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apocalypse - Page 4

  • Eternel retard

    Dans le brouhaha médiatique, une partie du discours de Dakar rédigé par H. Guaino pour Sarkozy m'a échappé : la partie théoriquement valable dans laquelle Guaino à travers Sarkozy oppose l'histoire au mythe de l'éternel retour. Rien que pour ça, je me sens obligé de rendre un hommage discret à Sarkozy & Guaino, tant ce type de discours critique est rare de la part d'un chef religieux (si Sarkozy est plus "naturel", Guaino a tout à fait la dégaine d'un "monsignore" en tenue pourpre ou écarlate).

    Combien de curés démocrates-chrétiens ou nationalistes n'ai-je pas moi-même maudits à voix basse ou à voix haute à cause de leur apologie de la morale païenne et pédérastique de Nitche ? Cette apologie insane de F. Nitche permet néanmoins de comprendre indirectement pourquoi toute Eglise ou secte a tendance à se garder de la science historique comme d'une peste, jusqu'à finir par tomber comme ce fut le cas avec cette grenouille de bénitier idolâtre de Jean Guitton, dans la chronologie - pour ne pas dire la chronolâtrie.

    *

    La théologie marxiste de la Libération est de fait porteuse à la fois de la mort du clergé et des compromis théologiques avec les architectures païennes diverses, dont la métempsycose, qui ressurgit dans la "Phénoménologie de l'esprit" de Hegel. La conception esthétique de Hegel est typiquement une conception anti-historique qu'on peut qualifier de "statique". Au mépris de l'observation historique que différentes formes d'art coexistent - et se combattent les unes les autres -, dans la conception nationale-socialiste de Hegel différents "états" artistiques se succèdent. Hegel se garde bien d'expliquer autrement que par l'emploi d'une phraséologie germanique "claire-obscure", qui parfois n'a rien à envier à la philosophie médiévale remâchée de Kant, COMMENT s'opèrent les mutations d'un état de l'art à un autre, de l'architecture à la peinture par exemple. Hegel dissimule mal que son schéma de progression est un schéma algébrique. Toute l'algèbre étant enfermée dans une cercle, le philosophe évite d'ailleurs de conclure pour ne pas laisser voir le retour au "statu quo ante".

    Ce schéma rationaliste de mutations successives vers un progrès plus grand, on le retrouve bien sûr dans le transformisme darwinien, prédestiné lui aussi à susciter l'admiration de penseurs nazis. Le délire darwinien est perceptible dans la littérature fanatique d'un gugusse comme Pascal Picq, pas très loin du cinéma de série Z yanki quand il s'agit d'expliquer à ses ouailles ce que l'homme super-évolué sera.

    Il me semble qu'il faut dire immédiatement pourquoi les régimes nationalistes capitalistes se sont emparés de Hegel (blanchissant Heidegger et Arendt promptement), après le régime nazi, qui constitue bien une forme d'accomplissement du modèle juridique hégélien. La raison de l'emprunt à Darwin, Hegel et même Freud est précisément que ces doctrines, sous l'aspect de sciences véritables, dissimulent des idéologies parfaitement réversibles et malléables (suivant la définition matérialiste d'Aristote de l'idéologie dans sa "Physique") : Hegel, Darwin, Heidegger, Jünger, Nitche, Sartre, etc., sont antihistoriques, ne contiennent même aucune dialectique véritable. La destruction de la dialectique permet de faire place nette à l'idéologie.

    De la même façon que l'Eglise tend à éradiquer l'apocalypse (c'est-à-dire l'histoire), l'Etat totalitaire tend à éradiquer toute forme d'art et de science.

    *

    Il me semble à ce stade avoir expliqué suffisamment pourquoi la théorie valable de Guaino & Sarkozy heurte de plein fouet la réalité historique de régimes nationalistes et capitalistes eux-mêmes "hors de l'histoire", et qui non seulement en sont sortis, mais ont tout fait pour maintenir les pays en voie de développement la tête sous l'eau.

    Seul le représentant d'un régime totalitaire - et il n'est même pas certain qu'un dirigeant nazi aurait osé le faire face à une population allemande qui se souvenait peut-être encore alors des vitupérations de Luther contre les usuriers - seul le représentant d'un régime totalitaire peut poser l'équation suivante : progrès historique = accumulation de richesses. Dans ce sens le progrès est "Highway to Hell".

    N'importe quel Africain peut décider d'entrer dans l'histoire s'il le souhaite ; il n'a qu'à lire "Hamlet" et voir le sort que Shakespeare réserve à Claudius et son conseiller Polonius, ainsi qu'à toutes les petites femelles confites en dévotion/obsédées par le sexe et le mariage (Ophélie).


  • Foi du charbonnier

    La faiblesse de leurs arguments, les médiats la compensent par la répétition des approximations, erreurs ou mensonges délibérés. Répété dans le n° de l'Assomption de "Famille Chrétienne", gazette pour mères de familles nombreuses écervelées, le mensonge des nationalistes démocrates-chrétiens selon lequel la femme décrite à plusieurs reprises dans l'évangile de saint Jean (Ap. XII,12) serait la Vierge Marie.

    "Et la poésie du texte de l'Apocalypse, lu à la messe de l'Assomption, souligne la splendeur du fruit de l'obéissance. La jeune fille qui a dit 'oui' a Dieu, de l'Annonciation à la croix, a 'le soleil pour manteau', 'la lune sous ses pieds' et sur la tête 'une couronne d'étoiles'". Voilà ce que l'éditorialiste Marie-Joëlle Guillaume écrit dans le style béni-oui-oui qui me rappelle les éditoriaux de François-Régis Hutin dans "Ouest-France" qui me filaient déjà de l'urticaire quand j'étais gosse.

    - Belle utopie de la part de Simone Weil de suggérer que chaque fois qu'un journaliste dit une connerie ou un mensonge, il soit condamné pénalement.

    - La remarque de D.H. Lawrence que le récit par saint Jean de sa vision à Patmos est entièrement dépourvu de poésie paraît d'ailleurs beaucoup plus pertinente que celle de l'éditorialiste M.-J. Guillaume, qu'on sent capable de dénicher de la poésie jusque dans les feuilletons yankis les plus vulgaires.

    La note du chanoine Crampon sur cette "femme aux douze étoiles", récupérée par un folklore marial assez étranger à l'esprit du christianisme, pour ne pas dire entièrement païen et mercantile dit : "Les Pères et les interprètes catholiques sont presque unanimes à reconnaître dans cette femme un symbole de l'Eglise." La sobriété de la note a au moins le mérite d'éviter les délires gnostiques. Le "presque unanimes" ne doit pas occulter qu'un "interprète catholique", non seulement perdrait tout crédit en croyant reconnaître la mère du Messie dans cette femme (montrant qu'il ne sait pas lire), mais s'interdirait en pratique toute interprétation cohérente du texte de l'apocalypse de Jean dans son entier.

