus grandes avanies, ni n'aura inculqué un mensonge aussi grossier que celui de la "souveraineté populaire" et de l'égalité.

    Pour faire passer une telle couleuvre, il est nécessaire de censurer à la fois Nietzsche et Karl Marx. Les valeurs républicaines modernes trouvent appui sur la rhétorique de quelques fonctionnaires assermentés, mais non sur des penseurs indépendants.

    La tentative sous le masque chrétien, elle, consiste à adapter le christianisme aux valeurs élitistes. Pour opérer ce tour de passe-passe, Charles Maurras va s'appuyer sur l'imbécillité extraordinaire du public catholique romain, que Nietzsche a théorisée d'une manière assez précise, bien qu'il n'en identifie pas la cause exacte. On trouve d'ailleurs à l'intérieur de l'Eglise romaine, quelques cas isolés de rebelles à l'imbécillité catholique romaine, tels Léon Bloy ou Bernanos, mais qui n'en reconnaissent pas la cause non plus, moins encore que Nietzsche.

    L'antichrist Charles Maurras, sorte de résurgence de Richelieu au niveau du journalisme, ne se contente pas de faire du christianisme le complice servile et commode des crimes des nations occidentales, il échaffaude par ailleurs une idéologie qui vise à faire passer l'empire romain pour une civilisation saine et équilibrée. Même la philosophie allemande n'est pas restée figée à un niveau critique aussi bas. Pour admettre que l'empire romain est une civilisation équilibrée, il faut admettre que le totalitarisme est un humanisme, ou bien la culture des Etats-Unis autre chose qu'une métastase. Quand on nie absolument l'histoire comme Maurras, on ne peut qu'en être le cocu, une sorte de voyageur dans le temps dépourvu de lien avec la pensée française.

    Ce cocufiage et l'infâmie de Maurras ont conduit à lui coller l'étiquette de chef de file d'un groupe folklorique vaguement indécent. Le besoin d'un discours subversif de l'histoire a cependant subsisté. L'évêque de Rome ne peut pas tout faire. Il est déjà assez occupé à combattre la mafia à l'intérieur de son parti, ainsi qu'à rédiger des encycliques suggérant que la lumière créatrice n'est pas celle de Satan : il a besoin de faussaires en histoire pour l'assister dans l'entreprise qui consiste à démontrer que le christianisme est compatible avec les visées de l'élite.

    Rémi Brague a pris le relais de Maurras il y a quelques années, avec un bouquin visant à démontrer que Rome est la matrice de l'Europe, c'est-à-dire du rêve nationaliste partagé par une série de bouchers sanguinaires fameux et un conglomérat de banquiers cyniques, et qui a choisi pour le symboliser une nymphe violée par un taureau, sans doute pour signifier la barbarie ultime de ce nationalisme.

    Ce que Brague et les braguets veulent éviter, ce n'est pas tant qu'on les rapproche de Satan, auxquels ils ne croient pas et qui leur semble pure abstraction en comparaison des missiles à longue portée du pacte atlantique. Ils ne veulent pas qu'on fasse le rapprochement avec Maurras, car ce dernier n'est pas assez bcbg.

    Malgré sa compromission avec le culte solaire de Louis XIV, qui oblige à le prendre "avec des pincettes", car ce genre de compromission sert à Nietzsche pour faire la démonstration d'un christianisme entièrement animé par des faux-jetons, le théologien catholique Bossuet signale quand même que, sur la piste de Satan et du nombre de la bête (666), tous les chemins mènent à Rome.

  • Lettres mortes

    Je ne vois pas quel homme de lettres peut disputer à François-René de Chateaubriand la couronne d'écrivain français le plus putassier de tous les temps ? Pas même Sartre, qui tenta de lui disputer un bout de trottoir. Les augustes académiciens, rentiers du Satan-trismégiste Richelieu ? Aucun ne sait rouler du cul comme Chateaubriand. Le branlement du bicorne fait tout au plus suinter quelques jeunes filles prépubères, clientes de Michel Déon ou Jean d'Ormesson.

    La littérature de Chateaubriand est la mieux faite pour les hommes privés de bordel, parce qu'ils n'en ont pas les moyens physiques, ou bien parce qu'une épouse vigilante, afin de ne pas se retrouver expropriée, leur tient la bride. Stendhal pourrait jouer le même rôle, avec son antichristianisme de sous-préfet, n'était son physique porcin, qui le relègue derrière Rimbaud sur le macadam.

