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  • Théorie du genre

    Pour qui sait regarder la vérité en face, la "théorie du genre" dont on nous rebat les oreilles traduit l'effondrement du savoir scientifique au niveau de la rhétorique, c'est-à-dire de la religion.

    Cette présentation d'une vérité religieuse comme une vérité scientifique est typique du discours totalitaire, qui s'est nourri notamment au XXe siècle d'évolutionnisme ou de darwinisme social.

    J'ai commenté l'exhortation fameuse de Simone de Beauvoir à "devenir femme" sur ce blog, présentation plus poétique de la "théorie du genre", et dit la part de christianisme qu'elle recèle. D'une manière générale, on ne peut comprendre le totalitarisme sans comprendre la religion chrétienne qui le détermine. Le monde païen connaît "seulement" la tyrannie fondée sur le droit naturel ; au cours de l'ère chrétienne s'est développée une formule de l'oppression, fondée non plus sur le droit naturel, mais la science humaine ou anthropologique. Autrement dit, le rapport de l'homme à la nature s'est inversé, non pas sous l'effet de la science, mais au contraire d'une spéculation religieuse intense, où la scolastique médiévale chrétienne a beaucoup contribué.

    Simone de Beauvoir est au demeurant une admiratrice de la philosophie nationale-socialiste de G.W.F. Hegel, c'est-à-dire d'une interprétation prétendument chrétienne de l'histoire que l'on retrouve à l'arrière-plan de tous les partis totalitaires modernes : nazi, stalinien et démocrate-chrétien, classés ainsi dans l'ordre de puissance. Répétons-le, car cette imposture est celle de l'Education nationale et des universités françaises depuis la 2nde guerre mondiale. L'hégélianisme est le plus grand commun dénominateur des idéologies totalitaires post-napoléoniennes, non le marxisme, ou même la doctrine réactionnaire de Nitche. Le marxisme est la doctrine de l'impérieuse urgence de dissoudre l'Etat afin, pour l'homme, de recouvrer la liberté. La critique de l'Etat et du droit modernes de Nitche est plus concise mais néanmoins assez efficace - ce qui fait du nazisme une idéologie moderne, c'est le volet des théories raciales ou du darwinisme social, derrière lesquels on retrouve, comme dans la théorie du genre, l'aspect du mobile juridique déguisé en mobile scientifique.

    - Une manière simple de contester le fondement scientifique de la "théorie du genre" est de dire que le "progrès social" est une hypothèse scientifiquement improbable. Les deux hypothèses sont en effet liées. Le "devenir de la femme", tel qu'évoqué par S. de Beauvoir est en effet un "devenir social chrétien". La vérité scientifique, c'est que la société se métamorphose, elle évolue, mais rien n'indique que cette évolution soit un progrès. Mesurez la place de la science dans ce genre de conviction : elle se nourrit d'un préjugé répandu par de soi-disant chrétiens, puis de soi-disant athées socialistes, alors même que le christianisme, si l'on prend la peine de lire les apôtres, s'avère LA RELIGION LA MOINS SOCIALE DE TOUS LES TEMPS. Jamais aucune religion n'a souligné autant la vanité complète et définitive du plan social, fondant l'universalisme sur l'amour, et l'amour sur le renversement de l'ordre social, non pas violent mais spirituel, non pas collectif mais individuel. En dépit de cela, l'Eglise romaine s'avère la matrice des institutions sociales occidentales.

    Mesurez la place de la science dans l'Occident en général, puisque c'est un suppôt de Satan, défenseur du droit naturel, Nitche, qui sait mieux que des légions de clercs catholiques que le christianisme est essentiellement anarchiste. Ce que Nitche ignore, c'est la détermination de ces légions de clercs. Pourquoi un tel acharnement à proférer des bobards religieux comme la démocratie ou l'égalité entre les sexes ?

    - Le "généticien" (sic) Axel Kahn, accomplissant son devoir médiatique, s'est fendu d'un essai de vulgarisation de la "théorie du genre" pour le petit peuple français têtu que les prêches radiophoniques émanciperont bientôt des ténèbres où il est plongé ; aussi parce que les sectateurs de la théorie du genre ont un peu du mal à s'accorder les uns les autres, comme dans la tour de Babel, parfaitement emblématique du tour que la rhétorique peut jouer aux rhétoriciens qui croient que la rhétorique est une "science dure".

    Au titre de généticien et de nombreuses autres distinctions, disons que M. Axel Kahn, savant pour rire, a sa part de responsabilité dans l'eugénisme national. Celui-ci est remis en cause par des économistes un peu plus sérieux que les médecins-légistes qui permettent à la France de se délester chaque année de 200.000 embryons. Or l'économie prévaut sur l'éthique dans les nations libérales, de sorte que celle-ci résulte objectivement de la compétition que se livrent les acteurs économiques à l'échelle mondiale. Voilà ce qu'on peut dire sur le terrain extra-scientifique où se situe M. Axel Kahn.

    "La théorie du genre ne veut pas dire qu'il n'y a pas de différence biologique entre l'homme et la femme, comme le zizi par exemple, mais qu'on ne peut pas déduire de cette différence biologique une différence de comportement, comme le fait que les femmes sont moins bonnes que les hommes en maths, par exemple." Voilà en substance ce qu'a dit le professeur Kahn, voulant ainsi renforcer le crédit de la théorie du genre auprès de la frange de la population qui parle petit nègre.

    Donc les différentes manières de se vêtir des hommes et des femmes n'ont pas une cause biologique ? De même les hommes vont à la guerre, ils représentent 99% de la population carcérale misogyne sans que la nature y soit pour rien ? Le propos d'Axel Kahn en dit long sur la mentalité évolutionniste, c'est-à-dire la théorie qui constitue la clef de voûte de l'eugénisme moderne, et qui pose l'hypothèse incomplètement démontrée du transformisme biologique. Paradoxalement, et ce paradoxe fait soupçonner un préjugé anthropologique plaqué sur le monde animal, l'évolutionnisme renforce l'idée du déterminisme biologique (pour ne pas dire qu'elle nie la liberté), tout en refusant à la nature d'être la cause essentielle de la culture, c'est-à-dire en posant le principe d'une liberté, celle contenue dans la théorie du genre, totalement théorique et "empruntée" à cette falsification du christianisme qu'est l'éthique chrétienne.

    Ce paradoxe n'est pas seulement celui de l'éthique scientifique moderne, il est aussi exactement celui de l'art moderne, dont on ne peut manquer de souligner l'appui qu'il a fourni aussi largement aux idéologies totalitaires, sous la forme globale du futurisme le plus inepte, ou encore de l'existentialisme le plus creux. Il y a discours éthique et un discours esthétique totalitaires, et ils convergent. Ce discours prétendument humaniste occulte la science véritable, non seulement métaphysique mais même physique. Le refus des savants technocrates d'envisager la métaphysique n'est pas, comme on peut croire au premier abord le refus d'envisager des questions extra-physiques ou qui touchent à la foi ; ce refus tient à ce que la conscience moderne postule une réalité virtuelle qui constitue une métaphysique d'un autre genre, dont le rôle d'agrégation des masses est primordial.

    - De prétendus savants comme Axel Kahn se gardent d'expliquer comment ils font pour concilier science et éthique. Ils ne démontrent pas non plus en quoi la conciliation qu'ils opèrent est supérieure moralement à celle opérée par le régime nazi, et leur abus de position morale dominante est strictement le même.

    En même temps que la communauté des savants neurologues ou psychiatres fait l'aveu que le cerveau, où cette communauté situe empiriquement l'intelligence, est encore "terra incognita" (la mise en évidence de l'activité cérébrale à l'aide de produits de contraste est une expérience tautologique ridicule), Axel Kahn décrète que la différence sexuelle biologique n'est pas lourde de conséquence sur la volonté qui anime l'homme ou la femme !? Il n'y a pas de définition de l'intelligence, mais l'intelligence des hommes et des femmes est similaire.