    Il faut dire que cette femme réapparaît dans l'Apocalypse quelques pages plus loin sous l'aspect d'une prostituée et d'une description qui indique sa déchéance (la symbolique de la seconde description permet d'ailleurs de rapprocher cette femme de l'Eglise plus nettement encore).

    - Dante Alighieri, lui, ne s'y était pas trompé en revanche. Il se garde de propulser plusieurs papes dans son "Enfer" sans fonder son propos sur les Ecritures, et notamment l'Apocalypse :

    "A vous, bergers [pasteurs, clercs], mirait l'Evangéliste [Jean],

    Quand la putain qui sied dessus les eaux [l'Eglise]

    Avec les rois lui parut s'enivrer [ici on pense bien sûr à la pièce de Shakespeare qui traite du même sujet ; et l'Apocalypse parle de la surprise de Jean en voyant cette putain] :

    Celle-là qui fut née avec sept têtes [les sept collines de Rome ?]

    Et qui trouva vigueur en ses dix cornes [la corne est symbolique du pouvoir temporel et législatif, et Moïse souvent représenté muni de cornes et surnommé "le plus grand des législateurs"]

    Tant que vertu à son époux fut chère [passage qui montre que Dante a lu les passages de l'Evangile mentionnant le "figuier stérile"]"

    Bien plus contemporaine de Dante que de Marx, bien sûr, et au coeur des préoccupations du poète italien, la passation de pouvoir progressive de l'Eglise à l'Etat. Quand Marx dissèque les modalités de la mutation ou de la métastase religieuse contenue dans la somme de Hegel, en quelque sorte l'Eglise n'est déjà plus qu'une coquille de noix vide à la dérive, un reliquat sec (comme on peut penser que la secte pharisienne était du temps de Jésus, une sorte de crispation du judaïsme).

    Si la théologie médiévale de Dante Alighieri ne peut être exemptée de critiques - elle a ainsi tendance à verser dans l'orphisme et le paganisme romain -, elle est assez forte et solidement fondée sur les Ecritures pour souligner l'hypocrisie des démocrates-chrétiens, qui n'hésitent pas à compromettre le christianisme avec les idéologies les plus fangeuses, comme le nationalisme en général, européen en particulier.

    (NB : On me signale le même mensonge que celui de Marie-Joëlle Guillaume dans le magazine porno-chic "Madame Figaro" (14 août 2009), sous la plume de Michèle Reiser : "Le 15 août (...) Depuis le XVIIe siècle, ce jour-là, on fête Marie dans les églises et sur les places du monde entier (...) Marie apparaît dans le ciel de l'"Apocalypse de Jean" comme une femme ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds et sur la tête une couronne de douze étoiles (...) Si la grâce fait défaut, il reste encore l'amour. "On échoue toujours à dire ce qu'on aime", constatait Roland Barthes, etc." On peut dire que tous les éléments de la "docte ignorance" sont réunis dans cette citation : le fétichisme religieux, le XVIIe siècle et sa foi du charbonnier, la grâce qui supplante l'amour (!)... sans oublier la citation bidon de Barthes.

  • Marie, reine des Cieux ?

    Comme le chanoine Crampon le note, dont les travaux présentent un caractère de sérieux indéniable si on les compare aux foucades gnostiques de feu Mgr Lustiger, ou encore aux pirouettes télévisées du Père La Morandais, la femme de la vision de saint Jean n'a jamais été tenue pour Marie, mère de Jésus, par les exégètes, mais, au regard des symboles que comporte sa description, pour une figuration de l'Eglise elle-même (sous réserve des nombreuses définitions de l'"Eglise" au cours de l'Histoire moderne).

    Le nationalisme démocrate-chrétien a imposé sa relecture de l'Evangile concernant ce passage comme d'autres depuis Crampon et Bloy. La dévotion à Marie a pris même au cours du XIXe siècle un tour plus qu'étrange, le Capharnaüm de Lourdes étant loin d'être un exemple isolé. Le jansénisme s'est d'ailleurs toujours accompagné, hier comme aujourd'hui, de manifestations superstitieuses et hystériques de dévotion comme de la sympathie des banquiers.

    Cette substitution de la Vierge Marie à l'Eglise dans la "foi du charbonnier", désormais commune à la plupart des chrétiens de France, au point qu'on entend certains parfois en faire une caractéristique du catholicisme (!) afin de se mieux disculper de leur tare, cette substitution a eu pour effet de renforcer le culte de l'Eglise catholique pour elle-même, esprit qui anime généralement les sectes.

    Le "culte des saints", qui fut autrefois une face du catholicisme plutôt sympathique et offrant prise à la littérature populaire, a pris une tournure qui relève presque, là encore, du culte de l'Eglise par elle-même. Quel sens peut avoir la canonisation de Jean-Paul II, par exemple ? Johnny Halliday n'a pas une croix pectorale moins imposante, il y a autant de monde à ses concerts qu'à ceux du pape, et pourtant personne ne songe (encore) vraiment à le canoniser !?

    Là encore il n'est pas difficile de comprendre qu'on est en plein processus de justification sectaire. Les arcanes de la procédure de canonisation ont d'ailleurs un aspect tout à fait démoniaque. Pourtant, si "la loi ne justifie pas" (saint Augustin), la canonisation encore moins.

     

  • Scholies d'Origène

    Le mépris réservé par le clergé à l'évangile de Jean, le "fils du tonnerre", et notamment à la révélation de Patmos, que les théologiens aussi bien libéraux qu'archaïsants zappent, m'incite à publier mes propres scholies sur l'Apocalypse au plus tôt - vu l'heure tardive.

    Quand l'Apocalypse n'est pas ouvertement discréditée comme étant une obsession de théologien "millénariste" par un clergé complètement absorbé par les valeurs séculières, elle est subvertie par des romans ou des films qui rendent le canevas historique de l'Apocalypse complètement abscon. Maurice Dantec est un exemple de cette subversion, du détournement de la Révélation au profit du Pacte Atlantique assoiffé d'or noir et armé jusqu'aux dents, Pacte auquel l'islam n'est en mesure d'opposer qu'un judéo-christianisme médiéval sans réelle force militaire. Or, non seulement l'Apocalypse n'est pas une lubie millénariste, mais elle est indissociable de toutes les grandes révolutions théologiques au cours de l'histoire, qui ont profondément marqué l'Eglise elle-même, avant que la religion laïque ne prenne le relais. Les passages un peu mystérieux de l'évangile de Jean concernent d'ailleurs les mêmes sujets que les passages demeurés assez mystérieux des épîtres de Paul.

    Mais il y a encore pire que Dantec, et qui explique sans doute la manière stupide qui consiste pour ce dernier à défendre l'Eglise en n'hésitant pas pour ce faire à se travestir en suppôt mélancolique (veste de cuir et lunettes noires), c'est l'exégèse officielle, validée par les autorités ecclésiastiques, de l'Apocalypse, qui revient le plus souvent à la disqualifier, à en faire un texte apocryphe.