    "Tout est sexuel" dit Freud, sans doute pour se venger d'être incapable d'écrire une seul phrase avec style, et de devoir se contenter d'un amour télépathique avec sa fille. Encore faut-il préciser que, dans la culture moderne, seuls la guerre et les charniers, les bordels d'antan où les putains crevaient massivement, traduisent une sexualité bourgeoise assumée ; le reste du temps, le sexe est "rentré", comme le dard de certains insectes. La manière de tuer du bourgeois trouve son pendant exact dans sa manière d'aimer. Tuer, pour le bourgeois, ne relève plus de l'art mais du jeu. On pense aux manières du chat, cette bestiole identifiable aux moeurs modernes.

  • Eloge de la faiblesse

    Contrairement à l'affirmation de Nitche, il n'y a pas d'éloge de la faiblesse dans le christianisme, faute de quoi le dieu des chrétiens serait effectivement un calcul irrationnel, comme la démocratie.

    Nitche lit les évangiles sans jamais se départir de son élitisme. Effectivement, dans l'ordre naturel et le droit qui en découle, l'homme d'élite est plus puissant. Aussi démocratique soit le monde moderne officiellement, le culte de la personnalité n'a pas fléchi d'un iota. Mais le christianisme ne tient aucun compte de l'ordre naturel et du droit qui en découle. Du point de vue de l'élite et de ce qui la justifie, nécessairement le Christ ne peut qu'être un homme faible ou suicidaire, entêté à mourir plutôt qu'à vivre pleinement.

    Ici, Nitche a sans doute tort de mettre dans le même sac les Romains et les Juifs, et de les féliciter pour leur assassinat dans les règles, au bénéfice de l'ordre public. En effet, si les Juifs avaient pris le Messie pour un homme faible et suicidaire, on peut penser qu'ils n'auraient pas réclamé son exécution.

    La faiblesse est représentée dans les évangiles par le jeune homme riche, qui au contraire occupe la position la plus enviée sur le plan de l'espèce. C'est-à-dire par l'attachement à la nature et au monde qui la reflète avec plus ou moins d'intelligence. Le jeune homme riche ne peut pas briser le cercle de ses usages. Le pauvre, que Nitche appelle faible, est plus près de la porte étroite de sortie du monde, en quelque sorte. C'est pourquoi Molière nous montre l'antéchrist Don Juan s'efforcer de retenir le pauvre à l'intérieur du cercle.

    L'effort surhumain accompli par Nitche est pour sortir d'un monde moderne sur le point de s'écrouler. Mais le chrétien n'a que faire de l'écroulement du monde - là encore, contrairement à ce que prétend Nitche, il n'en est pas actionnaire.

  • Surhomme et évolution

    "... Car il ne faut pas sous-estimer le chrétien : le chrétien, faux jusqu'à l'innocence, surpasse le singe, et de loin - eu égard au chrétien, une fameuse théorie des origines de l'humanité devient pure amabilité..." F. Nitche

    En vertu de sa théorie du sous-homme chrétien, hypocrite et efféminé, et de sa théorie du surhomme nitchéen, le porte-parole de Satan ne gobe pas la théorie de l'évolution. Le surhomme nitchéen agit bien en vertu de la nature, mais d'une manière consciente, dont seul l'homme se montre parfois capable, lorsqu'il est capable de prendre du recul par rapport à la société.

    Le transformisme est un préjugé socialiste. On trouve en outre chez Nitche la même observation scientifique que chez Alphonse Allais : les hommes les mieux adaptés à la société moderne sont les escrocs.

    Il conviendrait d'ailleurs de dire que les anti-évolutionnistes, sous l'étiquette du "créationnisme" ne sont pas "chrétiens" mais "nitchéens" : ils conçoivent dieu comme un démiurge. Sur le plan de la science physique, Nitche se réfère en partie à Aristote. C'est la métaphysique, c'est-à-dire l'indication dans la Genèse qu'il y a une forme de connaissance supérieure au savoir éthique et à la vertu sataniques qui empêche les juifs et les chrétiens de croire dans le darwinisme. La philosophie de Nitche n'est pas totalitaire comme les philosophies milléranistes à l'arrière-plan de l'évolutionnisme, qui se servent de la biologie afin d'ouvrir le plan de l'avenir à l'infini.

    Plus généralement il faut dire que l'histoire de la science moderne est une grossière propagande, exactement comme l'est l'histoire de l'art moderne. L'ouvrage de fonctionnaires payés pour démontrer le progrès social. 