    En ce qui me concerne, je soupçonne au contraire une accointance particulière entre les mathématiques modernes, dites "post-euclidiennes", et le mode de réflexion féminin, pour avoir observé à de nombreuses reprises que la géométrie antique pythagoricienne heurte naturellement moins la façon virile de penser, plus concrète. Il y a bien sûr des exceptions, notamment les "gens de robe", qui partagent souvent la manière subjective et pusillanime des femmes de penser, qui balancent souvent et concluent rarement. C'est certes une femme, Simone Weil, qui se prononce contre la physique nucléaire moderne en raison d'un tour rhétorique excessif suspect, mais son raisonnement est largement fondé sur la pensée grecque antique. Mathématicien, le frère de Simone Weil a manifesté quelques soupçons quant au fameux progrès accompli par les mathématiques modernes, en comparaison des anciennes, en raison de la dimension pataphysique ou surréaliste de la nouvelle norme.

    Un des processus totalitaires les plus dangereux est celui qui consiste à faire de l'exception la nouvelle règle, quand celle-ci servait anciennement à confirmer la règle principale. On retrouve ce processus dans l'eugénisme, la théorie du genre, le marketing politique : il expose la culture moderne et ses acteurs à une destruction sous la forme de "retour du naturel au galop".

    L'apocalypse chrétienne énonce que la seule force qui peut s'opposer à la violence anthropologique de l'homme vis-à-vis de lui-même, c'est la connaissance. Le monopole de l'Etat sur la science est donc un scandale absolu ; il ne fait que prolonger le monopole de l'Eglise romaine. Le plus scandaleux est la caution fournie par de soi-disant chrétiens ou de soi-disant juifs à cette science étatique totalitaire. J'ai des noms, des centaines de noms, mais je ne les donnerai pas, car tout homme périt par où il a péché - la folie frappe souvent les prétendus savants qui parlent contre l'esprit de dieu - il ne faut pas se préoccuper des salauds qui abusent de leur position dominante, mais des victimes de leurs tromperies. Il n'y a pas de liberté dans le genre, pas plus qu'il n'y en a dans la nature ; il y a seulement une façon plus hasardeuse de choisir sa mort, qui traduit plus l'empreinte de l'Etat, et moins celle de la famille. A quoi bon servir l'Etat ? C'est le dieu le plus froid, proche parent de Pluton. 

     

     

     

  • Demain la révolution

    Tandis que des manifestations violentes de mécontentement ont lieu en Ukraine contre le président Ianoukovitch soutenu par le pouvoir russe, quelques dizaines de milliers de personnes ont manifesté à Paris dimanche dernier a contrario contre le gouvernement oligarchique capitaliste de la France, son orientation "américaine" en matière de moeurs.

    On s'achemine peut-être en France vers un nouveau Mai 68, comme certains blogueurs le prônent depuis quelques mois ? La presse française préfère évoquer le 6 février 1934 - mais pas sa répression policière républicaine brutale. En réalité, le 6 février 1934 et Mai 68 sont des mouvements analogues ; Mai 68 est un mouvement beaucoup plus réactionnaire ou nitchéen qu'on ne le dit. Au demeurant, Nitche a raison, la France est plus réactionnaire qu'elle n'est moderne.

    La France est surtout moderne de par ses universités et ses professeurs, qui ne sont jamais que des fonctionnaires. "Réactionnaire" ne veut pas dire "de droite", puisque la mécanique gauche-droite est un moteur dont le mouvement n'est positif que du point de vue moderne. Si l'on prend Nitche comme exemple du pur réactionnaire - on peut définir le type réactionnaire comme celui à qui le seul slogan de l'avenir ne suffit pas pour avancer. La misogynie réactionnaire n'est pas un hasard, c'est quasiment un principe de jouissance, de sorte que l'avenir en particulier, et la détermination abstraite en général, est perçue comme un joug. Le désir d'avenir est un désir féminin. Ses chaînes, la femme en fait le plus souvent un ornement. La manière de marcher vers l'avenir est aussi caractéristique : comme elle est grégaire, il suffit qu'un obstacle se dresse sur ce chemin pour que le troupeau s'éparpille. Il y a dans le désir d'avenir, comme dans le désir de démocratie, un désir de se noyer dans la masse.

    De surcroît la presse et les médias français font corps avec l'oligarchie. Ils distraient les masses à l'aide de sujets secondaires, économiques. Bien sûr l'économie nous détermine, mais c'est précisément pour cette raison qu'elle n'a pratiquement aucun intérêt ; les mahométans sont plus raisonnables avec leur "Inch Allah", que tous ces branleurs avec leurs mastères d'économie qui font et refont leurs calculs à l'infini. Montrer ces têtes de cul à la télé française, quelle infamie. La vie est trop courte pour ne pas s'intéresser exclusivement à ce qui ne nous détermine pas. Simone de Beauvoir a raison : ce qu'on est à la naissance compte pour rien ; on peut prouver aussi bien le néant par l'origine que par la fin dernière. Mais dans ce cas, pourquoi ce déversement incessant d'histoires de cul et de sentiments féminins complètement puérils ? Autrement dit pourquoi l'iniquité moderne passe-t-elle par des garanties et des ruses féminines ?

    Le désir de rébellion ou de révolution de la jeunesse, son parfum excitant, viennent du sentiment que la révolution permet de reconquérir du terrain sur le destin ou l'économie. Comme dit l'humoriste Dieudonné : "Mieux vaut mourir libre que de vivre en esclave." : ce discours fait certainement mouche parmi les jeunes gens sensibles à la privation de liberté dans l'Etat de droit hyper-paternaliste où nous sommes. George Orwell dit justement que les intellectuels ne perçoivent guère la privation de liberté dans les régimes totalitaires ; c'est probablement parce que l'intellectualisme, qui est aussi un élitisme (en tant qu'artiste, Nitche rejette l'intellectualisme), peut se définir comme une pensée abstraite - comme le rêve, elle fournit sous la forme rhétorique un certain nombre d'échappatoires au lourd conditionnement de fait, qu'un artiste ou une personne à l'esprit plus concret ressentira mieux. En quelque sorte, l'intellectuel est non seulement captif du système, mais il en est un complément indispensable afin de suggérer les contours d'une liberté idéale, parfaitement hypothétique. D'une manière beaucoup plus sinistre, l'intellectuel, qui est une sorte de prêtre, censure les critiques du système technocratique qui entraîne le conditionnement le plus strict : censurés Marx, Orwell, Bernanos, Simone Weil, Céline, Shakespeare, Molière : ou passés à la moulinette de la culture de masse cinématographique.

    Cependant Shakespeare montre que la révolution, si elle paraît légitime et correspondre mieux à l'aspiration à la liberté que le maintien de l'ordre en place, la révolution est inutile dans la mesure où elle ne fait pas reculer les droits de la tyrannie (cf. "Jules César"). Le meilleur moyen d'être insoumis à l'ordre public n'est pas la révolution, mais la charité, beaucoup plus difficile que la révolution, la charité socialement impossible.

  • Ironie et histoire

    Nitche fait de l'humour ou de l'ironie, non seulement une vertu française, mais la marque d'une conscience païenne supérieure - d'où l'hommage qu'il rend aux moralistes français du XVIIe siècle. Le salut chrétien n'est aux yeux de Nitche qu'une plaisanterie saumâtre, car il soumet l'homme à une perspective entièrement abstraite, en contrepartie de la renonciation au bonheur terrestre, visée plus juste des religions païennes.

