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Lapinos - Page 124

  • Le choix des mots

    L'idée de Besancenot d'un grand parti anticapitaliste part d'un bon sentiment. La propagande a de plus en plus de mal à dissimuler que la richesse matérielle de l'Occident et des Etats-Unis repose sur un déséquilibre économique à l'échelle mondiale. Pour l'instant, le reste du monde, le couteau sous la gorge, accepte ce "rackett"... mais demain ?

    Même Chirac avait pigé ça ! Peut-être inspiré par ce que les Etats-Unis ont fait du Japon : un "no man's land".

     Mais ce qui manque visiblement à ce projet anticapitaliste, ce sont des idées marxistes. Che Guevara ne suffit pas. La dénomination même de parti "anticapitaliste" est trop lâche. Derrière l'économie, il y a des hommes ; c'est tout le subterfuge des libéraux et de leurs acolytes démocrates-chrétiens qui tiennent l'encensoir que de dissimuler cette réalité derrière la spéculation, les statistiques et le droit.

    "Antilibéral" serait plus franc, voire "antilaïc", "antitotalitaire". Il est impossible de dissocier le libéralisme de la laïcité et du capitalisme. Ce serait mépriser la vérité historique. Et c'est précisément ce que nous reprochons aux libéraux de tous poils : d'être des menteurs.

    Le libéralisme n'est pas une recette économique, c'est une superstition religieuse, et c'est en tant que telle qu'elle doit être combattue. C'est parce que le parti communiste est devenu un parti comme les autres, un parti de vieillards fétichistes, qu'il a crevé. A l'inverse Le Pen doit son succès dans les milieux ouvriers au fait qu'il a à plusieurs reprises su trouer le rideau de velours de la propagande libérale, faire tomber les masques.

    Le choix des mots, simple pinaillage sans intérêt ? Pas si sûr. Besancenot ou qui que ce soit mènera le combat antilibéral avec sincérité, s'il veut éviter d'être manipulé par Sarkozy ou le PS, dont la ruse consiste à jouer les moins pauvres contre les plus pauvres en agitant la promesse d'une poignée de dollars en prime, devra commencer par piétiner la propagande et les fétiches laïcs. Le combat doit se faire au nom de la vérité et non du relativisme libéral.

    C'est là que réside la principale différence entre Karl Marx et Hegel, Hegel le grand penseur du nazisme, le régime laïc le plus altruiste de l'histoire, le moins anarchique, mais qui, n'en déplaise à la bourgeoisie libérale, aux industriels démocrates-chrétiens, aux laïcards nostalgiques, ne reviendra pas. Le combat de Hegel est placé sous le signe du mythe et des fétiches. Celui de Marx est placé sous les auspices de la Vérité. Elle seule rend libre. Tout le reste n'est que tactique (Jauger Besancenot et son parti anticapitaliste ne prendra pas longtemps.)

     

  • L'essence de la laïcité

    Pour les candides qui se font encore des illusions sur la prétendue “neutralité laïque”, cette affaire de mariage musulman annulé, qui a mobilisé comme un seul homme le rouleau compresseur médiatique, est une véritable "leçon de chose".

    Car que s’est-il passé, derrière l’écran de fumée des syllogismes juridiques et de la propaganda télévisée ? C’est pourtant simple, des lobbys laïcs, relayés par des médias laïcs, ont annulé une jurisprudence laïque, au mépris de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice, grand principe constitutionnel laïc.
    Si on peut dire, l’empiètement des lobbys et des médias sur le pouvoir judiciaire ou législatif est tellement peu laïc que la Constitution n'a même pas songé à parer ce danger ; c’est pourtant ce qui vient de se passer, les médias ont ordonné à la Garde des Sceaux de changer la jurisprudence, au vu et au su de tout le clergé laïc, avec son approbation.
    (A ma connaissance, seule la presse étrangère, britannique, a relevé ce fait évident.)

    *

    Par-delà même ces deux négations, c’est la théorie laïque (algébrique) du cantonnement de la religion dans la sphère privée qui vient d’être bafouée ouvertement.
    L’avocat du couple musulman, Me Labbée, avait bien pris soin d'emprunter les fourches caudines du droit laïc. Il ne s’agit pas ici d’un père de famille musulman ou catholique "intégriste" qui ramène de force à son domicile sa fille émancipée légalement. La forme laïque et ses circonvolutions a été scrupuleusement respectée.

    Le caractère fourchu de cette théorie algébrique qui met en parallèle les sphères privée et laïque a surgi. Encore une fois c’est un cas d’école. La fiction de la sphère privée a été démantelée pour pouvoir s’attaquer à la religion musulmane qui s’y était réfugiée.
    Le sophisme, présenté comme une vérité universelle, utilisé communément par les laïcs pour traquer les religions dans la Cité et les en expulser, en affirmant que la virginité n’est pas un motif subjectif, que les seuls motifs subjectifs valables sont des motifs laïcs, les lobbys laïcs ont fait voler en éclat. Ils l'ont écarté pour mieux s’en prendre à l’islam, dans la vie privée, trahissant ainsi le véritable mobile laïc.

    La négation de la jurisprudence d’un tribunal laïc, la négation du principe de séparation des pouvoirs, la négation de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, tous ces reniements accumulés ne signifient qu’une seule chose : le superfanatisme de la religion laïque spéculée.

    *


    Ici j’en profite pour faire observer une chose à mes frères musulmans respectueux de la loi divine, et qui refusent de se prosterner devant des idoles laïques comme le football ou le cinéma. Une chose qu’ils ne sont peut-être pas les mieux placés pour observer : le fanatisme laïc, décrit par Marx comme un opium surpuissant, emprunte les voies du droit et de l’algèbre ; ce n’est pas un hasard si la réalité objective est subvertie par ces moyens. Car il n’y a pas de hasard, pas plus qu’il n’y a de fatalité.
    Le paganisme laïc, pas plus que l’hérésie démocrate-chrétienne qui le sert, n’étaient inscrits dans les gènes de la France. Les musulmans ne doivent donc pas s’interdire de comprendre l’esprit de l’Occident pour mieux éviter le piège mortel dans lequel celui-ci est tombé.

  • YSL = CRS

    Il n'y a pas que Jean Nouvel qui perpétue le style laïc, l'urbanisme d'Albert Speer ; sur le plan de la mode vestimentaire, après Coco Chanel il faut citer Yves Saint-Laurent. Que le féminisme soit associé à cette façon de se fringuer comme un homme, c'est tout un programme ! Et pas n'importe quel homme... Un bureaucrate en costard sombre et cravate, le prototype du "malhonnête homme", qui s'empêtre lui même dans ses calculs et finit par se gourer de bouton. C'est presque aussi fort que la pomme d'Adam de Mme Kouchner, comme image du féminisme laïc.

    Le totalitarisme vous laisse deux possibilités : ou de vous habiller à la mode de votre ghetto, ou l'uniforme strict griffé YSL. Bien sûr dans le genre "gauleiter", avec ses esclaves décharnés, Karl Lagerfeld fait la paire, en plus cultivé (la fameuse culture nazie dont parle Littell).

     

     

     

     

  • Un charter pour le Texas

    Où nous mène la laïcité ! A voir une bande de métèques célébrer “l’identité française”... Plus métèque que n’importe quel immigré curieux de connaître la France, toute la clique gaulliste et ses images d’Epinal. Ce Tillinac dégoulinant de clichés, judéomaniaque servile, qui croit, ce con, que le rugby et le football, c’est la France : autant dire que “les églises vides, c’est la France” ; et ce vieillard indigne, Jean d’Ormesson, qui finira par claquer d’orgueil à la télé, avec sa littérature miraculée pour les petites-filles de Mauriac ; et ce Finkielkraut incapable de piger ce que raconte Péguy, trissotin vedette des “cultureux” ; ou encore ces démocrates-chrétiens du Figaro qui fustigent le coran au nom de Bernanos - les salauds -, pour mieux fourguer des armes de destruction massive en loucedé à l’Arabie saoudite.
    Tous ces barbarins ont plus leur place au Texas qu’en France. Qu’ils aillent fonder une secte là-bas et cessent de boucher la ventilation ici.