    Je prends un seul exemple, l'ouvrage récent du franciscain yanki Stéphane Doyle, o.f.m. ("A catholic perspective on the book of revelation") : celui-ci, en fait de "perspective catholique", fournit une interprétation du texte à laquelle un adepte du soufisme musulman, un bonze tibétain ou un druide breton pourrait souscrire. Certainement pas un catholique, pour deux raisons :

    - Stéphane Boyle insinue que l'évangéliste Jean (le préféré de Jésus), n'est pas le véritable auteur de l'Apocalypse (!), mais qu'il s'agirait plutôt d'un disciple de saint Jean le Baptiste. Sans apporter aucune preuve ! simplement parce que l'Apocalypse dénote d'une bonne connaissance de l'Ancien Testament de la part de son auteur. Argument totalement absurde qui révèle qu'un franciscain accrédité aujourd'hui, ignore non seulement ce que la doctrine franciscaine doit à l'Apocalypse, mais aussi la Pentecôte et les dons de l'Esprit qui ne laissent AUCUN des évangélistes dans l'ignorance de l'Ancien Testament, auquel tous se réfèrent COMME Jésus lui-même. Jésus abolit la loi ancienne du sabbat, mais en toute connaissance de cause et d'effet.

    Argument débile, donc, mais lourd de conséquence, presque aussi stupide que la thèse des pasteurs protestants yankis selon laquelle l'Apocalypse -ici on se retient d'éclater de rire- serait un pamphlet contre saint Paul. Le franciscain yanki S.C. Doyle partage la même fascination que le dominicain français Philippe Verdin pour la théocratie, indubitablement satanique selon saint Jean, et c'est ce qui pousse bien sûr Doyle à un travail de sapeur sous couvert d'élucidation, procédé bien pire que celui d'un gugusse comme Dantec, qu'on n'est pas tenu de prendre au sérieux.

    - Pour interpréter le sens du nombre 666, que la vision incite à interpréter, S.C. Doyle passe par la numérologie ou la "guématrie", c'est-à-dire par une sorte de science kabbalistique qui, elle non plus, ne participe guère d'une perspective catholique ou chrétienne. Il traduit ainsi le "code 666" par "Néron", en se gardant de s'appesantir sur la démonstration. C'est une autre manière, elle aussi sournoise, de discréditer l'Apocalypse en frappant le texte de caducité. Le code 666 est cité en Ap. XIII, non loin de la phase ultime. Si 666 = Néron, l'Apocalypse n'a plus rien ou presque à nous dire, c.q.f.d. Je relève que sur internet, un autre site ouaibe passe par la guématrie, une guématrie qui paraît plus sérieuse que celle de Boyle, pour démontrer que l'antéchrist n'est autre que... Benoît XVI (Ce qui n'est pas sans rappeler les attaques ad hominem de Dante Alighieri contre les papes simoniaques.)

    En outre ce franciscain n'en profite même pas pour dénoncer -ce qui est le minimum dans un ouvrage de ce type- la scandaleuse récupération par le nationalisme européen de la symbolique chrétienne. Doublement scandaleux le procédé des chrétiens libéraux atlantistes dans la mesure où la femme aux douze étoiles N'EST PAS Marie, mère de Jésus, et ne peut pas l'être ("Les Pères et les interprètes catholiques sont presque unanimes à reconnaître dans cette femme un symbole de l'Eglise" dixit le chanoine Crampon, qui n'est pas un hurluberlu comme S. Boyle, lui.)

    Aussi scandaleux car l'Apocalypse contient la condamnation sans appel de la doctrine nationaliste en général, les nations étant animées par le diable, et en particulier celle, européenne, de Maurice Schumann et Jean Monnet, nation peut-être "aryenne", napoléonienne, laïque, démocrate-chrétienne, tout ce qu'on voudra, mais sûrement pas chrétienne.

    En attendant de donner mes propres scholies, et puisque le temps me serre à la gorge comme tout un chacun, je fais la publicité des scholies attribuées à Origène, perspicace contrairement à Boyle, et dont je m'apprête à recopier ici même quelques extraits. Il faut signaler ici que toute exégèse "augustienne" de l'Apocalypse est plus ou moins oblitérée par le fait que saint Augustin est pénétré de principes platoniciens décadents gênants pour comprendre l'association dans l'Apocalypse entre le diable, la "bête de la terre", et la politique des nations, qui confirme s'il était besoin l'interdiction prononcée par le Sauveur lui-même de sacraliser toute institution humaine.

    Les sept étoiles et l'épée acérée (1,16)

    "Dans sa main droite il a sept étoiles et de sa bouche sort une épée acérée, à double tranchant, et son visage, c'est comme le soleil qui brille dans tout son éclat."

    Il est écrit au Psaume 56 : "Les dents des fils des hommes sont des armes et des traits, leur langue un glaive acéré." (Ps 56,5). Non que les paroles soient absolument condamnables ; si elles sont les armes des justes (Ep 6,17), des traits choisis et une épée honorable (Is 49,2), - car tous les fils des hommes combattent, les uns pour Dieu et sa justice, les autres pour le mauvais et le péché -, il ne faut pas non plus en douter pour ce qui est dit ici de celui qui est devenu Fils de l'homme et qui a dans sa bouche une épée tranchante.

    Il a dit lui-même : "Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais le glaive" (Mt 10,34) et "un glaive qui peut pénétrer jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit" (He 4,12). Les méchants qui méditent sur les fausses doctrines ont fortement aiguisé leur intelligence comme une épée acérée (Ps 64,4), pour la rendre capable de faire du mal à leurs auditeurs, mais les autres ont aiguisé leur intelligence dans les divines Ecritures, pour leur propre salut et pour le salut de leurs auditeurs : leur langue est devenue une épée acérée pour le salut ; car les méchants blessent comme une épée, mais les sages guérissent par leur langue (Pr 12,18) et blessent d'amour : le Sauveur nous a donc blessés de son amour (Ct 2,5).

  • Angoisse de la nuit

    Près de mille ans de temps assassin ont passé, mille ans à ajourner l'Apocalypse faute de combattants en nombre suffisant pour oser affronter comme Shakespeare l'angoisse de la nuit, mille ans que la constance de l'ordre dominicain à servir le Léviathan perdure.

    (Je feuilletais récemment la biographie de saint Dominique (de Gusman) par Lacordaire : incroyable tissu de fables et d'hypocrisies ! Cette femelle tente de justifier l'implication de son héros dans la croisade albigeoise qui a ensanglanté le Sud-Ouest de la France, tout en le lavant personnellement du sang versé par les soldats.)

