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Mon Journal de guerre - Page 92

  • Veille de l'Archer

    Le poète, le prêtre et le philosophe. Chacun de ces trois augures assume dans sa langue ésotérique la fonction liturgique, au stade païen, puis chrétien, enfin laïc. Chacun domine son Etat et fourbit l'arche légale d'alliance de l'homme avec lui-même. Même le poète païen ne sacrifie aux dieux que pour mieux les tenir à distance et, en définitive, s'imposer sur la Nature.

    Des traces de ce sentiment subsistent chez Baudelaire, cygne noir polyphonique : païen, chrétien et philosophique à la fois. Et le plus grand mérite de Baudelaire est d'avouer sa possession, sa grippe aviaire. Sensés sont ceux qui prennent Baudelaire pour ce qu'il est : un suppôt ; perdus les autres, qui ne voient pas dans cet aveu l'éclair intermittent d'un fanal.

    La liturgie dit Shakespeare, du moindre rite tribal à la plus grande messe laïque, est toute comprise dans un cercle : le cycle statique de la vie et de la mort. La liturgie est faite de sperme, d'accouchement et de sacrifice. Si bien qu'on peut mettre en parallèle : sexe sado-maso et suicide pour temps d'amour prostitué, avec : tension liturgique pour temps de charité déchue.

    C'est pourquoi tous les progrès de toutes les Eglises viennent de l'extérieur, contre le clergé, pour qui la vie est comme la mort, et la mort comme la vie. L'Eglise catholique, jusqu'à sa mort, n'a eu le choix qu'entre s'adapter ou s'éteindre. La mort de l'Eglise ? Pour les âmes sentimentales, accordons-lui le reste de souffle de l'aïeule reléguée au coin du feu, qui ânone quelque proverbe et s'adonne à des rituels caducs dont elle seule connaît le secret. Mais le débat qui anime l'Eglise sur la liturgie retentit comme une oraison funèbre.

    La liturgie chrétienne est peut-être celle qui, à la fin du moyen âge, s'approche au plus près de la glace brûlante du paradoxe. Le chant grégorien est à la fois la plus sensée et la plus insensée des musiques qui prétend abolir le temps et s'élève vers le silence -chant qui vise le suicide du chant (Ezra Pound n'en est pas loin). Aussi ce choeur ne pouvait-il continuer de battre.

    "Que le prêtre en surplis blanc, sache de l'oraison funèbre être le chant du cygne, pour que le 'requiem' perde ses droits." (W. Shakespeare)

    Si la religion laïque est celle d'un Etat totalitaire, c'est parce qu'il n'y a rien en dehors d'elle.

    Après le temps révolu du poète, du prêtre et du philosophe, est venu celui du publiciste, dont la liturgie immonde, est transparente comme un cristal.

     

  • Sagesse des Anciens

    "Le rire est le propre de l'homme. Et de tous les types, celui dont la gorge se déploie le plus largement quand il rit, c'est le chacal."

    Corollaire : "Plus on est en meute, plus on rit."

  • Pour un art communiste

    L'helléniste-archéologue François Chamoux prétend que l'idée de "l'art pour l'art" est étrangère à la Grèce antique ; il cherche par là à démontrer la supériorité de l'artisanat. Cependant il a tendance à confondre deux choses : l'esthétique et la production artistique elle-même. L'idée d'art cultivé pour lui-même est une idée de la morale existentialiste, c'est-à-dire capitaliste, un slogan qui a commencé d'être forgé au XIXe siècle ; autrement dit l'idée de l'"art pour l'art" coïncide avec l'apparition et le développement de produits industriels, puis l'assimilation de ces produits industriels, la photographie par exemple, à l'art. Dans le sens où l'idée de "l'art pour l'art" participe de la propagande, cette idée est bien entendu étrangère à l'Antiquité. On voit bien d'ailleurs que la religion laïque est écartelée entre sa prétention à une grande spiritualité et l'évidence de son impuissance artistique, baignant dans le formol et la muséographie.