    Que toute cette boursouflure, toute cette moisissure laïque, de droite comme de gauche, soit remplacée par du sang neuf, qu’il soit africain ou russe, peu importe, c’est dans l’ordre des choses, juste une question de temps. Un laps suffisamment long quand même pour permettre aux fanatiques laïcs de tout saccager ! C'est ça qui est écœurant… Qu’on songe seulement aux effets de la politique économique gaulliste, de l’architecture post-nazie, en cinquante ans, sur le paysage français : c’est dantesque ! Un Français d’avant les grandes guerres laïques européennes reviendrait dans la France d’aujourd’hui, sans transition, il serait terrifié, il ne comprendrait pas le sens de ce gigantesque parc d’attraction.

    *

    Non pas l’“identité” de la France, car la France a peu à voir avec ce genre de raisonnements algébriques, ce n’est pas un pays d’experts-comptables, de géomètres-experts ou de polytechniciens, mais disons plutôt "l’esprit critique français", "l'imagination française", ouverte en principe aux quatre vents pour tenter d’en capter les forces, eh bien si cette France est délaissée, piétinée au profit de fétiches bourgeois, alors que le plus avisé s’en empare, c'est ce qui peut arriver de mieux à cet outil en déshérence.


    La France ne s’est jamais sentie propriétaire de la vérité que depuis que la France laïque nie le principe même de la vérité, promulgue l’histoire, la science et l'art par décrets, et traque les religions qui ne sont pas laïques jusque dans le for intérieur.

  • Pour un art communiste

    - Ce qui est gênant dans cette exposition des maquettes du Berlin d'Albert Speer, l'architecte chouchou d'Hitler, c'est qu'elles préfigurent le goût yanki pour l'empilage de gros cubes, avec tout le blabla qui va avec. Et pas besoin d'avoir fait l'école du Louvre pour voir qu'il y a plus de dessein chez Speer que chez Jean Nouvel ou Portzamparc.

    - Vous connaissez le "paradoxe de Johnatan Littell", qui fit l'admiration naguère des vieillards gâteux de l'Académie française ? Les nazis sont cultivés, et pourtant ce sont des barbares ! Traduit en langage bobo, ça donne : "Comment ça, nous pourrions regarder "Arte" pendant des années, écouter Finkielkraut sur "France-Culture", sans nous transformer pour autant en humanistes ?" Interpellant, pas vrai ?

    Le paradoxe, c'est l'hypocrisie des petits malins ou des crétins. Bien sûr Littell ne démontre pas que les nazis sont savants. Comment peut-on être savant et prendre Heidegger deux secondes au sérieux ? Il prouve simplement que les nazis sont plus savants que les yankis. Tout laisse penser que le nazisme restera dans l'histoire comme l'"âge d'or du capitalisme", c'est-à-dire la période où le capitalisme a eu sur lui-même le regard critique le moins émoussé (ce qui ne l'a pas empêché de courir à sa perte).

    Hegel, penseur de l'Etat laïc gouverné par un homme providentiel est sans aucun doute le penseur qu'on peut le mieux accoler à Adolf Hitler et à son régime martial soutenu par des hommes d'affaires démocrates-chrétiens. Eh bien il faut être honnête, Hegel c'est quand même autre chose que la niaiserie post-moderne qu'on doit se coltiner aujourd'hui.

    - Ce que les communistes un peu mollassons de Mai 68 ont oublié de préciser, en comparant la CRS à la SS, c'est que la CRS est une SS décadente, ou, pour reprendre le vocabulaire marxiste, une parodie de SS. Marx c'est aussi l'art de la mise en perspective et de la révélation ; le contraire du procès photographique ou cinématographique iconoclaste.

  • Le goût bourgeois

    C'est marre de toutes ces odes à la beauté de Carla Bruni dans les médias !

    Il faut bien que quelqu'un le proclame, à la fin, que Carla n'est qu'un boudin, un boudin maigre, mais un boudin quand même. Est-ce de voir tous ces cadavres et tous ces camps de travail à la télé qui a donné aux téléspectateurs le goût du fil de fer ? A moins que ça ne vienne du puritanisme laïc, de l'anorexie-boulimie capitaliste ?

    Quand je pense que Patrick Besson a couché avec cette gonzesse ! Il faut avoir du vice ! Ce devait être une manière de défi sado-masochiste pour lui, étant donné qu'il doit bien peser cent kilos de plus qu'elle.

    Une femme qui n'a pas de forme... Ici j'ouvre une parenthèse : avoir une forme ne signifie pas avoir des formes, être grosse, mais avoir une ligne fascinante. Une forte poitrine, par exemple, est plutôt nuisible. Un peintre classique diminuera la poitrine (ou le sexe masculin) pour obtenir une création plus harmonieuse, pour ne pas briser sa ligne abstraite. Une forte poitrine nuit à la gravité (cf. les cours du professeur P.). Le pire étant une fille maigre à forte poitrine, le modèle capitaliste. Déduire le régime social du XVIe siècle de la peinture du XVIe siècle, comme la majorité des contemporains, c'est rabaisser la peinture au niveau de la photographie ou du trompe-l'oeil.

    La femme, chez les maîtres, n'est ni excessivement grosse ni excessivement maigre. Si Rubens ou Boucher en rajoutent un peu ici ou là, c'est à leur caractère flamand qu'il faut l'attribuer, qui joue des effets de coloris et de carnation à un point que la peinture italienne ne cherche pas à atteindre, ayant à sa portée d'autres moyens. Mais Rubens ne confère pas de valeur mystique à la couleur ou à la lumière, comme Hegel fait naïvement, puis les ultimes crétins Klee ou Rothko (etc., etc.), ésotériques imbéciles programmés.

    Une femme qui n'a pas de forme (l'allure, le port en font partie) peut tenter de compenser par le vêtement ou l'expression. La chirurgie esthétique à laquelle Carla Sarkozy a visiblement eu recours est le meilleur moyen de tuer l'expressivité, de surmonter son squelette d'une tête de mort. Carla c'est "Fantômette à l'Elysée". La femme transparente. Du concept, de l'essence de femme, sans aucune féminité.

     

     

  • L'essence de la laïcité

    « Rien qui ne devienne vénal, qui ne se fasse vendre ou acheter ! La circulation devient la grande cornue sociale où tout se précipite pour en sortir transformé en cristal monnaie. Rien ne résiste à cet alchimie, pas même les os des saints, et encore moins des choses sacro-saintes, plus délicates, res sacro-sanctae extra commercia hominum. De même que toute différence de qualité entre les marchandises s’efface dans l’argent, de même lui, niveleur radical, efface toutes les distinctions. Mais l’argent est lui-même marchandise, une chose qui peut tomber sous les mains de qui que ce soit. La puissance sociale devient ainsi puissance privée des particuliers. Aussi, la société antique le dénonce-t-elle comme l’agent subversif, comme le dissolvant le plus actif de son organisation économique et de ses mœurs populaires.* La société moderne qui, à peine née encore, “tire déjà par les cheveux le dieu Pluton des entrailles de la terre”, salue dans l’or son Saint-Graal, l’incarnation éblouissante du principe même de sa vie. » Karl Marx, Le Capital, livre I. *« Rien n’a, comme l’argent, suscité parmi les hommes de mauvaises lois et de mauvaises mœurs ; c’est lui qui met la discussion dans les villes et chasse les habitants de leurs demeures ; c’est lui qui détourne les âmes les plus belles vers tout ce qu’il y a de honteux et de funeste à l’homme, et leur apprend à extraire de chaque chose le mal et l’impiété. » (Sophocle : Antigone. Note de Karl Marx)

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    Accuser Marx de manquer de spiritualité, c’est exactement comme accuser Balzac de manquer de poésie - un reproche qu’on entend parfois ici où là. C’est la haine du romantisme vis-à-vis du classicisme, la haine d’Alexandre Dumas vis-à-vis de Racine. Dans la même veine sournoise, il y a les efforts de la critique contemporaine pour réduire les peintres de la Renaissance, puissants, beaucoup trop puissants et populaires, beaucoup trop populaires, pour les réduire à des géomètres-experts ou à des magiciens et les ramener ainsi à la mesure du bourgeois amateur de gadgets conceptuels. Le fétichisme des mots contre l’art. L’orthographe contre la syntaxe. Le haïku contre la Bible.
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    Non seulement ceux qui accusent Marx d’être dépourvu de spiritualité sont des ignares, mais ce sont des ignares qui entendent le demeurer. C’est parce que la question de la foi est un question bourgeoise que Marx ne l’aborde pas. Le pilier ne doute pas de la voûte. Marx est bien placé pour connaître cette hypocrisie, lui qui a démontré que la laïcité était une fiction ; par conséquent la foi démocrate-chrétienne, chrétienne-démocrate, la foi athée qui en découlent, sont des fictions elles-aussi. À moins de nier la liberté individuelle, ce que Marx ne fait pas, ces fictions qui se présentent comme des angélismes, sont librement consenties. Étant donné que l’essence de la religion laïque, c’est la négation, en théorie aucune autre religion ne devrait accorder plus de place au doute. Or dans les faits, il n’est que de voir ses représentants les plus médiatiques, perpétuellement à la chasse aux sorcières, pour constater qu’on est en présence de fanatiques. La laïcité, c’est le fanatisme du doute.