    Aujourd'hui c'est :

    - Philippe Verdin qui fait l'éloge de la théocratie yankie et regrette que ce système de corruption généralisée ne soit pas appliqué en France par Sarkozy ;

    - Jacques Arnould qui fait l'éloge de l'idéologie de Darwin, ciment religieux des régimes laïcs barbares, éternité descendante combattant l'éternité transcendante ;

    - Dominique Humbrecht qui, comme un innocent s'interroge sur les causes de la crise des vocations sacerdotales.

    Le Gusman dans la pièce de Molière est-il une allusion au fondateur de l'ordre prêcheur de guerre ?

  • Brave New World

    "Hyperdémocratie", "hypermarché", "hyperboréen", "hyperprésident"... on peut dire que le surdiplômé Jacques Attali possède le maniement de l'hyperbole comme un chirurgien-dentiste possède le maniement de la roulette. Elisabeth Tessier peut aller se rhabiller avec son tarot caduc. Avec toujours une carte dans la manche gauche en cas de coup dur, Attali est le roi du bluff !

    Toutes ces années à lécher la sainte fente matricielle et à jongler avec les infinis ont contribué à roder le sens du calcul de ce Blaise Pascal de série Z ; sa manière de faire l'apologie du "bon temps" et de l'opposer à l'Apocalypse est d'un exact rapport quantité/prix.

    Nul hasard si, en face, Shakespeare aiguise son arme contre l'abcès du temps : "Eh, toi, stridente hirondelle, infâme pie de Satan augurant l'été, ne t'approche pas de la sainte milice !"

  • Salut et Salauds

    Déclaration du Colonel Le Nen, commandant les forces françaises d'intervention en Afghanistan : "La guerre est un art."

    Quand va-t-on enfin enseigner à Saint-Cyr et Polytechnique le b.a.-ba du marketing militaire ? Ce gugusse galonné en est resté à un discours de caserne pas très adapté à la télévision française qui s'efforce de démontrer que nous sommes des pacifistes armés (docu diffusé sur M6 qui en dit long sur la farouche niaiserie des officiers de l'armée de terre française, farouche niaiserie dont on suppose qu'elle est censée exciter la sympathie des téléspectateurs, et qui s'accompagne parfois hélas d'un fétichisme chrétien scandaleux.)

    "La guerre est un art." : il n'y a pas des stages où on apprend à dire "Outil de défense nationale" plutôt que "Fusil-mitrailleur" ou "Lance-roquette"? Je suggère plutôt, slogan qui permet d'adresser un clin d'oeil complice à la jeunesse : "La guerre est un art... comme les jeux vidéos!", ou, plus poétique : "Quelle connerie la guerre... quand elle faite par des amateurs."

    Le parachutiste chante : "Saint Michel, ange chevalier...", et il est beaucoup plus malin que ce Le Nen car, en réalité, c'est un dragon-parachutiste.

    "Que celui qui a des oreilles entende ! Si quelqu'un mène en captivité, il sera mené en captivité ; si quelqu'un tue par l'épée, il faut qu'il soit tué par l'épée. C'est ici la patience et la foi des saints." (Saint Jean, Ap. XIII, 9)

  • Le Procès

    Ce n'est plus le procès d'Ilan Halimi mais le Mur des Lamentations. La crucifixion de Barrabas après celle de Jésus. Pour la plus grande joie de Fofana. C'est la passion pour la Loi au seuil de l'Apocalypse. Le principal coupable on ne le voit pas, caché derrière les médiats.

    Marx est saint qui ramène toute balance à l'hypocrisie. D'une part comme de l'autre, c'est la haine. Me Szpiner s'occupe d'exploiter "L'Affaire".

    "Je frapperai de mort ses enfants, et toutes les Eglises connaîtront que je suis celui qui sonde les reins et les coeurs ; et je rendrai à chacun de vous selon vos oeuvres." (Ap. II, 23)

    Et quelle est l'oeuvre du jeune homme riche ?

  • Climat d'apocalypse

    Toute éruption volcanique ou tremblement de terre, surtout quand il a lieu au cours de la Semaine sainte non loin de Rome, la marraine des nations, ne peut que contribuer à entretenir le climat présent d'apocalypse.

    Ce ne sont pas les romans ou les films apocalyptiques qui manquent en effet en ce moment, liés au changement de climat ou au nouveau millénaire, apparemment. J'ai déjà dit ici à quel point les thèses de Maurice Dantec, lèche-cul capitaliste, me paraissent ineptes et fournir des arguments à ceux qui tentent de tourner le Nouveau Testament en dérision. Travesti le plus souvent en suppôt de Satan, Dantec doit d'ailleurs avoir pas mal de lecteurs au sein de chapelles satanistes à qui le développement de la sous-littérature dite "de science-fiction" doit beaucoup.

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    Dans le style "emberlificoteur" de Dantec, on peut citer aussi le feuilleton yanki 'Lost-away' ('Les Disparus', de J.J. Abrams & Damon Lindelof, produit par la chaîne ABC et diffusé en France par TF1), feuilleton qui relègue les prophètes et saint Jean auxquels il se réfère au rang du divertissement pour enfants gâtés.

    Vision d'ensemble de l'histoire ramassée en quelques pages, l'Apocalypse de saint Jean est extrêmement synthétique et donc parfois mystérieuse ; mais cela n'empêche pas l'Apocalypse d'être aussi d'une très grande cohérence dans ses rappels des prophéties de l'Ancien Testament et des phases de la vie de Jésus, contrairement à Maurice Dantec ou aux scénaristes de "Lost", qui font tout pour brouiller les cartes.

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    Mircéa Eliade relève bien le rôle des prophètes puis de saint Paul et saint Jean dans la formation de la pensée historique moderne. Mais son erreur, typiquement "laïque", tient à ce que Eliade oppose beaucoup trop radicalement l'histoire au mythe, alors même que certains mythes grecs possèdent un aspect historique marqué, notamment ceux d'Homère, que Shakespeare-Bacon après Dante Alighieri a incorporé à sa propre vision chrétienne apocalyptique, dans le style typique de la théologie néo-platonicienne dite "millénariste" par ses détracteurs.

    La Bible en général, et l'Apocalypse en particulier, concilient justement le mythe et l'histoire.

    D'où vient le préjugé laïc d'Eliade ? D'une conception chronologique de l'histoire, alors même que la caractéristique des grands historiens, Karl Marx en tête, est d'échapper à la chronologie, qu'elle soit linéaire ou cyclique. Marx fait d'ailleurs bien mieux qu'échapper à l'ordre chronologique ; en s'attaquant aux puissances temporelles, l'Etat et la religion laïque issue du christianisme, il parachève le style historique en participant lui-même de sa vision historique (G.W.F. Hegel, lui, si admiré, si "pompé", n'est même pas un historien !)

    Le 'cycle' simule en réalité lui aussi la chronologie, et ce sont bien au contraire les mythes primitifs les plus anciens qui sont les plus "moraux" et les plus "chronologiques" (Nitche a commis la même bévue qu'Eliade ; il faut souligner que le secret de la bévue de Nitche réside dans son ignorance ne serait-ce que de la trame de l'histoire). S'il convient de qualifier l'apocalypse de saint Jean de "mythe historique", précisons en outre que G.W.F. Hegel précède Hitler, Nitche ou Lévi-Strauss dans la mythomanie laïque d'inspiration génitale.

