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Mon Journal de guerre - Page 96

  • Vu à la télé

    Vu Alain Badiou à la télé. Bonne tête de philosophe grec. Quand on voit le niveau moyen des profs de philo. censés avoir passé un concours élitiste et qui sont pour la plupart incapables d'exprimer une idée générale cohérente, on peut dire que Badiou "redore" le blason de sa corporation.

    Il faut dire que je soupçonne Raphaël Enthoven, l'ex. de Carla B., de n'inviter dans son émission de philo sur "Arte" (poilâde garantie !) que des sombres crétins, et laids si possible, afin de paraître brillant par comparaison.

    Surtout il n'y a pas chez Badiou le côté "Marx pour les bobos" comme il y a chez Debord, Baudrillard ou Daniel Bensaïd, qui aurait sûrement fait dégueuler Marx et Engels. C'est une menace de mort qui pèse sur le prolétariat que défendent Marx et Engels, comme aujourd'hui en Chine ou en Afrique, en Inde, et pas une menace de baisse du pouvoir d'achat.

    Ce qui fait la supériorité de Badiou, au-delà de ses capacités rhétoriques, c'est la teneur scientifique de son propos, notamment dans le domaine historique. Un des traits caractéristiques du capitalisme, c'est d'étouffer l'histoire pour la ramener au niveau de la chronologie ou de l'expertise-comptable.

    *

    Là où on ne peut pas cautionner les propos de Badiou, c'est lorsqu'il parle de "discipline du raisonnement mathématique". Bien sûr le raisonnement algébrique est essentiellement puritain et contraire au matérialisme de Marx. Toutes les prétendues "lois économiques libérales", monétaires ou autres, dont Marx a dégagé les ressorts une par une, sont sous-tendues par une algèbre puritaine. On constate d'ailleurs que l'argument télégénique indépassable d'un crétin comme Guy Sorman : "Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes capitalistes possibles", vient directement de la "science" boche de Leibniz, science méprisable qui a pour effet de réduire les réalités physiques à de simples slogans.

    Badiou ne va pas jusqu'à faire des mathématiques un mode de pensée communiste privilégié, heureusement, mais même lorsqu'il qualifie le raisonnement mathématique de "rigoureux" et "discipliné", il va trop loin ; il est en-deça de Simone Weil qui avait détecté le caractère irrationnel des travaux de Max Planck et l'avait dénoncé comme un usurpateur. Le raisonnement algébrique est fondamentalement binaire et paradoxal, c'est-à-dire chaotique. Le chaos des modèles astronomiques par exemple (abusivement qualifiés d'astrophysiques), ce chaos est extrapolé des modèles algébriques eux-mêmes.

    Qu'est-ce que ça signifie ? ça signifie que dès lors qu'une modélisation algébrique d'une réalité physique présente un caractère de "finitude" ou de "continuité" (par ex. le monde fini de Kopernik ou l'univers en forme de soucoupe des frères Bogdanoff), il est fondamentalement truqué et on peut le réfuter. Les fameux "trous noirs" ne sont que du rapiéçage, rapiéçage d'un grand 'patchwork' algébrique débile.

    Ce que Platon n'avait pas compris, c'est que la symétrie n'est que le masque de la laideur ; la symétrie cache le chaos comme le miroir cache l'image, et la poésie est complètement réversible. C'est ce que révèle Aristote, dans sa "Physique", et en quoi il surpasse Platon.

    En somme, Badiou est un communiste qui fait l'éloge de la musique, alors que c'est du côté du dessein que Marx, Engels ou Simone Weil se situent, plus près des étoiles par conséquent.

     

  • G20 revisited

    Le compte-rendu du G20 avant le G20 par Paul Lafargue :

    "Capital, mon Dieu et mon Maître, pourquoi m'as-tu abandonné ? (...)

    N'ai-je pas vécu selon ta loi ? Mes actions n'ont-elles pas été droites et légales ?

    Ai-je à me reprocher d'avoir jamais travaillé ? N'ai-je pas pris toutes les jouissances que permettaient mes millions et mes sens ? N'ai-je pas tenu à la tâche nuit et jour, des hommes, des femmes et des enfants tant que leurs forces pouvaient aller au-delà ? Leur ai-je jamais donné mieux qu'un salaire de famine ? Est-ce que jamais je me suis laissé toucher par la misère et le désespoir de mes ouvriers ?