  • Pornographie laïque

    « Rien qui ne devienne vénal, qui ne se fasse vendre ou acheter ! »

    Parce que Marx a prévu la braderie des choses les plus sacrées par le régime bourgeois ; parce que Marx a mis a nu le double langage laïc qui procède en désincarnant le Verbe et permet de condamner l’esclavage tout en le pratiquant avec un cynisme accru ; parce que l’industrie cinématographique, que la bourgeoisie élève au rang d’art, est au cœur de ce business - pour toutes ces raisons la pornographie est exemplaire du mode de fonctionnement hypocrite des régimes laïcs.

    Les documentaires sur l’industrie du cinéma porno sont rares à la télévision. Il n’est pas aisé en effet d’en dissimuler le contexte politique.
    L’internet a eu au cours des quinze dernières années un effet dopant sur la croissance des Etats-Unis ; et l’industrie du cinéma X a eu elle-même un effet dopant sur l’internet. Dans les grandes écoles françaises qui se dotèrent rapidement de l’internet par esprit de conformisme, les connexions à des sites pornographiques représentaient 75 % à 90 % des "études" au démarrage, lorsque le haut débit n’était pas encore accessible aux particuliers.

    Retirez un élément du château de cartes de l’économie capitaliste, en déséquilibre permanent, et le château de cartes s’écroule. Au cours des premières années de développement de l’internet, comme ce fut le cas avec le minitel auparavant en France, les seuls sites marchands rentables étaient les sites vendant des services pornographiques.
    La pornographie a joué le rôle de l’huile dans un engrenage.

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    “Arte”, la chaîne de BHL, a diffusé récemment un reportage édifiant sur le thème de la pornographie. Les bobos sont en effet de plus en plus inquiets de voir leurs enfants, dès cinq ou six ans, visionner des images crues sur leurs propres bécanes, les outils de filtrage étant inefficaces ; bientôt sur leurs téléphones portables.
    La chaîne ”Arte” omet de dire qu’elle programme elle-même des films pornos yankis ou japonais régulièrement, qui reflètent sans doute le penchant de BHL lui-même pour un morne sado-masochisme à base de philosophie et de silicone. Arielle Dombasle, qu'on peut voir à peu près normale encore dans le film de Rohmer, Pauline à la plage, tentative avortée de sortir le cinéma de la logique industrielle, Arielle Dombasle s'est transmutée peu à peu sous le désir sadique de BHL en une sorte de poupée gonflable inexpressive. Non pas l'essence de la femme ou de la féminité, mais un produit de consommation capitaliste, une femme-objet qui répète en boucle des odes à son partenaire de jeux sado-masochistes.

    - La première manipulation d’”Arte” dans ce reportage consiste à faire porter le chapeau au régime communiste, sous prétexte que la majorité des prostituées virtuelles viennent des pays de l’Est, de République tchèque et de Hongrie notamment. Non seulement les Etats-Unis ont inventé cette industrie, mais ils continuent de la promouvoir et de la financer. Mais, selon “Arte”, ce sont les esclaves elles-mêmes qui sont coupables, ou la pauvreté engendrée par le communisme (la Hongrie et la République tchèque sont parmi les pays les moins "pauvres" et les moins communistes de l’ex-empire soviétique).
    Bientôt le communisme rivalisera avec le nazisme dans la propagande capitaliste. On peut compter sur des abrutis comme BHL et la clique des renégats démocrates-chrétiens pour tailler à Staline les mêmes moustaches caricaturales qu'à Hitler. La repentance pour tous hormis les suprêmes salauds !
    Souligner l’esclavagisme dans les colonies, sans rentrer dans les détails de l’histoire, c’est encore une façon de mieux faire oublier l’esclavage ici et maintenant.

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    - La seconde manipulation est plus subtile. Elle a un rapport direct avec les caractéristiques profondes du totalitarisme, avec le paradoxe apparent du mélange homogène de pornographie et de puritanisme laïc.

    Les reporters d’”Arte” constatent le phénomène d’accoutumance provoqué par le visionnage répété de films pornographiques. Certains adolescents ne peuvent plus s’en passer.
    Il ne s’agit pas ici, contrairement à ce qu’”Arte” insinue, d’une accoutumance au sexe, mais bien aux images pornographiques ou au “sexe virtuel”. Il serait aussi stupide de croire qu’on ne peut de passer de sport sous prétexte qu’on ne rate un match de l'équipe de France de foot sous aucun prétexte.
    Cette dissociation entre le sexe réel et le sexe virtuel opéré par la propagande puritaine laïque est double. Le sexe, coupé de ses effets procréatifs, est lui aussi assimilé au sexe réel ; comme si le comportement alimentaire anorexique-boulimique était un mode d’alimentation normal, par exemple. Ce que l’industrie pornographique montre en général, plutôt qu'un rapport "sexuel", c’est un rapport de pouvoirs sado-masochiste distinct de l’érotisme.
    On est bien obligé de voir là la marque de la dissection kantienne. Les laïcs puritains, dans un autre domaine, assimilent l’épistémologie à la science par le même tour de passe-passe ontologique.

    *

    “Arte” a largement recours dans ce reportage à des sexologues, des psychanalystes freudiens et autres charlatans en tous genres, qui répandent une image désastreuse de la science dans le grand public. Le langage mystique freudien est le moyen idéal d’assimilation de la pornographie-sexe virtuel à l’érotisme-sexe réel.
    L’individu qui ne peut se passer de cinéma porno, dans la mesure où il n’a pas une sexualité réelle épanouie, et le membre d’une ligue de vertu yankie qui s’offusque à la vue du moindre bout de chair, ils sont de la même engeance des batards capitalistes.
    D’ailleurs il existe un cinéma “porno-chic”, celui de David Cronenberg ou de David Lynch, grand public, encore plus hypocrite que l’industrie des images pornos “explicites”, qui vise à satisfaire les besoins d’individus “moyens” et fait la transition entre les ligues de vertu et les accros aux images sado-masos.

  • En avoir ou pas

    Avant que Me X. Serre-Pollet ne soit publiquement et unanimement reconnu du grand public grâce à l’affaire du “serial killer” Henri Bienfourny, les effractions de clôtures, conflits de garde d’enfant et autres attentats à la pudeur avaient été le pain quotidien du jeune avocat. Il avait ainsi rongé son frein au barreau de Nantes pendant dix longues années - le temps pour son physique de jeune premier de s’affermir et pour ses effets de manche de gagner en crédibilité.

    Grâce à un maton de la centrale de Nantes, ex-copain de promo, Serre-Pollet avait pu approcher Bienfourny dans sa cellule et le convaincre de le choisir, lui, plutôt qu’une célébrité comme Me Mollard. Puis il n’avait pas déçu son client, lui trouvant même des circonstances atténuantes inattendues en fouillant un peu dans son passé.
    En 2001 et 2002 en effet, Bienfourny avait été bénévole à la Banque alimentaire, avant d’en être chassé pour apologie de crime contre l’humanité. Un matin qu’il était seul présent pour la distribution des invendus du Centre Leclerc de la Beaujoire aux chômeurs du quartier, Marcel avait effectué toute la distribution avec un brassard frappé d’une croix gammée qu’il s’était procuré sur internet.
    L’habileté de Me Serre-Pollet fut de passer sous silence cet incident, ce geste aussi inexcusable qu’inexplicable, mais d’émouvoir cependant le jury avec l’engagement de son client dans cette cause humanitaire.
    Bienfourny évita d’écoper d’une incompressibilité aussi oiseuse qu’humiliante. Et vu qu’il avait quand même fait sept victimes, c’était une issue inespérée.