    François Chamoux tombe donc au moins en partie dans cette erreur, typiquement allemande, qui consiste à confondre les Grecs avec les Romains. L'art grec n'est pas entièrement imitatif, il échappe en partie à la vocation politique et religieuse que Virgile assigne à l'art pour déborder sur le domaine de la science. A la période moderne, aucune époque n'a mieux que la Renaissance réussi comme les Grecs à "dominer les Muses", celles-ci étant le symbole de l'art artisanal "stricto sensu" ou de la poésie. Comme l'histoire progresse contre le temps, l'art progresse contre la politique et la religion.

    L'idée de "désir mimétique" défendue par René Girard à propos de Shakespeare est proche de celle de Chamoux, le pédantisme en plus. Elle est également fausse dans la mesure où elle revient à assimiler la tragédie grecque, hauteur à laquelle Shakespeare prétend manifestement, avec le drame romain.

    Le stade ultime de l'imitation avant la mort, c'est le pastiche : les monochromes d'Alphonse Allais par exemple, railleries légères contre la peinture de paysage impressionniste. Les monochromes de Soulages, Klein ou Malévitch en revanche, parodies vides de sens, sont les produits du totalitarisme politique.

    (Il est vain comme Chamoux de chercher à comprendre les Grecs à travers Socrate et Platon, puisque comme l'établit François Bacon, Platon et Socrate "ne se connaissent pas eux-mêmes" en quelque sorte et incarnent la décadence grecque.)

     

  • Les Mystères Bacon

    Emilienne Naert, à propos du traité de Hobbes "De la Nature humaine" (1640), tissu de spéculations archaïques, note :

    "Il y a aussi un air de parenté entre l'athéisme et l'anti-christianisme de Hobbes et de d'Holbach."

    De fait il est surprenant de constater à quel point Hobbes, qui fut pourtant son secrétaire, renverse complètement la théologie occitane de François Bacon pour fonder ou refonder le "judéo-christianisme" en plein XVIIe siècle. Hobbes n'a conservé de Bacon que l'argumentation contre l'exégèse romaine de R. Bellarmin (exégèse ô combien délicate du "Tu es Petrus...")

    Ce que ne dit pas cette Emilienne, c'est que cette division en deux branches du "judéo-christianisme", l'une athée, l'autre pas, subsiste encore aujourd'hui. Michel Onfray d'une part, par exemple, et Rémi Brague de l'autre. Contemporain de d'Holbach, Diderot est aussi un bel exemple de janséniste athée, dont la particularité est de prendre toutes les théories libérales pour argent comptant, à l'instar d'un Tocqueville un peu plus tard.

  • Gaîté

    L'appétence de certains gays pour le mariage ne laisse pas de faire sourire, y compris d'autres gays. Exactement comme la prétention de certains chrétiens à mener une vie bourgeoise peut en faire rire d'autres ; rire jaune.

  • Prédateurs en série

    Dans un reportage à la télé, une jeune femme blonde au regard bleu, qui a l'air un peu paumée, est présentée comme une "prédatrice sexuelle" (sic), sous prétexte qu'elle a plusieurs amants, qu'elle couche avec plusieurs types parfois dans la même semaine.

    Une "prédatrice sexuelle", pas moins. Comment les moeurs de Colette seraient-elles présentées aujourd'hui à la télé ? Comme celles d'une "serial partouzeuse", quelque chose comme ça ? On manquerait de superlatifs. Peux pas m'empêcher de repenser à ce jeune commando de chasseurs alpins, dont la mièvrerie sentimentale -on le voyait envoyer des bisous virtuels à sa fiancée par internet- était exhibée il y a quelques semaines dans un autre reportage. De nos jours les suppôts de Satan qui balancent des roquettes ou effectuent des tirs de mortier sur des civils mangent des fraises tagada à quatre heure ; ça ne rassure que leurs parents.

