À vrai dire je connaissais assez mal La Rochefoucauld, seulement à travers les petites anthologies de Marx et du parigo-belge t’Serstevens.
Et si, de loin, La Rochefoucauld paraît fin, de près il est plus épais. On se lasse assez vite de son aigreur trop systématique. Rivarol est beaucoup plus impertinent et La Fontaine bien meilleur poète.
Est-il toujours vrai aujourd’hui, pour prendre la plus célèbre des maximes, que l’hypocrisie “rend hommage à la vertu” ?
L’hypocrisie contemporaine est comme "redoublée" et ne rend plus hommage, bêtement, qu’à elle-même, un réflexe et non plus un calcul.
L’exemple du clown triste Jacques Attali me vient à l’esprit. On peut l’introduire dans certaines maximes :
« La fidélité retrouvée à François Mitterrand, dont Jacques Attali ne se sépare plus, n’est qu’une invention de son amour-propre pour attirer la confiance ; c’est un moyen de s’élever au-dessus des autres et de se rendre dépositaire des choses les plus importantes. »
Invraisemblable Jacques Attali qu’une journaliste félicite dans un cocktail mondain pour les quelques noms prestigieux qui l’entourent, et qui répond, impavide :
- Et encore, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg…
D’où je déduis cette petite maxime personnelle :
« L’orgueil est le seul vice qui ne requiert aucune intelligence. »
Lapinos - Page 127
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Stèle païenne
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Exotisme
Aux catholiques et aux communistes attachés à l’idée de science et de progrès vers la vérité s’oppose l’argument païen de l’éternel retour du soleil après la pluie et du printemps après l’hiver. Cette idéologie climatique, horizontale, devrait conduire à l’optimisme et ôter toute angoisse aux païens désormais ultra-majoritaires en Occident (l’idéologie démocrate-chrétienne est très proche du paganisme, l'“américanisme” primaire des démocrates-chrétiens le prouve, qui équivaut à la perte de toute conscience politique et artistique).
Au lieu de ça, curieusement, le païen est plutôt mélancolique qu’optimiste. Ce qui devrait le rassurer l’inquiète.
(Au passage j’en profite pour redire l’extrême stupidité de la thèse d’un pseudo prof de lettres, Antoine Compagnon, qui classe les auteurs en deux catégories, “modernes” et “antimodernes”, sans tenir compte de critères politiques assez élémentaires ni de l’évolution de la querelle des anciens et des modernes ; pour qualifier Rousseau, Baudelaire (!), Barbey d’Aurevilly, Céline, d’”antimodernes”, il faudrait démontrer que ces auteurs sont hostiles à l’idée de progrès et non qu’ils sont hostiles à l’idéologie dominante depuis le XIXe siècle. Cette thèse est quasiment “orwellienne”, qui revient à démontrer de manière totalement subjective et amphigourique que tous les écrivains dissidents sont à contresens de l’histoire.)
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Ce qui me frappe en tant que catholique c’est la dégradation de la littérature païenne. Autant La Fontaine, La Rochefoucauld, Diderot, impressionnent par la limpidité de leurs styles et leurs saillies, autant les auteurs païens plus récents craquent sous la dent comme une viande trop cuite. Je ne parle même pas de Nitche, qui me fait penser à ces cocktails improbables qu’on sert dans les bars américains ! Paul Valéry, il préfigure Finkielkraut, on a envie de lui botter les fesses ; Cioran fait vite l’effet d’un rabâchage ; la mélancolie, c’est comme un chewing-gum, on ne la mâche pas deux fois. Tant qu’à traduire les moralistes français, autant les traduire en roumain.
Le cas de Céline est un peu à part, vu qu’il est à la fois païen, communiste, nazi, anarchiste et “bloyen”, c’est sans doute en partie ce qui fait sa force.
Un tournant dans la mentalité païenne, c’est Darwin. L’amalgame entre l’idéologie climatique horizontale et l’évolution verticale de Darwin. C’est ce qui rend Nitche aussi bouffon, il ne sait pas sur quel pied danser ce Bacchus de salon de thé. Même le matérialisme de Diderot, emprunté à Lucrèce, coïncide mieux avec l’idée de cycle. En somme c’est l’idée de hasard, d’imprévu, à laquelle les néo-darwiniens sont revenus, après l’effondrement de la théorie de Darwin.
On comprend pourquoi le vieux paganisme bénéficiait de l’indulgence des autorités catholiques, ainsi que de Marx.
Benoît XVI ne devrait faire aucune concession, en revanche, au paganisme contemporain, complètement délirant et dépourvu de poésie. Lorsqu’un membre est gangrené, on le coupe, comme le figuier qui ne donne pas de figues.
Je me sens de plus en plus isolé au milieu des païens, étranger dans mon propre pays, et parfois je rêve, comme Bernanos, d’exil en Amérique du Sud, à Cuba, ou en Afghanistan au milieu des Talibans, ou bien à Moscou où l’avenir est peut-être en train de se jouer.
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L'Empire d'essence
La grossièreté du cinéma français fait ressortir la subtilité de certaines productions yankies. Plus belle la vie évoque même la politique-fiction de George Orwell, représente une sorte de France totalitaire scénarisée par BHL. Tous les clichés sont là. En dehors de quelques méchants qui ont des bobines d’électeurs de Le Pen, le soleil brille sans éclipse sur une société pluriculturelle métissée.
La proportion importante de fictions policières, elle, est caractéristique de la mentalité puritaine. L’état-policier, l’état-hygiénique, c’est un rêve typiquement bourgeois. Avec une fascination, une incrimination particulière des crimes sexuels tels que le viol, l’inceste ou la pédophilie (qui dans la civilisation classique grecque ne sont même pas des crimes, sauf peut-être pour les stoïciens, et encore…).
Les malversations de la “Société générale” ou de l'UIMM, l’étalage de la haine des nantis de Neuilly les uns pour les autres ont certainement des répercussions sociales plus graves que tel ou tel acte pédophile, mais cela le bourgeois ne le voit pas.
Bien sûr il y a des raisons politiques d’abord à la supériorité de l’industrie cinématographique des Etats-Unis. Seul un cuistre peut l’imputer à la richesse des studios d'Hollywood.
Les Yankis ne lisent pas, ou peu. Et la frontière entre le cinéma et la littérature n’existe pas, n’a quasiment jamais existé aux Etats-Unis. Cette fonction de propagande subtile, elle est jouée en France par une sous-littérature écrite, des écrivains comme Eric-Emmanuel Schmitt, Anna Gavalda, BHL, Marc Lévy, Frédéric Beigbeder, Patrick Besson, etc.
