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Lapinos - Page 137

  • Marx pas mort mais enterré

    La gauche française, à commencer par les syndicalistes, est très influencée par le léninisme. Le léninisme emprunte un peu au marxisme, c’est sans doute ce qui fait que la gauche est moins conne que la droite. Assez forte pour entrer au gouvernement après avoir perdu les élections.

    Bien que la gauche soit ridiculisée par des types foireux comme Finkielkraut, Onfray, BHL, Enthoven, Philippe Val, Redeker, Sollers, etc. - n’oublions pas qu’à droite il y a des gugusses comme Zemmour, Tilinac, Dantec, d’Ormesson, qui, s’ils sont peut-être plus sympathiques, sont tout aussi inutiles, quelques vrais historiens comme Claude Allègre ou Emmanuel Leroy-Ladurie surnagent, et ils sont plutôt étiquettés "de gauche" que "de droite".
    Il y en a d’autres moins connus, évidemment ; les médias sont hostiles aux gens sérieux, et les gens sérieux le leur rendent bien. Suffit de voir Allègre sur un plateau de télé : on a l’impression qu’il va se jeter sur l’animateur et lui bouffer les deux oreilles. Dommage qu’il se retienne. On manque de tueurs de journalistes en série dans ce pays.

    Dans la droite nationaliste, le fait que certains se réfèrent impudemment à Chateaubriand, Tocqueville ou Ozanam montre bien qu’on y déraisonne là aussi à plein tube, malgré l'indépendance de Le Pen. Ozanam il y a cent ans je veux bien, mais maintenant les ravages du libéralisme sont évidents.
    Ce qui est étonnant dans cette droite nationaliste, c'est le nombre d'américanophiles décadents, voire de russophiles rêveurs, et le petit nombre d'Européens.

    *


    Mais ni la gauche ni l’extrême-gauche ne sont marxistes. Toutes les bourdieuseries et le situationnisme imbécile, non seulement ne sont pas marxistes, mais ce fatras bobo contribue à faire écran au marxisme.
    Si la gauche était marxiste, elle ne dépeindrait pas Hitler comme le grand Satan mais comme un capitaliste ordinaire ou presque, un peu plus sincèrement socialiste, en concurrence avec d’autres nations capitalistes et inquiet comme les autres capitalistes, un peu plus étant donné la proximité de l’URSS, par la montée en puissance de la nation russe.
    Au lieu de ça la gauche se sert de l’hécatombe des Juifs pour renforcer le discours idéologique.
    Et qu’on ne dise pas que je suis obsédé par les Juifs et les nazis : on ne peut pas allumer la télé, publique ou privée, sans tomber sur un reportage qui exploite de façon obscène les crimes des nazis ; et bientôt ce qui fait office de littérature n'abordera plus que ce seul sujet. Bientôt les généalogistes de France et de Navarre seront sollicités de tous les côtés par des écrivains en herbe à la recherche d'un ancêtre juif afin de glaner un minimum de crédibilité. Des écrivains en herbe toujours plus nombreux vu qu'aujourd'hui être écrivain c'est un peu comme jouer au loto.

  • L'ivresse de l'altitude

    L’idéologie est presque partout, à gauche comme à droite. La France, qui était une nation de peintres et de savants, est devenue une nation de philosophes et de journalistes, comme les États-Unis. Sans compter les marchands, qui détiennent le pouvoir réel, bien sûr.
    On parle d’“économie de services” : quelle expression abjecte ! Elle contient toute l’hypocrisie démocratique.

    Un exemple tiré de l’actualité : le gouvernement veut réformer la fonction publique et, dans ce but, récompenser le mérite individuel dans l’administration. Très joli, mais complètement naïf. On ne se demande même pas pourquoi le système d’évaluation déjà en place, purement formel, ne fonctionne pas. La réponse est pourtant évidente : une évaluation réelle est impossible humainement à mettre en place dans la plupart des administrations, à commencer par l’Éducation nationale, et elle serait trop coûteuse dans les secteurs où elle paraît plus plausible, plus coûteuse que les économies visées.
    Quiconque a déjà travaillé dans le privé est fixé sur les conditions de l’avancement dans ce secteur qui ont plus à voir avec la servilité qu’avec le mérite. Le beau mérite du vendeur de lave-linge ou de téléphones portables qui en a fourgué deux fois plus dans le même laps !
    La distinction public-privé est d’ailleurs globalement une illusion.

    Ici on voit nettement l’incohérence de l’idéologie des libéraux de droite qui prétendent vouloir diminuer le rôle de l’État. Ce projet d’avancement au mérite, ce n’est pas “moins d’État” mais “mieux d’Etat”. Ce n’est pas Madelin ou Tocqueville, mais Colbert. Avec ce problème que ni Fillon ni Sarkozy, s’ils peuvent éventuellement emprunter son discours, n’ont la stature du grand Colbert.

    *

    Le plus amusant, c’est que les syndicalistes soient farouchement opposés à l’avancement au mérite, alors qu’inéluctablement l'organe de contrôle du mérite tomberait entre leurs mains et leur influence idéologique en sortirait renforcée. Il est vrai que dans l’Éducation nationale, cette influence est déjà totale et qu’on ne voit pas comment elle pourrait se renforcer.

    Celui qui incarne le mieux la synthèse du crétinisme libéral de gauche et de droite, c’est Jacques Attali. Qu’il se place sous les auspices de Marx donne un côté ubuesque à ses propos idiots.
    N’importe qui a un tant soit peu une âme d’artiste constate le côté ubuesque de notre époque et que Jarry n’est pas un auteur comique mais tragique. Seules les brutes ne voient rien ou prennent Sarkozy pour le messie.

    *

    L’idéologie actuelle, elle, fait fonction d’hôtesse de l’air. Les moteurs de l’avion sont en flammes et, d’une voix rassurante, avec un joli sourire, l’hôtesse explique aux passagers qu’il ne faut pas s’inquiéter, on va bientôt arriver à destination, dans un pays de cocagne magnifique avec plein de palmiers, où on vit tout nu et on peut baiser librement, à condition de mettre une capote pour "augmenter son plaisir" - j'espère que vous n’avez pas oublié d'emporter vos godemichets et vos “sex-toys”, au moins, Mesdames et Messieurs ? La compagnie vient d’embaucher un nouveau pilote, secoué de tics mais très talentueux, un as du “looping” et des acrobaties en tous genres. Attachez vos ceintures, on entame la descente.

  • Table rase de la télé (5)

    Frédéric Taddéi, c’est un peu l’enfant de chœur de la propagande. Il reçoit tous les chanoines de la démocratie dans son émission nocturne.
    M’étonnerait pas qu’il se fasse tripoter après l’émission dans les coulisses par quelque archiprêtre libidineux, Sollers par exemple, ou le grassouillet Siné.
    Difficile de savoir ce que Taddéi pense vraiment de ces sermons assommants qu’il provoque, vu qu’il est lisse comme une hostie. Il sait manier l’encensoir avec dextérité, et le clergé adore ce servant modèle.

    *

    Fallait voir l’autre soir le jeune séminariste Raphaël Enthoven démontrer doctement que le rugby est un sport de droite passéiste vu que les joueurs se font des passes en arrière, vous avez remarqué, Mesdames et Messieurs, des passes en arrière, si c’est pas signifiant, ça !
    Ah, il a de l’avenir à la télé, ce branquignol. Lui, Enthoven, il a engrossé la fille à papa Justine Lévy avant de lui demander de se faire avorter pour pouvoir préparer l’agrégation de philo. peinard. C'est censé démonter qu’il est du côté du progrès, ce tâcheron affligeant ?