    Dans une large mesure, la religion grecque ne correspond pas à la définition trop restreinte que Nitche en donne, et qui consiste à nier qu'il y a une métaphysique grecque, pour réduire l'art grec à une simple détermination anthropologique, alors que tout laisse penser au contraire que Homère, Aristote ou Démocrite on une démarche théologique authentique, et ne sont pas seulement des poètes ou des moralistes. On voit bien notamment comme Homère et la mythologie soulignent que le plan humain du désir contrecarre le plan divin de la sagesse. Il y a d'ailleurs dès l'Antiquité grecque un matériel scientifique suffisant pour réfuter la science physique relativiste d'Einstein, qui déduit les propriétés de l'univers ou du cosmos des seules facultés humaines, c'est-à-dire prend pour un dogme l'idée selon laquelle la nature s'organise autour de l'homme.

    Le néo-paganisme écologiste ou libéral découle de l'idée d'exploitation plus ou moins rationnelle de la nature. Ces doctrines sont risibles du point de vue païen de Nitche, pour qui la nature est bien plus insondable que l'homme, dont le mobile biologique est transparent, et qu'il n'y a pas besoin de gratter beaucoup le vernis culturel pour découvrir. L'ironie est d'ailleurs permise par la connaissance de soi ou l'exaltation artistique de soi comme un être borné, limité, et non soumis au plan social infini, qui relie les hommes entre eux jusqu'à former une chaîne innombrable.

    Nitche oppose donc la recette d'un humanisme païen à la culture moderne, qu'il accuse d'être un instrument d'aliénation judéo-chrétien. La doctrine de Nitche capote sur le point de savoir de qui cet instrument d'aliénation sert le dessein. Capoterait tout autant une théorie qui chercherait à démontrer que la culture de masse répond à une initiative et à des besoins populaires, puisqu'il est manifeste que cet aspect du totalitarisme porte la marque des élites. De manière caractéristique, ce sont les élites qui s'efforcent d'assimiler les gadgets technologiques ou juridiques au progrès scientifique ou juridique.

    La doctrine païenne de Nitche est une doctrine aristocratique, et il ne peut en être autrement, en raison de sa référence rationnelle au droit naturel. Nitche est parfaitement conscient qu'une société égalitaire, en vertu de la nature, est impossible : une société égalitaire ne peut s'appuyer que sur la rhétorique la plus abstraite, qui tôt ou tard sera démasquée. Qu'adviendrait-il d'une société dont tous les membres seraient capables d'ironie, c'est-à-dire seraient avertis de la vanité de l'existence ? La raison de se soumettre au bonheur d'autrui serait perdue dans une telle société. C'est ce qui explique que les fachistes ont été naguère les meilleurs exégètes de Nitche, ne cherchant pas à dissimuler la nature essentiellement aristocratique du surhomme nitchéen.

    L'amalgame de Nitche serait véridique entre la culture moderne et la moraline judéo-chrétienne si le christianisme permettait de définir un plan social, une doctrine sociale, ou encore une anthropologie. Or ce n'est absolument pas le cas, et l'apôtre Paul, ennemi juré de Nitche et des pharisiens juifs et chrétiens qui propagent sa doctrine, ne donne pas prise au plan social, à moins de ne retenir de Paul que les quelques conseils cironstanciels qu'il donne à ses disciples, et d'en ôter toute la partie eschatologique.

    La conscience historique occupe quant à elle la même place que l'ironie dans la doctrine païenne de Nitche. Cette conscience historique, de Shakespeare ou Molière, a bien aussi un aspect ironique ; mais cette ironie, qui vise les rois tombés à terre, ne vient pas du constat de la vanité ou des limites de l'existence humaine, mais de la vanité et des limites du monde, et par conséquent de l'art humain. En définitive, après avoir cru reconnaître dans Shakespeare un semblable aristocrate (Francis Bacon), Nitche se demande quel but poursuit Shakespeare exactement. Shakespeare ne construit certainement pas une doctrine artistique à l'instar de Nitche, mais il montre bien plutôt que, comme le monde est condamné, l'art humain est aussi condamné à s'étioler, sans pour autant que la vérité soit altérée, ce qui constitue un démenti chrétien formel aux sciences sociales ou anthropologiques, ainsi qu'à la philosophie naturelle qu'elles ont fourni aux régimes totalitaires depuis le XVIIe siècle. 

     

     

     

  • Catholicisme intransigeant

    Dans le quotidien "La Croix" (11-12 janvier), un clerc catholique romain, Gaston Piétri, pose la question : "Où est la véritable intransigeance ?".

    Utilement celui-ci rappelle que Jésus-Christ n'est pas un modèle de composition, mais bien d'intransigeance. Il cite l'évangile : "Que votre oui soit oui." ; "Nul ne peut servir deux maîtres, Dieu et l'argent." ; "Tout arbre qui ne produit pas un bon fruit, on le coupe et on le jette au feu."

    Je précise que l'intransigeance du Messie est manifeste au cours de sa vie publique, non pas à l'égard de pécheurs que la société condamne : criminel, femme adultère, etc., mais à l'égard du clergé juif principalement. A ce clergé le Messie reproche de ne pas avoir saisi la portée universelle du judaïsme ou de la loi de Moïse, et d'en avoir restreint le bénéfice au seul peuple hébreu, méprisant ainsi l'esprit de la loi.

    Or le clergé catholique romain n'accomplit-il pas le même détournement de la parole divine dont les pharisiens se rendirent coupables il y a un peu plus de deux mille ans ? La doctrine catholique romaine est-elle véritablement "universelle", ou bien n'a-t-elle pas été réduite à une doctrine anthropologique, et par conséquent nécessairement relative ? L'intransigeance exige que l'on se pose cette question, d'autant plus que les derniers évêques de Rome, Joseph Ratzinger en particulier, affirment la nature anthropologique du message évangélique, ce qui est IMPOSSIBLE, notamment en raison de l'intransigeance de la parole divine à l'égard de l'ordre social humain.

    Joseph Ratzinger tente ici de justifier la vocation du clergé romain à décréter dans le domaine moral, ou comme on dit aujourd'hui, dans le domaine social. Derrière l'argument de l'anthropologie se dissimule en réalité le cléricalisme romain.

    Gaston Piétri ne pose pas de cette manière le problème de l'intransigeance chrétienne vis-à-vis de la vérité, c'est-à-dire de l'amour. Son but est de priver d'une base évangélique les catholiques réactionnaires qui manifestent leur désapprobation vis-à-vis de la politique et de la morale modernes. Il n'a pas tort, car il n'est pas difficile de montrer que ce type de réaction est fondé juridiquement contre l'histoire. Poussant le raisonnement juridique jusqu'au bout, l'antéchrist Nitche est amené à nier la résurrection du Messie, c'est-à-dire le triomphe de la vérité et de l'amour sur la logique juridique, essentiellement relativiste. Pour autant ce clerc romain n'a pas raison. L'évangile moderne ne cautionne pas plus l'attitude moderne qu'elle ne justifie le retour à un ordre ancien. D'ailleurs le flou juridique moderne est facteur d'une iniquité non moins terrible que l'ordre tyrannique ancien. Dans la mesure où l'éthique occidentale moderne assume un prétendu héritage judéo-chrétien (Hegel), à travers l'idéal démocratique égalitaire, notamment, et les droits de l'homme, elle expose les peuples opprimés par les nations occidentales à rejeter en bloc les évangiles et l'éthique hypocrite dont le "clergé laïc" occidental prétend qu'elle découle. Par conséquent, l'éthique moderne est un motif de scandale extraordinaire pour les chrétiens ; l'intransigeance doit les inciter à dénoncer cette subversion moderne, non pas au profit d'un ordre ancien somme toute à peine moins abstrait que la perspective moderne totalitaire, mais parce que le triomphe de l'Eglise, invisible, n'est pas fonction du temps.