  • République et Béotie

    Admiratifs devant des cratères et autres récipients grecs, mon pote et moi convenons que Picasso a tiré le meilleur de son oeuvre de la puissance de synthèse de ces artisans de l'Antiquité dont l'art exprime le mépris des effets spéciaux. De même, si on compare la statuaire de Rodin avec celle d'un bon sculpteur grec, Rodin paraît immédiatement académique et sentimental.

    Nous convenons aussi que la mythologie grecque pourrait fort bien être enseignée au collège où elle serait beaucoup plus attirante et utile que n'importe quelle autre matière, permettant de transcender plusieurs disciplines... MAIS, car il y a un mais, c'est impossible car le cadre institutionnel républicain s'en trouverait rapidement ébranlé. Et même, à mes yeux, bien plus vite que n'importe quel dogme chrétien ; c'est une évidence à laquelle mon pote est trop "hégélien" pour pouvoir souscrire. Pourtant les ennemis scolastiques puis jansénistes de la mythologie grecque, qui s'accommodent beaucoup mieux du culte des ancêtres romain ne sont autres que les ancêtres de la République laïque athée à qui le judéo-christianisme a fourni (la philosophie naïve de Feuerbach le prouve) toutes les pièces du raisonnement anthropologique. La forgerie du "droit naturel" ou de la "morale naturelle" est typiquement le genre de spéculation débile léguée par le christianisme à la religion laïque.

  • Saint Marx

    C'est précisément parce qu'il est "sans foi ni loi" que Karl Marx est le plus grand théologien chrétien depuis Shakespeare. La question de la loi est une question juive et la question de la foi se pose quand la loi est appliquée hypocritement. Même pour Léon Bloy ou Claudel, qui louchent pourtant un peu vers le moyen âge (obsession matrimoniale de Claudel), la question de la foi n'est pas moderne.

    En quelque sorte il n'y a pas de pensée historique sérieuse qui se préoccupe des questions de foi. La question de la foi est une question d'autruche.

  • Saint Marx

    Le péché que le raisonnement politique ou social exonère, c'est le péché d'envie ou de jalousie, c'est-à-dire le péché de Satan. On le voit à travers l'exemple de la circonstance atténuante du crime dit "passionnel" en droit laïc, non seulement absurde mais scandaleuse sur le plan chrétien. A travers le droit ubuesque dit de la "propriété intellectuelle" également.

    L'envie de Marthe, soeur de Lazare, lui vaut une remontrance de la part de Jésus. Marthe incarne une conception archaïque de la religion ; elle préfigure aussi ce monstre spirituel qu'est le judéo-christianisme.

    C'est parce qu'il est "antisocial" que le communisme de Marx est saint ; et la notion de "doctrine sociale" inventée par les chrétiens libéraux est, elle, en revanche, diabolique, au-delà même de l'entourloupe patronnale qu'elle représente.


  • Eyes to eyes

    Preuve de la supériorité de l'Angleterre : même chez les auteurs les plus éloignés de mon camp comme Hobbes, je trouve quelque chose à glaner, tandis que Nitche ou Proust, je les hais sans réserve, comme des cadavres au parfum tenace.

    Je ne partage aucune des idées de George-Bernard Shaw, et pourtant, "Ne rien dire qui n'irrite pas.", voilà un leitmotiv littéraire presque "shakespearien" !

    A sa façon d'entretenir chez ses alliés yankis la plus profonde stupidité, on reconnaît la perfidie satanique de l'Angleterre, qui jamais n'a su se montrer à la hauteur de ses prophètes.



  • Définition

    Le "populisme", dont Le Pen a longtemps eu l'apanage médiatique, consiste à se foutre de la gueule du peuple et le mener en bateau. On ne peut donc mieux dire que le suffrage universel est populiste, surtout après l'engouement à l'échelle mondiale parfaitement spontané pour Barack Obama.

  • Pop art

    "J'ai un piège à fille qui fait crac, boum, hue, etc." : slogan que j'ai souvent entendu dans ma vie prononcé par des types qui n'avaient pas pigé que le piège, c'est la fille, justement. "Women beware women" de Middleton est désormais unisexe.