    Il y a une autre façon de le formuler : Plus on s'approche de l'art vrai, plus on s'approche de l'histoire et de l'apocalypse ; plus on s'éloigne de l'art, plus on s'approche en revanche de la sorcellerie. Il n'y a aucune modestie dans la révérence de la secte laïque vis-à-vis des civilisations primitives ; l'attraction est de l'ordre du magnétisme. L'hommage que Lévi-Strauss rend au tribalisme, c'est en réalité à lui-même qu'il le rend. C'est autre chose de dire qu'un sorcier vaudou est plus émouvant qu'un membre de l'Académie française. Il est certain que lorsque le tribalisme se donne à fond, il est plus émouvant, plus féminin. Les fétiches des Dogons sont plus émouvants que ceux de Jeff Koons, ça ne fait aucun doute. C'est bien parce que le tribalisme de Sarkozy et de Guaino est extrême que leur position de donneurs de leçon est intenable, outre le racket capitaliste dont le tiers-monde est victime.

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    On pourrait multiplier les exemples de sous-littérature apocalyptique, au rayon SF de la Fnac ou à l'affiche des cinémas. Peut-être la fortune accumulée par les Evangélistes yankis n'est-elle pas étrangère à ce tombereau de niaiseries cinématographiques qui dévaluent l'aspect historique de l'apocalypse ?

    Sur le ouaibe sont publiées des théories qui ont le mérite d'être plus originales que celles que la sous-culture officielle développe. En vrac quelques exemples de thèses assez "fouillées" par leurs auteurs :

    - La démonstration par l'héraldique que le Prince William d'Angleterre est l'envoyé de Satan (il est vrai que la mythologie bretonne, contre laquelle Bacon-Shakespeare se bat, a de nombreuses connotations sataniques, le mythe des Chevaliers de la Table Ronde et du graal en particulier) ; l'Angleterre après Shakespeare est devenue "latine" peu à peu, après avoir été touchée par l'"héllénisme", contrairement à l'Allemagne qui ne l'a jamais été ; la difficulté de la science laïque à "situer" François Bacon vient de là, de ce qu'il est un sommet et qu'après lui, avec J. Locke ou D. Hume, l'humanisme retourne à la caverne.

    - La démonstration par la guématrie que Benoît XVI, cette fois, obéit au Prince des Ténèbres (par un admirateur de Blaise Pascal, ce qui m'incite à prendre la démonstration avec des pincettes, comme tout ce qui touche à l'idiot archaïque de Clermont-Ferrand. M. Luther, moins superstitieux que B. Pascal, vit lui aussi dans la papauté une entreprise diabolique, et rien n'indique que Luther souhaiterait aujourd'hui être "réhabilité" par l'Eglise catholique.) ;

    - La démonstration que New York est la "nouvelle Babylone" sous prétexte que de nombreuses nationalités y sont réunies et que la communauté grecque y est importante (?) ;

    - La démonstration que Barak Obama est l'envoyé de l'Esprit-saint (Vu le nationalisme yanki de Barak Obama, et la condamnation sans appel des nations dans l'Apocalypse, cette théorie semble plutôt bancale ; l'alliance souhaitée par l'Allemagne et les Etats-Unis avec la Turquie a tout l'air d'une stratégie d'attaque contre les Russes.) ;

    - La démonstration que le soleil est entré dans une phase d'activité et de rayonnement plus intense, d'ordre apocalyptique, et qui doit atteindre son maximum autour de 2012 ; certains climatologues pensent de fait que, loin d'accélérer le réchauffement, la pollution atmosphérique le ralentirait plutôt ; difficile de trancher étant donné le brouillard médiatique autour de cette question ; aucun des camps, "pour" ou "contre", ne paraît d'ailleurs atteindre le minimum scientifique requis comme la superstition laïque dans l'"effet papillon" l'établit assez ; l'"effet papillon" n'est autre que la poésie des imbéciles laïcs ;

    Ces diverses théories "underground" peuvent paraître au moins aussi étranges que les méli-mélo et le vortex de Dantec ou le divertissement "Lost" ; le plus bizarre est à mes yeux le mutisme de l'Eglise catholique sur le sujet de l'apocalypse, quand ce n'est pas carrément la condamnation de la théologie "millénariste" qui a donné pourtant à l'Eglise, sans remonter jusqu'à Joachim de Flore ou Dante Alighieri, les plus dynamiques impulsions. Si la scolastique ne possède pas d'ailleurs toujours le même dynamisme, c'est surtout en raison du cléricalisme et du monachisme sévères qui règnent encore au XIIe et au XIIIe siècle.

    Que sont les confidences de parloir de sainte Thérèse de Lisieux ou l'hystérie étrange de Thérèse d'Avila, les pirouettes de Jean Guitton, à côté de la science de François Bacon alias Shakespeare ? Les invectives de Léon Bloy font-elles peur au clergé ? Simone Weil est-elle beaucoup trop indépendante pour des Eglises sous la coupe de potentats locaux ou internationaux pour qu'on veuille lui enfiler une camisole, comme Polonius à Hamlet ?

     

  • Précipitation ?

    Outre mon "Journal de Guerre", je me suis attelé à un petit traité sur "les fins dernières". Il ne s'agissait pour moi au début que d'écrire sur les conceptions artistiques comparées de G.W.F. Hegel, docteur du "national-socialisme", et de ses adversaires Marx et Engels, docteurs du "communisme".

    On lie généralement Hegel plutôt à des despotes comme Napoléon ou Bismarck, étant donné qu'il est leur contemporain et parce que l'hypocrisie capitaliste "bobo" est répandue dans l'université, mais il y a dans le nazisme quelque chose qui "colle" encore mieux avec l'aporie de Hegel, l'idée de "roue", de mouvement cyclique du temps. A quoi il faut ajouter le caractère ésotérique, à la limite du grotesque, présent dans le nazisme comme chez Hegel (Il faut rappeler bien sûr qu'avant de reposer sur une quelconque "philosophie", Hitler est un chef d'Etat capitaliste qui a sorti l'Allemagne de la crise par une politique de type "keynésien".)

    Un idéologue germanique, je ne sais plus si c'est Koestler ou Freud, a avoué que Shakespeare lui donnait envie de vomir. C'est une remarque physique très intéressante parce que, de fait, il y a tout à l'inverse dans le national-socialisme de Hegel pour faire vomir Shakespeare.