    "Il n'y a pas de droits de la vérité à faire inscrire à tout prix dans les institutions. Il y a le droit des personnes à entendre un message dont les ondes de choc devraient aller loin dans le jeu social. A condition que les témoins du Message eux-mêmes respectent ce jeu social et ne s'installent pas en surplomb." : cette casuistique, typiquement moderne en l'occurrence, de Gaston Piétri, n'est pas fondée sur les évangiles ; c'est au contraire le refus de composer avec la nécessité sociale qui est le sens des paraboles et de l'amour chrétien. Où est-il écrit que le christianisme a pour but de féconder le "jeu social" ? Le Messie n'a de cesse de répéter que son royaume n'est pas de ce monde, et que le "jeu social" n'est qu'un jeu macabre, c'est-à-dire entérinant la mort comme un réalité éternelle. Gaston Piétri se fait ici l'apôtre d'une idéologie laïque moderne qui n'a rien de chrétien, mais qui ressemble beaucoup à un luthéranisme dévoyé, ayant renoncé à l'intransigeance de Luther, sans doute peu nostalgique du moyen-âge, mais réduit du fait de l'évolution à un conformisme social plus grand encore que celui du petit parti catholique réactionnaire nostalgique. La dialectique du conservatisme et de la modernité n'est d'ailleurs pas une dialectique chrétienne : c'est une dialectique culturelle, et il n'y a pas de culture chrétienne.

    Plus concrètement, on peut s'interroger sur le bénéfice de ces doctrines sociales chrétiennes ? En quoi n'ont-elles pas fait le jeu du capitalisme moderne, depuis le début, suivant l'argument de leurs détracteurs athées ou anticléricaux ? N'y a-t-il pas rien de plus désespérant pour les apôtres sincères de la justice sociale, persuadés du mérite des papes à faire entendre un tel discours abstrait, que l'échec systématique et catastrophique de ce type d'entreprise que le message évangélique ne cautionne pas ? N'est-ce pas ce type de désespéré qui, confronté à la désillusion, finit par être acculé à l'égoïsme ou à la vengeance ?

    Enfin, s'il n'est pas permis de servir l'argent comme un second maître, quel est le sens du consentement à un Etat, une personnalité morale temporelle, dont l'existence est entièrement dépendante d'une problématique économique aliénante, au point que les élites dirigeantes ne peuvent même plus prétendre à la responsabilité, et ne disposent plus, comme solution ultime, que de diviser pour se maintenir ? Traduit en acte dans le fachisme néo-païen ("Dieu, famille, patrie"), où dieu n'est autre que Satan, comme dans le communisme prolétarien, le discours de la justice sociale n'a rien fait qu'assurer le triomphe de la détermination humaine la plus basse, économique, dans les faits voire dans les consciences. Comme l'argument de la justice sociale est indissociable de cette prétendue "éthique judéo-chrétienne", les chrétiens fidèles à la parole divine sont amenés à voir dans la formule moderne sur laquelle l'Occident s'appuie la manifestation de l'antéchrist.

     

     

     

     

     

     

  • Titanic

    Aucun chrétien ne saurait se porter au secours de la civilisation, puisque la civilisation et le christianisme poursuivent deux buts strictement opposés, comme le Christ et Satan.

    Il y a de quoi être sarcastique à propos des "défenseurs chrétiens de la civilisation", brave bourgeois abonnés au "Figaro" ou à quelque gazette capitaliste similaire.

    L'effondrement de la civilisation et des nations sur elles-mêmes a d'ailleurs du point de vue chrétien sa logique. Le principe conservateur de la civilisation est battu en brèche par une idée de progrès, social ou juridique, abstraite et artificieuse ; celui-ci entraîne un relativisme moral toujours plus grand. Contrairement à ce que prétend la philosophe nazie Hannah Arendt, l'éthique moderne n'est pas vectrice d'une criminalité banale ; celle-ci est au contraire marquée par l'irresponsabilité extraordinaire des élites technocratiques modernes, à qui l'argument du progrès sert de blanc-seing.

    Autrement dit, l'éthique païenne est marquée par le principe de responsabilité, tandis que ce n'est pas le cas de l'éthique moderne.

    Du point de vue évangélique, spirituellement opposé à la détermination éthique ou psychologique, bien qu'il soit plus rationnel que l'art moderne ubuesque, l'art païen antique n'a pas le caractère universel. Il exclut l'amour, ce qui est préférable que d'en procurer l'illusion, au profit d'une philosophie naturelle qui exclut la révélation à l'homme de l'amour au profit du moindre malheur social.

    Exiger l'amour sur le plan social est la calamité dont le monde moderne souffre ; cette quête amoureuse jusqu'à l'abaissement des valeurs au plan sentimental paraît une invention typiquement chrétienne, alors que paradoxalement les évangiles et les apôtres sont les plus dissuasifs de voir dans le mariage de Roméo et Juliette autre chose qu'un mécanisme naturel de consommation.

    "Chrétien" ou "juif" est devenu synonyme de "capitaliste", ne serait-ce que parce que les nations qui exercent leur domination militaire sur le reste du monde sont des nations qui arborent des insignes chrétiens ou juif. Ce n'est autre que la manifestation de l'antéchrist dans l'histoire, selon sa description évangélique. Qu'il en soit conscient ou non, peu importe, un suppôt de Satan tel que Nitche n'est que l'auteur d'une charge destinée à faire diversion. Mais le satanisme ne peut se nourrir des seules valeurs politiques traditionnelles, ni de la formule égyptienne de la civilisation, la plus pure.

    Quelle que soit la furie du monde, les chrétiens fidèles à Dieu et qui ne propagent par intérêt des mensonges sur la religion chrétienne sont sous sa protection. Nul ne sait mieux qu'un chrétien quel dieu bénit les nations et la civilisation.

     

  • L'Odeur du Danemark

    "Jusqu'à ces derniers temps, les enfants prodigues disaient merde à leurs pères et passaient à la Gauche, avec armes et bagages ; le révolté, c'était classique, se changeait en militant. Mais si les pères sont à gauche ? Que faire ? Un jeune homme est venu me voir : il aimait ses parents mais, dit-il avec sévérité : "Ce sont des réactionnaires !" J'ai vieilli et les mots avec moi : dans ma tête, ils ont mon âge ; je m'égarai, je crus avoir affaire au rejeton d'une famille aisée, un peu bigote, libérale peut-être et votant pour Pinay. Il me désabusa : "Mon père est communiste depuis le congrès de Tours." Un autre, fils de socialiste, condamnait à la fois la SFIO et le PC : "Les uns trahissent, les autres s'encroûtent." Et quand les pères seraient conservateurs, quand ils soutiendraient Bidault ? Croit-on qu'elle puisse attirer les fils, la Gauche, ce grand cadavre à la renverse, où les vers se sont mis ? Elle pue, cette charogne ; les pouvoirs des militaires, la dictature et le fascisme naissent ou naîtront de sa décomposition. ; pour ne pas se détourner d'elle, il faut avoir le coeur bien accroché. Nous les grands-pères, elles nous a faits : nous avons vécu par elle ; c'est en elle et par elle que nous allons décéder. Mais nous n'avons plus rien à dire aux jeunes gens : cinquante ans de vie en cette province attardée qu'est devenue la France, c'est dégradant. Nous avons crié, protesté, signé, contresigné ; nous avons, selon nos habitudes de pensée, déclaré : "Il n'est pas admissible..." ou : "Le prolétariat n'admettra pas..." Et puis finalement nous sommes là : donc nous avons tout accepté. Communiquer à ces jeunes inconnus notre sagesse et les beaux fruits de notre expérience ? De démission en démission, nous n'avons appris qu'une chose : notre radicale impuissance."

    J.-P. Sartre (Situations)

    - Gauche-droite-gauche : le pas de l'oie.

     

  • Nabe contre Dieudonné

    ...et Finkielkraut contre Soral.

    C'est une belle affiche pour un pugilat télévisé, n'est-ce pas ? Qu'on ne dise pas que les responsables de programmation n'aiment pas ça, les débats animés. Or rien que le communiqué de presse de Nabe pour la parution de son bouquin a battu des records d'audience.