    Plus profondément le slogan traduit le désir d'être pris au piège. Il y a des proies qui cherchent leurs prédateurs.

  • Climat écolo

    La doxa écologiste ne va pas moins à l'encontre du christianisme que le capitalisme. L'écologisme n'est en effet qu'un raisonnement alternatif sur le mode du raisonnement spéculatif capitaliste, aussi inepte sur le plan économique.

    Face à la faillite du système de rackett financier, on a pu voir le baron Serpillère de Wendel retourner sa veste et réclamer des subsides directement de l'Etat, faire preuve d'un pragmatisme en bronze. A-t-il modifié le cours du capitalisme pour autant ?

    Il y a beau temps que Marx a relevé que le courant idéologique libéral est de type alternatif. Capable de prouver l'existence de Dieu aussi bien que celle du Néant, en fonction des circonstances. A l'écart de la science puisqu'il s'agit d'un procès rhétorique.

    Des alternances du type "croissance-décroissance", le capitalisme en a connu et fait subir d'ailleurs plusieurs déjà, sans s'écarter jamais de sa résolution ultime : la guerre.

    En matière de climat c'est le même brouillard scientifique du côté écolo comme du côté capitaliste. Des deux côtés on gobe la théorie du battement d'aile de papillon, dont Claude Allègre use d'ailleurs habilement à la télé pour saper l'argumentation du parti opposé, sachant pertinement le rôle de bourrage de crâne que jouent les médiats, et que celui qui s'en servira le mieux sera le plus grand savant.

    La théorie revient à projeter sur la nature un modèle "f(x)" dans lequel "x" n'est qu'un reflet statistique de la nature elle-même, suivant la technique dite du "morphing" ou de l'anamorphose, gadget qui n'a rien de scientifique mais traduit la même croyance superstitieuse dans le hasard que celle de Sganarelle dans le moine bourru.

    De part et d'autre le même mensonge statistique, donc, au service d'une morale laïque complètement grotesque ; une morale qui consiste à voir dans l'homme une sorte de gestionnaire du cosmos, lui-même configuré à l'échelle des préjugés animistes de la pseudo-science laïque.

    Un climat d'apocalypse, en somme.

     

     

     

     

  • Goebbels pas mort

    Léa Drucker -du team Lagardère- réussit le tour de force sur "France 3" de proposer en plein fiasco capitaliste des émissions à la gloire des "200 familles" de maquereaux qui ont réduit la France à ce qu'elle est désormais, une vieille pute à fanons qui ne sait plus à quel client se vouer pourvu qu'il ait un peu de liquidités sur lui.

    La baderne Max Gallo, social-traître exemplaire, s'est porté volontaire pour passer à la chaux le monument funéraire à la gloire du passé industriel. Le chant du cygne entonné par un vieux gallinacé déplumé.

    Après les "200 familles" et les guerres pour s'approprier les richesses minières et manoeuvrières de la Lorraine ou de la Ruhr, le volumineux totem de Gaulle fait partie des incontournables "standards" de la France des supermarchés et des manufactures d'automobiles (rebaptisée "France éternelle" par Max Gallo) qui justifie tout un numéro. Lapsus de Daniel Rondeau, dont c'est le seul talent : "La jeunesse a raté de Gaulle !"

    Comme si jeune voulait forcément dire con ! si on fait des comptes un peu sérieux, il n'est pas difficile de conclure que le bilan de de Gaulle est dérisoire :

    1. Rien ne s'apparente dans la carrière militaire de de Gaulle de près ou de loin au tour de force stratégique qui a permis à Franco de conquérir l'Espagne à partir de rien.

    2. Sur le plan de la manoeuvre politique, Churchill surclasse tous ses contemporains. Il réussit même le tour de force d'être encore plus laid que de Gaulle.

    3. L'action politique de de Gaulle n'a pas bien sûr eu les conséquences de celle de Lénine, Staline, Mao, ou les banquiers yankis.