    Marx et Engels ont donné des pages de critique littéraire d'une lucidité étonnante où, bien que Marx et Engels fussent plutôt francophiles, le primat de l'Angleterre est reconnu ; et l'espèce de suborneur de l'art Chateaubriand dénoncé, entre autres traits remarquables. Mais Marx est décédé avant d'avoir pu donner l'essai qu'il voulait sur Balzac, où la jointure entre le communisme et le catholicisme (Balzac est presque le seul catholique de son temps à n'être pas janséniste/libéral) serait sans doute apparue plus nette. A vrai dire l'itinéraire intellectuel de Marx est proprement incroyable puisque, instruit dans un milieu comparable à celui du pape allemand actuel, subissant les mêmes influences que Joseph Ratzinger, il a su les combattre plus efficacement que celui-ci pour, au sortir de cette jungle philosophique peuplée de monstres tel Feuerbach, regagner la science chrétienne la plus moderne, Duns Scot et Roger Bacon pour le Moyen Age, ou "le dernier des Renaissants" François Bacon, plus mystérieux encore pour l'Université laïque, chargée avant tout de divertir les jeunes français, que Karl Marx.

    Il serait trop long de le détailler ici, mais la question du progrès de l'art dans l'Histoire, au plan national-socialiste comme au point de vue communiste, débouche directement sur la question de la lumière et de ses multiples "représentations" au cours de l'Histoire connue, c'est-à-dire environ depuis les travaux de Pythagore et de sa secte démoniaque - j'entends "démoniaque" ici au sens "neutre", c'est-à-dire au sens d'Homère et non du Nouveau Testament, où les démons sont reconnus et combattus en tant que tels. Dans la théologie catholique, ne pas croire à Satan revient à ne pas croire dans les Evangiles : il va de soi que cela ne s'applique pas à Pythagore ou à Thalès. De Pythagore jusqu'à A. Einstein, même si les sophismes de ce dernier sont beaucoup trop grossiers, par rapport à ses équivalents grecs ou romains, pour qu'on s'y attarde. L'observation par Simone Weil de l'absurdité complète des travaux de Max Planck vaut plus encore pour Einstein et Poincaré, qui ne sont que des "sous-Bergson".

    *

    Aussi ai-je élargi mon étude à une comparaison non seulement des deux moteurs du progrès artistique, mais carrément des deux "eschatologies laïques" de Hegel et Marx ; jusqu'à la comparaison qui s'impose de cette comparaison avec l'apocalypse de saint Jean, objet si ce n'est principal de l'eschatologie chrétienne, du moins une part essentielle.

    Il paraît évident en effet que les trois faits suivants ont la même cause :

    - l'absence de pensée historique proprement "catholique" ;

    - le mépris des théologiens catholiques contemporains pour l'apocalypse, dont l'étude est reléguée en-deçà de basses questions de moeurs, voire de questions purement juridiques comme celles du mariage ou encore la question de la "doctrine sociale" de l'Eglise, thème renfermant plus d'hypocrisie et de lâcheté que les théologies de saint Augustin et saint Bernard de Clairvaux réunies, sans compter les pirouettes de Jean Guitton, toupie pascalienne, tant l'impérialisme occidental a fait dégorger de sueur et de sang les non-esclaves du tiers-monde au cours du dernier siècle ; tant la passivité de l'Eglise face au crime de l'avortement chimique en série choque, jusqu'aux instigateurs de ce crime même parfois (Cf. les 'Mémoires' de l'académicienne Simone Veil) ; si bien qu'on n'est pas étonné que Dante Alighieri croise autant d'ecclésiastiques dans son 'Enfer' ;

    - le frein mis par l'Eglise à l'exégèse "bloyenne" qui consiste non pas à superposer le Nouveau et l'Ancien Testament, erreur qu'Augustin ne commet même pas, mais à les confronter, en quelque sorte de façon "dialectique", pour reprendre le terme grec classique.

    Le mot de Bernanos selon lequel "Hitler a déshonoré l'antisémitisme" n'explique pas tout en l'occurrence, ni même le soucis de certains prélats de plaire aux médiats et de se fondre autant que possible dans le décors des plateaux de télé, le primat des Gaules Barbarin étant sans doute, encore une fois, le plus bel exemple de lopette démocrate-chrétienne qu'il m'ait été donné de voir de ma vie, pourtant riche en rencontres de cette sorte.

    Vu que l'Histoire est sujette à des précipitations, et tous les efforts de Marx et de Hegel tendent d'ailleurs à deviner quel peut bien être le moteur de ces précipitations, vu que "Nous ne connaissons ni le jour ni l'heure", il me paraît opportun de jeter d'ores et déjà ici quelques jalons.

    - Des deux eschatologies laïques en présence, qui n'ont été enrichies substantiellement ni l'une ni l'autre au XXe siècle, sauf l'eschatologie marxiste par les observations de Simone Weil dans le domaine des mathématiques dites "dures", de l'eau de boudin en réalité, celle de G.W.F. Hegel apparaît comme sacrifiant le plus à l'ésotérisme.

    (Tout l'effort des "philosophes marxistes" après Marx, disons sous l'influence du stalinisme pour simplifier, a consisté à réduire Marx à Hegel, à lui faire parcourir tout le chemin qu'il avait parcouru dans le sens inverse, comme Pénélope détricote son ouvrage pour gagner du temps - ou à le réduire à n'importe quoi, comme Derrida. Côté Hegel, ses ramifications ne valent pas mieux, et l'"existentialisme" n'est qu'une longue dissertation de philosophie ennuyeuse, qui ennuie Sartre lui-même au point qu'il préfère "Bibi et Fricotin" ou "Jules Verne", des extrapolations quasi-algébriques justement, dérivées de spéculations de Hegel, elles-mêmes dérivées de la morale épicurienne/stoïcienne, et qu'on retrouve aussi chez saint Augustin ou certains scholastiques ineptes. J'ai cité Derrida comme exemple de délire marxiste ; pour Hegel on peut citer Heidegger, ultime crétin nazi, "ultime" dans le sens où Hitler lui-même n'est pas si con ; Heidegger dont on peut se demander s'il fait la différence entre la philosophie d'Aristote et celle d'Epicure. Quant à Nitche, cas à part, parodiant M. Rubel, l'exégète de Marx dans l'édition de la Pléiade, on peut dire qu'il incarne à peu près ce que Marx serait devenu si Marx avait été une femelle sentimentale comme Nitche et non un humaniste sérieux.)

    - La "phénoménologie de l'esprit" : voilà l'expression de Hegel qui résume le mieux le caractère démoniaque de la pensée de Hegel, où transparaît le mieux que la pensée de Hegel n'est pas une science vivante, mais bel et bien un 'produit', une poésie, un hymne nostalgique, une philosophie morte, tout ce qu'on veut dans le genre médaille d'or aux jeux pythiques.