Patrick Besson ne demanderait pas mieux que d’être scénariste pour TF1, et il n’est pas si “cher” que TF1 ne puisse l’embaucher, mais il n'y pas encore de demande en France pour un produit impertinent, même si Sarkozy en rêve, pour pimenter ses soirées avec Carla.
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À côté de séries comme 24 h, Les Experts, Prison break, qui jouent sur des ressorts banals, la fascination commune pour le sexe et la violence, avec une dose de suspense et de patriotisme yanki en plus, et qu’on peut qualifier de “pornographiques” sans s’y attarder, d’autres séries plus psychologiques visent le public féminin.
Il faut garder à l’esprit que près de soixante-quinze pour cent de la production littéraire commerciale est épongée par des femmes ; si le bovarysme touche de plus en plus les hommes, c’est d’abord historiquement une affaire de femmes. Si la gent féminine fait des efforts hypocrites dans ce sens, elle reste assez imperméable à la débilité psychologique profonde d’un match de football ou de rugby.
Sex and the city est l’exemple le plus célèbre de ce genre de séries qui donnent dans l’épaisseur psychologique, sans équivalent à la télé française
Sex and the city est une sorte de publicité pour la société new-yorkaise, mais sans verser dans le manichéisme, avec un contraste qui rend la propagande plus efficace. Spielberg est plus efficace que Léni Riefenstahl : le public paie pour voir les films de Spielberg !
Reste que l’androgynie morale des héroïnes de la série Sex and the city, pour le public français amateur de jolies femmes, est assez dégoûtant.
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Plus récemment, dans la même veine "impertinente", la série Dr House évite aussi les clichés du cinéma européen, balourd jusque dans les analyses sociales de Chabrol, ou ontologiques de Godard.
Ce personnage de toubib handicapé, chef du service des cas épineux, qui appelle un chat un chat, et une chienne une chienne, en dit assez long sur la société yankie. À condition de ne pas porter sur cette série le regard d’une téléspectatrice française moyenne.
Cette série n’est bien sûr pas fabriquée pour le public français d'abord.
Ainsi le Dr House étant politiquement incorrect, il se doit pour les Etats-Unis d’être athée ; difficile à piger en France où ce sont au contraire les “intégristes” musulmans ou catholiques, les membres de l’Eglise de Scientologie, qui sont politiquement incorrects, l’athéisme étant banal sous nos latidudes.
Le comique de cette série est typique du nouveau comique bourgeois. Le Dr House fonctionne exactement de la même façon que les bouquins de Nitche. Il dit ce qu’un bourgeois peut entendre de plus choquant, tout en restant dans les limites de ce qu’un bourgeois peut entendre. Aussi politiquement incorrect soit-il, il ne faut pas s’attendre bien sûr à ce que le Dr House nie l’existence des chambres à gaz, par exemple, ou se mette à vanter les mérites de Ben Laden en tant que résistant à l’occupation israélo-américaine, ce genre de truc, même pour rigoler, dans le cadre d’une fiction, par pure provocation (le rire doit beaucoup à l'effet de surprise) ; l’émoi dans les chaumières serait trop grand et l’avenir commercial de la série compromis (Même si aux Etats-Unis elle fut diffusée en “pay per view” sur une chaîne du cable, ce qui est une donnée du cahier des charges.)
Le bourgeois est plein de petits tabous que le Dr House brise par surprise, et ça chatouille. La ménagère yankie est prête à ce que ses valeurs antiracistes ou féministes, la limitation de vitesse ou l’interdiction de fumer soient ridiculisées par un personnage de fiction, qui a l’excuse d’ailleurs d’être handicapé. De toutes façons ces valeurs sont superficielles et n’engagent à rien. Mais pas touche aux grands tabous bourgeois.
De même si Le Pen fait toujours des cartons en termes d’audience à la télé, c’est aussi parce qu’il y a des bobos qui le regardent juste “pour se faire peur”.
Dans la vraie vie, un tel personnage “socialement incorrect” a peu de chances de faire mouiller les gonzesses qui, dans la série, sont toutes au garde-à-vous devant House. D’autant moins que malgré ses fonctions de chef d’un service hospitalier, le Dr House est complètement raide.
Même s'il est un phénomène avant-coureur, le bobo en France ne donne encore qu’une faible idée du niveau de conformisme qui règne aux Etats-Unis. La diffusion par TF1 de ce genre de série prouve que le décalage entre le public français et le public yanki tend à s'effacer ; tous les efforts des politiciens libéraux et de la propagande télévisée vont dans ce sens.
Malgré sa volonté d’indépendance, son refus ferme de se plier à l’hypocrisie bourgeoise, le Dr House comme Nitche en définitive rentre dans le rang et le système en ressort encore plus fort. C’est bien tout le sens du mépris qu’un catholique ou un communiste réserve à la philosophie de Nitche : en définitive elle ne fait que renforcer les valeurs bourgeoises, son principe est antirévolutionnaire, comme le mouvement de Mai 68 qui, sous couvert de combattre le puritanisme et l’ignorance, n’a fait que les renforcer, ajouter de l'hypocrisie à l'hypocrisie.
Nul hasard dans le fait qu’un cochon de curé démocrate-chrétien, dans une basilique française en 2008, invoque les bienfaits de la morale de Nitche dans son sermon. Idem pour l’hédonisme laïcard ridicule de Michel Onfray ; c’est la même religion.
L’”identité française” est un concept crétin de philosophe sarkozyste ; en revanche le peu d’honneur français qui subsiste incite à botter le cul de tels énergumènes en soutanes, plus prompts à défendre les valeurs bourgeoises évolutionnistes et athées que les valeurs évangéliques.
Comment prétendre à l’universalisme chrétien lorsqu’on se berce d’illusions aussi ringardes ? Certes un type comme Tariq Ramadan, à défaut d’être moderne, est plus français qu’un curé démocrate-chrétien, étant donné qu’être français, ça se mérite, ce n’est pas un magot ni une rente de situation.
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Pour revenir à Dr House, c’est plus précisément l’apologie de la science (médicale) yankie à quoi cette série œuvre tout compte fait.
La science yankie, rappelons-le, en dehors de prolonger l’usage de quelques super-gadgets nazis (sans les nazis, les Etats-Unis seraient sans doute en faillite depuis longtemps), la science yankie n’a accompli aucune prouesse et ses missiles pourraient bien se retourner contre elle.
Depuis cinquante ans, quelle “potion magique” nouvelle les laboratoires américains multimilliardaires ont-ils élaborée ? Que dalle en dehors de produits dopants et de repeindre en rose des pilules vertes - même le “pot belge” est une invention belge.