    *

    Selon le rapport de l’expert-psychiatre, le schéma criminel du “serial killer” Bienfourny le poussait à s’attaquer à de jeunes filles au pair danoises, qu’il séquestrait dans un vieux “blockhaus” de la côte Atlantique, théâtre de ses jeux de môme, puis de ses ébats amoureux d’ado ; ça durait quelques jours au cours desquels Bienfourny violait sa proie à plusieurs occasions avant de la noyer une nuit de pleine lune et de grande marée, et cela systématiquement, même si on comptait aussi une femme de ménage portuguaise de quarante-deux ans dans la série.

    L’extraordinaire perversité des crimes sexuels de Bienfourny auraient dû lui valoir le dégoût et la haine bien mérités des médias et des téléspectateurs, mais, curieusement, cette haine se focalisa sur son avocat.
    Etait-ce l’air insolent de Me Serre-Pollet ? Sa façon désinvolte de répondre aux questions des journalistes par-dessus la jambe et en mimant le geste de se dépoussiérer les ongles ? Toujours est-il que Serre-Pollet ne put bientôt plus poser les pieds sur un plateau de télévision sans être hué dans tout l’Hexagone, de Lille à Marseille et de Brest à Strasbourg. Hélas sans que cette désapprobation générale n’incite le moins du monde le cynique avocat à se remettre en question.

    Même lorsque Bienfourny fit paraître, après six mois d’emprisonnement seulement, un livre de confessions intimes intitulé - Morale du Tueur en série -, le scandale rejaillit sur son avocat, qu’on accusa d’avoir servi d’intermédiaire entre les éditions du “Gallinacée” et son ex-client. Me Serre-Pollet eut beau se défendre en jurant ses grands dieux qu’il n’avait jamais acheté un livre neuf de sa vie, et surtout pas un livre publié par le “Gallinacée”, il ne fut pas cru.

    *

    La mobilisation médiatique et l’indignation des Français autour de l’affaire Bienfourny étaient à peine retombées qu’éclatait à son tour le scandale de la chapelle Saint-Brandon. Un couple d’étudiants à la fac de Droit de Brest, Erwan Marcheznouar et Clémentine Legazoal, après avoir célébré une messe noire dans la chapelle Saint-Brandon, petit joyau d’art gothique des XIIIe-XIVe siècle, qui justifiait largement l’afflux de touristes venu chaque été pour la visiter, le jeune couple avait entièrement recouvert le monument classé d’inscriptions sataniques rose fluo, avant d’y mettre le feu en enflammant un bidon d’essence.

    On ne sera pas étonné que Me Serre-Pollet saute dans le premier train en partance pour Brest afin de proposer ses services à Clémentine et à Erwan. Compte tenu du succès de Serre-Pollet dans la délicate affaire Bienfourny et de la maigreur de leurs comptes en banques à l’un et à l’autre, les prévenus acceptèrent sans hésiter ses services.
    Me Serre-Pollet n’était pas de ces avocats qui conseillent à leurs clients de plaider coupable, comme en témoignent les larges extraits de sa plaidoirie reproduits dans un numéro spécial illustré de Ouest-France consacré à l’affaire des “Diaboliques de Tréguenon” :

    « Mesdames et Messieurs, Mesdemoiselles les Jurés, cher public… Sommes-nous, oui ou non, dans un régime authentiquement laïc et républicain ? Oui, en vérité, je vous le demande, la laïcité est-elle toujours le meilleur rempart contre la superstition et les croyances ésotériques de religions qui remontent jusqu’au Moyen-âge ?
    Au nom des seuls intérêts touristiques d’un canton, d’un département ou même d’une région, qui disposent par ailleurs d’une vue unique sur le large, faut-il reléguer les principes les plus sacrés à un rôle de figuration ? Les Droits de l’Homme à bénéficier d’une éducation entièrement dépourvue de préjugés religieux… ces droits inaliénables, en vertu de quoi devraient-ils demeurer virtuel pour celui qui vit dans l’ombre d’une chapelle et dans l’écho de son carillon dominical ? Comment opposer demain ce droit aux jeunes barbus fanatiques de l’Islam, qui réclameront de vos filles qu’elles soient vierges, si on ne le fait pas respecter hic et nunc !? Comment ??

    « (…) Ce que l’Etat n’ose pas faire, afin de ménager une certaine frange de la population qui vit encore dans les mythes du passé, Clémentine et Erwan n’ont-ils pas eu, eux, au contraire le courage de l’accomplir, malgré le vent, malgré les flammes, et malgré le vent qui soufflait sur les flammes, nous renvoyant ainsi à nos petites lâchetés quotidiennes ?

    A titre personnel, permettez-moi d’exprimer une opinion : il y a toujours eu une petite frange d’esprits réactionnaires tournés vers le passé obscurantiste de notre pays, freinant des quatre fers comme des brutes. Les mutations nécessaires au progrès, s’il avait fallu attendre l’assentiment de cette minorité de fanatiques, n’auraient jamais eu lieu. Ce n’est que mon sentiment, bien sûr, mais je voulais vous le faire partager.

    « (…) Permettez-moi donc, Mesdames et Messieurs, et Mesdemoiselles les Juré(e)s, de rendre hommage à la foi sincère de Clémentine et Erwan dans l’avenir de la laïcité. Au moins on peut dire qu’ils n’ont pas renié les principes qui leur furent enseignés il y a quinze ans à l’école communale Yves Coppens de Kerguenon où ils effectuèrent leur maternelle, côte-à-côte, déjà.

    D’ici dix, quinze, vingt ans, il n’est pas dit que le conseil municipal de Kerguenon - gardons-nous d’insulter l’avenir ! -, que ce conseil ne décide de baptiser une rue du nom composé de ce jeune couple de pionniers laïcs ici présent, sous vos yeux, dans le boxe des accusés. Souvenez-vous de l’affaire Dreyfus : il en a fallu du temps !
    En attentant, Mesdames et Messieurs, Mesdemoiselles les Jurés, je réclame pour mes clients Clémentine et Erwan l’acquittement pur et simple ! »


    Un tonnerre d’applaudissement suivit cette plaidoirie où Me Serre-Pollet avait mis, outre ses arguments, tout son cœur et tout son allant. Comme leur avocat le leur avait recommandé, Erwan et Clémentine n’ajoutèrent pas un mot, se contentant de regarder le Président du Tribunal droit dans les yeux sans ciller.

    Un arrêt de non-lieu fut d'abord rendu. Mais le syndicat d’initiative, ainsi que la municipalité, ayant demandé et obtenu un procès en révision, firent venir un avocat de Paris. Celui-ci argua du distinguo entre une saine “laïcité” qui ne nuit à personne, pas même au patrimoine immobilier, et le “laïcisme”, dérive dangereuse du droit qui entraîne les individus à se croire détenteurs d’un principe supérieur ; pire : à ne pas dissocier la forme du fond et à se priver par conséquent de la principale ressource du droit civil laïc !
    Le premier jugement fut cassé, Erwan et Clémentine finalement condamnés à un euro de dommages-intérêts et à ne plus s’approcher des édifices religieux du département à moins de cinquante mètres.

  • Pour un art communiste

    Comme le dessein de la Renaissance, la pensée de Marx repose beaucoup sur ses articulations.
    L’articulation entre Marx et les Lumières, l’articulation entre Marx et le religion, l’articulation entre Marx et la doctrine historique de Hegel, l’articulation entre Marx et l’anarchie… Toutes ces questions un peu subtiles ont été noyées dans le flou impressionniste de la pensée dite “post-moderne”.

    En France, des penseurs gnostiques comme Althusser, Derrida, ou même Sartre, sont pour partie responsables du voile épais de préjugés qui recouvre désormais la doctrine marxiste. La gnose elle-même, ce style n’est pas marxiste. Une partie de l’œuvre critique de Marx consiste en effet à démontrer que la gnose de Hegel, des gadgets comme le “sein” et le “dasein” par exemple, revêt l’apparence du mysticisme pour mieux dissimuler en réalité des syllogismes et des tautologies destinés à combler lacunes et contradictions.
    « Ce qui ce conçoit bien s’énonce clairement. » Marx prône un style radical, imagé, allégorique : par là il montre qu’il est bien l’héritier des Lumières. Le style de Marx c'est celui d'Alexandre qui tranche le nœud gordien.
    Althusser, Derrida et Sartre n’ont fait que recouvrir de mysticisme frelaté une praxis marxiste qui rejette ce langage romantique décadent.