  • Table rase de la télé (4)

    J'ai vu une chose l’autre jour à la télé, c’est l’humanisme du président iranien Amadinejah, une des cibles favorites de BHL.
    Peu importe les discours d’Amadinejah, entre sa démagogie, celle de Sarkozy ou de Bush, il n’y a pas de différence fondamentale.
    C’était une séance de questions-réponses face à la presse internationale. À un journaliste qui s’enquérait de la “condition des homosexuels en Iran”, le président iranien a répondu en souriant : « Mais il n’y a pas d’homosexuels dans mon pays. »
    Déjà rien que l’humour contenu dans cette réponse : Érasme a de l’humour, par exemple, c'est sûr, on le devine dans son regard, tandis que BHL, pas une once ! Pour avoir de l'humour, il faut de l'autodérision. Et le système de BHL ne supporte pas la moindre autodérision, sinon il s’écroule. La force de BHL réside dans sa faculté à asséner que ce qu’il dit est sérieux et à l'asséner encore, c’est ainsi qu’il parvient à emporter l’adhésion d’esprits, assez faibles certes, mais suffisamment nombreux.

    *

    Ce que dit là Amadinejah, de façon plus profonde, c’est qu’on se refuse en Iran à enfermer l’individu dans un déterminisme sexuel - un des déterminismes les plus stupides qui soit, puisqu’on ignore jusqu'à son fondement.
    Il n’est pas difficile d’imaginer quelle aurait été la réaction d’un humaniste de la Renaissance devant un ghetto homosexuel comme on peut en voir dans l’Ouest des États-Unis.
    Nul doute qu’une telle abomination eût scandalisé Érasme comme il scandalise Amadinejah.
    Parmi mes potes, il y en a quelques-uns, je le devine facilement, qui ont plus de goût pour les formes masculines que pour les formes féminines. Hélas, il n’y en a qu’un seul parmi eux qui se révolte contre le fait qu’on veuille lui ôter la liberté de sa conduite, sous ce prétexte, et que la démocratie lui impose ses mœurs et jusqu’à une sorte d’idéal homosexuel, qui, ne serait-ce qu’esthétiquement parlant, laisse à désirer.

    *

    On dira que la Renaissance a connu, elle, des ghettos de Juifs. Il s’agit-là d’une discrimination politique qui ne porte pas atteinte à la liberté des personnes, bien au contraire, elle est destinée à renforcer cette liberté.
    Qu’on m’explique ou qu’on explique à Amadinejah comment on peut fonder un critère politique sur l'inversion sexuelle ?? Sauf à employer des sophismes dans un but électoraliste comme le brillant démagogue yanki Bill Clinton ?
    L’antisémitisme de la Renaissance, celui de Léon Bloy, celui de Balzac, celui de Baudelaire, celui de Shakespeare, celui de Marx, celui de Simone Weil, celui de Drieu La Rochelle, n’est pas un antisémitisme fondé sur un critère racial mais sur un critère politique.
    Seuls ceux qui veulent discréditer Simone Weil, par exemple, jouent du fait qu’il n’y a qu’un seul mot pour désigner l’attitude politique de Simone Weil vis-à-vis du peuple juif et le racialisme nazi.

  • Nazis d'aujourd'hui

    Il faut l’aveuglement d’un philosophe pour ne pas voir que si Jean-Jacques Rousseau, Diderot, Voltaire, n’ont pas sombré dans l’oubli, c’est à leur poésie qu’ils le doivent et non à leurs idées, qui ne résistent pas à la critique scientifique, et ne sont pas très originales.
    Un philosophe comme Philippe Val, ou comme BHL, sans la poésie de Rousseau ou de Voltaire, ça n’est rien, rien qu’un prurit idéologique.

    Au fond racisme et antiracisme ne sont que les deux versants d’une même idée, qui pue le XIXe siècle évolutionniste à plein nez. Quand je vois BHL à la télé, c’est plus fort que moi, je pense aussitôt à un nazi, Goebbels par exemple. Le débraillé soigneusement entretenu de BHL dissimule mal l’arrogance du personnage, fondée sur des dogmes à faire sourire un historien.

    Il est bien sûr inutile de chercher une vraie cohérence dans la propagande nazie ou dans la propagande démocratique de BHL. La seule cohérence de ces propagandes, c’est qu’elles remplissent leur usage religieux, cependant, il n’est pas bien difficile de voir que l’idéologie de BHL comme celle des nazis emprunte à la fois aux Grecs - Nitche côté nazi et les “Lumières”, Goethe, côté BHL -, et au bas Moyen-âge - Heidegger côté nazi et Lévinas côté BHL.
    Dans leur rejet du marxisme et du christianisme, les nazis et BHL se rejoignent aussi.
    On objectera que dans mon schéma on retrouve les Grecs partout puisqu’ils sont aussi à la racine du christianisme et du marxisme. Mais ce ne sont pas exactement les mêmes Grecs. Encore une fois, entrer dans les détails n’a pas d’intérêt, une thèse sur le sujet serait vaine, c’est juste histoire de voir qu’il n’y a pas de réelle opposition de principes entre BHL et les nazis. Derrière le rideau de fumée des idées, il y a des capitalistes plus ou moins cyniques.
    Un historien ne peut s’empêcher de noter ici que le socialisme théorique de BHL, les nazis l’ont réalisé entre 1933 et 1940. Les banlieues françaises, elles, ne ressemblent pas franchement à la cité socialiste idéale.

    Racisme et antiracisme, versants d’une même idéologie, donc, avec pour but deux objectifs, dont il est difficile de savoir lequel est le plus niais : la pureté de la race ou le métissage absolu.

    *

    Plus intéressantes car plus humaines, la doctrine de la lutte des classes et celle de la hiérarchie des classes sont aussi les deux versants d’une même idée. Toutes les deux soulignent l’importance des classes sociales, bien sûr, même si dans le marxisme il y a une volonté de dépasser l’affrontement des classes que l’économie capitaliste porte jusqu’à son point de tension et de haine ultime.
    Le dandy réactionnaire, Baudelaire ou Barbey d’Aurevilly, hait le bourgeois capitaliste et Zola, le journaliste à sa solde, dans la mesure où ce bourgeois est un aristocrate qui refuse d’assumer ses responsabilités, de remplir son rôle social.
    Quoi de plus logique que le vif intérêt que Marx porte à la littérature de Balzac ? Dommage qu’il n’ait pas eu accès à celle de Barbey, plus dense encore, difficile à comprendre pour un démocrate, mais pas pour un marxiste. Très logique aussi le mépris de Marx pour Chateaubriand. Chateaubriand qui se détériore en Tocqueville, qui se détériore lui-même en BHL.
    Même si ce n'est pas de façon explicite, Marx nous parle de la décadence de l’aristocratie.

    *

    Dans le triomphe des idées de BHL, malgré leur faiblesse, on voit la preuve de la justesse de la raison marxiste. Pour un catholique contemporain, c’est-à-dire un catholique appelé à la dissidence, Marx est un nouvel Aristote. Et pour Platon il y a Baudelaire, Barbey ou Evelyn Waugh. Claudel aussi est un grand docteur de l’Église.
    Voilà pour saint Paul. On aimerait voir Benoît XVI jouer son rôle politique, de dalle.
    La question de la dissidence des chrétiens, soulevée par le pape, est liée au rôle politique du pape, qui doit être, au moins, subversif. La décadence de la liturgie est secondaire, ce n’est qu’un symptôme.