(En sciences humaines, les Yankis nous ont “chipé” les trois plus grands raseurs que la France ait enfanté : Derrida, Robbe-Grillet et BHL ; si les universités yankies y mettaient plus de conviction et que le niveau d’anglais était un peu moins faible dans l’université française, le débauchage américain pourrait même contribuer à améliorer sensiblement le niveau moyen du corps professoral européen.)
Néanmoins, de façon dialectique, derrière la propagande, le scénariste de Dr House émet quand même une critique authentique. Elle est presque indiscernable puisqu’elle porte sur l’épistémologie.
Aux Etats-Unis, pour résumer, on peut dire que l’épistémologie stagne au “niveau Wikipédia”, c’est-à-dire le plagiat plus ou moins rigoureux d’encyclopédies solides dans un but prétendument humaniste, ce que certains qualifient (le plus sérieusement du monde) de “science démocratique”.
Cela donne le type de raisonnement statistique suivant : “Puisque 80 % des gens pensent que l’hypothèse évolutionniste de Darwin est exacte, eh bien c’est qu’elle ne peut pas être fausse.”
Les tirades du Dr House vont à l’encontre de cette épistémologie-là, et montrent plutôt bien ce qu’elle a d’arrogant et de niais à la fois.
Les assistants du Dr House incarnent la médecine académique, systématique, pleine de certitudes statistiques, et bien sûr carriériste. Sans le carriérisme à l’arrière-plan, on ne peut pas comprendre la science démocratique.
L’esprit imaginatif et ouvert, élitiste, du Dr House, au strict plan de l’épistémologie, l’emporte toujours dans cette série. Le Dr House a toujours raison et ses assistants ont toujours tort (Je précise que je n’ai pas vu la fin de la série et qu’il n’est pas exclu que le Dr House finisse cinglé ou avec une MST comme Nitche.)
Sur ce plan-là la série a valeur de pamphlet - ou de sous-pamphlet.
Si l’athéisme du Dr House est d’une banalité telle en France que même Sollers et BHL jugent plus branché de se draper d’une sorte de voile spirituel, en ce qui concerne son niveau scientifique le public français n’est plus très loin du public yanki. Je vous laisse conclure. -
Table rase du cinéma
Pourquoi le cinéma yanki est-il plus intéressant que le cinéma français ? Cette question ! Et pourquoi les souchis sont-ils meilleurs au Japon, le cidre en Normandie ou la bande-dessinée en Wallonie ?
Les Yankis maîtrisent, voilà tout. Ils maîtrisent une industrie qui a perdu depuis longtemps la légèreté du début.
Les Yankis ne confondent pas le cinéma avec autre chose, le théâtre ou la poésie, par exemple.
Un peintre qui confond la peinture avec la sculpture s’expose à des déboires. La petite peinture bourgeoise ratée de Cézanne s’explique ainsi, par un aveuglement, un manque d’objectivité. Un artiste moyen qui respecte le cahier des charges produira une œuvre plus solide qu’un artiste largement doté qui emprunte une voie de garage. Cependant Cézanne se prête bien au format carte-postale.
On range bêtement Picasso dans la catégorie des peintres abstraits, alors que sa fortune critique (démesurée) tient au contraire à son classicisme, que son éclectisme trahit, de sa rupture d’avec la doctrine cubiste ; chez Picasso c’est l’artisan qui domine et lui évite de tomber complètement dans le panneau tendu par la philosophie, à l’instar de Braque, Franz Marc, ou dans une moindre mesure Kandinsky. C’est l’objectivité de Picasso qu’il faut remarquer, confronter à l’extrême stupidité doctrinale de Klee. Le plus concret, le plus madré, l'a emporté.
Si les Yankis n’éprouvent pas de complexe à s’adonner au divertissement pur, contrairement aux Occidentaux en qui l’amour de l’art, le désir de s’élever par l’art - “La beauté sauvera le monde” - subsiste à l’état de nostalgie, c’est parce que l’horizon yanki ne va guère au-delà du divertissement. Même leurs musées sont conçus comme des parcs d’attraction.
Cette bestialité “évolutionniste” est liée à l’absence de conscience politique des Américains. Déjà Hegel disait que l’Allemagne n’était pas un Etat. Par un autre chemin que Hegel, j’en arrive au même constat à propos des Etats-Unis. Les Etats-Unis ne sont ni un Etat, ni même DES Etats. Ils sont une sorte de parenthèse dans l’histoire.
Les Occidentaux, eux, éprouvent toujours le besoin de recouvrir leur cinoche d’une esthétique imbitable qui n’abuse que les bobos. La mesquinerie des bobos est telle qu’ils doivent s’appliquer à faire passer Karl Lagerfeld, Paul Bocuse ou Zinédine Zidane pour des “artistes”.
S’habiller, manger, se divertir, voilà pour le cahier des charges du bobo.
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Gros carton des séries télé yankies en ce moment, notamment auprès des femmes. On leur prête plus d’épaisseur psychologique. “Epaisseur”, c’est un peu exagéré, disons que la clientèle des psychanalystes, des curés démocrates-chrétiens et autres charlatans est plutôt féminine.
Non seulement le public des séries, mais le format aussi est différent. Ce n’est pas la même pornographie, axée plutôt dans les formats courts sur l'exploitation du sexe, de la violence et du bovarysme. Déjà l’allongement moyen de la durée des films s’expliquait par la volonté de jouer sur un ressort plus psychologique, afin de séduire une clientèle féminisée.
La victoire des séries sur le cinéma est non seulement une victoire féministe mais encore une victoire commerciale, car vendue sous forme de dévédés, cette sous-littérature cinématographique s’avère très lucrative. D’une façon générale, les conquêtes féministes sont indissociables des "progrès" du capitalisme. L’idéalisme de Simone de Beauvoir s’est mué logiquement en cette sorte d’impavide cynisme dont font preuve aujourd’hui des féministes comme Caroline Fourest et Christine Ockrent en tête.
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Sartre a démystifié dans Les Mots le cinéma de son enfance - “Inaccessible au sacré, j’adorais la magie” - distraction de petit bourgeois puritain escorté par sa “Môman”. "Le tout transformé en rien”, car en effet du point de vue de l’artiste le cinéma ne crée rien, ne peut rien créer d’autre, dans le meilleur des cas, qu’une sorte de magie. La caméra n'est pas un outil, c'est tout un procès. La production n'est pas un idéal, ni même un plan, c'est une stratégie commerciale.