    *

    A propos de l’articulation avec l'anarchie : Marx éprouvait de la sympathie pour le mouvement anarchiste de lutte contre l’oppression bourgeoise. Mais il s’oppose au raisonnement des anarchistes, primitif de son point de vue. Tout simplement parce que pour Marx l’Etat laïc totalitaire est le principal moteur d’anarchie, c’est-à-dire de dissolution de tous les critères humanistes. Les institutions de la société civile bourgeoise, la presse bourgeoise, les cartels bancaires, l’université bourgeoise, le droit bourgeois, la religion laïque des Droits de l’homme, voilà l’anarchie pour Marx.
    On entend parler parfois d’”anarcho-marxistes”, ou encore on entend dire que “l’histoire a donné raison à Hegel, et tort à Marx. Ceux-là ne savent pas lire. N’est-il pas tout à fait étrange d’entendre Ségolène Royal se dire antilibérale et se revendiquer simultanément de Tocqueville, penseur décadent ? Elle se revendiquerait de Maurras que ça ne serait pas plus illogique.
    On objectera qu’il s’agit juste de tactique électorale, de ne pas se laisser déborder par Besancenot. Certes, mais en tant qu’elle est mensongère, la propagande électorale est un facteur d’anarchie ; l’”opium du peuple” : on est en plein dedans.

  • Pourquoi Marx ?

    À propos de la convergence du catholicisme avec la doctrine marxiste, trois remarques supplémentaires :

    - Il ne vient à personne l’idée de dénoncer la collusion de la pensée chrétienne avec Platon, Aristote, Nitche, Maurras, Kant, etc., a priori. Le pape cite lui-même Kant comme un visionnaire, dont Péguy a au contraire souligné l’ineptie.
    Des maisons d’édition se revendiquant clairement catholiques publient même des biographies de Nitche où l’auteur n’hésite pas à étaler sa sympathie pour l’inventeur de la morale du super-héros. Michel Onfray, nitchéen médiatique, spécialisé dans l’anticléricalisme, n’en a pas moins reçu dans sa Normandie natale une éducation démocrate-chrétienne exemplaire, avant d’être initié aux arcanes de la philosophie par Lucien Jerphagnon. Bien sûr, s’agissant de la repentance de l’Eglise catholique, Onfray préfère la position de l’Inquisiteur à celle de l’accusé ; ça peut se comprendre de la part d’un super-héros comme lui, “best-seller” édifiant (il prend sur la couverture de ses bouquins une pose de super-héros laïc qui n’a peur de rien et surtout pas du ridicule.)

    *

    S’il fallait décerner la palme du paganisme à l’un de ces auteurs, Platon ou Nitche l’emporteraient évidemment sur l’auteur du Capital, loin, très loin de l’”éternel retour” ou de la mythologie de Platon. Alors pourquoi Marx ? Est-ce un hasard ?

    - Secundo, cette convergence entre le communisme et le catholicisme est d’abord contestée par des catholiques qui ignorent à peu près tout du marxisme. Benoît XVI a-t-il connaissance du rejet du césarisme par Marx ?
    Ou contestée par des marxistes qui ignorent à peu près tout de la doctrine catholique. Ce versant-là est plus intéressant, dans la mesure où Marx lui-même, s’il avait une bonne connaissance de l’Ancien et du nouveau Testament, voit la religion chrétienne à travers le prisme de Feuerbach, c’est-à-dire de la théologie protestante, même si Marx rejette en définitive la démonstration générale de Feuerbach, après un examen approfondi. Feuerbarch fonde d’ailleurs la morale laïque bien plus sérieusement que Nitche ou les divers existentialistes.

    - Enfin, il convient de remarquer que le communisme a été perverti par la même hérésie que le catholicisme au cours du XXe siècle, à savoir la religion laïque. Ce sont les principes laïcs, admis par une large majorité de communistes en Europe de l’Ouest qui ont ôté au communisme son caractère révolutionnaire et scientifique. Exactement comme l’intrusion de principes laïcs dans la doctrine catholique, malgré le syllabus de Pie IX et le combat d’écrivains comme Bloy, Péguy, Claudel, Chesterton, Waugh… a eu pour effet de transformer le christianisme en césarisme. Les démocrates-chrétiens continuent d’aller à la messe, de faire des retraites de Saint-Ignace, d’analyser les textes sacrés, mais pour le reste, beaucoup, en purs esprits s’en lavent les mains, quand ils n’apportent pas carrément leur soutien à l’Etat laïc, affirmant contre la lettre et l’esprit que le devoir d’un chrétien est en toutes circonstances… de payer l’impôt à César.

    *

    De la même façon que la religion laïque est fondée sur sa propre négation désormais, à savoir l’affirmation de sa “neutralité” (de l’usage du kantisme dans le fanatisme…), la religion démocrate-chrétienne est fondée sur sa propre négation elle aussi : le passage de l’Evangile de Matthieu où Jésus, en présence des Pharisiens, recommande de ne pas rendre un culte à César - d’une façon qui semble inaccessible à l’entendement de ces pharisiens, entre parenthèses.
    Le manifeste du Parti communiste en particulier, et Marx en général qui démystifie l’Etat, est plus conforme que la religion démocrate-chrétienne à l’évangile de Matthieu.
    On pourrait rétorquer que Marx, s’il s’oppose à la religion de l’Etat, critère qui permet de distinguer un régime totalitaire d’une dictature, fonde une religion de l’homme pour l’homme. Ça serait inexact ; Marx fonde une religion de l’“humanité”. L’histoire récente montre que cette religion de l’“humanité” s’oppose à la religion libérale des “Droits de l’homme”. En niant Dieu, serait-ce en passant par l’angélisme philosophique de Kant ou le “pari de Pascal” (Péguy a fait le lien entre les deux sophistes), on finit par nier l’homme. En réaffirmant l’humanisme, Marx peut-il nier Dieu ? Le fait est qu’il ne le nie pas. Ce que Marx nie, c’est l’aptitude de la religion à mettre en valeur la Vérité.
    Même si la volonté de restaurer l’esprit scientifique et artistique dans l’Eglise sous-tend en partie le récent concile de Vatican II, le moins qu’on puisse dire c’est que cette volonté a échoué ; le style gnostique des actes du concile le prouve. Cet échec est le même que celui de Mai 68. Cet échec a un nom : victoire du libéralisme, ou de l'angélisme.

  • De la Mie et des Jeux

    Deux symboles de l'inepte politique  d'experts-comptables baptisée pompeusement "libéralisme". Une idéologie qui fait désormais l'unanimité juqu'au PS, Bertrant Delanoë, Manuel Valls, Claude Allègre... sans doute une manière de rendre hommage à Mai 68.

    - La propagande en faveur des machines à pain, d'abord. Les médias capitalistes, "Le Point", "M6", se font un devoir d'inciter les familles,  en prenant la ménagère par les sentiments, c'est-à-dire en arguant d'une centaine d'euros d'économie par an, à acheter des machines à pain fabriquées par des esclaves en Chine, alors même que la boulangerie est un des rares artisanats qui survit au démantèlement de l'économie et qui créé des emplois dignes de ce nom dans tout le pays. Difficile de faire plus bête sur le plan économique. Bien sûr c'est au nom de la liberté que les classes moyennes ont le droit de manger de la mie de merde au lieu de manger du pain cuit. Il convient de rappeler ici que l'Education laïque a oeuvré, bien avant Sarkozy ou Jacques Attali, soyons équitables, à dégoûter les enfants de l'artisanat en particulier, et de l'art en général. Elle en a fait de parfaits petits spéculateurs et de parfaits petits mathématiciens - sans distinction de sexes.

    - La construction dans Paris du "building" de l'architecte assisté par ordinateur Jean Nouvel. On sait l'importance du tourisme dans la balance commerciale, et notamment l'attrait de Paris : pour les libéraux il ne fait aucun doute que ce sont des tours de béton et d'acier que les curieux viennent voir à Paris. Le monde entier nous envie Jean Nouvel, dont les cubes sont inégalables.

    Non plus "du pain et des jeux", mais "de la merde et du football".

  • Ligne de fracture

    Contemporain de Zola déjà, Léon Bloy, même s’il ne fut pas “dreyfusard” comme Péguy, dégoûté par la mise en scène médiatique, Léon Bloy a démontré qu’entre les libéraux laïcs (alors antisémites) et “les Juifs”, c’était un problème de concurrence, de jalousie, une jalousie qui préfigure celle du peuple allemand d’entre les deux guerres, exploitée par Hitler, non pas une question d’idéal.
    La métaphysique du peuple allemand (Heidegger), cette idéologie est parallèle à la métaphysique du peuple juif. C’est ce que Bernanos a voulu dire par : « Hitler a déshonoré l’antisémitisme. »
    Le judaïsme, qui était d’abord une religion, est devenu avant tout un nationalisme.