  • L'arroseur arrosé

    Qu'on ne compte pas sur moi pour verser une larme sur la toile de Monet. J'ai trop de goût pour ça.
    Du vandalisme ? Pas si sûr étant donné le niveau de Monet, son naturalisme de bourgeois béotien qui a pour seul mérite de faire ressortir la subtilité du naturalisme de la grande peinture de la Renaissance.

    Petit spectacle que la peinture de Monet. Petite technique aussi. Bref, de la peinture de gare. Monet c'est un peintre pour les amateurs de rugby, les Finkielkraut, les Tilinac, tous ces nostalgiques de la IIIe République, des photos de Doisneau, de la méthode Boscher, etc.
    Entre le début de la décadence et la fin de la décadence, on n'est pas tenu de choisir, surtout quand on n'est pas évolutionniste, pas plus qu'on est tenu de choisir entre le football des bobos progressistes et le rugby des bobos nostalgiques.

  • Contre Proust

    J’ai oublié de parler d’un bouquin bizarre… Contre Proust, qui a tort de croire qu’un bon écrivain fait forcément un bon critique - tout le monde n’a pas la sagacité de Chardonne -, comme Sainte-Beuve je me passionne pour les biographies d'écrivains dignes de ce nom.
    Proust démontre qu’on peut être assez bête, avoir assez mauvais goût (le Ritz, Vermeer), et faire néanmoins un poète potable, bien qu’un peu irritant à la longue. On peut dire n’importe quoi mais le dire avec de belles phrases. Il n’est pas le seul dans ce cas ; Claudel aussi sur la peinture a dit n’importe quoi, placé José-Maria Sert au-dessus de Jordaens (!), mais il a dit ça de façon magnifique, c’est toujours mieux que de dire n’importe quoi dans un style administratif.

    Les démocrates, qui conçoivent mal l’ambiguïté et le paradoxe, ont du mal à comprendre Proust, en quoi il est décadent par rapport à Sainte-Beuve dans sa critique d'art, ou même Delacroix et Baudelaire (Cf. Guillaume Durand parlant de Proust, pour les amateurs d'effets comiques forts.)

    Bref, désireux d'en savoir un peu plus sur Marx tout en évitant les idioties de cette tête de moineau de Jacques Attali, je me suis rabattu sur le bouquin de Jean-Jacques Marie, de la “Quinzaine littéraire”, une étude consacrée aux pérégrinations de Karl Marx à travers l’Europe, sous-titrée “Le Christophe Colomb du capital”.
    Jusque-là rien d’anormal, la couverture du bouquin est même d’un rouge on ne peut plus banal. Mais on voit bien vite que ce Jean-Jacques Marie, même s’il est plus pertinent qu’Attali - pas difficile -, est presque aussi gonflé !
    Guillaume Durand, Jacques Attali, Jean-Jacques Marie : trois exemples qui montrent qu’en démocratie, c’est le culot qui est la vertu du monde la mieux partagée. Plus c’est gros plus ça passe.

    *

    D’abord le bouquin est sponsorisé par LVMH. Oui, la LVMH de Bernard Arnault, ce capitaliste arrogant qui collectionne les gadgets d’art contemporain, indirectement Bernard Arnault sponsorise Karl Marx, sans le savoir probablement, car les capitalistes ne savent pas exactement ce qu’ils font ni ce qu’ils disent.

    Ensuite, par-ci, par-là, au détour d’un chapitre, Jean-Jacques Marie, qui est trotskiste, en profite pour charger Staline de tous les crimes soviétiques. Comme si l’implication de Trostski n’était pas parfaitement connue des historiens désormais. S’il y a bien quelqu’un qui ne fait pas table rase du passé, c’est bien Karl Marx avec sa méthode historique, et c’est bien pour ça que les communistes l’ont escamoté, vu leur passé politique peu reluisant.

    Troisièmement, et ça c’est typique de l’arnaque capitaliste où on soigne l’emballage pour vous vendre n’importe quoi dedans : cette collection sponsorisée par un fabricant de bagages en skaï et d'eau de Cologne de synthèse, est consacrée aux écrivains-voyageurs, alors que Marx détestait voyager ; il ne l’a fait que sous la menace d’être déporté dans le Morbihan, plein de remugles en ce temps-là, ou sous le coup de bannissements, ou pour réclamer un peu d’argent à des parents.
    (Une parenthèse pour signaler que la pauvreté a suscité au XIXe les deux penseurs qui ont pénétré le plus avant les mystères de l’argent et des relations du peuple juif à l’argent, Karl Marx et Léon Bloy ; Bloy qui reproche par ailleurs à une partie du clergé de maintenir le peuple catholique dans une sorte d’état de léthargie ou de conformité aux dogmes du libéralisme.)
    Jean-Jacques Marie explique bien en quoi Marx n’est jamais si heureux que dans une bibliothèque ; il est polyglotte mais c’est pour mieux lire les auteurs étrangers dans le texte. Sans bouger de Londres, Marx voyage dans le monde entier.
    Ça va contre le préjugé actuel selon lequel il faut se rendre sur place pour avoir un point de vue supérieur. Petits détours de BHL en Yougoslavie, en Amérique.
    On pense à tous ces reporters qui sont allés en Union soviétique et en ont ramené des images pieuses.
    On pense à E. Waugh, véritable écrivain-voyageur, lui, et à son roman, Scoop, où il brosse un portrait réaliste du milieu des journalistes-reporters.
    (Scoop : ce titre de Waugh a été repris par un minable paparazzi français de Paris-Match pour faire l’éloge de son métier crapuleux avec un culot monstrueux… encore ce fameux culot.)
    En quelque sorte, Marx, c’est l’antitouriste. Vu que Londres est l’épicentre du capitalisme, autant s’y tenir et éviter de papillonner à droite à gauche.

    Cette contradiction-là de Jean-Jacques Marie n’est pas la plus gênante, évidemment, surtout si on se fie à l’instinct critique de Sainte-Beuve pour comprendre une œuvre plutôt qu'aux sophismes de Proust. À cet égard les voyages de Marx sont instructif sur sa méthode.

  • Coup de cœur

    Mon coup de cœur de la semaine pour Rachida Dati. Dommage qu’elle soit pas plus gironde, sinon je l’aurais bien demandée en mariage pour fonder une famille nombreuse catholique d’origine musulmane.
    J’aime sa façon de mener à la baguette le syndicat de la magistrature, cette bande d'anarchistes qui, avec l'aide de psychologues-experts freudiens plus timbrés que leurs clients, sèment sans remords les criminels à travers le pays, et n’ont qu’une obsession, traduire devant les tribunaux la poignée d’intellectuels indépendants qui ne se conforment pas aux dogmes capitalistes en vigueur.

    Comme quoi l’immigration n’a pas que des méfaits. Idem quand je vois des femmes voilées, pas de façon provocante comme les Saoudiennes, mais plutôt comme les Africaines dont Delacroix célèbre la beauté, et Charles de Foucauld loue la simplicité. Ça me fait penser immanquablement aux dessins de la Renaissance, plutôt ceux de Dürer que ceux de Baldung, où les femmes aussi sont délicatement voilées et leurs habits font des plis. Ça m’aide à oublier tout ces gros beaufs coiffés de casquettes de base-ball ou fringués de tee-shirts à l’effigie du Che ou des Rolling-Stones.