A l’inséparable et odieux couple formé par le féminisme et le capitalisme, il faut ajouter l’inséparable et odieux couple formé par le puritanisme et la pornographie.
Voyez le bourgeois s’extraire à demi abruti de la salle obscure où il est demeuré aligné en rang d’oignons pour subir patiemment un spectacle conçu pour des masses de voyeurs… Cette fête triste n’inspire-t-elle pas la pitié ? Plus encore que la famine de l'Africain. A ceux qui n'ont pas faim donnez-leur du pain et non du cinéma !
Vivement qu’un art communiste et orthodoxe, à la fois populaire et sacré, vienne refermer la parenthèse. C’est du moins là l’espérance des derniers catholiques, qui s’oppose radicalement aux spéculations et aux martingales des bâtards démocrates-crétins. -
Marcher sur la tiare
Ancien condisciple de Joseph Ratzinger, Hans Küng a tenté dans un bouquin de persuader le pape du progrès théologique que représente Hegel (en vain).
De fait il serait temps pour l’Eglise catholique d’abandonner les ratiocinages juridiques dépassés, inspirés de Thomas d’Aquin, et à plus forte raison encore l'épistémologie inepte de Kant, de Popper, ou l’existentialisme crétin. Même le ludion Sartre a jugé plus prudent de se convertir peu avant de mourir plutôt que de tout miser sur le néant.
Si l’Eglise catholique reste paralysée sur son grabat de préjugés démocrates-chrétiens, on peut penser que les catholiques seront balayés en Occident par le fanatisme orthodoxe, allié à la raison communiste. Il ne manque plus qu’un Savonarole, un saint Paul, pour redonner aux Russes entièrement confiance en eux et dans le destin de la Russie.
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Hegel anticipe notamment avec lucidité la métamorphose de l’art en une sorte de prurit philosophique qu'on ne peut éviter aujourd'hui, la moindre réclame aujourd'hui constituant un petit sophisme mesquin.
N’importe qui est un peu sensible est à même de comprendre le dynamisme spécial de Hegel. Mais les démocrates-chrétiens sont de véritables Philistins.
À la décharge de Benoît XVI, et comme Marx l’a remarqué, la pensée de Hegel reste marquée par l’idéalisme bourgeois. Hegel "marche sur la tête” et ses efforts louables pour être en prise avec la réalité historique auraient été insuffisants si Marx n’avait pas révolutionné la dialectique de Hegel. Par conséquent les propositions politiques, pratiques, de Hans Küng portent le plus souvent la marque d'un idéalisme idiot, pas très convaincant.
La vérité finit toujours par s’imposer par sa force au plus grand nombre ; ainsi le christianisme s’est imposé dans l’empire romain comme une traînée de poudre, les vieilles idoles païennes n'ont pas résisté au progrès chrétien.
D’une certaine façon le nouvel alliage entre christianisme et communisme a déjà pris en Amérique du Sud et en Russie. Quel intérêt le pape peut-il avoir à s’accrocher aux vieux fétiches de l’Occident bourgeois, la laïcité positive, les séries télévisées américaines, le cinéma français, la religion de la Choa, l’existentialisme ? Laissons ça aux abonnés du “Monde” et du “Figaro”, entrés en phase terminale. -
Un critique sinon rien
Un lieu commun qui circule dans le milieu douteux des critiques littéraires dotés d’une carte de presse et qui s’en servent pour aller au cinéma le dimanche, c’est que Philippe Sollers, comme romancier, la cause est entendue, ne vaut pas tripette… mais gare à la sagacité du critique Sollers ! Il sait même le latin, figurez-vous. Tiens donc, se pourrait-il qu’un romancier qui cache l’inconsistance de ses intrigues derrière la graisse d’une syntaxe et d’un vocabulaire rococo-bling-bling fasse un bon critique, après tout ? Comme je n’ai jamais entendu Sollers parler de littérature sur un plateau télé, jamais que de Nitche, de gondoles ou du tailleur taillé pour la victoire de Ségolène Royal, je profite de ce que je suis au BHV pour une bricole pour me faire une idée. Sollers a conscience que la littérature “passe mal” à la télé et qu’il vaut mieux causer d’autre chose, d’autant plus si on n’est pas un auteur. Il a moins conscience en revanche que le téléspectateur pourrait fort bien se passer de ses sketches un peu répétitifs. Le rayon “livres” est toujours désert au BHV ; il semblerait que les gays soient plutôt des bricoleurs hors-pair que de grands lecteurs ; à moins qu’ils préfèrent se fournir chez des libraires spécialisés. Dans la case “Sollers”, il y a son dernier titre. Peu mémorable. Derrière Sollers “invente”, outre Nitche, Dante, Confucius et Joseph de Maistre. Seul ce dernier sort un peu de l’ordinaire d’une bibliothèque municipale. Il y a chez Maistre quelques sensations fortes qui, comme chez Nitche, sont de nature à faire frémir à peu près tout ce que la clientèle de la Fnac compte de bas-bleus. D’Eric-Emmanuel Schmitt à Maistre, il y a comme un pic. Face à Maistre, Sollers est comme le bourgeois emmitouflé dans ses après-ski au pied des pentes de la Haute-Savoie. Un peu essoufflé. Hélas Sollers oublie de replacer Maistre dans son intertextualité. Maistre ne fait que ressusciter Machiavel au XIXe siècle, il fait office de camp de base à Baudelaire et à Bloy, avant les sommets. Le sommet de la poésie-critique pour Baudelaire, celui de la théologie-critique pour Bloy. Comme sujet à disserter, j’aurais plutôt proposé à Sollers, si j’avais été son éditeur : “Expliquez-nous pourquoi Baudelaire écrit qu’”il faut battre sa femme”, en évitant toute digression philosophique et les justifications psychanalytiques oiseuses.” Un autre lieu commun qui circule, c’est que Jean-Edern Hallier, lui, n’était pas un bon critique, et même un malappris qui n’hésitait pas à jeter les livres par terre, sans même les avoir lus ! Ici quelques bas-bleus tombent dans les pommes. Dire qu’Edern-Hallier aurait pu flanquer à la poubelle le bouquin de Littell en 2006 ! On l’a échappé belle. Edern-Hallier est mort, vive Sollers ! Il dit parfois des grossièretés, mais dans l’ensemble, jamais un mot de travers, le critique idéal.
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Extension du domaine de la lutte
En refusant de partager le même plateau télé que Le Pen, Sophie Marceau a donné un exemple de la résistance dont le milieu du cinéma est capable, au nazisme d'aujourd'hui qui ne dit pas son nom mais dont la vigilance des bobos nous garde. Pour ceux qui doutaient des valeurs morales du show-biz, les voilà édifiés.