    Capital, mon Dieu, j'ai falsifié les marchandises que je vendais, sans me préoccuper de savoir si j'empoisonnais les consommateurs ; j'ai dépouillé de leurs capitaux les gogos qui se sont laissé prendre à mes prospectus. (...)

    Mais, Seigneur, se peut-il que tu frappes si impitoyablement un homme qui n'a jamais désobéi à un de tes commandements ?

    Mais c'est mal, c'est injuste, c'est immoral que je perde les biens que le travail des autres avait si péniblement amassés pour moi.

    Les capitalistes, mes semblables, en voyant mon malheur, sauront que ta grâce est capricieuse, que tu l'accordes sans raison et que tu la retires sans cause.

    Qui voudra croire en toi ?

    Quel capitaliste sera assez téméraire, assez insensé pour accepter ta loi, - pour s'amollir dans la fainéantise, les plaisirs de l'inutilité, si l'avenir est si incertain, si menaçant, si le vent le plus léger qui souffle à la Bourse renverse les fortunes les mieux assises, si rien n'est stable, si le riche du jour sera le ruiné du lendemain ?

    Les hommes te maudiront, Dieu-Capital, en contemplant mon abaissement ; ils nieront ta puissance en calculant la hauteur de ma chute, ils repousseront tes faveurs.

    Dieu farouche, Dieu aveugle, Dieu stupide, prends garde que les riches n'ouvrent enfin les yeux et ne s'aperçoivent qu'ils marchent insouciants et inconscients sur les bords d'un précipice ; tremble qu'ils ne s'y jettent pour le combler, qu'ils ne se joignent aux communistes pour te supprimer !

    Mais quel blasphème ai-je proféré ? Dieu puissant, pardonne-moi ces paroles imprudentes et impies.

    Tu es le maître, qui distribue les biens sans qu'on les mérite et qui les reprend sans qu'on les démérite, tu agis selon ton bon plaisir, tu sais ce que tu fais.

    Ô Dieu doux et aimable, rends-moi tes faveurs : tu es la justice et, si tu me frappes, j'ai dû commettre quelque faute ignorée. (...)"

    "Lamentations de Job Rothschild, le capitaliste", 1887.

    L'actualité de ce texte n'est pas la seule chose remarquable. Bien que Lafargue ne soit pas un historien et un savant comme son "beau-père" K. Marx, il a su parodier intelligemment le ton janséniste dans son pamphlet.

    De fait, avant que la religion capitaliste telle que nous la connaissons ne devienne un refuge d'hypocrites et d'ignares diplômés, le jansénisme réduisit Dieu à une marionnette. Car les fils de la "grâce" (devenue l'"aléa", le "hasard" dans la religion laïque) ne relient pas l'homme à Dieu mais enchaînent Dieu à des martingales terrestres. Blaise Pascal a d'ailleurs parié sur Dieu comme on parie sur un cheval de course ou la remontée du cours boursier. On peut dire que les railleries de Diderot et de Voltaire, Pascal les a plus que méritées ! Si Voltaire avait pris la mesure de la débilité profonde et concordante avec sa théologie des travaux "mathématiques" de Blaise Pascal, rétrograde "carreur" de cercle, il aurait été plus sévère encore.

    - Qu'on note ceci : ramener le christianisme au problème de la Foi, est une manière pour Blaise Pascal de saboter perfidement la Charité. C'est-à-dire de briser la dynamique chrétienne. L'esprit du monde n'a jamais quitté Pascal, en réalité, qui n'est qu'un poseur, le produit de son époque. Précision : la théologie dite "millénariste", celle de Bacon-Shakespeare par exemple, est combattue actuellement par l'ensemble du clergé catholique ou quasi, QUI NE VEUT PAS EN ENTENDRE PARLER. Lorsque le pape accuse François Bacon d'être le père de la science "prométhéenne", c'est, au choix : un menteur ou un ignorant. Le cardinal Barbarin, devenu pape sous le nom d'Urbain VIII, en soutenant l'arriviste G. Galilée et ses tours de passe-passe algébriques a certainement oeuvré beaucoup plus pour la mécanique et la science prométhéenne que François Bacon ou Karl Marx.

    Or la perfidie de Blaise Pascal, la religion capitaliste en "hérite" qui de son côté ramène l'économie au niveau des équations et des principes comptables et abolit ainsi l'examen des conditions de l'activité économique réelle.