    Comme quoi Sarkozy n’a pas tout faux. Nul n’est imparfait.

  • Table rase de la télé (3)

    Une brochette d’économistes chez la “reine Christine” - comme on disait naguère, avant que Christine Ockrent n'attrape cet air de douairière.

    Jacques Attali préside la docte assemblée déconnante, en col Mao, l’air plus bouffon que jamais. Jacques Attali, c’est le Géo Trouvetou du capitalisme, le Courtial des Pereires des sciences économiques, le Savonarole de la consommation, le parasite du marxisme. Il y a aussi Elie Cohen, modeste comptable bombardé tête pensante, pour qui deux plus deux feront toujours quatre, “ad vitam æternam”. Et quelques autres personnages à peine moins inutiles.

    *

    On peut compter sur Jacques Attali pour inventer des gadgets qui dopent la croissance. Visionnaire, il propose de construire plus de gratte-ciel dans Paris. Astucieux, car comme chacun sait, si les touristes défilent en masse dans la capitale, c’est pour admirer la tour Montparnasse. Pourquoi pas les “Twin Towers” dans l’Île de la Cité, en effet ? On baptiserait l’une Jacques, et l’autre du nom de son jumeau, pour rendre hommage à sa modestie.

    L’autre idée géniale d’Attali, c’est d’augmenter les dépenses de santé. En effet, il faut une France de vieillards, mais de vieillards qui bougent, qui soient capables d’escalader des gratte-ciel, dopés au Viagra et aux hormones de synthèses (À titre personnel, Attali semble bien décidé à jouer son rôle de parasite jusqu’en 2050. Même sur le rapport de la commission bidon avec laquelle il occupe ses vieux-jeunes jours, il y a la photo de sa pomme.)
    En somme, Jacques Attali découvre l’Amérique cinq siècles après Christophe Colomb.

    Pas un seul de ces micro-économistes imbéciles, dont la seule imagination consiste à vouloir convertir les Français au “fast-food”, à Andy Warhol, au viagra et à CNN, pas un seul de ces micro-économistes ne s’avise du cynisme absolu qu’il y a à chercher des solutions pour relancer la croissance dans un pays où on avorte à tour de bras, à l’échelle industrielle - un mort toute les deux secondes.
    Sûr que les jeunes immigrés africains, polonais ou chinois, toujours plus nombreux, ne rêvent que d’un seul avenir : contribuer à financer le traitement contre l’Alzheimer de Jacques Attali ou de Jean d’Ormesson, pour qu’ils continuent à déconner à plein tube jusqu’en 2050.

    *

    Je repose la question : à quoi servent les polytechniciens ? Y-a-t-il des gugusses de cette envergure à l’état-major des armées ? Qu’est-ce que nous avons à reprocher aux nazis, en définitive, en dehors de leur application et de leur sérieux ?

  • Tendance lourde

    Plus la démocratie se rapprochera du terme de sa course, aussi brève qu’absurde, et de foncer dans le mur, plus on entendra les clercs de cette religion évolutionniste invoquer en toutes circonstances les bienfaits et les miracles de ce régime de gangsters (comme dit le pape Benoît XVI, hélas de façon encore trop équivoque).
    Plus, aussi, le cinéma et la télévision, tout l’iconoclasme contemporain, nous abreuvera de clichés du soir au matin et du matin au soir, sans trêve : "France-Info", CNN, et le cinéma de Spielberg.

    Car les deux bases les plus solides du capitalisme sont certainement la méthode Coué et la propagande filmée, fondements de la "politique" actuelle.
    Objectivement, il est bien difficile de distinguer Pompidou de DeGaulle, et Giscard de Pompidou, Mitterrand de Giscard, Chirac de Mitterrand, ou Sarkozy de Chirac ou de Mitterrand. L'idéologie et les raisonnements binaires de journalistes fournissent tout un tas de critères de disctinction entre ces acteurs soi-disant politiques, mais dès lors qu'on a un peu de bon sens, c'est la continuité qui saute aux yeux, l'uniformité. DeGaulle, Pompidou et Mitterrand surnagent un peu par leur culture historique et littéraire.

    Je ferais une seule différence entre Sarkozy et ses prédécesseurs, encore que je dois admettre qu'elle n'est pas si nette. Tandis que ses prédécesseurs insistaient plus sur la démocratie, Sarkozy, lui, insiste plus sur le capitalisme. Ça fait qu'on peut le trouver moins hypocrite, mais cela ne veut pas dire qu'il est plus prudent ou plus politique.

  • Table rase de la télé (2)

    Tombé par hasard sur l’émission littéraire tardive de PPDA, “Vol de Nuit”, j’ai l’impression de me trouver en Union soviétique. Même léthargie, même sourires conventionnels, même consensus forcé que dans la nomenklatura russe.
    PPDA cause mais je n’entends rien. À l'Est on exaltait les vertus du peuple solidaire, ici les vertus de chaque existence individuelle, qui se résume longuement à la façon de baiser ou de ne pas baiser. Bien que celle-ci préfère le faire par derrière, et celui-ci avec des travestis, les invités de PPDA se ressemblent tous.

    Le capitalisme ne cesse de parler de cul pour éviter d’aborder des questions plus profondes et, avec tout son pognon, il tue le désir des choses vraies.

    Histoire d’un jeune capitaliste : pauvre et laid, il s’efforce de devenir riche par tous les moyens, le commerce de gadgets est le meilleur ; il se branle devant internet jusqu’au jour où il touche le gros lot au loto ; il peut alors se payer quelques-unes des plus belles féministes du monde, subitement conquises par son tempérament, son esprit, son humour et son chic ; il en fait monter sept d'un coup. Mais soudain il ne bande plus.

    *

    Sinon TF1 poursuit de ses foudres morales (!) un groupe de Normands nostalgiques de la SS. “Good bye Lenin” : on a le droit d’être nostalgique de Lénine, de Trotski, de Staline ou de Mao, voire de Heidegger et de Jeanne Arendt, mais pas de la SS.
    C’est l’éthique empirique des industriels du BTP. Bouygues est antiraciste, probablement pour se faire pardonner d’avoir importé des Africains sur ses chantiers, de leur avoir fourni un travail d’esclave chinois et de les avoir entassés dans des immeubles à géométries variables mais toujours improbables. D’où Harry Roselmack en couverture.

    Cette bande de nostalgiques du régime nazi avait restauré une casemate allemande sur la côte normande. C’est le propriétaire de la casemate, bénéficiaire des travaux de rénovation, qui les dénonce à TF1, et Roselmack qui se charge d’instruire le procès. Entre les SS et la Gestapo, TF1 a fait son choix. Peut-être que les nostalgiques auraient préféré être jugés par Arte ? C'est quand même plus chic.
    La Normandie, ce n’est sans doute pas un hasard. Si on y a peu souffert des Allemands directement, en revanche les bombardements yankis qui ont fait des dizaines de milliers de morts dans la population civile ont dû marquer les esprits ; d’autant plus que les esprits sont obligés de se taire et de célébrer ce passé faste de bombes alliées.