Beau coup de pub en même temps, pour Sophie et Jean-Marie. Quand on peut joindre la promo à la morale, pourquoi se priver ? On ne va pas reprocher à Jean Moulin d'être une célébrité, pas vrai ?
Résistance aussi admirable à l'usure du temps de Sophie Marceau qui refuse, au prix d'un régime strict, ça se voit, d'être une victime de la mode. Si Sophie Marceau ne cède pas à la boulimie, elle viendra compléter la longue liste des boudins "light" qui, de Catherine Deneuve à Juliette Binoche en passant par Isabelle Huppert, refusent de quitter la toile. Résistance, j'écris ton nom !... au générique des films.
Dommage que Sophie Marceau ne soit pas avec Yann Moix. Ils formeraient un beau couple de résistants, je trouve, pour succéder à Lucie et Raymond Aubrac.
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Table rase des "Temps modernes"
Un lecteur catholique peut trouver étrange que Les Temps modernes, revue dirigée par Claude Lanzmann, “adoube” la théologie de Benoît XVI dans son numéro d’avril-juillet 2007. L'article est signé Jean-Claude Milner et intitulé avec une balourdise qui se veut humoristique "La Science, combien de divisions ?"
Jean-Claude Milner en quelques pages, sous le prétexte de critiquer l’ouvrage de Benoît XVI Jésus de Nazareth transforme Benoît XVI en une sorte de vicaire de la "religion de la Choa", ni plus ni moins.
Au deuxième degré, cet article qui se veut tout ce qu’il y a de plus sérieux a donc un côté burlesque. Au premier degré, il devrait, il doit heurter les catholiques - accessoirement les juifs orthodoxes pour qui la bible a une valeur plus grande que les films de Claude Lanzmann.
Le plus choquant n’est pas que Milner “tire la couverture à soi”, mais bien qu’il puisse trouver dans la théologie de Benoît XVI des arguments pour pouvoir procéder à cette récupération, pour transformer l’universalisme chrétien en particularisme ; la religion de la Choa est en effet une religion très très particulière.P. 334, § 2, un extrait qui révèle le mélange de morgue, de préjugés et de burlesque involontaire qui caractérisent les propos de Milner :
"Le Pape fait preuve de courtoisie à l'égard des grandes religions du monde ; il fait mine de n'en mépriser aucune, mais cela se ramène à de la pure et simple diplomatie. Le judaïsme, lui, ne relève pas de la diplomatie, mais du respect. (...)"
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Hélas si Benoît XVI n'est pas si fumeux que ne l'était Mgr Lustiger, tout de même, il donne prise à ce genre de prose.Jean-Paul Sartre n’est pas cité par Jean-Claude Milner, mais le rapprochement s’impose avec Benoît XVI. Leurs philosophies, à l’un comme à l’autre, sont très ambiguës. En dernier ressort, Sartre est apparu comme le prophète de l’égotisme bourgeois, ce n’est pas pour rien qu’il est le pape de la Rive-gauche, mais son idéalisme bourgeois est néanmoins traversé par le mot d’ordre communiste d’”engagement”.
De son côté Benoît XVI ne fait qu’opposer à ce qu’il appelle le “rationalisme” un autre idéalisme, et non pas une méthode concrète. Il jette le bébé avec l’eau du bain, la science avec le positivisme.
Et les sources d’inspiration de Benoît XVI et Sartre sont à peu près les mêmes ?
A son cocktail d'humanisme cartésien et de marxisme, Sartre additionne une dose de gnose médiévale, la muflerie philosophique d’Heidegger. Il refuse de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie, ce qui n’est ni très marxiste ni très humaniste.
L’idéalisme de Benoît XVI vient aussi de la philosophie allemande, de cette philosophie allemande romantique qui n’est pas sortie de l’obscurité du Moyen-âge et qui a donné des philosophes aussi décadents que Kant, Heidegger et Nitche, incapables d’émettre sur des sujets concrets autre chose que des niaiseries ou des préjugés, notamment des préjugés racistes. Les préjugés racistes doivent être condamnés pour ce qu’ils sont, non pas de la méchanceté mais de la bêtise. La bêtise de Kant, celle de Heidegger ou de Nitche ne doivent rien au hasard, pas plus que leur succès public.*
Il ne serait même pas étonnant que Benoît XVI protestât contre l’interprétation de Jean-Claude Milner ; de la même manière on peut être sûr que Sartre aurait protesté contre la métamorphose des Temps modernes en une sorte d’organe de la religion de la Choa, frisant souvent le rocambolesque, comme lorsqu’un universitaire yanki, Francis Kaplan, exécute Simone Weil parce qu’elle refuse l’érection de la Choa en culte et s’oppose à ce qu’on fasse d’elle une juive, parce qu’elle ne croit pas au déterminisme racial et ne veut pas d’autre religion qu’une religion humaniste et universelle.
Dans le dernier numéro des Temps modernes, un commentaire de la citation de Bernanos : « Hitler a déshonoré l’antisémitisme », est un sommet dans la mauvaise foi, le but étant bien sûr de faire de Bernanos par tous les moyens un crétin comme les autres.
Les temps modernes en définitive sont donc, au propre comme au figuré, le tombeau de la science humaine, qu’il faut ressusciter, contre des gugusses comme Milner ou Kaplan, contre Sartre, et contre Benoît XVI si c’est nécessaire. Si l’Occident ne le fait pas, ce sont les Russes communistes et orthodoxes qui s’en chargeront à notre place. Ils ont déjà du mal à dissimuler le mépris que nos fétiches leur inspirent. -
Politique d'intérieur
On a tort de croire que Ségolène Royal est cocue. En essayant de gagner du temps, en se positionnant comme un conservateur tranquille, préoccupé par l'agitation médiatique de Sarkozy, mais surtout pas au point de vouloir pousser le Président vers la sortie, François Hollande prouve au contraire qu'il n'a qu'un seul désir : baiser son ex. !
Jean-François Kahn, jamais à court d'idées comme Attali, imagine déjà François Fillon en "putchiste". Il est vrai qu'avec sa tête de fossoyeur, Fillon a tout pour plaire à une France au bord du cercueil, nostalgique des enterrements à l'ancienne.
Le "pschittt" de Sarkozy, le manque de crédit de ses opposants qui traînent des slogans libéraux usés jusqu'à la corde, tout converge pour que les petits partis politiques, Le Pen et/ou Besancenot, s'ils continuent d'incarner le refus de la politique libérale le plus radical, taillent des croupières à l'UMPS aux prochaines élections. Déjà au cours des dernières années le nombre des Français qui ne se sentent ni représentés par le PS ni par l'UMP n'a cessé de croître.
