"Le Figaro" (famille S. Dassault) annonce cette semaine que la majorité du corps électoral français a désormais plus de 50 ans...
En réalité le vieillissement du corps électoral n'est qu'un des facteurs du dispositif gérontocratique qui incite les partis politiques à proposer des programmes de plus en plus sécuritaires. Déjà N. Sarkozy avait été élu par la part du corps électoral la plus âgée, alors qu'une de ses promesses phares était de "remettre les Français au travail".
On peut se demander si la "droitisation" des programmes politiques en France n'a pas pour cause principale le vieillissement.
Trois effets se conjuguent pour mettre hors-jeu la jeune génération (20-40 ans) sur le plan électoral. Le premier est donc le vieillissement du corps électoral ; le second est l'abstention nettement plus élevée dans la jeune génération (20-35 ans) ; le troisième est le vote pour Mélenchon ou Le Pen des rares jeunes qui votent, alors même que l'oligarchie barre l'accès au pouvoir de ces partis, qui ont en commun d'être "patriotiques", c'est-à-dire d'exprimer une certaine défiance vis-à-vis de l'Union européenne.
On dira que l'abstention est une preuve de l'immaturité de la jeune génération ; à moins que celle-ci estime que le suffrage n'est plus rien qu'un rituel de "boomers" ? La jeune génération a peut-être une meilleur perception de la nature technocratique du pouvoir en 2025 ? Il me semble que le débat sur l'Intelligence artificielle l'intéresse plus que de savoir si le candidat de droite va l'emporter sur le candidat de gauche.
Le mouvement des Gilets jaunes, composé principalement de jeunes actifs est donc, mathématiquement, représentatif de la jeune génération "hors jeu".
Ce mouvement était composé de 30% d'électeurs de Le Pen, de 25% d'électeurs de Mélenchon, et de 25% d'abstentionnistes. Les Gilets jaunes ont paru d'ailleurs relativement indifférents aux obsessions sécuritaires de droite (la peur du "grand remplacement", du terrorisme islamique...) et de gauche (la peur du réchauffement climatique, la peur du fachisme, la peur des hommes violents...).
Les partis d'extrême-droite et d'extrême-gauche jouent un rôle assez évident de fracturation de la jeune génération, rassemblée par la grève des Gilets jaunes autour de thèmes moins idéologiques.
L'Etat profond (Big Brother) est consolidé par la peur, qu'il contribue à faire régner. Cela semble évident en ce qui concerne le régime soviétique, mais l'analyse d'Orwell est valable pour tous les types de régimes.
Donald Trump a réussi à mobiliser une large part de l'électorat étatsunien contre un Etat profond, qu'il assimile dans sa propagande à un Etat soviétique (contraire au principe démocratique). On doit parler de "propagande" à propos de la politique de D. Trump, car ce dernier sait parfaitement que "l'Etat profond" a sauvé le système bancaire américain à plusieurs reprises au cours des dernières décennies, dont la dernière fois en 2023 ; il est par conséquent impossible de concevoir "l'Etat profond" isolément du capitalisme : la cryptomonnaie est une monnaie idéologique, exactement comme l'or ; on ne peut rien fonder d'autre sur la cryptomonnaie qu'une voyoucratie.
La victoire dans les urnes de D. Trump est un signe pour les Gilets jaunes que leur mouvement est un mouvement historique ; les historiens y verront la première fronde de grande ampleur contre un Etat profond "à l'arrêt", paralysé par sa propre politique - un Etat de surcroît gérontocratique, qui recrute de jeunes cadres pour mieux dissimuler ses rides profondes.
Plus la crise s'installe, plus on peut s'attendre à la "soviétisation" de cet Etat : que la majorité des jeunes CRS vote pour un parti qualifié de "fasciste" par d'autres jeunes étudiants ou ouvriers ne change rien à ce phénomène totalitaire. La même police qui arrêta sur ordre des Juifs, il n'y a pas si longtemps, arrêtera des "antisémites" si on le lui demande. L'Etat est un monstre froid, et les nationalistes ne sont pas les seuls à le faire passer pour autre chose qu'une mécanique infernale.
Les Gilets jaunes doivent être le parti du sang-froid face à l'hystérie ; le temps joue contre l'Etat profond.