  • Modernité

    Le truc de la modernité a le don de séduire d'abord les peuples arriérés. Je prends toujours l'exemple du Japon dans ce cas-là, tant cette nation a conservé le sens de l'honneur. Il semble qu'aucun apôtre français n'est jamais allé au Japon enseigner à ces butors que l'honneur est l'apanage des cocus. N'était le besoin des Japonaises de se reproduire, elles auraient transformé depuis longtemps les Japonais en eunuques serviables. Le soleil passe pour le dieu japonais, mais on dirait que c'est plutôt la lune rousse.

    La modernité est la pacotille que le colon offre au peuple qu'il colonise, l'alcool qui permet aux fermiers yankees d'exterminer les Indiens, l'opium des gentlemen britanniques pour endormir les Chinois. Le retard des Allemands et des Italiens sur le terrain de la modernité les a privés d'empire colonial.

    Nitche a théorisé la domination du sous-homme dans le monde moderne. Marx non plus n'est pas "moderne", car cela suppose d'être un ayant-droit de l'impérialisme.

  • L'art moderne

    Rechercher l'originalité, c'est rechercher la folie. C'est ce qu'on exige des artistes aujourd'hui, afin qu'ils remplissent un rôle social. Beaucoup sont assez cons pour se laisser faire.

    En général, ce sont les mêmes clowns qui affichent leur mépris pour l'art religieux. Observez les grimaces d'Einstein sur certains clichés : c'est le signe d'un esprit original défaillant. Si la psychiatrie était une science sérieuse, elle mettrait en garde contre le relativisme d'Einstein. C'est un moine qui m'a fait comprendre l'imbécillité d'Einstein quand j'avais dix-sept ans ; il n'était pas plus sérieux, mais sa maîtrise de la rhétorique et des syllogismes lui permettait de piger à quel petit jeu ce fameux Boche joue. Un prestidigateur le comprendra aussi : attirer l'attention sur un détail, et le tour est joué.

    L'artiste ou le savant moderne est un enfant de la balle, qu'il finit parfois par se tirer dans la caboche pour en finir. La décapitation des élites est finalement une question de santé publique. Lorsqu'une élite est massacrée par le peuple, elle ne fait que payer un ou deux siècles d'irresponsabilité d'un seul coup. C'est ce qui ne colle pas dans la doctrine de Nitche : il ne veut pas admettre, contrairement à Shakespeare ou Molière, que la décadence touche d'abord les élites. L'analogie est entre le peuple et la matière, et entre les élites et l'âme, et le chaos vient de l'âme. Ce n'est pas le problème des apôtres si les élites se sont emparé du christianisme et l'ont retaillé à leur cote, ouvrant ainsi le néant sous leurs pas. Quel besoin a Dante de s'appuyer sur la religion truquée de Virgile ?

    A part ça Nitche est le moins original qui soit. Il imite de bons imitateurs de la nature. C'est ce qui isole Nietzsche du monde moderne. Il n'est pas assez complexe. Ainsi Deleuze fait de Nitche une pelote compliquée à dénouer. Il trahit complètement l'esprit de son maître. On voit que pour Deleuze, la nature n'est pas assez humaine. Il manque à l'arbre, accrochée à la branche, la corde tissée avec des doigts d'homme pour pouvoir se pendre. Nitche aurait flanqué la paperasse de Deleuze au feu, comme Don Juan botte le cul de Sganarelle.

  • Molière et l'antéchrist

    Molière a brossé un portrait prémonitoire de l'antéchrist : Don Juan. Tout Nitche est dans le personnage de Don Juan. Nitche aurait rêvé de mener la vie de Don Juan ; ne le pouvant pas, à cause des bâtons que sa mère et sa soeur lui mettaient dans les jambes, il a couché les pensées de Don Juan sur le papier.

    Une nonne ne renoncera au voile et à s'enfermer dans le château de l'âme pour faire plaisir à son papa pour rien au monde... sauf l'amour de Don Juan. Ah, si Don Juan pariait sur dieu, plutôt que de faire son La Rochefoucauld ! Mais Don Juan sait que les paris ne sont ouverts qu'à la table de Satan ; c'est lui qui distribue les atouts.

    Molière a brossé aussi un portrait prémonitoire du démocrate-chrétien : Sganarelle. Bientôt la démocratie-chrétienne réclamera des gages à Satan, si elle n'a pas déjà commencé.