La politique libérale continue de creuser, lentement mais sûrement, le fossé entre les générations. La surenchère d'hypocrisie bourgeoise attise la volonté de révolte des victimes morales du capitalisme, et simultanément les plonge dans un état d'abrutissement qui les éloigne d'une conscience politique révolutionnaire, les transforme en militants de groupuscules épars et désordonnés. La zizanie, la haine entre militants islamistes, lepénistes, anarchistes, communistes-révolutionnaires, syndicalistes radicaux, leur enfermement dans des ghettos idéologiques, c'est bien sûr le résultat de la propagande libérale : "Plus belle la vie !" : à la fin l'hypocrisie est tellement épaisse que le bourgeois n'a plus conscience qu'il ment, à la fin l'hypocrisie du bourgeois se change en bêtise et en paralysie sur le plan politique.
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Créationnisme
Pour un savant ou un homme de Dieu, le hasard n'existe pas. Cependant dès l'instant qu'on commence à y croire, on est soumis à ses lois.
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Pas de Mai qui tienne
Merci à Nolleau et Zemmour d'avoir, sur le plateau de Laurent Ruquier, fait table rase du printemps de Mai 68 dès le mois de mars 2008, étalé au grand jour les mobiles bobos d'André Glucksman, pantin qui s'est jeté dans leur ligne de mire.
Liquidation précoce, et en même temps que de temps perdu !
Si Glucksman a encaissé pour toute la bande, c'est parce que c'est le plus bête. Une bêtise narcissique, "ontologique" comme on dit à la fac de Nanterre. Les soixante-huitards ont élevé leurs enfants pour en faire leurs propres reflets, sans la moindre ride si possible.
On peut penser qu'avec BHL, le règlement de compte aurait été plus "serré". Que les deux exécuteurs testamentaires de Ruquier auraient dû forcer un peu plus leur talent, esquiver un ou deux anathèmes, le genre que BHL sait dégainer plus vite que son ombre. Et puis BHL c'est pas le genre de crétin à sortir à découvert. Narcissique, mais quand même pas sarkozyste ! Et puis un sens aigu du western.
Mais c'est insuffisant. La génération suivante à laquelle j'appartiens ne peut se passer, après les truands, de liquider aussi les mercenaires Nolleau et Zemmour.
Si comme l'explique clairement Zemmour, la censure de la FNAC ne fait que prolonger la censure gaulliste, et le puritanisme bobo celui de Tante Yvonne, le corsage généreux de BHL n'est donc que le revers du costard-cravate strict de Zemmour. La logique, un journaliste du "Figaro" ne la pousse jamais très loin. La bourgeoisie gaulliste a engendré les bobos qui partagent avec leurs parents la peur et la haine de tout ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à la Révolution. Ils peuvent bien citer Bernanos, Bloy ou même Marx, au "Figaro", ça ne trompe que les abrutis.
Nolleau, lui, flingue pour le compte des socialistes. Gonflé de laisser entendre que la gauche libérale ne doit rien à la philosophie vaseuse de Glucksman & Cie. En termes électoral, la gauche doit au contraire tout aux soixante-huitards, qui se sont chargé de son "marketing" et de sa publicité, de faire passer des vessies pour des lanternes. La jeunesse emmerde Mai 68 !
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Ex-féminin
(Ill. de H.) -
Lévy oblige
Si on laisse "Arte" allumé en fond sonore et visuel comme je l'ai fait pendant deux ou trois jours, on se rend compte que deux types de programmes dominent sur cette chaîne. D'une part les documentaires sur la choa et tout ce qui tourne autour, d'autre part la diffusion de films classés X japonais, yankis, "vintages", comme disent les futurs ringards pour dire "démodé".
En outre, quelques docus qui tendent à prouver au public bobo d'Arte que Poutine est une sorte de nouvel Hitler doublé du fantôme de Staline, avec un zeste de monstre des Carpathes, et que par conséquent les valeurs auxquelles les téléspectateurs d'Arte sont profondément attachés, liberté, égalité, laïcité, etc., sont en danger immédiat d'être bafouée par l'ogre de Moscou. Ou encore des docus sur le Tiers-monde, pour dire tous les sentiments de solidarité que la Rive Gauche de Paris éprouve pour les populations affamées d'Afrique, victimes de la famine et des discours du pape.
Je ne sais pas si cette programmation reflète exactement les goûts personnels de BHL ? Sans doute manque-t-il quelques pages de publicité pour le dernier navet à la mode des éditions Gallimard ou Grasset pour que l'orgasme de notre Beautiful Héraut National soit complet.
Quel que soit l'état de béatitude de BHL, en regardant "Arte", ne serait-ce que d'un oeil, on pense immédiatement à cette expression de "pornographie mémorielle" dont l'usage avait valu à Dieudonné d'être invité sur tous les plateaux de télé, et puis subitement de se lasser.
Ce que j'aime particulièrement dans cette expression de "pornographie mémorielle", c'est qu'elle sépare judicieusement la sexualité de la pornographie, deux choses en effet complètement distinctes. Un raisonnement un peu critique et politique, le genre de raisonnement par conséquent particulièrement mal venu dans un régime bourgeois, permet de comprendre que la pornographie est en rapport avec l'image, photographique, cinématographique, télévisée, et pas spécialement avec le sexe. On peut même dire que la pornographie dégrade l'érotisme et donc que c'est la mort du sexe au bout du compte. La pornographie cinématographique et l'érotisme pittoresque sont deux ennemis jurés.
L'amalgame entre sexe et pornographie est logique dans la pensée bourgeoise, marquée par le puritanisme - de Freud, mais pas seulement. Puritanisme et pornographie cohabitent très bien aux Etats-Unis, et pour cause. Il est faux de dire comme une brochette de neurologues l'a affirmé récemment, dans Le Livre noir de la psychanalyse qu'il n'y a plus qu'en France qu'on gobe encore les bobards de Freud. Tout le cinéma américain ou presque, les séries américaines dont on parle beaucoup en ce moment, est imprégné des superstitions de la psychanalyse.
D'autre part le raisonnement puritain qui amalgame le sexe et la pornographie permet de "blanchir" le cinéma et la télévision, principaux vecteurs de cette pornographie. Aujourd'hui il y a même de sombres démocrates-crétins qui n'hésitent pas à prétendre que les séries américaines, au prétexte qu'elles sont plus subtiles que le cinéma français, ce qui n'est pas bien difficile, que les séries américaines peuvent être de véritables outils d'évangélisation (!). (Quand est-ce qu'un pape se décidera à mettre des bornes à la bêtise démocrate-chrétienne ?)