    Il n'y a pas d'organe neuf chez Hegel, mais un mélange bien rangé d'empirisme, de théologie et de morale archaïques.
    Pour faire le lien avec l'apocalypse, la Bête de la Mer passe précisément par le "phénomène" pour sidérer ses victimes.
    Neptune, les sirènes, Charybde et Scylla... sont autant de démons surgis de la mer en travers du chemin du retour vers Ithaque. La théodicée de Hegel s'achève par la mort d'Ulysse devant les remparts de Troie. Comment Hegel fait-il pour concilier la très grande génitalité et la très grande spiritualité ? Il n'y parvient pas, pas plus que Darwin ou un prêcheur chrétien du mariage de droit divin.

    Comme "phénomène" on peut citer à titre d'exemple l'électro-magnétisme, en raison de sa connotation satanique (appliqué à de la limaille de fer l'aimant dessine un diable), mais aussi parce que ce phénomène joue un rôle non négligeable dans les spéculations débiles d'Isaac Newton, que William Blake ou Robert Fludd avaient bien percé à jour, en plus d'une théologie anglicano-loufoque, au moins aussi loufoque que celle de Kepler. Dieu sait que la science protestante, même si Luther a toujours récusé l'idéologie héliocentrique (Luther est plus catholique que Benoît XVI !), Dieu sait que cette science-là a pu fournir de nombreux modèles à Shakespeare pour les personnages des traîtres Rosencrantz et Guildenstern.

    Au phénomène s'oppose l'épiphanie. Il a manqué à Marx, Engels et Simone Weil de pouvoir atteindre jusqu'à l'astrologie, comme Shakespeare, même si Marx sait que bien des conflits ne peuvent se résoudre qu'au plan astronomique.

    Il n'y a que deux camps, il n'y en a pas trois. Et les tergiversations de Benoît XVI le rendent extrêmement suspect ; ou bien c'est un béotien, ce qui revient exactement au même. "La laïcité est une bonne chose, je crois", a dit le dernier pape ; il ne croit pas, il doute. Son doute est sa foi.

    *

     


    - Question d'art "populaire", le progrès selon Hegel se fait vers la musique. Pour un marxiste, la musique est militaire et mondaine ou tribale. Les sorciers laïcs croient deviner de la musique partout, jusque entre les hautes sphères, qu'ils s'imaginent sifflantes, comme le python, par friction. La "phénoménologie" peut aussi être comprise comme une "fascination par la musique". Dans la théodicée de Hegel, Ulysse ne se bouche pas les oreilles avec de la cire.

     

    *


    "Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d'avoir droit à l'arbre de la vie, et afin d'entrer dans la ville par les portes ! Dehors les chiens, les magiciens, les impudiques, les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime le mensonge et s'y adonne !" Ap. XXII, 14-16

    Comparant ensuite avec l'apocalypse de saint Jean, j'observe brièvement :

    - que Satan se manifeste dans la Vie de Jésus de deux façons différentes, il paraît lui-même d'abord, à l'instar de la Bête de la Mer dans l'Apocalypse, avant d'influencer les Pharisiens et Pilate, les prêtres et le gouvernement, et d'agir indirectement, comme la Bête de la Terre.

    L'exégèse officielle actuelle de l'apocalypse, très contestable (notamment l'ouvrage "officiel" du franciscain yanki Stephen Doyle) est marquée par l'augustinisme ; y compris un exégète moins "bénin", pour rester poli, et plus ancien comme Césaire d'Arles.

    J'y reviendrai, mais disons-le brièvement, la source de Hegel est dans Augustin, Bernard de Clairvaux, comme l'a mis en lumière le médiéviste Etienne Gilson. On peut le dire autrement : Hegel et Augustin tirent leur savoir, comme les Romains, des savants grecs les plus désuets.

    Karl Marx de son côté reconnaît que le matérialisme anglais qui est le sien, même si c'est un peu flou dans sa tête, qu'il ne différencie pas comme il faut F. Bacon de D. Hume, découle de la science scolastique de Duns Scot.

    A ceux qui ne comprennent pas comment un philosophe, Marx, à qui on a collé une étiquette d'athée, vocable lui-même soumis à de très nombreuses variations au cours de l'Histoire (ou Blaise Pascal est "athée" selon moi, ou c'est un blasphémateur), peut rejoindre la théologie catholique il faut expliquer trois choses :

    - Le tour "prométhéen" de Marx, sa rébellion contre le pouvoir civil et religieux qu'il assimile à bon droit, puisqu'en France même, Napoléon III, pour des raisons électorales d'abord, jugea bon de recouvrir son régime d'un vernis chrétien, l'a préservé d'une théologie chrétienne complètement "sécularisée".

    - Le sérieux scientifique de Marx et son goût de la vérité lui ont évité de devenir une sorte de fou furieux à la fois rébarbatif et satanique comme Nitche, qui fabrique de toutes pièces l'histoire de la Grèce et celle de Rome, forge cette notion misérable de "civilisation gréco-romaine", au lieu de se concentrer sur l'essentiel comme Marx, à savoir précisément ce qui oppose les Grecs aux Romains.

    - La troisième est ce que j'appelle "le mystère François Bacon", plus mystérieux encore que la décadence de la science grecque après le sommet que représente Aristote. La bonne dialectique de l'Histoire est englobée pour Marx dans le secret de la "chute" des Grecs. Mais le mystère de la "chute" de l'Angleterre, front pensant de l'Europe, après François Bacon alias Shakespeare, est encore plus mystérieux puisque Marx et Engels ne l'ont pas discerné aussi clairement que le problème grec. Et pas plus l'historien plus ou moins marxiste François Furet.

    *


    La difficulté de distinguer le diable du Paraclet comme le souligne la théologie de Léon Bloy, méprisé et qualifié de "millénariste" par des clercs "mondains", faces de carême comme Pascal, la difficulté vient du tour de Satan qui consiste à porter le masque séduisant de "Lucifer".
    Il ne paraît donc pas imprudent d'aiguiser son arme et de se méfier des tentures, voiles d'hypocrisie derrière lesquels s'abritent les pharisiens, quitte à, s'il le faut, porter comme Hamlet l'estocade.

     

  • Signes sataniques du temps

    Il faut dire que l'attaque grossière de Prieur et Mordillat contre l'apocalypse est relayée à l'intérieur de l'Eglise elle-même, de façon plus subtile.

    La bouffonnerie de Prieur et Mordillat, qui consiste à prétendre que l'Apocalypse n'est qu'un pamphlet, alors même que la vision de saint Jean est animée par des phases qui correspondent à la vie du Messie lui-même, cette bouffonnerie n'est que la partie émergée d'un iceberg plus gros.

    J'en veux pour preuve la réponse du Père Alain Bandelier à la question posée par une de ses ouailles dans le magazine "Famille chrétienne" (21-27 fév. 2009 - magazine dont l'intérêt est de refléter la doctrine officielle actuelle du Saint-Siège, qualifiée parfois de "judéo-chrétienne").

    Question : "Que faire pour que le Seigneur revienne enfin dans la gloire et mette ainsi un terme aux horribles souffrances que subissent les hommes de siècle en siècle ?"