    Bien sûr ça poserait quelques problèmes protocolaires, A. Finkielkraut refuserait sans doute de se ranger du même côté de Nabe, à cause de l'odeur. Mais bon, on trouverait bien une solution protocolaire. Finkielkraut porterait une tenue de décontamination, ou Nabe ferait comme les papes sa contrition.

    C'est un peu vache de coller Finkielkraut dans le camp des "justes" : il est tellement nul ; Finkielkraut aime la rhétorique comme un perroquet éprouve le besoin de parler, ça ne veut pas dire qu'il y arrive.

    Mettons plutôt BHL ; mais BHL est trop malin pour se compromettre dans un pugilat avec le bas-clergé.

    Les politiciens ont de quoi être jaloux : leurs joutes verbales et leurs compétitions électorales n'intéressent plus que les journalistes, payés pour s'y intéresser. Le vaudeville avec des actrices ou des chanteuses est leur dernier atout pour faire de l'audimat.

    Mais ce débat n'aura pas lieu. Pas à la télé, qui est un sanctuaire. Il y a dans la nef des recoins obscurs où tel ou tel paria peut se faufiler grâce à un chanoine complaisant (F. Taddéi), et lapper ainsi quelques gouttes de la lumière glorieuse des saints...

    Mais pas question de débattre de l'existence de dieu au beau milieu de la nef, en plein sur le maître-autel. Le diable doit symboliquement rester à l'extérieur. Je dis "symboliquement", car il n'est aucune institution qui peut résister à Satan.

    Plus encore que par Soral & Dieudonné, c'est par les faux espoirs qu'elle entretient qu'une élite se fait désarçonner, c'est-à-dire par une puissance implacable et incontrôlable.

  • Mort de l'Art

    La mort de l'art est une catastrophe bien pire pour les grands de ce monde que la mort de dieu.

    Le peuple, lui, au contraire, est plus attaché à dieu qu'il ne l'est à l'art. L'iconoclasme populaire vise le catholicisme romain seulement dans la mesure où celui-ci, quand il était encore vivant, mélangeait art et spiritualité, trahissant l'esprit et la lettre des évangiles. Autrement dit le catholicisme romain avait transformé dieu en oeuvre d'art, c'est-à-dire en idole.

    Précisons, en idole "moderne", car l'idolâtrie moderne est issue de la doctrine catholique romaine - la philosophie de Hegel est la plus révélatrice de cet aspect de transmission de l'idolâtrie catholique romaine aux institutions modernes (à condition de lire Hegel dans des versions qui n'ont pas été expurgées par des universitaires staliniens ou républicains afin de gommer cet aspect confessionnel).

    La haine de Nitche à l'égard du peuple est un aspect de sa doctrine artistique ; non seulement l'art élève au-dessus du peuple, mais il est aussi souvent destiné à maintenir à distance le peuple, à creuser un fossé entre les élites et celui-ci. Ici se loge le secret de l'égalité, toujours promise et jamais accomplie, et qui n'est qu'une manière de tenir en haleine le peuple.

    L'art égalitaire ou démocratique n'existe pas. Shakespeare ne vise pas telle ou telle catégorie de personnes, suivant le temps et l'espace, comme la musique. Mais Shakespeare, contrairement à la musique, n'a aucune utilité sociale.

  • Avorter c'est tuer

    Avorter c'est tuer... légalement. J'ai pendant quelques années été un militant résolu contre la loi Veil et son application, avant de perdre peu à peu au fil de mes lectures scientifiques et chrétiennes toute conviction d'ordre moral ou politique.

    Mon anarchisme avait beau être assez primaire et révolté contre un Etat ploutocratique qui broie des nourrissons surnuméraires avant de les jeter à la poubelle, il ne m'a pas empêché de comprendre que, si je voulais lutter contre l'assassinat légal, je devais aussi manifester devant les casernes pour leur fermeture, car les médecins ne sont pas les seuls à qui l'Etat délivre un blanc-seing afin d'ôter la vie si nécessaire.

    Or manifester devant les casernes n'est pas plus efficace que manifester devant les hôpitaux. Les bidasses n'ont d'ailleurs pas beaucoup plus de jugeotte que les femmes enceintes. C'est un peu le même élan qui fait la femme enceinte et l'homme soldat. Les militants ne valent pas mieux, puisque leur combat se situe à un niveau intellectuel plus propice à une mort moins brutale. La mort du militant n'est même pas toujours consécutive à la mort de ses idées.

     

    Néanmoins j'ai pas mal appris sur l'anarchie et son état, après Trente Glorieuses de France qui s'empiffre. "L'avenir de nos enfants" : laissez-moi rire ! De voir des "anarchistes", par exemple, du côté de la police, de l'Etat et de la loi Veil, par exemple, ça ouvre les yeux sur les méthodes étatiques de lavage de cerveau.

    Du côté des "pro" comme des "anti", dans l'ensemble, il n'y a que des tocards ou des ratés, comme dit Nitche. Du côté des "anti", il n'y a personne ou quasiment, et il n'y aura jamais personne tant que cette cause comportera un "risque social". Jamais je n'ai vu un évêque, par exemple, s'associer physiquement à une telle cause ; pourtant le diable sait que les évêques sont capables de s'associer aux causes sociales les plus sordides ou stupides. Du côté des "pro", on a l'Etat et toute la moraline féministe derrière. Ne militent donc que ceux qui sont persuadés que le militantisme fait avancer les "questions sociales".

    De surcroît, j'avais le sentiment que les militants "pro", comme les militants "anti", étaient manipulés. Autrement dit, pour militer démocratiquement, il faut croire dans la démocratie, et ma culture française sceptique ne m'a pas préparé à une telle foi débordante dans ce qui n'est pas mais sera peut-être demain. Toutes ces manifs, c'est du cinoche, et on le sent bien. Comme le cinoche, ça ne mène nulle part.

    Plus tard j'ai découvert combien les laboratoires pharmaceutiques sont intéressés à la cause féministe et la cause politique. C'est dingue comme de grands professeurs de médecine gynécologique, qui testent de nouvelles molécules, ont le désir de venir en aide aux femmes chevillé au corps. Mieux vaut s'assurer que celui qui prêche le progrès social n'est pas sous l'emprise d'une drogue quelconque.

    A trop regarder la société et les mouvements sociaux de près, on finirait par croire que l'amour n'est qu'une pure distraction inventée par un artiste aveugle. La société peut bien aller en enfer si elle veut - c'est le sens du courant.

     

  • Table rase

    "Table rase" est l'expression marxiste la plus évangélique, probablement directement inspirée des sources bibliques de K. Marx et de sa volonté de s'affranchir du préjugé hégélien dominant son époque.

    Le profit qu'il y a à s'affranchir de toute forme de culture, à rejeter le culte identitaire anthropologique, qui n'est autre que la formule totalitaire de la culture, est en termes de conscience. Si le Christ n'est d'aucune culture, que rien ne le rattache à la terre, ce n'est pas parce qu'il est mort ou abstrait, suicidé ou victime, c'est parce qu'il est catholique, c'est-à-dire divin et universel. Les catholiques romains défient le ciel en inventant une culture catholique.

    Au contraire le gain de l'identité et de la culture est en terme de sécurité : il n'y a rien d'étonnant à ce que les personnes les plus faibles physiquement et spirituellement, se soumettent aux aléas de la culture moderne (la plus labyrinthique) ; la culture de masse est d'ailleurs un puissant motif d'incitation au culte identitaire.

    L'érudit néo-païen Carl Jung note le dégoût de l'homme pour l'inconscience, c'est-à-dire sa pétition de principe en faveur de la liberté ; en pleine possession de ses moyens, il est en effet pénible à l'homme de concevoir que son existence n'est que la réponse plus ou moins active à des stimuli du type de ceux auxquels l'animal obéit. Aussi confus soient les savants évolutionnistes, ils s'efforcent de trouver des explications à l'originalité de la conscience humaine, au regard de la conscience animale. Les personnes religieuses sont les moins aptes à qualifier cette différence, en raison du mouvement collectif que supposent les religions "horizontales" ou la culture.