Un exemple pour bien me faire comprendre. Même s'il ne présente pas sa femme dans des situations sexuelles explicites dans son film, mais se contente de la montrer à poil pour aguicher, BHL a produit un film beaucoup plus "pornographique" que la plupart des films classés X, notamment que les films démodés à petits budgets qui ne visaient pas une exploitation commerciale la plus intensive possible. Je citerais aussi parmi les pornographes David Lynch, ou Catherine Breillat, Stanley Kubrick, ce porno-chic "bridé" qui permet l'exploitation commerciale dans le plus grand nombre de salles.
Les petits producteurs indépendants de films X ont souvent des motifs beaucoup plus naïfs et moins immoraux que ces sortes de maquereaux des temps modernes que sont Lynch et Breillat, au nom de la liberté et du féminisme, ça va de soi.
Certains petits cinéastes de films X veulent lutter par exemple avec leurs films contre le puritanisme de la bourgeoisie, qui est une réalité, ou ils veulent simplement "tirer leur coup" avec des gonzesses plus canons, il ne s'agit là que du bon vieux maquereautage ordinaire qui ne vise pas d'abord cyniquement la gloire ou les royalties. J'ai plus de respect pour la pute à l'angle de ma rue, jetée bon gré mal gré dans le ruisseau des relations et des sentiments humains, que pour Arielle Dombasle, Juliette Binoche, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, ou je ne sais quelle femme-objet de ce genre. Ce qui est appréciable chez un acteur de cinéma, c'est son reniement du cinéma, comme B. Poolevorde qui dénonce comme Brigitte Bardot la médiocrité de ce milieu, Yann Moix en tête, ou un acteur de cinéma qui se reconvertit dans le théâtre, bel acte d'amour.
Mais on peut très bien aussi qualifier des films ou des photos de "pornographiques", uniquement en raison de leur exploitation putassière de tel ou tel penchant humain, sans qu'il y ait aucune scène de nu ou de sexe. Le goût de la violence et la cupidité constituent d'autres angles d'attaque pour les pornocrates contemporains.
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Le poète, le prêtre et le soldat
(Ill. de H.) -
Misère de la bourgeoisie
Les deux mamelles de la bourgeoisie sont la bêtise et l’hypocrisie ; l’hypocrisie fut plutôt l’apanage de la gauche, sous la Ve République, et la bêtise ce qui distingua la droite. Ça me conduit à requalifier deux présidents, Chirac et Pompidou, plus hypocrites que bêtes, en présidents “de gauche” ; et Michel Rocard, dont la bêtise est d’ordre quasiment “syntaxique”, en Premier ministre “de droite”.
Nicolas Sarkozy, lui, sans qu'il y ait vraiment "calcul" de sa part, tète aux deux mamelles de la bourgeoisie simultanément, la bêtise (d'où sa sincérité) et l'hypocrisie (d'où son double langage et son double gouvernement). Tout l’intérêt de ce “type”, au sens critique, réside dans ce phénomène, qu'on a sans doute pas tort de comparer à l'élection de Napoléon III, qui a bénéficié à peu près des mêmes appuis que Sarkozy, notamment la démocratie-chrétienne.
Sarkozy est à la fois un enfant de la réaction gaulliste aux non-événements de Mai 68, une réaction bête et aveugle, et le parangon des nouvelles valeurs bourgeoises qu’on dit “bobo” pour mieux indiquer leur mièvrerie, qui reposent sur une hypocrisie, une fausse révolution, et plus profondément sur un mépris "libéral" de la science, de l'histoire, de l'art et de la politique. L'"existentialisme", qui fait office de "pensée" à la bourgeoisie, est en réalité un système de justification de l'hypocrisie et de la bêtise bourgeoise.
Sarkozy n’a donc pas beaucoup à forcer son talent pour mobiliser son électorat de vieillards ou de vieillards-nés à coups de slogans idiots, et à priver parallèlement la gauche libérale d’arguments solides contre lui, en la renvoyant à sa démagogie, son hypocrisie, domaine où elle décrochait jusque-là le premier prix.*
J’écrivais récemment à un pote yanki que seule la fréquentation de milieux marginaux, en France, rappeurs fils d’immigrés africains, militants du FN, moines bénédictins, militants de la Ligue communiste révolutionnaire, gothiques, altermondialistes, SDF, putes, délinquants incarcérés, militants anti-IVG, seuls les discours anticonformistes sont intéressants dans la France de 2007.
Tous ces marginaux qui pour la plupart ne sont pas représentés politiquement détiennent la vérité politique, de façon morcellée, ce sont les victimes de décennies d’hypocrisie et de bêtise, de mensonges bourgeois.
Sinon autant rester aux Etats-Unis, mon pote, où la bêtise et l’hypocrisie se confondent déjà depuis un moment. -
Le sacrifice de Cupidon
(Ill. de H.) -
Certifié non conforme
Tant que l'Internet ne met pas en danger le pouvoir libéral démocratique, le pouvoir libéral démocratique n'a pas intérêt à le censurer.
L’Internet est même au service de la propagande bobo. Si les régimes bourgeois occidentaux ne s’autolégitimaient pas, c’est pas les pays du tiers-monde qui le feraient à leur place !
De temps en temps, un bobo bénin vient rappeler au bon peuple des téléspectateurs que la censure n’existe pas ou presque sous nos latitudes évoluées, et qu’au moins, de ce point de vue-là, c’est un monde meilleur que le nôtre, en toute objectivité.
Comme par hasard ce sont toujours des gens qui n’ont rien à dire qui prétendent que l'autocensure n’existe pas.
Le fait que Michel Houellebecq soit passé au travers de la censure, comme Le Pen avant lui, n’implique pas que la censure n’existe pas mais au contraire la prouve. On se trompe si on prend Houellebecq pour un écrivain, un poète ; c'est un acteur politique qui est parvenu à soulever le couvercle de la censure et à narguer le système pendant quelques années.
On se souvient du tollé qu'il déclencha en racontant que le patron puritain de “Nouvelles Frontières”, Jacques Maillot, jamais avare d’un petit prêchi-prêcha, comme tout bon démocrate-chrétien qui se respecte, Jacques Maillot trempait dans dans le business du sexe en Asie.
Même "bronka" lorsque Houellebecq prétendit que les Allemands étaient des gens plus sympathiques que les Français, ce qui n’est anodin que pour un crétin.