    Cette tête de faux-cul de Franz-Olivier Giesbert, fils de soldat yanki, aime bien répéter que les paysans normands réservèrent un accueil mitigé à son paternel et à ses collègues de travail en uniforme de GIs. Sous-entendu : ces sauvages avaient été “conquis” par les méthodes Allemandes.
    Plutôt : les sauvages normands ont pris la pacotille qu’on leur tendait pour les amadouer, les chewing-gums, le cinoche et le rockn’roll, certains béjaunes ont même pu voir dans les GIs des hommes nouveaux, mais les plus madrés se sont tenus sur la réserve vis-à-vis de ces nouveaux conquistadors et de leurs slogans chromés. À d'autres.

  • Table rase de la télé

    Ravages du féminisme : Patrick Besson, pour pouvoir s’acquitter de ses pensions alimentaires et continuer de résider dans le centre de Paris, vu que la littérature eût payé mais qu’elle ne paye plus, Patrick Besson brigue un fauteuil à l’académie française ou autre ; à moins qu’un producteur veuille adapter son dernier bouquin au cinéma ? Il met tout son cœur, il fait au plus niais pour rendre son style le plus cinématographique possible.
    Autant dire qu’il a décidé de s’intégrer complètement. Fini les serberies qui faisaient son charme et des victimes mieux choisies que celles de Milosevic. Place au Besson-BHL - à moins que ce ne soit un Besson-Sollers ?
    S’il était moins grand, je verrais bien aussi Besson jouer dans des films de Houellebecq pour gagner sa croûte vu qu'il a une gueule d’informaticien (cf. Bill Gates). Quand on est trop petit, on met des talonnettes, mais quand on est trop grand ?

    Entre l’impertinence et la franchise d’une part, et Jean d’Ormesson ou Éric Orsenna d’autre part, lorsqu’on n’a pas de pensions alimentaires excessives à verser, le choix n’est pas difficile à faire ; alors j’ai décidé de remplacer Besson et son “Plateau télé”, d’essayer de tuer la télé à sa place, Don Quichotte moderne (Bien sûr je refuse par avance toute offre de collaboration au Point - déontologiquement, c’est impossible.)

    *

    Un phénomène qui m’interpelle à la télé depuis quelques mois, c’est le phénomène Éric Zemmour. On laisse Éric Zemmour, bien qu’il ne soit spécialiste de rien en dehors de l’honneur perdu de Jacques Chirac, disserter longuement sur tout et n’importe quoi dans l’émission de Ruquier le samedi soir.
    Contrairement à Le Pen, Zemmour peut tenir tous les propos politiquement incorrects qu’il veut sans être inquiété par le syndicat de la magistrature, et dire à Harry Roselmack - en face, mesdames et messieurs, mesurez le luxe ! - que c’est parce qu’il est noir qu’il fait de la télé, et que c’est parce qu’il est animateur de télé qu’on publie son bouquin.
    Ou alors que le divorce généralisé fait grimper les prix des loyers à Paris.
    Il pourrait même suggérer à Laurent Ruquier de virer sa cuti et de fonder une famille nombreuse pour se sentir mieux que dans sa peau de pédé stakanoviste, ça passerait comme un suppo. bien graissé, avec un gloussement de l’intéressé. Comme si la censure n'existait pas !
    Bien sûr, il y a quelques huées parfois, venant du tas de beaufs volontaires massés dans des gradins derrière pour faire un public “vivant”, mais rien de bien méchant, pas de cailloux ni de lynchage en direct.
    Si Zemmour ne touche pas aux supers tabous démocratiques, il est quand même trop bien élevé pour ça, reste qu’il bénéficie d’un privilège exorbitant. D’où lui vient ce privilège ? Dire que Ruquier est moins servile que Guillaume Durand ou Jean-Pierre Elkabbach, c’est évident, mais c’est une explication insuffisante. Je vois deux autres raisons.

    En France aujourd’hui, ça remplace les quartiers de noblesse, si tu peux justifier d’un parent voire d’un vague cousin déporté à Büchenwald ou à Dachau, y compris via l’Algérie ou la Tunisie, t’es immunisé, tu peux raconter à peu près tout ce que tu veux sur l’histoire, la politique et l’économie, même si, dans le cas de Zemmour, l’histoire, l’économie, la politique, les religions, sans parler de la littérature, ne sont que de vagues notions apprises au Figaro.
    La deuxième raison, c’est que Zemmour défend peu ou prou la même idéologie que Sarkozy, mais en plus petit et en plus laid, avec plus de tics, ce qui est assez rare pour être souligné à la télé.

  • Factotums de Neuilly

    L’opinion publique française ignore tout de la Birmanie, de ses coutumes, de ses mœurs, de sa politique ; n’importe, postée devant la télévision, armée de sa zapette, elle a choisi son camp, s’est fabriquée son petit drapeau avec deux louches de philosophie, un zeste de “droit international” et une rengaine de Patrick Bruel. Et vive la démocratie !

    Je suis un Français de souche. Qu’est-ce que ça signifie ? Par exemple que certains de mes ancêtres ont été spoliés de leurs terres au cours de la Révolution française. Et que d’autres ont bénéficié de ces spoliations. D’où une certaine pondération chez votre serviteur.
    La révolte en Birmanie me rappelle que si ce maudit Louis XVI avait eu le courage de réprimer quelques milliers d’émeutiers, comme les généraux birmans viennent de le faire, les centaines de milliers de morts atroces que sa lâcheté et sa commisération ont entraîné auraient peut-être été évitées, ainsi que d’autres catastrophes plus spirituelles et la barbarie napoléonienne.
    Mon ancêtre spolié a laissé quelques souvenirs imprimés. Il ne se plaint pas d’avoir été spolié mais se réjouit au contraire d’avoir eu, lui et ses enfants, la vie sauve.
    Louis XVI est l’ancêtre de ces démocrates hypocrites qui rêvent de voir la guerre civile se propager en Birmanie. Qui méprisent le régime autoritaire birman mais font sans vergogne leurs courses en Chine de gadgets fabriqués par des esclaves chinois.

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    Un autre événement qui évoque des souvenirs cuisants, c’est la faillite récente de la “Northern Rocks”. Incapable de garantir la fiabilité de ses titres, cette banque britannique bien mal nommée a perdu en un instant la confiance de ses clients qui se sont précipités tels des moutons de Panurge pour retirer leurs liquidités.
    En pleine crise financière, en 1716, la Régence mit sa confiance dans l’Écossais Law qui importa en France pour augmenter le volume de la monnaie en circulation le système de l’agiotage. Quatre ans plus tard, c’était la faillite, les clients de la banque de Law ayant perdu subitement toute confiance dans des actions qui spéculaient sur les trésors plus ou moins imaginaires de l’Inde et du Mississipi. Comme dit l’historien Duby, plus lucide sur les questions économiques que politiques : “La Régence a ouvert la boîte de Pandore.” Soixante-dix ans plus tard, après d’autres crises financières, notamment celle provoquée par la maudite “guerre d’Indépendance américaine”, c’était la sanglante Révolution française.

    Il y a encore des idéologues comme le pseudo-économiste Michel Fitoussi ou le polytechnicien Jacques Attali pour se réjouir de l’invention de l’agiotage, ce grand bluff.
    Pour eux le capitalisme, s’il n’est pas exactement le meilleur des mondes, est le meilleur des mondes POSSIBLES. Sinistres crétins ! Je m’empresse de dire que les économistes libéraux de droite sont aussi crétins, si ce n’est plus. La réalité que Fitoussi et Attali n’occultent pas dans leur discours, au moins, c’est qu’à l’origine du capitalisme, il y a une intervention décisive de l’État. Le capitalisme n’est pas tombé du ciel pour nous apporter paix et prospérité comme certains crétins libéraux de droite pensent. Si le Régent n’avait pas décidé de mettre en œuvre les méthodes de Law, celui-ci serait demeuré dans des tripots, à jouer au poker.