    En même temps que ce dégoût de l'inconscience, C. Jung relève qu'il est une limitation à la conscience dont l'homme s'accommode facilement, et qui correspond à peu près à l'état heureux. On peut comprendre par-là le mépris des hommes de science vis-à-vis de la religion épicurienne, non pas spécialement athée, mais essentiellement orientée vers la quête du bonheur. On pourrait dire que l'homme moyen ou vertueux se contente d'une conscience moyenne, et qu'il se doute inconsciemment du risque que comporte la vérité.

    Quoi qu'il en soit, le plan politique ne peut englober celui de la vérité ou de la liberté, car le plan politique ne peut faire mieux qu'atteindre des objectifs moyens. Tout parti politique qui feint d'associer à ses moyens le but d'atteindre la liberté doit être regardé comme l'antéchrist en action - à commencer par la démocratie-chrétienne et les démocrates-chrétiens contre qui, tôt ou tard, la colère des apôtres finira par se déchaîner.

    Comme la culture moderne est inférieure en termes de moyens à la religion épicurienne, cette culture moderne définit l'état de l'homme moderne au niveau de la sous-humanité ou d'un esclavage extraordinaire, touchant aussi bien les maîtres du monde que leurs esclaves. Sur ce point le chrétien ne peut qu'approuver Nitche. En revanche, il n'est pas véridique que cette culture de mort soit absurde. Elle a bien un sens que Nitche ignore.

     

  • Conspirationniste chrétien

    Le christianisme est une religion conspirationniste. Le conspirationnisme chrétien est même la clef de nombreuses oeuvres d'art occidentales, demeurant énigmatiques pour les conservateurs d'art ou les muséographes modernes. Sans doute le cas le plus récent et le plus célèbre est-il celui de l'art luthérien, accusant la religion catholique romaine de servir Satan ; mais ce cas n'est pas isolé.

    La conspiration du monde contre la vérité définit le cadre général du complot. L'apôtre Paul précise les modalités de la conspiration dans ses lettres, dans la notion d'antéchrist. Un aspect, notamment, est souligné, à savoir la montée en puissance de l'antéchrist. Le Messie n'hésite pas lui-même à mettre ses apôtres en garde contre les faux prophètes qui prêchent en son nom. Un autre signalement de la conspiration est le fameux "complot de pharisiens et de veuves" fustigé par le Messie - le caractère clérical de la conspiration mondaine est ici souligné. 

    - Le combat de Nitche contre le Christ et ses apôtres est remarquable à plusieurs titres ; d'abord parce qu'il émane d'un suppôt de Satan "triomphant", c'est-à-dire qui estime le christianisme moribond. Il corrobore ainsi involontairement l'aspect de montée en puissance de la bête de la terre, dont les chrétiens sont avertis par leurs écritures saintes et leurs prophètes. Il ne faut pas s'attendre à la fin du monde, dit Paul de Tarse, avant que la domination de l'antéchrist sur le monde ne se soit manifestée.

    Secundo, la doctrine néo-païenne de Nitche, d'une pureté satanique bien plus grande que la culture nazie, notamment en ce qui concerne l'aspect majeur de la philosophie naturelle, cette doctrine nitchéenne draine dans son sillage une cohorte de doctrinaires et de philosophes tellement hétéroclite qu'elle fait paraître la culture occidentale moderne pour un véritable cloaque, dépourvu d'axe critique. Nitche n'est sans doute pas le seul maître trahi par ses disciples, mais dans son cas on dirait une plaisanterie, puisqu'il y a des nitchéens chrétiens, des nitchéens "de gauche", et même des nitchéens libéraux.

    La culture moderne, souvent présentée comme ayant un mobile scientifique reléguant les vieilles religions du passé au rang de la superstition, s'avère bien plutôt d'une opacité croissante. Or la culture n'est autre que la religion du citoyen lambda. Cette opacité s'accompagne d'une culture de masse et d'un viol des consciences perceptible bien au-delà des seuls apôtres.

    - On ne peut manquer de remarquer que l'éthique judéo-chrétienne la plus récente, défendue par l'intelligentsia occidentale, bien qu'elle soit entièrement dépourvue de lien avec l'apocalypse ou l'eschatologie chrétienne, est elle-même "conspirationniste". Elle prend en effet sa source dans le complot nazi, enseigné tel quel.

    - Bien entendu les historiens savent que la politique est essentiellement un complot, c'est-à-dire une coalition d'individus ou de partis dont les intérêts et les forces convergent suffisamment pour exercer le pouvoir. Ce n'est pas le complot politique qui est caractéristique de l'Occident, mais l'instabilité des complots successifs.

    - Shakespeare illustre, à l'opposé de Nitche qui tente de réduire le christianisme et le judaïsme à des mouvements psychologiques erratiques, l'adaptation des élites et de la politique moderne à l'irruption dans le monde de l'histoire conspirationniste chrétienne. Il n'est plus possible à l'ordre politique, naturellement pyramidal, de se contenter de refléter le système solaire suivant les antiques philosophies naturelles. L'imposture de la philosophie naturelle moderne, éclatée en diverses branches et excessivement spéculative, vient de là : de la nécessité, outre le droit naturel païen, d'endiguer la vérité chrétienne inconciliable avec la société.

     

  • Contre Nabe

    D'abord, une précision : contrairement à Soral, Dieudonné ou Nabe, j'écris sous couvert d'anonymat. C'est une façon de procéder parfois stigmatisée pour sa lâcheté. Lorsque l'accusation vient du chef de l'Etat lui-même, plus entouré de gardes du corps qu'aucun souverain d'ancien régime ne fut, et entretenant des services de renseignement intérieurs coûteux - cette accusation prête à sourire. Le président de la République s'en est pris ainsi dernièrement à ceux qui, sur internet, menacent l'orchestration de l'opinion publique par quelques éditorialistes.

    Si les gangsters procédaient à visage découvert et envoyaient leurs portraits à la police, on se moquerait d'eux ; il en va de même pour la police de la pensée et ses opposants.

    Je déplore depuis longtemps l'attitude de M.-E. Nabe qui consiste à accepter les invitations à se produire à la télévision ; elles ont pour but de démontrer que la télévision est garante de la liberté d'expression, et que la dissidence n'a pas lieu d'être. Telles ces gazettes impertinentes, dont l'impertinence se limite à l'exhibition sexuelle carnavalesque, ou la dénonciation de tribunaux d'inquisition qui ne siègent pas en France.

    M.-E. Nabe s'attaque donc à Dieudonné et Soral, leur reprochant d'attiser le conspirationnisme ou le complotisme. C'est plutôt étonnant de la part d'un qui se dit chrétien, dans la mesure où l'aspiration à la vérité, par-delà les limites tyranniques ou légales assignées à cette aspiration, est typiquement chrétienne ou juive. Autrement dit, la loi n'explique rien pour un chrétien -elle ne débrouille pas la condition humaine-, par conséquent l'aspiration à la connaissance, contre sa nécessaire limitation par des raisons politiques, est une impulsion chrétienne. Aucun politicien, s'il a deux grammes d'honnêteté (et par conséquent ne procède sous des couleurs chrétiennes), ne prônera la transparence la plus complète, sachant qu'elle aurait pour effet la dissolution de l'ordre politique.

    A cause de ce mélange impossible de politique et de christianisme, l'Occident est une civilisation maudite. Maudite par qui ? Maudite par le conspirationniste Shakespeare.

    D'ailleurs M.-E. Nabe se dit lui-même le suiveur de L.-F. Céline ; or il a été donné à Céline, à cause de la guerre et comme ses victimes juives ultérieures, d'apercevoir l'Occident tel qu'il est, sans ses habits de lumière humaniste.