    *

    La volonté actuelle des démocrates-chrétiens (Sébastien Lapaque dans Le Figaro) ou de la revue Les Temps modernes, de déshonorer à son tour Bernanos ou Simone Weil, au mépris de l’histoire, est parfaitement logique. Elle vise à dissimuler la continuité des principes laïcs totalitaires, de la France de Drumont aux Temps modernes, en passant par le régime nazi.
    La gnose d’Heidegger, de Popper, d’Adorno, etc., inspirée du saucissonnage saucissonnage kantien, s’avère être l’outil idéal de mystification.
    Au passage, Les Temps modernes déshonorent d’ailleurs aussi Sartre, qui aurait certainement récusé cette propagande capitaliste, bien qu’il ait lui même mêlé à son engagement marxiste une bonne dose de fausse mystique existentialiste.
    L’idéologie laïque assigne désormais à Sartre le rôle que l’idéologie démocrate-chrétienne assigne à Chateaubriand ou à Mauriac, et qu’elle voudrait assigner à Bernanos, un rôle de fétiche, de gourou.

    La véritable ligne de fracture idéologique se situe entre le protestantisme, la religion laïque dans ses différentes versions, le judaïsme et l’islam d’une part, et le catholicisme, la religion orthodoxe et le communisme d’autre part.

  • CRS = SS

    Certes, comme l’explique Simone Weil dans Les Causes de l’oppression, la foi dans la religion laïque peut être sincère. La Nature toute-puissante imposait aux sociétés primitives une crainte superstitieuse ; l’Etat laïc totalitaire tout-puissant et ses institutions bureaucratiques tiennent eux aussi les individus en “respect”, leur inspirent la même sorte de crainte, le sentiment d’être le jouet de forces supérieures.
    Celui qui fait du soldat nazi, prêt à obéir aveuglément à son führer le seul exemple de fanatisme laïc, c’est celui-là qui est le vrai “révisionniste”.

    La France contemporaine fournit encore quantité d’autres exemples de ce panurgisme à grande échelle, de plans Marshall de la bêtise. On pense bien sûr au gaullisme ; mais le moins qu’on puisse dire c’est que les successeurs de De Gaulle n’ont pas enrayé la machine à broyer les consciences et que les héritiers de Mai 68 se planquent derrière un idéal qu’ils ont trahi. Ici Sarkozy vaut mieux que Glucksman, Cohn-Bendit ou Alain Geismar : il est moins hypocrite.

    *

    Les Yankis n’ont pas, hélas, le monopole de l’ignorance. Mais le régime yanki a perfectionné la propagande de Goebbels. Le sécularisme laïc et capitaliste que l’Allemagne nazie a échoué à imposer à l’Europe, les Etats-Unis ont réussi à l’imposer au monde entier.
    C’est le mérite particulier de Drieu La Rochelle d’avoir distingué très tôt, dès qu’il fut en contact avec la réalité nazie, la continuité entre le régime nazi et le régime yanki, lui qui était devenu nazi par anti-américanisme. En un sens Drieu s’est moins trompé que Malraux ou Bernanos ; c’est ce qui lui vaut la haine recuite des propagandistes.

    Un intellectuel comme Claude Allègre fait le chemin inverse aujourd’hui de celui de Drieu ou Bernanos, vite décillé sur le compte de De Gaulle et des gaullistes. A contrecourant de l’histoire. Allègre est pourtant bien placé pour constater les dégâts du capitalisme sur la science, qu’il combat d’ailleurs vigoureusement, par un étrange dédoublement de personnalité… pas si étrange que ça, en fait ; pour tout dire, cette contradiction est même très répandue.
    On la retrouve au cœur même du nazisme. Ce qui distingue le régime nazi du régime yanki, en effet, c’est que le premier, avant de s’abîmer dans une guerre totale capitaliste a accompli le socialisme réel, dans le cadre d’une nation, ce qu’aucun Etat n’est parvenu à faire dans l’ère capitaliste avant lui ni après. Le rapport que les libéraux entretiennent aujourd’hui avec le nazisme est bien un rapport de répulsion ET de fascination.
    La caricature de l’Allemagne nazie est plus que jamais nécessaire. Il convient pour la propagande laïque de ne pas entrer dans les détails de l’Histoire. Ainsi, en éludant “le point de détail”, Le Pen n’a fait qu’éviter le piège qu’on lui tendait pour mieux tomber dedans.
    La leçon de l’histoire du nazisme tirée par Drieu, c’est que la voie du capitalisme à visage humain, du capitalisme “réformé”, du capitalisme “socialiste” est une impasse. C’est une leçon qui vaut aussi bien pour Allègre que pour Le Pen, Sarkozy ou Ségolène Royal aujourd’hui, idolâtres à des degrés divers de l’Etat laïc républicain.

    *

    Bien sûr un des aspects les plus odieux de cette propagande laïque, c’est sa façon de faire de Tariq Ramadan, du régime iranien ou de l’islam en général des boucs émissaires, de les dépeindre en héritiers d’Adolf Hitler. On remarque que ce sont les mêmes qui sont à la pointe de la propagande anti-islamiste en France, Le Monde, Le Figaro, dont l’influence s’étend au-delà de leurs seuls abonnés, qui ne se gênent pas pour vendre des armes à l’Arabie saoudite.

  • Marx, Antigone et les crétins

    Le mérite revient à Marx d'avoir démontré de façon drastique comment, en fait, la laïcité est la religion de l'Etat totalitaire (In : Critique de l'Etat hégélien). Il fait voir en quoi la mystique de Hegel est une illusion (elle-même issue des ratiocinages gnostiques de Kant). Evidemment on aurait tort de croire que Marx s'attaque au penchant naturel de l'homme à s'organiser, à concevoir des critères et une hiérarchie. Tout au contraire, la religion laïque est pour Marx facteur d'abrutissement, un opium plus fort que n'importe quel autre, destructeur au bout du compte de tout art, de toute science et de toute politique - en un mot de toute spiritualité.

    Ce qui confirme la démonstration de Marx que la religion laïque mène au totalitarisme, c'est que bien peu d'adeptes de la laïcité aujourd'hui ont une notion à peu près claire des principes de Hegel, pourtant le plus solide théoricien de l'Etat divin. Ni même une notion claire de Feuerbach, le plus solide théoricien de la morale démocrate-chrétienne. Il est vrai qu'en France on a tendance à tout ramener aux Lumières, à Voltaire et à Rousseau, bien que le premier ait plutôt été inspiré par le régime de la monarchie constitutionnelle anglaise, qui n'est pas une théocratie laïque, et que le second ne soit en aucun cas un athéologien comme Feuerbach ou un admirateur de l'Etat-Dieu dirigé par un homme providentiel comme Hegel (On imagine mal Rousseau admirateur de Bismarck, Napoléon ou Hitler).

    Balzac de son côté a bien compris que le XIXe siècle et la société civile bourgeoise naissante qu'il a si bien peinte en humaniste, est non seulement marquée par la haine de Dieu mais également par la haine du siècle de Louis XV et de ses Lumières. Rousseau et Voltaire n'ont pas été enterrés, bien sûr, mais ils survivent à l'état de fétiches, comme Baudelaire et Balzac dans le petit musée de Proust. Au mieux on peut dire que Proust est un fétichiste qui a le bon goût de ses fétiches, comme l'égocentrique Sollers aujourd'hui. Mais ce fétichisme n'a pas grand-chose à voir avec le contenu de Voltaire, Rousseau, Balzac ou Baudelaire.

     

  • Créationnisme

    Le Breton Yves Coppens est un des docteurs de l'Eglise évolutionniste laïque. L'apparition de ce paléontologue distingué sur un plateau de télévision suscite immanquablement l'émoi des fidèles assemblés autour de lui, persuadés d'avoir affaire à une sorte de Newton des Temps modernes.

    En réalité Yves Coppens est-il beaucoup plus qu'un fouille-merde arrogant ? Il est permis d'en douter. Sur le plan scientifique, Coppens résume les incohérences de la prétendue science néo-darwinienne. D'abord parce que son hypothèse déterministe est beaucoup plus proche de la théorie de Lamarck que de l'invocation du Saint-Hasard qui permet de boucher toutes les théories bancales et dont les néo-darwiniens abusent, comme un mauvais charpentier du mastic.