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    Pas facile de convaincre un idéologue de droite que Marx n’a rien à voir avec le communisme soviétique, qu’il est plus proche d’Aristote que de Lénine. L’idéologue de droite est une espèce plus sincère que l’idéologue de gauche, mais il n’est pas moins têtu.
    Je dois admettre que les divagations de Jacques Attali, qui ose se dire marxiste, sont de nature à susciter la méfiance de n’importe quel honnête homme.
    Pour corriger les défauts du capitalisme, qui pour ce Phillistin consistent seulement dans l’inégale répartition des richesses, Attali suggère de renforcer les institutions démocratiques ! Quel contresens historique et marxiste ! Primo Marx a blâmé sa propre race de s’occuper trop d’affaires d’argent, d’en faire une fin en soi. Ensuite Marx, c’est en cela qu’il est le digne héritier des Grecs, est un antidote contre l’idéologie, qu’il a combattue toute sa vie et qui ne résiste pas à son scalpel. Aussi Marx a prévu ce déferlement de gadgets promus par un "marketing" dément, tous ces gadgets qui fascinent Jacques Attali.
    La démocratie - et, non pas l’égalité, la liberté et la fraternité qui la caractérisent, mais le nivellement social, scientifique et artistique, l’oppression économique et la concurrence acharnée - la démocratie est une CONSÉQUENCE du système capitaliste, sans lequel ce régime politique n’aurait pas été possible. En aucun cas pour un marxiste authentique la démocratie ne peut être un remède à l’oppression et aux carnages capitalistes du XXe siècle. Dans la démocratie en Amérique, le premier des services marchands, sans lequel la "nouvelle économie" n'aurait pas été possible, c'est la prostitution "via" internet.

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    Ici on voit une différence entre Sarkozy et son modèle F. Mitterrand. Si ce dernier avait pris pour bouffon ce major de l’X, Sarkozy, lui, paraît le prendre au sérieux.
    Lorsque je vois la bobine du polytechnicien Attali, qui défie les probabilités, ou celle de l’économiste Fitoussi, ou encore celle du démocrate Bruel à la télé, en tant que Français de souche je pense au joueur de poker écossais Law.

  • Horreur télévisuelle

    Il faut voir l’air autosatisfait de cet écrivaillon, Ono-dit-Biot, bombardé spécialiste de la Birmanie à la télé sous prétexte qu'il y a passé des vacances et qui, sous couvert d’expertise, en profite pour fourguer sa camelote littéraire. Imitation de BHL, mais cinq ou six kilos en trop pour être aussi “crédible” que le "boss".

    S’il y a des dissidents sincères et éclairés en Birmanie, ce dont il est permis de douter vu la désinformation ambiante, certes leur cause n’est pas honorée ni aidée par ce genre d’énergumène - VRP de soi-même d'abord.

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    Les anarchistes aussi on les imagine plutôt maigres, à force de cavaler pour échapper aux flics. Ce n'est pas le cas du gras Siné, ex-publicitaire reconverti dans l'anarchie de comptoir, qui crachote quelques slogans à la télé contre Tintin-le-facho entre deux réclames avant de repartir se dorer la couenne dans sa villa corse, sous protection gendarmière. La Corse, qui n'est pas une colonie de peuplement, comme on sait, mais plutôt de "peoples" en goguette ou en post-retraite.

  • Censure démocratique

    Je trouve la mise à l’index médiatique de Tintin au Congo caractéristique du néo-colonialisme démocratique. Tous les ingrédients de la propagande sont là.
    Pour appréhender le néo-colonialisme d'un seul coup d'œil ? Eh bien qu’on songe par exemple au rôle capital de “Total” dans la vie politique française. Ou qu’on se souvienne de Chirac dans son costard de représentant de commerce en Chine. Voir encore l’état de l'Afrique après cinquante ans d'humanitarisme moderne tendance Bernard Kouchner. Les propos malthusiens tenus récemment par l’animateur Pascal Sevran sur l'Afrique sont aussi une bonne illustration.
    Il me vient encore une image : celle des massacres entre Hutus et Tutsis sous le regard indifférent des “soldats de la paix”.

    Non, vraiment, la “condescendance” de Tintin vis-à-vis des Africains n’est pas de mise ; lorsqu’on se contente d’exploiter les ressources minières du Tiers-Monde comme font les néo-colonialistes, mieux vaut être le plus diplomate possible et adopter l’attitude de maître Renard dans la fable : « Que mes ancêtres furent méchants avec vous, et comme vous avez eu du mérite à les endurer !… Cette autocritique vaut bien quelques concessions pétrolières, sans doute. »

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    La méthode est caractéristique également de l’hypocrisie néo-colonialiste. Le procès de Tintin au Congo est instruit par les médias. Sur le fond, le verdict est posé d’avance : Tintin est raciste, indubitablement. Pour ce qui est de la forme, on sait d’avance que Tintin au Congo ne sera pas officiellement censuré. Les néo-colonialistes veulent non seulement faire étalage de bons sentiments humanitaires, mais pouvoir réaffirmer de surcroît leur réprobation vis-à-vis de la censure… après avoir matraqué que Tintin et Hergé étaient de vilains colons belges sur toutes les ondes ! Et puis Tintin au Congo, même raciste, contribue à la croissance.

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    Le paradoxe n’est pas que l’extrême-gauche pseudo-marxiste ou pseudo-anarchiste et les libéraux capitalistes s’entendent comme larrons en foire pour dénoncer le racisme d’Hergé et le colonialisme belge. Rien de plus logique à ça. Ils communièrent aussi dans la haine de Saddam Hussein, et je n’ai pas souvenir de vives protestations lorsque Mitterrand prit la décision d’envoyer quelques avions pour bombarder Bagdad dans le sillage des Yankis. Aujourd’hui, tous ces néo-colonialistes rêvent ouvertement d’une guerre civile en Birmanie.

    Probablement les troskistes n’ont pas pardonné à Tintin d’avoir été un des premiers à dénoncer les crimes du régime trotskiste dans Tintin chez les Soviets… et les capitalistes “libéraux” d’avoir dénoncé la brutalité et le cynisme des Yankis, leur morale de gangsters et de journalistes, dans Tintin en Amérique.
    Le paradoxe est plutôt que des Africains éprouvent le besoin de s’impliquer dans ces gesticulations médiatiques de néo-colonialistes contre Tintin. Mais la connerie n’est-elle pas universelle ?

  • C'est mon choix

    Entre Mitterrand et Edwy Plenel, pas difficile de faire un choix. Pas plus qu’entre Chirac d'un côté, et F.-O. Giesbert ou Karl Zéro de l'autre. Chaque fois que j’ai aperçu la tronche de l’un de ces tristes guignols à la télé, ma défiance vis-à-vis de Mitterrand ou de Chirac s’en est trouvée automatiquement diminuée d’un cran.
    Entre Giscard et Jean-Edern Hallier, ma préférence s’inverse. Mais Hallier était-il vraiment un journaliste ? Il n’en avait pas le style.
    J’avoue d’ailleurs que dans la sympathie que j’éprouve pour Le Pen, la haine que lui vouent les baveux entre pour une bonne part. J’espère que quand il mourra, ils ne lui tresseront pas, malgré tout, des couronnes de laurier. Ça serait vraiment une fin horrible !