    Mais le tour de force de la propagande consiste surtout à faire de de Gaulle un édile aimé du peuple, mensonge presque aussi grossier que celui de Cohn-Bendit à propos de la haine entre les peuples allemand et français ; de tous les dirigeants de l'après-guerre, de Gaulle est sans doute de tous celui qui a été le plus impopulaire ; dans son parti dévoué aux cartels, il a même été avantageusement remplacé par le poète-amateur d'art Georges Pompidou.

    Il y a sûrement une raison liée à sa laideur physique dans le rêve ubuesque de de Gaulle de s'incarner dans un autre corps, complètement ésotérique qu'il appelle "la France", et qui n'a jamais existé que dans la fantaisie de petits garçons qui jouent aux soldats de plomb dans leur enfance.

  • A confesse

    Vu que son paternel a profité de l'Occupation pour spolier des Français d'origine juive de leurs biens, le peintre Garouste se voit contraint de pratiquer un art entièrement fait de repentirs.

    On pense à la définition donnée par Virgile de l'art romain entièrement au service de la Politique. La Politique a comme l'Enfer la forme d'une hyperbole.

  • Fier d'être miso

    "WOMEN BEWARE OF WOMEN!" : je tombe sur ce magnifique slogan misogyne de Thomas Middleton (1580-1627). Cette misogynie-là est sensiblement différente de la misogynie du penseur judéo-chrétien abusé par sa mère, misogynie parfaitement réversible car passionnelle, dont Nitche ou Freud fournissent des exemples presque parfaits ; Nitche avoue que seule sa mère ou sa soeur aurait pu le faire renoncer à l'idée d'éternel retour... aveu d'aliénation stupéfiant. C'est peut-être seulement la soeur de Nitche et non le philologue boche lui-même que séduisit le parti nazi, mais étant donné que la soeur de Nitche a engrossé son frère de l'idée d'éternel retour,  ça revient au même.

    J'interprète le goût assez répandu dans le clergé chrétien comme laïc (M. Onfray) pour la morale sado-maso de Nitche comme un travers pédophile. Benoît XVI est d'une extraordinaire naïveté lorqu'il entend prévenir les débordements criminels du clergé par l'examen psychologique : il faut déjà pour gober la théorie de Freud avoir soi-même une inclinaison incestueuse ! Le serpent se mord la queue.

    Tandis que la misogynie de la Renaissance est évangélique, provient de la confrontation entre Marthe et Marie, la misogynie de Nitche est, elle, "vétéro-testamentaire", comme disent les théologiens contemporains dans le vent.

    Dans la société patriarcale du XIIe siècle, encore plongée dans l'obscurité, l'historien Georges Duby a souligné que se nouait souvent une relation ambiguë, notamment dans les milieux aisés, entre la mère et son fils (d'où dérive l'erreur d'interprétation du mythe d'Oedipe par Freud, fasciné qu'il est par la relation entre Jocaste et Oedipe, quand le mythe souligne au contraire ce que la morale doit à la politique, et vice-versa, ce que Shakespeare a parfaitement saisi - le correctif de Jung est d'ailleurs à peine moins inepte que l'inversion de Freud). Cette relation ambiguë semble d'ailleurs déterminer la théologie de saint Augustin. Oedipe n'est qu'un être parfaitement normal, enfermé dans le temps, dont il devine fort bien la définition énigmatique proposée par le Sphinx. Le Sphinx est pris parfois malgré sa signification démoniaque comme un symbole du potentiel de la pseudo-science pyschologique. En réalité c'est avec plus de sagesse que les Romains en ont fait un symbole de la tyrannie. La pseudo-science pyschologique de Freud n'est autre que le produit d'une politique tyrannique. Si Freud est aussi animiste, beaucoup plus encore que Thomas d'Aquin, c'est parce que l'âme s'avère le médiat idéal de domination pour un Etat totalitaire. Le mythe grec est beaucoup plus lumineux à cet égard que la superstition freudienne. Du régime dynastique de Thèbes, il révèle le sous-bassement, qui n'a rien d'idéal. Le raisonnement politique est fondamentalement génital et incestueux, comme Aristote le pense contre Platon, et il ne sort pas de ce cercle. Croire que le capitalisme, nettement inspiré par le modèle génital, est inéluctable, revient à enfermer la logique humaine dans le seul raisonnement génital. De cette façon Nitche comme Freud se retrouve en-deça du bien et du mal quand son voeu était de surmonter le rapport moral, abrutis incapables de comprendre qu'il n'y a pas de raisonnement plus politique que le raisonnement animiste du membre d'une tribu anthropophage ou d'un kamikaze japonais.