Apparemment Houellebecq est retombé sous les fourches caudines de la censure démocratique depuis, même si son "pavé dans la mare", "Plateforme", est toujours d'actualité. C'est curieux, H. a l'air de douter que le prix Goncourt n'est qu'une garantie de finir dans les oubliettes de l'histoire, à brève échéance. D'une certaine façon, les provocations de Le Pen et de Houellebecq sont involontaires, spontanées. D'ailleurs aucun des deux ne remet vraiment en cause les fondements de la bourgeoisie, puisqu’on peut résumer Le Pen et Houellebecq à deux nostalgiques de la IIIe République, des anti-soixante huitards qui n’ont pas compris ou font semblant de ne pas comprendre que “Mai 68” n’était qu’un mouvement antirévolutionnaire conservateur. Seule la mode vestimentaire a changé. On comprend que Sarkozy ait pu séduire Le Pen et Houellebecq, qui ne font qu'exprimer un "désir de sincérité" presque enfantin. Ce sont des victimes de l'hyperhypocrisie qui se rebellent contre elle. Un peu comme Nitche.*
La censure démocratique n'est pas "positive", elle ne répond pas à des principes moraux, comme sous Louis XV ou dans un régime communiste, en Iran ; la censure ne se réveille dans un régime démocratique que pour protéger le pouvoir bourgeois de critiques radicales qui pourraient saper ses fondements économiques et politiques.
La traque de Marx à travers l’Europe à une époque où les pamphlets, les ouvrages politiques avaient un impact certain, cette traque n’est plus d’actualité depuis que la télévision et le cinéma ont pris le dessus. Rien n’est plus facile que de contrôler des lopettes décérébrées comme PPDA, Pujadas, Claire Chazal, toute la clique des animateurs télé. Pas besoin d’une conscience politique très développée pour comprendre ça.
La police de Louis XV ne décida pas d’arrêter Diderot et de le mettre au vert pendant quelques semaines parce que sa prose "libertine" menaçait le pouvoir royal, solidement établi, mais parce que le pouvoir estimait qu’il avait publié un ouvrage licencieux, immoral. Le pouvoir de Louis XV ne voulait pas se protéger mais punir un contrevenant.
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Sans même parler de la loi Fabius-Gayssot, dont on ne peut parler dans le détail sans tomber sous le coup de la loi et qui revient à promulguer l'histoire par décret (avec la complicité de la communauté "scientifique" européenne toute entière !) : la censure des ouvrages et sites pédophiles, qui a d'ailleurs elle aussi un aspect juridique délirant, cette censure a été mise en place sous la pression populaire, les manifestations gigantesques en Belgique qui ont déstabilisé le pouvoir belge, par exemple, et qu’on veut éviter de voir se produire en France. Le pouvoir politique bourgeois ne s'est pas avisé que la promotion de la pédophilie par le canal de l'Internet pouvait avoir des effets moraux désastreux, mais il redoute les manifestations populaires de protestation contre l'inefficacité de la Justice qui peuvent être dangereuses.Si le bourgeois a une hygiène, voire deux hygiènes par jour, histoire de récurer sa crasse virtuelle, il n'a pas de morale en revanche.
Si l'internet devait pour une raison ou une autre menacer les fondements du pouvoir oligarchique en place, si la propagande télévisée perdait de son influence au profit d'autres médias, c'est évidemment très loin d'être le cas aujourd'hui, y compris aux Etats-Unis, alors les avocats de la liberté d'expression se transformeraient immédiatement en censeurs zélés ; aucun doute n'est permis là-dessus. A titre préventif, un certain nombre de penseurs bourgeois aussi différents que Jacques Julliard, Bernard Stiegler, Emma Drucker, Maurice Dantec, dénoncent déjà l'expression d'une pensée "différente" sur le ouaibe, "négationniste", "anti-américaine", "pro-nazie", "révolutionnaire" ou "islamiste". Ces cochons exigent la censure de ceux qui ne peuvent pas s'exprimer publiquement ou très peu.
Et la probité, la déontologie du journaliste, rouage essentiel du système, n'est pas la règle : on ne rencontre cette probité et cette déontologie dans le journalisme que de façon exceptionnelle, à gauche comme à droite.
Ni les bobos de gauche de “Libération”, ni les ringards de droite de “Valeurs actuelles” ou du “Figaro” ne peuvent prétendre sérieusement à un autre titre que celui de valets du capitalisme, des grandes banques d’affaires douteuses ou des marchands d’armes cyniques. -
Portrait idéal de François Pinault
(Ill. de H.)
UN BOURGEOIS, ÇA TROMPE ÉNORMÉMENT.
UN BOURGEOIS, ÇA SE TROMPE ÉNORMÉMENT. -
Table rase de la critique
Une seule façon pour mesurer la censure objectivement, d’une époque en dentelles à une époque bottée, jusqu’à notre “cyber-époque” libérée : tâter la force de la critique.
Je ne vais pas vous assommer avec une thèse mais juste un exemple. Voyez Zemmour et Nolleau chez Ruquier ; on leur a dit qu’ils allaient jouer le rôle de critiques, disques, bouquins et dévédés, tout en vrac.
Eh bien il ne s’est pas passé beaucoup de temps avant qu’ils endossent le costume de baltringues, hués par le public au moindre pet de travers, dès qu’ils débordent le cadre strict du “politiquement correct”.
Puisqu’il n’est plus permis de dire du mal du physique des gens, c’est ce qu’on appelle la “censure positive”, je n’insiste pas sur les bobines de Zemmour et Nolleau, très pratiques pour tourner en dérision la critique, il suffit d’allumer la télé en pleine nuit pour le constater, entre Laurel et Hardy et une paire de têtes à claques (ça m’a échappé.)
Quand ils ne sont pas tournés en dérision et parviennent à distiller un peu d’acide - genre jus de citron plutôt que vitriol -, sur le petit Moix qui sait plus quel filon exploiter, à quel rabbin se vouer, sur la vieille maquerelle Breillat ou le vieux Chancel déphasé, c’est le tollé général et nos duettistes finissent par bredouiller des excuses et se laisser tirer les oreilles.
On imagine le barouf si Nolleau dénonçait sans périphrase les motifs putassiers de Moix ou de Breillat, ou montrait l’encéphalogramme plat de Chancel.
Bref, les critiques aujourd’hui, ce sont des marionnettes. Quant à la censure, elle, elle est carrément interdite. C’est bien le sens du certif de non-conformité délivré par la Fnac, non ? -
Silhouette démodée
(Ill. de H.)