    Donc le complot n'est pas seulement dans la bouche de Soral et Dieudonné, il est partout, et ce depuis des millénaires.

    Et ceux qui corroborent le plus la thèse du complot avancée par Soral et Dieudonné, ce sont ceux qui les empêchent de se défendre dans la presse et la télévision, et produisent des tirs d'artilleries médiatiques propres à ébranler les convictions les mieux ancrées dans la garantie de la liberté par l'Etat républicain et les représentants de la force publique. Aussi stalinienne soient la France et ses intellectuels, la méthode du procès en l'absence des principaux accusés risque d'apparaître vite comme suspecte à tous les actionnaires minoritaires du régime.

  • Histoire et totalitarisme

    Du point de vue historique, modernité et totalitarisme sont synonymes. Je veux dire par là, si l'on considère Shakespeare et Karl Marx comme les historiens les plus lucides des temps modernes.

    Le point de vue moderne est un point de vue intellectuel ; il n'est assumé que par une catégorie d'hommes qui se définissent eux-mêmes comme des "intellectuels", en se gardant d'ailleurs de préciser ce qu'ils entendent par "l'intelligence". Le paysan rend un culte à la nature ; l'intellectuel, lui, rend un culte à ses parents, ce qui constitue une religion de plus courte vue.

    Certainement Marx, et moins encore Shakespeare, ne sont des intellectuels : ils s'efforcent en effet de réduire au maximum le degré d'abstraction de la pensée, non de s'abriter derrière des mots ou des idées.

    George Orwell souligne utilement la stupidité excessive des intellectuels en comparaison des gens ordinaires, et la tolérance desdits intellectuels vis-à-vis du totalitarisme. Cela suppose que la privation de liberté due au totalitarisme, les intellectuels ne la sentent pas ou ne l'éprouvent pas. De quoi le totalitarisme prive-t-il surtout ? De science.

    J.-P. Sartre a voulu marquer "l'engagement" comme un progrès de la philosophie moderne sur l'ancienne ; mais cet engagement marque en réalité un progrès de l'intellectualisme.

    Orwell est athée, plus que Marx dont le propos est émaillé de références bibliques, et il est certain que Orwell associe l'intellectualisme à la morale judéo-chrétienne. Il n'a pas tort, dans la mesure où transformer un message évangélique anarchiste en doctrine sociale requiert des trésors de rhétorique. La conversion tardive de Sartre au "judéo-christianisme" n'est qu'un retour au bercail ; en réalité l'intellectualisme moderne est issu de la scolastique médiévale.

    Un autre point de vue critique sur la modernité, c'est celui de l'art, dont on peut prendre Nitche pour le représentant, sans se fier à son propos historique, qui pose en principe que l'histoire n'est qu'une illusion psychologique. Aux yeux du païen ou de l'antéchrist Nitche, la modernité n'est pas un totalitarisme, mais il la qualifie de "culture de mort". Il n'a d'ailleurs pas tort d'associer la méfiance de la modernité au peuple français, et d'en faire ainsi le peuple le plus réactionnaire d'Europe.

    Pour l'historien Shakespeare, le totalitarisme a une signification historique ; pour Karl Marx, il exige une explication autre que celle mise à la disposition des intellectuels et des élites dirigeantes par Hegel. Pour un négationniste du sens de l'histoire païen comme Nitche, la culture de mort est liée à la foi chrétienne absurde dans l'histoire et la fin du monde.

    Ce qui fait le danger extrême de l'intellectualisme et des intellectuels, c'est que leur puissance est excessivement grande, comparable à l'impact de la culture de masse, dont ils sont les principaux actionnaires et promoteurs, et l'uniformisation ou l'égalisation des consciences qu'elle entraîne à l'échelle mondiale, en même temps que la fragilité de ce pouvoir, parfaitement abstrait et le plus relatif, derrière l'apparence d'une cohésion sociale.

  • Fatalités

    L'antienne libertaire conserve son charme, bien que l'homme moderne fasse montre d'une soumission de plus en plus évidente et inquiétante à l'ordre établi ; "inquiétante" si on a le souci de l'humanité ou de la société, plus que de dieu, qui indique, lui, à ses fidèles, de ne jamais avoir peur, en aucune circonstance, même la plus terrible, par l'intermédiaire du Christ Jésus.

    Un chrétien ne combat la fatalité que là où il peut la vaincre ; c'est pourquoi il n'est pas d'exemple d'authentiques chrétiens impliqués dans la politique, en raison des avertissements du Messie de ne pas s'avancer sur ce terrain miné par la fatalité.

    L'antienne libertaire conserve surtout son charme auprès des femmes et des intellectuels, dans la mesure où ceux-ci sont mieux adaptés au monde moderne. La virilité est d'ailleurs souvent stigmatisée comme étant une tare au regard des idéaux modernes, tandis que la suspicion de la culture moderne est pratiquement toujours liée à une forme ou une autre de misogynie. La culture française est particulièrement résistante à l'idée de progrès social, c'est-à-dire moral ou religieux.

    A l'idéal artistique viril et antique, acceptant la fatalité, s'oppose donc un idéal libertaire féminin qui prétend repousser les limites que la fatalité assigne à l'humanité. C'est, ainsi, la fameuse devise de Simone de Beauvoir : "On ne naît pas femme, on le devient." Il n'est pas difficile de reconnaître ici une version, laïcisée, du catéchisme chrétien, où l'anthropologie a pris toute la place, et la confiance en l'homme remplacé la confiance en dieu. C'est aussi l'objectif le plus abstrait, à l'arrière-plan de la culture moderne, bien que ces deux tendances de la culture occidentale ne sont pas toujours représentées de façon aussi nette qu'elles sont par Simone de Beauvoir d'une part, et Nitche de l'autre, tenant d'un pur conservatisme aux antipodes de l'idéal moderne hégélien de celle-ci.

    La liberté, au stade moderne, subsiste donc sur la plan social à l'état de concept pur, parfaitement abstrait et défendu par les autorités religieuses avec des moyens similaires à ceux employés naguère par l'Eglise pour défendre ses dogmes, où la propagande et la culture de masse jouent un rôle indispensable. Cet objectif énoncé en termes de liberté a donc un but et effet coercitif inconciliable avec la liberté, pratiquement aussi absurde que le slogan "il est interdit d'interdire", où le relativisme en matière de liberté éclate, de façon absurde ou comique, suivant que l'on prend le slogan au sérieux ou comme l'expression de l'appétit de plaisir de l'élite libérale judéo-chrétienne.

    Le christianisme, extérieur au mouvement culturel, n'y est représenté que sous l'apparence subversive de l'éthique "judéo-chrétienne" ; subversive et extrêmement dangereuse, comme toutes les illusions et le point brillant de l'Avenir vers lequel se dirigent le léviathan moderne.

  • Liberté...

    quand tu nous tiens.

    Transposée en paroles ou gravée par l'homme dans le marbre, la liberté n'est pas seulement une théorie éloignée de nous, c'est aussi la conception la plus truquée de la liberté, qui fait de celle-ci un motif d'aliénation.

    Le mot "liberté" ne devrait pas figurer dans les dictionnaires, puisque la rhétorique et les intellectuels ne sont pour rien dans la liberté.

    Un esprit réactionnaire, tel Nitche ou Montherlant, est moins dangereux pour l'homme par son signalement que l'art exclut la liberté que ne sont les rhéteurs sournois qui conduisent les sociétés à leur perte en leur faisant miroiter la liberté.

  • Affaire Dieudonné

    L'argent met tout le monde d'accord. Quand il y en a moins, les gens sont moins d'accord.

    La révolution française est une crise fiscale d'abord, puis seulement une crise morale. Sans argent, il est plus difficile à une élite d'endormir les consciences.

    Même "athée" ou "laïque", l'éthique des nations occidentales demeure bizarrement "judéo-chrétienne", aussi éloigné soit le message évangélique de prôner une morale utile aux nations.