    Baudelaire, assez éloigné du communisme, est pourtant assez concret pour souligner que l'honnêteté du commerçant n'est même pas l'honnêteté, elle est simplement le bon sens. Ce que les prêtres capitalistes n'héistent pas à présenter comme "neutre sur le plan moral" n'est autre que le crime.

    Que penser d'un clergé catholique qui a entériné en France récemment sans broncher la généralisation du boursicotage et donc de L'ENRICHISSEMENT "SANS CAUSE" !? Si ce n'est qu'il se vante de n'être pas matérialiste, à l'instar du Job Rothschild de Lafargue, pour mieux se livrer aux mêmes calculs crapuleux qu'un banquier.

    Un chrétien qui croit que l'enrichissement peut ne pas avoir de cause n'est autre qu'un possédé, sans l'ambiguïté de Baudelaire, un innocent les mains pleines de sang.

     

     

     

     

  • Résurrection

    "Le Capital est mort, vive le Capital !" : sur les ondes radio ce matin, de jeunes clercs enthousiastes annoncent la naissance d'un nouveau petit veau d'or tout neuf. "Jouez hautbois, résonnez musettes, chantons tous son avènement !"

    Sainte Ethique, sa marraine, n'a pas manqué de se rendre au baptême et de faire un petit discours.

    Tout a déjà été annoncé par le prophète Paul Lafargue dans "La Religion du Capital". Tel au chapitre des "devoirs du capitaliste", le n°23 : "Le capitaliste ne se mêle pas aux parlotages sur le libre-échange et sur la protection : il est tour-à-tour libre-échangiste et protectionniste suivant les convenances de son commerce et de son industrie."

    Ou le n°24 : "Le capitaliste n'a aucun principe : pas même le principe de n'avoir pas de principes."

    Il y a entre Alphonse Allais et Paul Lafargue comme une sorte de virage dans l'humour français.

     

  • Ma méthode de lecture

    Vu que j'ai choisi comme axe de mes études la confrontation entre les eschatologies laïques du XIXe siècle (Hegel et Marx) et l'apocalypse de saint Jean, l'ouvrage de Mircéa Eliade intitulé "Le mythe de l'éternel retour" retient mon attention. J'en profite pour donner ma méthode de lecture :

    - Du fait qu'Eliade cite à plusieurs reprises le philosophe nazi Heidegger (dénazifié pour blanchir Sartre de lui avoir emprunté quelque gadget), je peux déduire que je ne tirerai rien de bien substantiel d'Eliade. Le problème d'Heidegger n'est pas en l'occurrence qu'il soit nazi, mais qu'il confonde à peu près Aristote avec Epicure, ce qui pose un problème majeur puisqu'on peut considérer ces deux philosophes grecs comme antinomiques.

    Or la Grèce a connu un progrès du mythe de l'Eternel retour vers la dialectique, avant de revenir à l'Eternel retour. Comment Eliade peut-il comprendre clairement une telle évolution dans ces conditions ?

    - Et je constate rapidement qu'Eliade prend conséquemment au sérieux l'"existentialisme", qui n'est rien d'autre que la morale capitaliste ou laïque, ce dont Eliade ne semble pas dupe mais qu'il n'énonce pas clairement.

    Un toubib me disait un jour que les aborigènes d'Australie n'ont pas de lombalgies parce qu'ils ignorent la définition de la lombalgie ; de la même manière, quiconque vit sous la pression constante d'un pouvoir quel qu'il soit ignore que son existence relève de l'existentialisme chrétien/athée/juif/musulman/sucré/amer.

    - Eliade souligne que le mythe de l'éternel retour a un effet psychologiquement rassurant dans les civilisations primitives, un peu comme le nationalisme ou le patriotisme rassurent, c'est moi qui précise ici, en procurant l'illusion aux individus qu'ils partagent avec un vaste groupe -armé et puissant-, un même "karma" (tant que ces enfants ne sont pas eux-mêmes dévorés par leur mère-patrie). De même le mythe de l'éternel retour est-il un peu inquiétant vers la fin, comme les propos du journaliste-philosophe P. Muray le prouvent ; et les drogues plus ou moins dures complètent utilement l'existentialisme.