    Alors même que la théorie évolutionniste n'a jamais été aussi équivoque, Yves Coppens, par des simplifications et des raccourcis, essaie de faire croire le contraire.

    Ensuite la trop-fameuse Lucy, qui doit son nom à une chansonnette des Beatles, cette Lucy n'est PAS une pré-humaine, mais, dans le vocabulaire évolutionniste, une de nos cousines. Or, tant que les évolutionnistes n'auront pas tracé un arbre généalogique établissant le degré de parenté des espèces entre elles, cette guenon n'est pas plus notre cousine qu'une girafe.

    De même une bonne partie des spéculations originelles de Coppens, inspirées par la répartition géographique d'une poignée d'ossements, a été infirmée par des exhumations ultérieures de fossiles qui mettent à mal la chronologie de Coppens. Malgré ces faits, qui auraient dû inspirer un peu d'humilité scientifique à Coppens, celui-ci continue de porter avec le même aplomb son masque de singe.

    Il n'est que de voir le "documentaire" (sic) évolutionniste, <I>L'Odyssée de l'espèce</I> pour comprendre qu'on a affaire à de la science-fiction, et une science-fiction beaucoup moins pertinente que celle de Pierre Boulle. Sous couvert de "vulgarisation", Coppens et Jacques Malaterre se foutent de la gueule du monde. Leurs hommes-singes sont presque aussi évolués que Jean-Pierre Elkabbach ! Aussi basses soient les motivations d'Elkabbach, il y a quelque exagération à le présenter comme le chaînon manquant.

    Dire qu'on en est là parce que le chimpanzé, lorsqu'il se gratte le nombril d'un air sceptique, est la métaphore parfaite du penseur bourgeois contemporain. Le surhomme laïc se démontre par le sous-homme singe. Le bon citoyen vacciné, qui se brosse les dents deux fois par jour et accompli son devoir électoral régulièrement a tout lieu, lorqu'il scrute un de ses lointains ancêtres bonobos derrière les grilles d'un zoo, de se sentir satisfait du progrès moral accompli.

     

  • Goebbels pas mort !

    En dehors du nombre des crimes de guerre perpétrés sous Lénine et Staline, de leur degré de barbarie par rapport aux crimes commis par les Allemands, les Britanniques ou les Yankis, on voit bien que la propagande libérale est en train d’essayer d’utiliser Lénine et Staline comme repoussoirs, comme elle a fait auparavant avec Hitler et les nazis, à grand renfort de cinéma.

    Sans le cinéma, instrument de propagande de la bourgeoisie par excellence, d’extrêmes simplifications comme celles qui consistent à transformer Hitler en père Fouettard, qu’on invoque dès qu’un citoyen quelconque prétend penser en dehors des passages cloutés, sans le cinéma produit par la société civile bourgeoise, de telles simplifications historiques n’auraient pas été possibles.
    La presse, au XIXe, malgré les arrestations ponctuelles, est encore beaucoup trop libre pour faire avaler ce qu’on nous fait avaler en 2008 par tous les orifices disponibles.

    Dans une société totalitaire comme la nôtre, le truquage cinématographique fait office de preuves objectives et la voix off des documentaires remplace la conscience morale individuelle. Dites-moi quelle chaîne de télévision vous regardez et je vous dirai ce que vous pensez…

    Sarkozy, en voulant couper la publicité sur les chaînes publiques ne prend pas une mesure “de gauche”, comme Mme Albanel a tenté de faire croire ; une mesure “de gauche” aurait consisté à décider de couper la publicité sur TF1. La différence entre les chaînes publiques et les chaînes privées n’est pas plus grande qu’entre la gauche et la droite, dont il faut s’approcher très près pour voir la différence.

    *

    Ce qui est intéressant dans le nouvel usage qui est fait de la caricature de Staline par la propagande, c’est qu’il impose une mutation. Jusqu’ici la religion inculquée aux enfants c’était que Staline et les Yankis avaient sauvé le monde de libre de l’Empire du Mal à cinquante-cinquante (en réalité les soldats yankis ont bien failli être refoulés dans l’Atlantique).
    Désormais il va bien falloir changer le scénario du film, faute de quoi les enfants ne pigeront pas comment un salaud de l’envergure de Staline a bien pu contribuer à “sauver le monde libre” ?!, ce qui est à peu près aussi difficile à comprendre que si on révèle qu’Hitler a enrôlé des milliers de juifs dans l’armée allemande… Bon sang, mais qu’est-ce qui peut bien pousser les gens à exiger plus de poésie ou de vérité que 2+2=4 n’en contient ? Ou plus d’art que le carré blanc sur fond blanc du génial Malévitch ? Voilà tout le drame des publicitaires et en même temps ce qui leur permet de vivre aux crochets de l’économie et de la détruire peu à peu.

    Pour modifier le script, il va falloir majorer au maximum le rôle des Yankis et des Britanniques ; on peut s’attendre à ce que Sarkozy, dans les années à venir, ne rate pas une occasion d’aller jouer à Big Jim sur le mur de l’Atlantique, aussi peu crédible soit-il dans ce rôle avec ses talonnettes… mais avec un appareil de photo ou de cinéma, il y a toujours moyen d’occulter ça.
    Lorsque j’entends causer un cinéphile, j’ai envie de sortir mon flingue. Ça peut paraître nazi de dire ça, mais ça serait oublier le rôle décisif qu’ils ont joué dans le développement de cette industrie.

  • Fiction totalitaire

    - Paraît que la destination préférée des adolescents en fugue, en majorité des filles, c’est Marseille, le quartier du Mistral où est tourné le feuilleton Plus belle la vie.

    - Besancenot, de la Ligue communiste révolutionnaire, congratulé par Michel Drucker sur le plateau de Vivement dimanche : si c’est pas une preuve que le patronnat qui finance la télévision sait se montrer compréhensif avec le prolétariat opprimé…
    Etant donné ma conversion au communisme, je pourrais avoir plus de sympathie, désormais, pour Besancenot que pour Marine Le Pen ; mais quelque chose m’en empêche.

    La mutation du PS n'est pas tant l'adhésion au libéralisme que le rejet de l’idéal révolutionnaire, pour s’adapter au vieillissement du corps électoral. Ça implique que le débat gauche-droite n’est plus qu’une guerre médiatique. De Delanoë ou de Ségolène, le meilleur scénario l’emportera. Ségolène ne peut mieux investir son temps et son argent que dans des cours de danses, de diction, des cures de rajeunissement.

    À côté de cette compétition à l’américaine entre bonimenteurs de gauche ou de droite, s’ils veulent incarner autre chose, Besancenot et Marine Le Pen n’ont pas d’autre choix que de se radicaliser ; Besancenot de se couper complètement de la gauche caviar dont les deux tiers des médias expriment les idées du matin au soir ; Marine Le Pen de se couper complètement de la droite saumon dont le tiers restant des médias exprime les idées. Plutôt que d'une fracture sociale, il vaut mieux parler d'une fracture entre les générations, de plus en plus difficile à surmonter par les partis politiques ; d'un côté le désir d'une mort lente dans des conditions de confort optimales, de l'autre le désir d'une vie réelle sans cinéma, moins confortable et plus libre.
    Comme la résistance à l’esprit capitaliste totalitaire, indissociable de la religion laïque de l’Etat, se situe autour de vingt à trente pour cent des votants, il est probable que l’un des deux candidats qui revendique l’esprit de jeunesse et de résistance, Besancenot ou Le Pen, est amené à passer à la trappe. Que le plus imaginatif l'emporte !

    Vingt à trente pour cent, c’est à la fois très peu, et en même temps un tel score est inimaginable dans beaucoup de pays.
    Malgré tous les signes de débilité mentale profonde, je ne peux pas m’empêcher d'observer que la France est mal préparée au totalitarisme. Même Plus belle la vie, les ficelles sont tellement grosses qu’il y a peu de téléspectateurs à prendre ce moralisme-là au sérieux.
    Même Sarkozy qui prend pour modèle la laïcité positive totalitaire, paradoxalement son immaturité est telle qu’il discrédite l’idée même d’État ; il la désacralise par son petit théâtre grand-guignolesque. Berlusconi passe pour un type sérieux à côté de Sarkozy.