    Juppé aussi a eu des mots durs vis-à-vis des journalistes. Mais il en a épousé une, démocrate-chrétienne qui plus est, et il a pondu un petit bouquin faux-cul à mort il y a une dizaine d’années, typiquement dans la veine journalistique.

    Je suis bien en peine, pour l’instant, de dire quel journaliste a Sarkozy dans le collimateur ? Ils sont tous comme subjugués. Est-ce parce qu’il leur ressemble ou au contraire parce qu’ils le craignent ? Si Sarkozy ne profite pas de cet ascendant naturel pour tenter de remettre les journalistes à leur place, au ras du caniveau, mais qu’il se contente de soigner ainsi son complexe d’infériorité, le moins qu’on pourra dire c’est qu’il a manqué de machiavélisme.
    J’ai failli ne pas reconnaître Sarkozy l’autre jour à la télé ; on dirait qu’il a subi comme son confrère Strauss-Kahn une opération de chirurgie esthétique qui l’a défiguré. À moins que ce ne soit le maquillage ? Comme la morale dégénère en éthique, la beauté dégénère en esthétique.

  • Trop d'immigrés à la télé

    À la télé, l’historien Michel Winock avance timidement que le pouvoir des médias dépasse désormais celui des hommes politiques ; vu l’irresponsabilité des médias, ça lui semble inquiétant. Ce danger, Simone Weil le pointait déjà sans aucune timidité il y a plus de soixante-dix ans !
    La démocratie, au plan de la pensée, apparaît comme une sorte d’âge glaciaire. Régis Debray accuse soixante-dix ans de retard ; ce n’est qu’au plan de la syntaxe, complètement décadente, qu’il a dix ans d’avance.
    Même pour défendre l’égotisme bourgeois, il n’y a plus de philosophe du niveau de Sartre.
    La critique de la télé à la télé est forcément timide, quand la télé ne suscite pas carrément des guignols, de Gaccio à Jean-François Kahn en passant par Karl Zéro-talent, pour agiter des chiffons rouges : le fachisme, l’islam, la scientologie, l’antisémitisme, le réchauffement, etc., et faire diversion.

    En l’occurrence c’est F.-O. Giesbert, mi-homme de Cromagnon, mi-brute yankie, qui réplique à Winock que rien n’a vraiment changé sous le soleil depuis les démagogues de la Grèce antique.
    Winock disposait pourtant d’un bon exemple tout frais, celui de la guerre en Irak, déclenchée par les médias yankis d’abord, qui ont forcé la main de l’administration Bush, débordée par l'"enthousiasme populaire".
    Non contents d’avoir semé la zizanie en Irak, les démocrates voudraient voir maintenant l’anarchie régner en Birmanie. La dictature chinoise est beaucoup plus supportable : les Chinois sont de futurs clients - en Birmanie, il n'y a que des bonzes et des soldats.

    *

    Plus divertissant que le directeur du Point sur un plateau de télé, son chroniqueur Patrick Besson qui tente désespérément de “se faire adapter au cinéma” et pond ainsi des romans de plus en plus plats. On devine que Besson ne sera pas parfaitement heureux tant qu’il n’aura pas atteint le niveau de Marc Lévy.
    D’après Patrick Besson, on a tort d’être aussi sévère avec la littérature française, qui a de beaux restes. Qui a lu les sept cents romans de la rentrée et peut prétendre qu’ils sont unanimement mauvais ?
    Jusque-là l’argumentation de Besson est assez habile, même s’il doit être le dernier à mettre le nez dans cette surproduction de navets nouveaux.
    Mais après Besson dérape ; les Serbes sont souvent comme ça, d’un culot épatant dans un premier temps ; après, ils finissent par prendre leurs propres coups de bluff pour la réalité.
    Lui-même, dit Besson, est parfaitement capable de citer sur-le-champ une bonne vingtaine de noms d’écrivains contemporains compétents ! Une vingtaine ! Bigre, je sens qu’on va rire… Le chiffre est vite ramené à trois. Parmi les trois, Besson cite Frédéric Beigbeder. Ça aurait pu être pire, vu que Beigbeder a beaucoup lu et beaucoup pompé sur les “anciens”, mais quand même, le coup est un peu gros (sauf pour un plateau de télé).
    Laissons de côté les petits romans publicitaires de Beigbeder, qui n’ont aucune espèce d'intérêt. Lorsque Beigbeder est à son meilleur niveau, c’est-à-dire lorsqu’il se raconte, il est incapable de couper, sur trois pages, les deux qui sont ratées. C’est pourtant le b.-a.-ba du métier, et Besson le sait bien. Même si Céline n’est pas parfait, il y a dans Mort à crédit trente à quarante pages de trop, Céline a conscience de son métier et de ses propres limites, contrairement à Beigbeder. Il y a cinquante ans, on pouvait au moins dénombrer encore une petite dizaine d’écrivains et une petite dizaine d’éditeurs qui dominaient leur art.

    Plutôt que de continuer à entendre ce genre de grossièretés, je me demande parfois si je ne ferais pas mieux de demander l'asile politique à la junte birmane.

  • Revue de presse (XVII)

    L’hebdomadaire démocrate-chrétien Famille chrétienne, dans la logique de son soutien à la politique démago-libérale de Sarkozy, ouvre ses colonnes à un sociologue yanki pour démontrer à ses lecteurs que le capitalisme a son fondement dans le christianisme qui ne fait pas seulement valoir la foi mais aussi la raison. Comme s'il n'y avait pas assez de fantaisistes comme ça de ce côté-ci de l’Atlantique ! Comme si le capitalisme n’avait pas fait la preuve de son caractère complètement déraisonnable depuis belle lurette !
    Ce matin, dans mon supermarché, des pommes pas mûres à un euro cinquante le kilo en provenance d’Australie : quel homme un tant soit peu rationnel ne trouvera pas ce genre de trafic absurde ?

    Rodney Stark : ce gugusse diplômé ignore tout manifestement, non seulement du catholicisme, mais aussi du capitalisme et de la Révolution française de 1789 ; celle-ci a porté au pouvoir la classe bourgeoise qui faisait pression pour l’obtenir et renversé à la même époque l’Église catholique, saccagé l’art chrétien, traqué ses prêtres. Même s'il est impossible de faire complètement table rase du passé, les Jacobins avaient bien compris les bénéfices du colbertisme ; et le changement de cap est net comme le couperet de la guillotine.

    Marx l’a longuement décortiquée, la dynamique du capitalisme repose sur l’accumulation du capital, l’argent produisant de l’argent en dehors du processus classique d’échange d’une marchandise contre une somme d'argent. Cette “plus-value” qui grossit le capital indéfiniment est inséparable, non seulement du salariat généralisé, de la division accrue du travail et du machinisme, mais aussi du système bancaire actuel, très récent.