  • Surhomme à quatre pattes

    "Qu'il est petit, Nietzsche, depuis qu'en Allemagne tous les garçons de boutique sont devenus nitchéens."

    R.-M. Rilke

    Le mérite des garçons de boutique, c'est qu'ils n'écrivent ni thèses sur Nitche, ni romans nitchéens - ils ne font pas de films nitchéens.

  • Déphilosopher

    F. Nitche rétablit le primat de Satan sur la philosophie. Pratiquement l'effort des exégètes les plus récents de Nitche consiste à amputer cette notion, que seuls les penseurs fachistes ou nazis, dans un contexte de crise des valeurs modernes (fiduciaires, essentiellement), ont été capables d'assumer à peu près (Drieu La Rochelle, D'Annunzio, E. Pound, Heidegger, etc.).

    La clique "judéo-chrétienne" se montre en ce domaine la plus sournoise, adoptant deux tactiques convergentes, dont le but est de préserver les droits du philosophe à élucider les évangiles. La première tactique consiste à laïciser Nitche ou à le banaliser, ce qui revient à peu près à prendre le public pour un ramassis d'imbéciles. La seconde tactique, adoptée par l'évêque de Rome dans sa dernière encyclique ("Lumen fidei"), consiste à opposer à l'antichristianisme de Nitche les arguments idéologiques de Hegel, en occultant que le mysticisme juridique totalitaire de Hegel a été deux fois dénoncé comme une imposture - d'une part par Nitche lui-même, de l'autre par K. Marx.

    L'apostasie spéciale de J. Ratzinger consiste à occulter que l'hégélianisme n'est pas seulement une philosophie compatible avec les pires atrocités du point de vue de Nitche, mais également du point de vue chrétien, dès lors qu'il se rattache un minimum aux évangiles. A l'intercession de l'esprit et de la parole divine, Hegel substitue la notion, démoniaque, du providentialisme, garant de la plus grande passivité religieuse des masses populaires. S'il cède parfois à la démarche philosophique, Augustin d'Hippone n'aurait pu voir dans l'hégélianisme qu'une subversion équivalente à celle à laquelle l'empire romain procéda pour christianiser l'empire - il n'est besoin que de lire la "Cité de Dieu" pour s'en rendre compte. Que branlent les séminaristes catholiques en leurs séminaires ?

    Toute volonté humaine dépend de la puissance naturelle satanique, selon Nitche, qui dénie ainsi toute notion de la vérité aux religions animistes ou à la banale détermination psychologique moderne. L'amalgame sans fondement consiste de sa part à assimiler le christianisme à une religion animiste. A quoi l'animisme moderne se rattache-t-il, une fois le lien essentiel rompu avec Satan, proclame Nietzsche ? A cette détermination propre à l'homme qu'est la mort.

    Mais le judaïsme ou le christianisme ne disent pas le contraire. En effet, ils situent le début de la volonté comme pensée, nitchéenne ou satanique, à la chute d'Adam et Eve. La connaissance du bien et du mal, même la plus authentique ou objective des prêtres de Satan, implique la soumission de leur volonté à ce dernier, c'est-à-dire au destin selon la profession de foi de Nitche. On trouve là l'explication de l'interdit juif ou chrétien de l'art. Contre la mort, l'art ne peut rien. La résignation à la mort, attribuée au christianisme par Nitche, ne l'est pas. Elle indique une faiblesse et une soumission accrue aux effets du destin. L'anthropologie moderne rapproche l'homme de l'insecte, mais comment faire du christianisme et du judaïsme les sources de l'anthropologie moderne, quand elles sont, entre toutes les religions, les moins anthropologiques, puisqu'elles n'ouvrent pas droit à l'art ?

    Ce que Nitche met à jour n'est pas le christianisme, mais la négation de la révélation et de l'eschatologie par certains clercs au profit de l'éthique. Ce n'est pas un phénomène de subversion propre au monde moderne. Dans le livre de Daniel, on peut voir que les prêtres babyloniens avaient inventé une même ruse et détourné la religion païenne à leur profit. Beaucoup plus récemment, c'est ce que la psychanalyse fait, bien que Freud l'oppose au judaïsme comme une science véritable, accusant Moïse d'inventer de toutes pièces la religion juive au profit de quelques brigands, poussant ainsi la négation de l'histoire plus loin encore que Nitche. L'athéisme de Freud, qui ne va pas jusqu'à honorer Satan comme Nitche, permet l'usage de la psychanalyse à des fins éthiques. L'inconvénient du credo satanique de Nitche est qu'il constitue une incitation bien trop puissante à devenir soi-même par soi-même, c'est-à-dire sans intermédiaire clérical. Le satanisme jette une lumière beaucoup plus crue sur les méthodes de l'esclavagisme bourgeois moderne.