    Si Malraux, par "religieux" voulait dire que le XXIe siècle serait "sectaire", il ne s'est pas trompé ; mais ce n'est que le corollaire de la force centrifuge du capitalisme : à l'intérieur de la grande nef étatique glaciale se forment de petites chapelles pour ne pas mourir de froid. Le tribalisme laïc est à une échelle différente. Le sous-bassement de ces chapelles est souvent beaucoup plus instinctif qu'on croit ; il n'y a pas que les gays qui s'associent en fonction de leurs appétits sexuels ; les partouzeurs vont avec les partouzeurs, les continents avec les continents, ce qui ne le sont qu'à-demi ensuite, etc. Plus la spiritualité est mise en avant, plus on peut craindre que ce soient de vils mobiles qui gouvernent en réalité ces contrats sociaux secondaires.

    - C'est donc à faire ressortir le véritable caractère de la pensée dite "historique", opposée aux mythes de l'éternel retour, qu'Eliade se montre impuissant, commettant la grossière erreur de qualifier l'existentialisme d'"historicisme", alors que celui-ci nie au contraire l'histoire. Eliade n'a pas vu que la pensée historique de Hegel n'en est pas une mais reste ancrée dans le byzantinisme allemand. L'erreur d'Eliade est ici d'autant plus grave que Marx, déjà, l'avait relevé.

    - Malgré l'avertissement d'Aristote cette fois, Eliade oppose le "cycle païen", "indo-aryen" à la "ligne historique". Qu'elle soit cyclique ou linéaire, une idéologie est une idéologie et renferme forcément un paradoxe. Si seulement Eliade avait lu Aristote plutôt que les conneries d'Heidegger (d'autant plus vicelard qu'il rend hommage à la "Physique" d'A.). La ligne n'est qu'une portion de cercle. Seul les crétins nullibistes yankis, Riemann, Beltrami, Einstein et "tutti quanti" peuvent croire qu'ils ont approfondi Euclide ou Aristote quand ils ne font qu'effleurer sa surface.

    Eliade aurait dû dire plus nettement que l'éternel retour et l'histoire ne sont pas opposés comme deux idéologies. Ce qui les oppose est ce qui oppose l'artifice à la nature. Le créationnisme d'Aristote contient bel et bien une pensée historique. Quant à Homère, si le théologien "millénariste" François Bacon (alias Shakespeare) l'a récupéré, c'est bien parce que "L'Iliade" et "L'Odyssée" ont un caractère apocalyptique et historique. 

    - Pour résumer : Mircéa Eliade critique le mythe de l'éternel retour seulement dans la mesure où il est lui-même sous son emprise. Autrement dit, il est impossible de concevoir une pensée historique qui ne soit pas théologique. Et, à l'inverse, une théologie qui se mélange au mythe de l'éternel retour n'est pas une théologie mais une généalogie déguisée en théologie. Là où l'erreur quasi-algébrique d'Eliade est encore perceptible, c'est qu'on voit bien que la pensée marxiste, conçue comme une pensée linéaire, demeure statique et finit par retomber au niveau idéologique de Hegel : c'est Althusser ou Balibar.

     

  • Histoire télévisée

    La chaîne d'Etat "Arte" diffuse et rediffuse un documentaire autour d'un vieil officier de la SS, réfugié en Espagne et qui continue de nier obstinément la choa.

    On peut penser que la tradition jacobine française explique en partie la loi Fabius-Gayssot, cas de censure étatique assez isolé à une époque où il est devenu "interdit d'interdire" en principe, et où le pouvoir dispose par l'intermédiaire des médiats qu'il contrôle directement ou indirectement d'un pouvoir de filtre et de censure bien plus efficace que les vieilles méthodes napoléoniennes terroristes. La liberté de nier la choa aux Etats-Unis s'explique par le fait qu'ils sont persuadés de n'y avoir aucune part. Bien que Madrid soit une ville boche, les Madrilènes ne se sentent pas coupables non plus.

    Pour une fois il ne s'agit pas d'un reportage de pure propagande sur "Arte", comme le documentaire de Prieur et Mordillat autour de l'apocalypse de saint Jean récemment, qui ne faisait pas dans la dentelle en opposant la vision de saint Jean à la théologie de saint Paul (!) ; ou encore l'éloge de l'art contemporain capitaliste sans aucun recul critique.