    Les féministes, Sylviane Agacinski par exemple, pourtant moins niaise que Simone de Beauvoir, a traduit sottement le patriarcat comme un abus de pouvoir masculin, alors qu'en réalité la violence de la politique touche tout autant les hommes, si ce n'est plus, mais d'une façon différente. Autant dire que les Japonais ou les Allemands sont "phallocrates", alors que de toute évidence ce sont des femelles avides de sécurité, qui se sont jetés après leur défaite sur le modèle yanki comme une femelle se jette sur le mâle dominant vainqueur.

    *

    Le type de misogynie que je qualifie de "romaine" ou de "judéo-boche" séduit d'ailleurs généralement les femmes, et non la misogynie d'Hamlet (Ophélie, c'est autant Nitche que Rosencrantz ou Guildenstern, savants manipulés par le pouvoir politique, le sont).

    Pourquoi ? Parce qu'en réalité il n'est pas difficile de comprendre que la misogynie de Schopenhauer ou de Nitche est d'abord dirigée contre eux-mêmes ; la femme que Nitche déteste le plus, c'est lui-même (Flaubert est beaucoup plus lucide que Nitche, même si sa critique du christianisme est similaire.) Nitche est complètement prisonnier de rapports familiaux. Plus encore qu'en lisant Proust, et c'est peu dire, j'ai la sensation désagréable en feuilletant Nitche d'être enfermé à double-tour dans une table de chevet (Proust me procure plutôt le mal de mer avec sa prose isomorphe de foetus inné).

    Au lieu de diriger sa vindicte contre sa famille, le ventre sacré de sa mère, d'où vient son hystérie, Nitche s'en est pris à des objets extérieurs : Dieu, les femmes, le christianisme (attitude typique de la mentalité libérale, soit dit en passant, qui toujours se défausse et trouve un bouc émissaire, même confrontée à l'évidence de sa propre faillite et corruption. Exemple tout frais : c'est George Bush et non la société civile yankie qui a dévasté l'Irak pour se venger d'un crime que les Irakiens n'avaient pas commis. Le "coup d'Hitler" est sans arrêt recommencé, cinématographie à l'appui.)

    Ce type de misogynie est un aveu de faiblesse et il séduit les femmes, assez nombreuses, ayant un désir de maternité. On peut même penser que si l'institution matrimoniale persiste, malgré son caractère irrationnel au regard des derniers virages en épingle de l'économie capitaliste, qui permet d'épargner individuellement très facilement et se préoccupe peu des conditions de logement et de vie familiale des smicards, si l'institution du mariage perdure c'est uniquement en raison du désir de maternité persistant des femmes.

    Bien sûr ce n'est pas un hasard si le problème des misogynies recoupe exactement celui des antisémitismes. Pourquoi l'antisémitisme et la misogynie "nationales-socialistes" de Nitche sont beaucoup plus dangereux que ceux de Voltaire ? Parce que dans le cas de Voltaire il s'agit d'une critique, tandis que dans le cas de Nitche, ses passions sont dirigées contre lui-même et peuvent aller jusqu'au suicide. Quelqu'un qui peut se tuer par désamour de lui-même est capable de n'importe quelles tortures contre le corps d'un autre. Déjà Léon Bloy à la fin du XIXe siècle mettait les Juifs en garde contre les dangers du libéralisme, avertissement resté lettre morte.