  • Déphilosopher

    Pour le besoin d'un petit bouquin sur le satanisme, je relis Nitche (eh oui, on a le droit de prendre Nitche au sérieux). Le principal mérite de Nitche, c'est que ce n'est pas un intellectuel, mais un artiste.

    L'intellectualisme part d'un complexe d'infériorité, physique le plus souvent, que l'intellectuel compense par la rhétorique. On voit le cas d'hommes du peuple, plus vigoureux, qui veulent se donner des airs raffinés en apprenant l'art de la rhétorique : les conséquences en sont le plus souvent dramatiques. On m'a rapporté le cas d'un type, entré aux Beaux-arts, fruste, presque brutal, venu d'un bled paumé de la campagne française. Son art était par conséquent beaucoup plus naturel et plus puissant que celui de ses condisciples parisiens, bercés avec Proust, Flaubert, Tintin et Milou, depuis l'enfance. Seulement pas moyen pour ce type fruste de devenir moderne, c'est-à-dire subtil, pour plaire aux dames et aux professeurs, assez choqués par le style direct du type. Du coup le brave gars, ça l'a tué, il n'a pas tardé à se suicider. Dans son milieu, mieux valait ne pas être artiste, et à Paris il lui fallait être moderne -l'impasse.

    La production intellectuelle conserve la marque du complexe. Tandis que l'artiste, lui, selon la méthode de Nitche, tente de surmonter la faiblesse. Dans le monde moderne, les derniers artistes sont comme des lions, domptés par des intellectuels malingres, plus rusés. Aujourd'hui on conseillerait à un type bâti comme Michel-Ange de passer un CAP de tailleur de pierre.

    Satan n'aime pas beaucoup les intellectuels. La force des intellectuels tient dans le parasitisme. Sacré problème que la mort de l'art, du point de vue de Satan. Quand chacun devient sa propre idole, suivant le culte identitaire masochiste, il y a péril en la demeure de Satan.

  • Nazisme et satanisme

    Dans les documentaires moralisateurs sur le nazisme et Hitler, celui-ci y est fréquemment comparé au diable et à Satan, y compris par des personnes qui ne se déclarent pas croyantes, mais rationalistes. L'éthique, quelle que soit sa couleur locale, scinde les comportements en deux, bons ou mauvais ; par ces documentaires il s'agit de diviser la conscience. Cela donne bonne conscience de penser que Hitler est le diable, et mauvaise conscience qu'il n'est qu'un homme ordinaire. Le raisonnement éthique présente une analogie avec le raisonnement algébrique binaire.

    La conscience historique s'affranchit du raisonnement éthique - Shakespeare, Marx -, afin d'élucider ce qui dans l'histoire traduit un mouvement libre de la part de l'homme, et non un mouvement instinctif, caractérisé par la banale détermination binaire relativiste. Un homme doté d'une conscience éthique se satisfaira assez facilement du raisonnement évolutionniste, qui se heurte à la conscience historique. Le déterminisme biologique incite à penser l'histoire en termes de statistique ou de cycles économiques, c'est-à-dire à nier l'histoire par principe, pour tout ramener à la politique, contexte où comme l'indique Aristote, l'homme se comporte de façon à peu près identique à l'animal (travail, famille, patrie).

    Hitler et le nazisme, involontairement, ont servi de base à l'éthique la plus indéfinissable qui soit. Elle constitue un facteur d'aggravation de l'irresponsabilité des élites dirigeantes occidentales et un pas supplémentaire vers le nihilisme.

    L'attitude du Vatican vis-à-vis du nazisme est la plus équivoque possible, et avec la repentance l'Eglise romaine a donné à l'éthique judéo-chrétienne un tour plus absurde que jamais. Il s'agit d'une démarche juridique institutionnelle, dépourvue du plus petit lien avec le message évangélique. L'Eglise romaine s'est comportée là comme la firme Volkswagen a fait pour continuer de vendre des voitures sans heurter la bonne conscience de sa clientèle. Probablement les athées éprouvent dans cette affaire la même délectation que le juge d'un tribunal d'inquisition. Quel que soit le côté par où on l'aborde, cette procédure sent la tartufferie à plein nez.