    On reconnaît le caractère "judéo-chrétien" de l'éthique contemporaine à plusieurs éléments, dont en l'occurrence, dans l'affaire de l'humoriste Dieudonné, l'utilisation des victimes juives de la shoah à des fins d'intimidation morale, décalque de l'utilisation du christ Jésus sur la croix, élément central de la morale puritaine chrétienne (subversif du sens de la parole divine), prêtant un sens salutaire à la souffrance, qu'elle n'a pas en réalité dans le christianisme, religion la moins sacrificielle de tous les temps.

    On est donc en présence d'une éthique occidentale, dont la formule est "judéo-chrétienne", bien qu'elle s'impose aussi aux athées, voire aux nations sous domination occidentale - néanmoins cette éthique n'a rien d'évangélique, c'est une pure invention équivalente du purgatoire.

    En outre, le principe de la liberté d'expression, qui plus est défendue par l'Etat, aurait bien fait rire les philosophes païens, qui l'auraient sans doute trouvée une ruse un peu grossière. Là encore on reconnaît une stigmate "judéo-chrétienne", et l'éthique judéo-chrétienne est un élément du totalitarisme, c'est-à-dire d'une tyrannie qui repose largement sur la complexité et des apparences trompeuses. "L'inconscient" est, pratiquement, une tare moderne (d'ailleurs au cours de son enquête à vocation scientifique, Carl Jung fait une découvert qui le déstabilise un peu, et qui a trait au rapport étroit entre l'alchimie médiévale et la psychanalyse moderne).

    Le journaliste catholique Léon Bloy (accusé récemment lui aussi d'antisémitisme à travers un de ses ouvrages réédité par Alain Soral) affirmait qu'un journaliste chrétien doit s'efforcer autant que possible de mettre chaque sujet d'actualité en relation avec l'apocalypse, ou s'abstenir d'écrire.

    Il y a là sans doute de quoi faire bien rire un athée comme Dieudonné ; cependant, l'apocalypse, on la retrouve dans l'actualité, sous la forme d'éléments de justification du pacte entre la nation israélienne et la nation américaine auprès d'une quantité de citoyens américains non négligeables.

    Un juif authentique - non un médecin juif -, connaît d'ailleurs mieux que Dieudonné l'arbre de la connaissance du bien et du mal, qui se cache dedans, et ce qu'il signifie.

  • Jihad chrétien

    "Je ne suis pas venu apporter la paix au monde, mais le glaive." Jésus-Christ

    Cette parole d'amour guerrier, incompréhensible du point de vue mondain, mobilise l'antéchrist contre lui.

    Il ne s'agit pas ici de terrorisme, c'est-à-dire de la méthode en usage au sein des nations, afin d'inciter au respect de l'ordre public et persuader l'opinion que l'Etat est le meilleur garant de la paix.

    Il ne s'agit pas de terrorisme, mais de science et de la révélation que les civilisations sont cimentées par la peur, d'où découlent les comportements bestiaux et la haine entre les hommes, qui permet à Satan de régner sur eux.

    La fin du monde ne se fera pas sans livrer bataille, dit le Messie, ni briser la chaîne de l'ordre humain, qui relie le monde à Satan. La paix, que l'homme est plus prompt à théoriser qu'à accomplir, n'est que le repos du guerrier aux yeux des chrétiens, où celui-ci puise de nouvelles forces pour retourner à la guerre, afin d'étancher sa soif de sang.

    La meilleure preuve est que les antichrists les plus "évidents" - Napoléon, Nitche, Hitler... - mettent systématiquement en avant, comme le but ultime de leur entreprise, la paix, européenne, voire mondiale, prenant ainsi le contre-pied de la guerre sainte chrétien. C'est notablement sur la scène internationale, où la diplomatie requiert les plus grands et machiavéliques mensonges, que le motif de paix est le plus fréquemment mis en avant.

    - Cette parole du Messie est encore mal comprise à cause de l'incompréhension par le plus grand nombre de la signification de l'amour chrétien, qui du point de vue évangélique est une force extérieure au monde, impossible à décrire dans le langage humain. En raison de la trahison de nombreux clercs platoniciens, le béotien se figure l'amour chrétien comme un idéal et non une force divine, théorie que les savants rationalistes n'ont pas de peine à réduire à une vaine spéculation, et l'amour n'existe plus ainsi que comme une faiblesse ou un défaut de l'âme humaine.

    Aussitôt après cette annonce du défi du Christ lancé à l'ordre humain, celui-là s'empresse de dénoncer la conception humaine de l'amour, telle que celle qui règne au sein de la famille, proche du rapport donnant-donnant que les anciens païens entretenaient avec leurs dieux, puisque le lien familial est primitivement fondé sur l'intérêt.

    Si l'amour de Dieu désoriente tant l'homme, en comparaison du pacte avec Satan, c'est parce que Dieu ne demande rien en échange de son amour. L'homme a tellement l'habitude du commerce qu'il a du mal à imaginer quelque chose en dehors.

  • Dionysos en boîte

    En somme la société ne désire qu'une seule chose, elle est toute tendue vers elle, et cette chose c'est jouir, ou bien souffrir le moins possible. Pour les femmes, en dehors de quelques amazones, cet idéal de bonheur est associé à l'idée de paix, plus conforme à leur physiologie. Pour les hommes la guerre est tout aussi jouissive, en dehors de quelques intellectuels qui préfèrent dominer par la ruse.

    Chez les femmes et les intellectuels, la notion de jouissance est d'ailleurs souvent relativement floue. J'ai fréquenté ainsi une musulmane qui refusait d'admettre qu'elle jouissait, de quoi que ce soit ; car, pour elle, jouir signifiait "être occidental", et par conséquent faire partie de cette masse de putains et de maquereaux qui lui inspiraient un immense dégoût. Elle avait donc une notion très conceptuelle de la jouissance.

    Pourtant, c'est souvent aux yeux des meilleurs jouisseurs que la société, d'où vient la justification religieuse de la jouissance, n'a que peu de valeur. Comme ces oeuvres de fiction écrite pour le divertissement et la jouissance du lecteur, qui perdent tout leur intérêt dès lors qu'on en connaît la fin.

    C'est ce qui fait que les personnes qui souffrent accordent parfois à la vie un prix plus grand que ceux qui jouissent et qui, d'une certaine façon, ont fait le tour de la question sociale - à qui la vie apparaît comme la musique, un peu répétitive et limitée dans son propos. 

    L'éloge de la souffrance n'a pas, contrairement à ce que prétend Nitche, de caractère chrétien. Simplement comme le christianisme est indifférent à la société, comme il affirme qu'elle est dépourvue de la moindre valeur spirituelle, il est muet sur le sujet du bonheur, vers quoi tendent toutes les doctrines sociales, et qu'elles procurent inégalement. Contrairement à beaucoup de religions païennes, dont la plus banale est sans doute l'épicurisme, forte de l'attente sociale du monde, les apôtres chrétiens ne proposent pas de recettes pour être heureux.

    Comme il n'existe pas de société sans esclaves, il n'en fallait pas plus pour que certains esprits cyniques ou débiles se glissent dans cette lacune apparente du christianisme afin de s'en servir comme d'une contrainte et d'un moyen pour justifier l'esclavage et l'enchaînement au monde.

    Comment le Messie, qui est venu délivrer l'homme de sa nature, non pas parfaite mais chancelante, pourrait-il accabler celui qu'il désire sauver du fardeau d'une souffrance supplémentaire ?

  • Voeux pieux

    Ne croyez pas que je suis venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive.

    J.-C.

    Ce sont les voeux de bonheur qui sont pieux, et le christianisme qui est impie. C'est pour tenter de sauver le monde que le zélé Judas a vendu Jésus-Christ. Il s'est aperçu ensuite que le monde n'en valait pas la peine.