  • Chanson française

    Quoi de plus bluffant que le succès de Cynthia Sanders ? De fait la jeune chanteuse française d’inspiration américaine n’était pas l’héritière d’une dynastie de chanteurs mais simple gérante d’un salon de toilettage pour chiens dans le Nord-pas-de-Calais ; elle ne pouvait se prévaloir d’aucune vedette de la chanson, aucun acteur, pas le moindre journaliste dans sa famille.
    Absolument rien ne laissait prévoir que son tube Carillons de bonheur, composé pendant ses RTT, cartonnerait comme il cartonna - 300.000 singles vendus en un mois ! -, sans d’autre soutien que son petit ami de toujours, Sébastien, en congé préparental d’éducation (Cynthia avait cessé de prendre la pilule depuis cinq mois et demi.)
    Une spontanéité qui faisait plaisir à voir !

    D’abord, grâce au bouche-à-oreille, tout le canton de B*** fredonna bientôt en chœur le refrain (“Carillons de bonheur battent dans mon cœur, lalala, pour Jo-hon-ny Walkeur !…”.) ; puis aucun night club à cent kilomètres à la ronde ne put débuter la soirée autrement qu’au son des “Carillons” de Cynthia Sanders.
    Cynthia ne faisait plus ses courses dans B*** sans s’armer de son feutre à dédicacer.

    La nouvelle star du cru brilla ensuite rapidement d’une aura nationale : les animateurs les plus populaires du PAF s’arrachaient Cynthia qui faisait souffler un vent de fraîcheur dans des émissions pourtant déjà peu suspectes de parisianisme.
    Internet se chargea enfin d’en faire une célébrité internationale, notamment dans la francophonie, et la barre symbolique du million de téléchargements sur son site Myface.com (hors hexagone) fut franchie.

    *

    Bien sûr un tel succès n’alla pas sans provoquer quelque jalousie. Par exemple de la part de chanteurs à textes qui avaient bossé dur pendant des années, se coltinant des questions sociétales brûlantes, produisant des chansons engagées dont l’utilité publique était reconnue unaniment, mais qui ne décollaient pas.

    Néanmoins les Français, eux, ne boudaient pas leur joie d’entendre et voir chanter Cynthia Sanders, et c’est ce qui comptait le plus aux yeux de la jeune femme. Peu importait que les bobos fissent la fine bouche et préférassent les calembours lacaniens de Ménabar ou les mélodies subtiles de Karine Khan.
    Pour preuve, le “remix” techno des “Carillons” se vendait encore mieux que la version originale.

    L’arrogance que certaines vedettes de la télé ne dissimulent pas toujours parfaitement, Cynthia en était complètement exempte ; c’était ce qui touchait les gens au plus profond ; elle était tout à fait simple et exprimait les meilleures intentions du monde : apporter un peu d’espérance aux Français dans une période où le pouvoir d’achat n’était pas rose, et composer un album complet pour la rentrée avec quelques titres en anglais.

    La gloire de Cynthia aurait pu n’être qu’éphémère ; elle aurait pu, tel un papillon de nuit, être happée par la lumière des phares d’une célébrité à laquelle elle n’était pas génétiquement préparée et périr d’une métaphore aussi banale… si un documentaire de la chaîne culturelle “Arte” sur Coluche ne lui avait pas donné l’idée, comme le grand comique, de se présenter à l’élection présidentielle à son tour.

    Comme pour Coluche, la campagne fut semée d'embûches, mais Cynthia était têtue et son tube faisait taire en cas de besoin tous ses détracteurs. De plus la France avait évolué depuis Coluche et les dernières crispations s'étaient relâchées.
    Au milieu de la campagne, alors que l’enthousiasme pour la jeune candidate semblait faiblir après la révélation par le Canard enchaîné que Cynthia n’avait même pas décroché son brevet des collèges ni payé ses impôts en 2006, elle obtint le soutien inattendu de Mgr Philistin, fringant cardinal primat des Gaules, qui sortit de sa réserve et de sa componction théologique habituelle pour donner une interview au Figaro.
    Le cardinal jugeait qu’il était temps d’en finir avec le préjugé franco-français à l’égard de la société de consommation, cause d’une apathie spirituelle déplorable ; et Mgr Philistin de souligner le côté “positif” et donc sain de Cynthia Sanders ; le tube de la chanteuse, quand le cardinal l’avait entendu pour la première fois au XVIe Festival œcuménique de la Part-Dieu, lui avait fait irrésistiblement penser au Cantique des cantiques, pour l'anecdote…
    Difficile de mesurer l’impact d’une telle interview avec précision, mais étant donné le net "retour du religieux" constaté par les instituts de sondage et l’audience du Figaro dans les maisons de retraites, grâce à l’idée de génie de son nouveau directeur d’imprimer en plus gros caractères, il n’était pas interdit de penser que la bénédiction du Primat des Gaules avait joué un rôle décisif, même si le cardinal aurait préféré manger sa mitre plutôt que d'avouer sortir du cadre de la laïcité, naturellement.

    Toujours est-il que Cynthia Sanders l’emporta au finish sur le président sortant d’une bonne tête au second tour des élections de 2012, entrant ainsi, comme on dit, dans l’Histoire.
    Qui aurait pu prévoir, quelques années auparavant, que le président Sarkozy serait battu sur son propre terrain, où il semblait pourtant inaccessible, le terrain du dynamisme et de la sincérité, de la présence charismatique dans les médias, du sens de l’innovation dans le respect de toutes les cultures, laïque ou religieuses, le tout dans un style certes un peu tape-à-l’œil mais résolument moderne ?

  • Les mains pures

    Le débat actuel sur l'Education nationale permet de voir que le véritable enjeu, derrière les prêchi-prêcha laïcs dont ni la droite libérale ni la gauche libérale (jusqu'à Besancenot) ne sont avares, ce n'est pas tant l'EDUCATION des enfants que la GARDE des enfants.

    La droite libérale insiste pour que les mères de famille puissent se délester en toutes circonstances de leurs enfants et se rendre sur leur lieu de travail - en général, que cette mère de famille exerce la profession de pute, de caissière ou de sage-femme, car dans la logique libérale le travail n'a pas d'odeur : il rend libre, point à la ligne.

    A ce motif, la gauche libérale n'oppose pas un programme éducatif, mais simplement une conception de l'éducation de masse un peu différente, un système dans lequel le pouvoir d'achat des professeurs se verrait revalorisé.

     On aurait tort de croire que ces deux logiques libérales sont faciles à départager ; elles sont en réalité complémentaires. Comme Marx l'explique, le capitalisme est pris dans la contradiction de la capitalisation et de la consommation. A propos des 35 heures, la gauche libérale a défendu le volet "consommation" (plus on travaille, moins on a de temps pour consommer) et la droite libérale le volet "capitalisation" (moins on produit, moins les cartels accumulent de plus-values).

    Il n'y a pas là un discours économique plus stupide que l'autre, les deux discours sont aussi stupides car ils ne tiennent pas compte de la réalité politique (en l'occurrence la montée dans le Tiers-monde de la haine vis-à-vis des Occidentaux, hypocrites esclavagistes munis de leur chapelet de droits de l'homme virtuels).

     Il convient de relever la position démocrate-chrétienne particulièrement cynique. Michelin ou Edouard-Leclerc dans le domaine du commerce international détaché de toute contingence morale - Xavier Darcos dans le domaine de l'Education nationale, qui défend en principe une Education nationale qui ne serait pas soumise aux lois du marché, tout en défendant en réalité une Education nationale qui répond d'abord aux exigences du marché. Le cours de l'évolution de masse suit le cours des besoins du marché français, particulièrement avide en employés du "tertiaire" désormais, en ingénieurs, informaticiens, boursicoteurs douteux, etc.

    La propagande de droite aime à se moquer du petit fonctionnaire en gris, à s'offusquer du désir manifesté par des cohortes de diplômés d'entrer (en sommeil) dans la fonction publique.

    La propagande de gauche se garde bien de remarquer que la carrière d'un chef de rayon yahourts ou d'un conseiller de clientèle bancaire est loin d'offrir un grand contraste et de ressembler à l'existence d'un super-héros nitchéen comme Indiana Jones.

    Le consensus est général pour laisser aux immigrés le soin de tenir les marteaux-piqueur sur les chantiers de Jean Nouvel ou autre crétin multimédaillé. Il faut surtout garder les mains pures.