    On peut s'étonner que le Vatican, peu avare de sermons et d'encycliques, n'ait pas cherché plutôt à élucider le caractère satanique du nazisme, c'est-à-dire à se situer sur un plan théologique, et non de justification éthique parfaitement inutile.

    Sur le plan idéologique, le nazisme est un mélange contradictoire de nitchéisme et d'hégélianisme. C'est-à-dire d'un satanisme pur, tel qu'il est proposé par Nitche, et d'un mouvement hégélien moderne, une "culture de mort" et un "nihilisme" tels que Nitche décrit l'hégélianisme. On constate que l'arrière-plan scientifique de l'eugénisme darwinien nazi comporte aussi cette contradiction.

    Autrement dit, le nazisme est un satanisme nitchéen dans sa partie la plus spirituelle et dépourvue de solution éthique ou politique adaptée au monde moderne, et hégélien dans sa partie opératoire, celle où le nazisme entre en concurrence avec d'autres nations occidentales. L'aspect satanique seul permet de distinguer le nazisme des régimes totalitaires concurrents, soviétique et capitaliste. Le nitchéisme fait l'originalité du nazisme, mais sur le plan moral et politique il est des plus banals, dans la continuité de la culture de mort occidentale depuis le moyen-âge. Un nietzschéen fera ressortir l'aspect de morale "judéo-chrétienne" hégélienne sous-jacent au nazisme (ainsi que l'a fait Drieu La Rochelle, par exemple), tandis qu'un tenant de l'éthique judéo-chrétienne pointera du doigt l'aspect satanique.

    Le Vatican est donc dans une position où il ne peut pas fournir une explication chrétienne, ni même historique, sans rompre avec l'éthique judéo-chrétienne bourgeoise, à laquelle Hegel prête un sens millénariste, ramenant ainsi la fonction mystique du droit au niveau du tribalisme et du culte identitaire. Le millénarisme démocratique des institutions occidentales avec lesquelles le Vatican collabore est impossible à fonder ailleurs que dans l'idéologie hégélienne. D'où l'insistance des cacouacs modernes à répéter en boucle que la philosophie allemande est le summum du raisonnement philosophique, thèse qui se heurte au scepticisme des Français les moins disposés à prendre la religion des élites pour argent comptant.

    La philosophie des lumières françaises elle-même n'est présentée aux Français que comme un mouvement de pensée préliminaire à l'hégélianisme, alors que ce que l'hégélianisme traduit, exactement comme l'empire napoléonien sur le plan politique, c'est une sclérose de la pensée des Lumières, la définition à partir de celles-ci d'une logique totalitaire. L'hégélianisme laisse le champ libre à l'expérimentation anthropologique de l'homme sur l'homme, telle que Shakespeare l'illustra avec le personnage de Shylock et sa livre de chair humaine en gage.

    L'hégélianisme définit l'élément passif féminin de la culture occidentale en phase terminale, c'est-à-dire la tendance au nihilisme et l'abstraction religieuse la plus froide. On peut prendre l'art de Dali comme l'un des meilleurs exemples de cette tendance macabre : plastiquement irréprochable, nul sur le plan érotique. Les derniers poètes communistes, plus nietzschéens que marxistes, Picasso notamment, introduisent le dernier élément positif dans la culture occidentale, c'est-à-dire les dernières formes qui ne soient pas entièrement passives et anthropologiques, bien que le motif d'ensemencer la culture soit de la part de Picasso inconscient et animal. C'est d'ailleurs la détermination sexuelle et psychologique de la culture qui explique que le judaïsme, et plus encore le christianisme selon l'accusation de Nitche, soit pur de tout mouvement culturel.

    Si Shakespeare ne désacralisait pas entièrement l'art, il ne serait même pas capable, comme Nitche en raison du lien satanique qu'il entretient avec la nature, de prévoir le pourrissement de la culture occidentale, en raison de l'usage intensif qui en est fait désormais par les élites de sidération des masses, qui explique l'infériorité de la valeur de la production artistique contemporaine en comparaison de la spéculation monétaire. Dali avait d'ailleurs bien compris l'équivalence de l'art moderne le plus macabre avec la valeur monétaire. C'est également la posture des autorités éthiques, définissant le cadre juridique de l'art, qui est la plus cynique.