    Les Juifs manquèrent de recul sur la religion allemande et l'idée libérale de renouvellement génétique, imposant aux Juifs de muter à peine de disparaître, Etat dans l'Etat, vieillard qu'on préfère confier à l'hospice (vaine est la tentative de scinder le nazisme aussi bien du capitalisme que du darwinisme) ; les Allemands n'en avaient pas sur les Juifs, et les camps de travailleurs juifs paraissent issus du goût médiéval des Allemands pour la purge.

    Simone Weil en revanche est dans le même cas que Voltaire et son rapport au judaïsme, étant critique, ne représente aucun danger. D'ailleurs celle-ci a rejeté les idoles allemandes (Max Planck) exactement de la même manière et pour les mêmes raisons qu'elle a rejeté les idoles juives. Probablement Simone Weil a-t-elle été sauvée des eaux de la bêtise, contrairement à son frère André Weil, compromis dans les pitreries du "groupe Bourbaki", parce que la mère de Simone Weil ne l'a pas possédée, n'a pas tué en elle tout esprit critique. Jonas n'est pas un simplement un Juif, c'est un Juif qui vit dans les organes de la baleine, privé de lumière. Et la baleine est une métaphore pour le Léviathan.


  • Libéralisme pédophile

    Probable que si les bobos ont reporté leurs suffrages de Bayrou sur Cohn-Bendit lors du dernier scrutin, c'est qu'ils ont dû finir par trouver Bayrou trop révolutionnaire.

    Parmi les nombreuses listes, l'une d'elles révélait l'essence de l'idéologie libérale, la liste "Alternative libérale" conduite par une jeune femme, Sabine Hérold. Sur l'affiche un poupon bien nourri et souriant était censé incarner l'idéal libéral menacé par une politique conservatrice entravant l'esprit d'initiative.

    Relevons d'abord un fait qui permet de mesurer l'amplitude du mensonge libéral : des millions de "bébés" ont été éliminés au moyen de produits chimiques au cours des trente dernières années, dans le cadre d'une politique libérale mise en oeuvre par des politiciens libéraux/démocrates-chrétiens (l'académicienne Simone Veil s'étonnait encore récemment de ne pas avoir été invitée à discourir aux obsèques de Mgr Lustiger, et on a vu Valéry-Giscard d'Estaing au premier rang de la conférence de Benoît XVI sur l'Europe monastique au Couvent des Bernardins) ; cette politique d'élimination massive qui a eu notamment pour effet de mettre à la disposition de l'industrie et de la grande distribution une main-d'oeuvre meilleur marché, n'aurait pas pu être menée sans l'appui des services sanitaires et sociaux de l'Etat ; certes, mais sans ces services publics, comment la politique libérale pourrait-elle être autre qu'une pure théorie ? Si les Etats-Unis d'où vient cette politique d'avortement à l'échelle industrielle ne sont pas libéraux, quelle nation l'est ?

    *

    En dehors de ce fait, la liste "Alternative libérale" illustre que le libéralisme est typiquement une idéologie de mère de famille anxieuse, prête à se ruer sur la première potion magique. Bien sûr Mlle Hérold a raison de dire, telle une anarchiste, que l'Etat est cause de paralysie et d'aliénation. Mais c'est une idiotie de ne pas voir que l'Etat tentaculaire est une machine au service de l'économie capitaliste. La concentration du capital et le développement du rackett fiscal imposent le déploiement policier. L'hypertrophie de l'Etat vient de celle des banques nationales ; sans la concentration de fortunes entre les mains de quelques familles et la spéculation, jamais les grandes compagnies des Indes n'aurait pu être créées sous la Régence de Louis XV en France et la politique monétaire insane de Law être appliquée.