    Réponse : "(...) Même les chrétiens ont régulièrement la tentation de "décrocher" de leur espérance théologale pour s'accrocher à un rêve : le retour du Christ sur terre. C'est l'hérésie du millénarisme, selon laquelle Jésus viendrait régner mille ans ici-bas - alors qu'il a clairement dit que son royaume n'était pas de ce monde. (...)"

    Abracadabrante réponse ! A une question, qui, de toute évidence, traduit une soif d'apocalypse ; le genre de question qui risque d'être réitérée au Père Bandelier vu l'effroi dans lequel le monde est en train de plonger.

    D'abord, contre Bandelier, il convient de rappeler le texte de la vision de saint Jean à Patmos, vision qui contient toute l'Histoire :

    "Puis je vis des trônes, où s'assirent des personnes à qui le pouvoir de juger fut donné, et JE VIS les âmes de ceux qui avaient été décapités à cause du témoignage de Jésus et à cause de la parole de Dieu, et ceux qui n'avaient point adoré la bête ni son image, et qui n'avaient pas reçu sa marque sur leur front et sur leur main. Ils eurent la vie, et régnèrent avec le Christ pendant mille ans. Mais les autres morts n'eurent point la vie, jusqu'à ce que les mille ans fussent écoulés. - C'est la première résurrection ! - Heureux et saint celui qui a part à la première résurrection ! La seconde mort n'a point de pouvoir sur eux ; ils seront prêtres de Dieu et du Christ, et ils règneront avec lui pendant mille ans." Ap. XX, 6.

    Ensuite quelques explications : dans sa réponse, le Père Bandelier tente d'assimiler le "monde" au monde PHYSIQUE, autrement dit à la "Nature", autant qu'on puisse interpréter l'idée de ce clerc, qui n'a pas l'air de savoir très bien lui-même ce qu'il dit, ajoutant juste après : "Aux pharisiens qui l'interrogent sur la venue du Royaume, il répond qu'il n'est pas ici ou là, comme une chose observable ; c'est une réalité intérieure à l'Histoire" ?????? Cela ferait sourire sur les "éclaircissements" que ledit Bandelier est censé apporté à ses lecteurs, si ce clerc ne portait pas une accusation grave d'hérésie contre la théologie qualifiée de "millénariste" dont Léon Bloy et Simone Weil sont les ultimes représentants, mais qui s'appuie aussi sur Joachim de Flore, François Bacon alias Shakespeare, sans oublier François d'Assise, phalange rassemblée derrière la bannière du Saint-Esprit.

    Le "monde" dont Jésus parle n'est pas bien sûr la Nature célébrée par François d'Assise mais ce que Shakespeare appelle "le temps", représentés dans le Nouveau Testament par les Pharisiens et Ponce-Pilate, autorités religieuse et politique liguées contre le Messie et son message. Nul besoin d'avoir fait sept ans de séminaire pour savoir le sens d'une "mondanité".

    Venant d'un clerc dont la gazette, "Famille chrétienne", n'hésite pas à substituer la télévision à la vision véritable, une gazette appliquée à sceller le pacte entre l'Eglise et le Siècle en présentant le capitalisme comme une fatalité, le darwinisme comme la seule façon possible de concevoir le progrès, une gazette où l'on ose se demander si les Etats-Unis ne constituent pas un modèle de "Cité de Dieu" (!), Etats-Unis dont le satanisme transpire de partout, dont la gazette n'hésite pas à présenter la soldatesque française au service des cartels du pétrole comme un détachement de croisés, venant de ce Bandelier, l'accusation d'hérésie, assurément, ne manque pas de culot ! Pour ne pas dire de calotte.

  • Au Danemark

    Une sorte de dogme rédigé en lettre de plomb surplombe la littérature bourgeoise, comme quoi le style serait l'homme lui-même ou son empreinte. Madame de Staël ou Sainte-Beuve sont les principaux prêcheurs de cette paroisse. En persuadant par-derrière Sainte-Beuve qu'une femelle qui se branle en se remémorant les pâtisseries de son enfance mérite elle aussi d'être appelée 'un homme', et par conséquent de posséder son propre style, Proust ne bouleverse pas fondamentalement la critique ; il ne fait qu'effectuer la remise à niveau.

    Et, pour finir, pastiche du pastiche : 'Le style, c'est le cameraman.'

    Alors qu'en réalité, "Le style, c'est le gnome." Et ça ne vaut pas que pour Sarkozy, même si ça explique en partie la fascination que ce petit Janus en costard exerce sur les amateurs de divertissements proustiens, ravis ou agacés de voir s'agiter sous leurs yeux leur propre caricature.

    Au seuil de l'Apocalypse, croyez-moi, mieux vaut tenir une solide épée aiguisée qu'un quelconque style. Et commencer par trancher la gorge avec cette dague, la gorge du petit poète que chacun, porté par l'air du temps, désormais porte en soi, en prenant exemple sur Hamlet d'Elseneur.

     

  • Signes sataniques du temps

    Un trait caractéristique du théologien laïc, c'est sa haine spéciale de l'apocalypse. Par conséquent de saint Jean et de saint Paul. Des athéologiens aussi célèbres que Nitche, Gilles Deleuze, D.H. Lawrence, etc., s'en sont pris frontalement ou sournoisement à l'apocalypse, le texte même de la révélation ou ses auteurs.

    Les angles d'attaques sont assez variés, qui vont de la diffamation pure et simple, comme lorsque l'incendie de Rome est imputé aux chrétiens plutôt qu'à Néron, voire carrément la chute de l'Empire romain tout entier, jusqu'au sketch de Yann Moix à la télé, accusant saint Paul d'être un usurpateur et chantant les louanges de la gourdasse Edith Stein pour avoir néanmoins son article dans les gazettes démocrates-chrétiennes BCBG.

    Plus intéressante est l'accusation lancée par Gilles Deleuze à saint Jean de n'avoir aucun talent poétique. Cette remarque prouve que la confusion entre l'Ancien Testament et le Nouveau est le fait de la théologie laïque et pas seulement presbytérienne.

    Récemment la chaîne 'Arte' a diffusé dans la même veine une émission où une bande de clampins bardés de diplômes s'évertuait à démontrer que l'Apocalypse de Jean n'était autre qu''un pamphlet dirigé contre saint Paul', ce qui, je l'avoue, m'a fait peu chrétiennement tordre de rire pendant cinq bonnes minutes devant mon poste de télé. Différents théologiens de mes deux, catholiques comme protestants, avaient consenti à tremper dans cette escroquerie, sans doute contre salaire.

    Pire il faut le dire est le travail de sape du clergé démocrate-chrétien qui s'acharne à NE PAS parler de l'apocalypse et continue de bassiner ses ouailles, après les sermons sur la monarchie de droit divin, avec des sermons sur le mariage de droit divin, le coïtus interruptus à l'américaine, les syllogismes de Benoît XVI, la messe en latin... ou pas, etc. Amen.