    Prétendre que ce type d’économie et la course aux gains de productivité étaient contenus en germe dans l’Occident médiéval chrétien, c’est faire comme si l’usure n’y était pas réprouvée. Le crédit à la consommation, le crédit immobilier trentenaire, techniques financières caractéristiques du capitalisme, sont des formes d’usure et, à ce titre, l’Église devrait catégoriquement persister à les condamner. Si elle ne le fait plus, c'est parce qu'elle n'a plus voix au chapitre.
    Le système d’épargne boursière également devrait être scandaleux pour le clergé contemporain, et, sûrement, il l’aurait été pour un clerc du Moyen-âge pour qui le commerce devait être subordonné à des fins extérieures et qui aurait forcément trouvé le système spéculatif insane.
    Un autre historien, un vrai cette fois, François Furet, a magistralement mis en lumière le fait que le capitalisme surgit dans toute son originalité dans l'Angleterre du XVIIIe siècle, qu’il n’est pas lié au progrès scientifique mais à un contexte politique et social bien différent de celui du Moyen-âge ou même de la France catholique de la même époque.

    Famille chrétienne se moque bien de la science et des vrais historiens et préfère gober le discours évolutionniste de M. Stark, qui vaut son pesant de beurre de cacahuète :
    « Malheureusement, il faut admettre qu’il y a dans l’Église des anticapitalistes, sans doute victime d’une désinformation [sic]. Pourtant, il ne faut pas confondre capitalisme et matérialisme ! Je ferai plus simplement remarquer au passage que les plus importantes manifestations de générosité individuelles proviennent de la nation la plus capitaliste au monde : les États-Unis d’Amérique. »
    (“Famille chrétienne”, 22-28 septembre)

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    Plus loin, dans le même hebdo, on peut lire ceci, cette question d'un journaliste, à propos du rugby, qui dénote bien du niveau spirituel atteint par les héritiers de Frédéric Ozanam (1813-1853) :
    « Alexandre Arnoux compare le ballon de rugby à une "hostie volante partagée entre deux tabernacles". N'y a-t-il pas une sorte de parabole "eucharistique" dans un match où des hommes se sacrifient en frères pour un Corps qui est l'équipe ? »
    Probablement le genre de "catholiques" qui crièrent au scandale lors de la parution il y a 150 ans des Fleurs du Mal de Baudelaire. La "raison" que les démocrates-chrétiens vénèrent sans même s'en apercevoir, c'est la raison du plus fort, celle qui permet par exemple aux capitalistes yankis de dire et de faire n'importe quoi sans être contrecarrés.

  • Vieilles gloires littéraires

    Sur le plan littéraire, Drieu est tout aussi lucide, si ce n’est plus. Emmanuel Berl, Julien Benda, Porto-Riche, Bernstein, tous ces ex-écrivains célèbres qui faisaient chier Drieu, ils n’intéressent plus personne en dehors de quelques maniaques bibliomanes désormais.
    Et pourtant, Dieu sait qu’on réédite tout et n’importe quoi aujourd’hui ! Rien ne serait plus facile que de payer un critique du “Monde”, de “Match”, du “Figaro” ou de “France 2” pour dire tout le bien qu’il pense de Porto-Riche et pousser le quidam à l'acheter…

    Lira-t-on encore Modiano ou Weyergans dans trente ans, dans vingt ans ? Houellebecq restera sans doute, mais plutôt en raison de son anticonformisme que de sa prose (Aussi, quelle erreur de se fondre dans le moule en faisant du cinéma produit par Lagardère.)

    *

    Préjugé favorable, tout de même, de Drieu en faveur de Nitche. Nul n’est parfait. Un préjugé partagé d’ailleurs par t’Sterstevens. Préjugé d’une époque. Et puis Drieu n’est pas un catholique conventionnel. Le superhomme, Zaratoustra, toute cette bimbeloterie… le goût pour les arts premiers n’est pas très catholique. Pour un catholique, les schémas marxistes de Simone Weil sont beaucoup plus raisonnables que la trahison par un Allemand francophile des grands moralistes français. Pourtant, Drieu le sait, le dit et le répète : les Allemands font de bons soldats, mais en politique ils sont nuls.
    Quant à Marx, beaucoup plus anglais qu’allemand, Drieu l’ignore presque complètement ; il est occulté par le communisme.

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    Apparemment sur un point Drieu s’est trompé. À la fin, estime-t-il, les Russes l’emporteront sur les Anglo-Saxons, pourris jusqu’à la moelle par le capitalisme.
    Dès le milieu du XVIIIe siècle, Grimm, le La Boétie de Diderot, aussi antipathique et visionnaire que Diderot est sympathique et aveugle, Grimm prévoyait que l’empire russe jouerait un rôle de premier plan à l’avenir, ce qui était loin d’être évident.
    Mais la dislocation récente de l’empire soviétique semble donner tort à Drieu. À moins qu’il faille attendre encore un peu ? Une chose est sûre, outre la haine du catholicisme et le mépris des Yankis, bref de tout ce qui n'est pas russe - un signe de santé psychologique -, les Russes ont ce que les "musulmans" n’ont pas et qui les condamne à demeurer sous la domination occidentale : l’unité, l’argent, les armes, et toutes les ressources énergétiques nécessaires.
    À tout prendre, Drieu aimerait mieux tomber sous le joug des Russes plutôt que sous celui des Yankis. Moi aussi : entre les gonzesses yankies et les gonzesses russes, il n’y a pas photo.

  • Prescience de Drieu

    Et la prescience de Drieu, n’est-elle pas étonnante ? Car il est isolé ou presque dans son “living room” mais avec quelques années d’avance prévoit la tournure que vont prendre les événements. Il y a sans doute des cartes d’état-major étalées chez lui, il connaît le nombre de divisions allemandes, britanniques, françaises, par cœur, il a beaucoup moins de préjugés que ses contemporains, et cela suffit.

    Comparons avec les politiciens actuels, incapables, avec leurs bataillons de soi-disant experts en économie et tous leurs logiciels, de prévoir ne serait-ce que six mois à l’avance une crise économique ! Tous les Attali, Cohen, Boissonnat, quelle bande de radoteurs inutiles ! Ils justifient après coup tout ce qu’on veut, ça, pour ça on peut compter sur eux. Attali publie un bouquin où il annonce la multiplication des i-pods, et tous les crétins qui sortent de Sup. de co. se ruent pour l’acheter.

    Le diagnostic de Drieu sur les campagnes d’Hitler : six mois de retard par année. Évidemment c’est le jugement d’un homme de méditation sur un homme d’action, mais il n’a pas tort, Hitler fond sur sa proie, puis il ne sait trop qu’en faire ensuite, il paraît tergiverser.

    *

    Ce goût pour la conjecture politique, dont Drieu affirme qu’il se passerait bien pour se consacrer entièrement à l'histoire des religions, est plus fort que lui. Conséquence directe, l’avortement est un sujet qui l’obsède. Il a déjà écrit une nouvelle qui tourne autour et a le projet d’écrire tout un roman dessus.
    La réaction des démocrates-chrétiens, qui sont en quelque sorte les “derviches tourneurs” du catholicisme, face à l’avortement, est beaucoup plus “calme”. “L’avortement ? Ah, oui, c’est embêtant, mais tant que le business va, tout va”, voilà à peu près le ton et l’esprit d’un évêque français moyen, pas très éloigné de celui de Fillon ou Sarkozy.
    Lorsqu’on se souvient de l’inaptitude de Mgr Lustiger au calcul politique, à miser sur Balladur plutôt que sur Chirac (Parce que celui-ci avait intercédé en faveur de Mgr Lefebvre ?), on se dit que les évêques feraient mieux de s’en tenir aux principes, ce pourquoi ils sont payés, au moins en partie.