    Pourquoi, maintenant, l'incapacité à comprendre la politique concrètement et globalement est-elle typiquement celle d'une mère de famille ou d'un gosse incestueux, marqué par cette mentalité ? Parce que le raisonnement anhistorique est typiquement génétique et inné ; il renvoie à une idée du monde matricielle. Le cycle capitaliste, qui comprend des phases de guerres sanglantes contrairement à ce que des actionnaires de l'impérialisme comme BHL essaient de dissimuler, ce processus sera naturel aux yeux de ceux qui se font une idée de la nature conforme aux cycles féminins. Il règne d'ailleurs aux Etats-Unis comme un climat général d'inceste et d'hystérie. Moi-même j'étais assez indifférent à la question économique avant de séjourner aux Etats-Unis et de comprendre le caractère profondément pédérastique de la société capitaliste ; j'avais auparavant, encore enfant, noté lors d'un séjour en Allemagne cet état de dépendance marquée des hommes vis-à-vis des femmes, caractéristique de l'idéologie chrétienne selon moi, et assez difficile à endurer pour un Français de souche habitué à vivre dans un pays où l'individualisme masculin est plus marqué.

    Il faut ajouter qu'une société incapable de penser l'histoire, une société qui pose le caractère inéluctable du capitalisme et de sa corruption toujours plus grande, cette société-là ne peut qu'être une société animiste. La ménopause capitaliste est derrière nous.


     

  • Angoisse de la nuit

    Près de mille ans de temps assassin ont passé, mille ans à ajourner l'Apocalypse faute de combattants en nombre suffisant pour oser affronter comme Shakespeare l'angoisse de la nuit, mille ans que la constance de l'ordre dominicain à servir le Léviathan perdure.

    (Je feuilletais récemment la biographie de saint Dominique (de Gusman) par Lacordaire : incroyable tissu de fables et d'hypocrisies ! Cette femelle tente de justifier l'implication de son héros dans la croisade albigeoise qui a ensanglanté le Sud-Ouest de la France, tout en le lavant personnellement du sang versé par les soldats.)

    Aujourd'hui c'est :

    - Philippe Verdin qui fait l'éloge de la théocratie yankie et regrette que ce système de corruption généralisée ne soit pas appliqué en France par Sarkozy ;

    - Jacques Arnould qui fait l'éloge de l'idéologie de Darwin, ciment religieux des régimes laïcs barbares, éternité descendante combattant l'éternité transcendante ;

    - Dominique Humbrecht qui, comme un innocent s'interroge sur les causes de la crise des vocations sacerdotales.

    Le Gusman dans la pièce de Molière est-il une allusion au fondateur de l'ordre prêcheur de guerre ?

  • Créationnisme

    Selon l'historien Michel Pastoureau, l'homme ne serait pas cousin du singe mais plutôt du cochon, avec lequel nous possédons d'étranges affinités (pas le quadrupédisme). Menace de crise de fous rires sur les plateaux télé lorsque Pastoureau paraît et énonce sa thèse, vu le faciès porcin et nettement couperosé du thésard. Mais les caricaturistes ne relevèrent-ils pas eux aussi en leur temps la grimace simiesque de Darwin ?

    Ce fils prodigue de science ne manque pas pour autant d'arguments. Selon des témoignages récents de rugbymen anthropophages, le goût de la chair serait exactement le même que celui du cochon. Et les organes du porc identiques à ceux de son prédateur, utilisés pour les cours de médecine. Ajoutons l'omnivoracité légendaire de l'homme.

    Expliquer l'interdit alimentaire des Juifs par le tabou de l'anthropophagie est un peu téméraire de la part de Pastoureau cependant, vu que les pourceaux sont dans la Bible (comme chez Rabelais ou Léon Bloy) des bêtes diaboliques, tout comme le singe au demeurant, l'ours, le léopard, les insectes et de nombreux félins.

    Cela dit dans l'ensemble la thèse de Pastoureau est plutôt plus cohérente que celle de Darwin et repose sur un nombre d'analogies physiques plus important.

  • Devises capitalistes

    Condamner Hitler mais admirer la philosophie néo-gothique de Sartre ou Heidegger.

    Condamner Staline mais admirer l'art stalinien de Kandinsky.