    De fait, cet ancien officier SS peut apparaître comme un pur imbécile qui continue de nier l'évidence, lorsqu'un ancien déporté lui présente par exemple d'anciennes photographies montrant des monceaux de cadavres de prisonniers. Il se défend en prétendant que les photographies sont truquées. Mais dans ce cas, comment ce SS justifie-t-il sa participation à un documentaire télévisé, qui relève du même procès de preuve que la photographie ? C'est illogique.

    L'équilibre du documentaire vient de ce que le téléspectateur peut constater le calme de cet ancien SS accusé d'être un tortionnaire et qui n'est pas agité de tics lorsqu'on le soumet à des questions gênantes sur son ancien métier. Le téléspectateur peut donc se dire qu'après tout l'hypothèse d'un officier imbécile qui, du fait de cette imbécillité, n'aurait même pas vu les coups et les mauvais traitements infligés aux prisonniers, cette hypothèse est plausible tant le Boche a l'air d'être enfermé dans la tour d'ivoire de son honneur et de son patriotisme.

    Idem lorsque la fille d'officier supérieur franquiste qui l'accueille lui révèle soudain qu'elle a des origines juives (cette séquence relève presque du gag, mais ça semble involontaire) ; cette révélation ne fait apparemment ni chaud ni froid à la vieille baderne nazie qui fait penser au collectionneur de papillons Ernest Jünger (à ce détail près que ce dernier s'est au contraire prévalu d'avoir trahi Hitler en fin de compte).

    Mais même si ce documentaire laisse les différents protagonistes s'exprimer assez librement (seule la voix française qui "double" l'officier allemand est caricaturale, exagérément démoniaque), on ne peut pas se satisfaire d'une Histoire télévisée, quel que soit le sujet : Hitler, Staline, les croisades, l'apocalypse, quel que soit le sujet, le documentaire historique constitue un recul important des études historiques. Quel que soit son sens, qu'il nie la choa ou au contraire qu'il l'affirme, le témoignage d'un ancien officier des Sections de Sécurité est irrecevable. Il y a trop de raisons d'ordres divers qui peuvent pousser un soldat allemand à se disculper ou, au contraire, à s'accuser. Et le côté "bête de foire" qu'on exhibe (le vieillard continue de fêter l'anniversaire d'Hitler) de ce documentaire est quand même assez troublant.

    L'Allemagne nazie et le régime de Vichy ont d'ailleurs eux-mêmes largement utilisé le procédé cinématographique au service de leurs régimes iniques. Sans compter les Etats-Unis qui se sont carrément blanchis de leurs crimes contre l'humanité, les bombardements atroces en Normandie, sur les villes allemandes, au Vietnam à l'aide du napalm, au Japon, en Irak plus récemment, par le biais du cinéma, procès qu'ils ont porté au rang de l'art pour le rendre encore moins discutable. Alors même que le cinéma possède toutes les caractéristiques de la fiction.

  • Théorie de la relativité

    Peut-on lire Blaise Pascal ou Montaigne après avoir lu François Bacon ? Je m'y suis efforcé la semaine dernière, mais rien à faire ; même si l'on s'en tient au style, je trouve que Pascal ne vaut pas la Rochefoucault, dont les pensées de jurisconsulte romain mélancolique ne me font déjà pas beaucoup bander. Probable que c'est parce que La Rochefoucault est un athée plus sincère que Pascal qu'il a plus de style. Pascal balance trop.

    Quant à Montaigne, comme le titre l'indique, ce ne sont que des "essais". Il faut pour trouver une perle ouvrir beaucoup trop d'huîtres vides. L'idée qu'il puisse y avoir des "moralistes chrétiens" n'est acceptable que pour un janséniste et elle est aussi farfelue que l'idée qu'il puisse y avoir des romanciers catholiques. Evelyn Waugh tenait à cette étiquette d'"écrivain catholique", mais il ne l'est pas plus que L.-F. Céline, ce qui n'est déjà pas si mal. Waugh comme Céline valent d'ailleurs pour n'avoir pas ou peu versé dans l'"existentialisme", c'est-à-dire pour s'être tenus à l'écart d'une morale officielle qui doit autant, si ce n'est plus, à Pascal qu'à Voltaire ou Rousseau.

    Quand François Bacon ressuscite le théâtre grec "in extremis" sous le nom de Shakespeare, Montaigne fait, lui, l'apologie des systèmes métriques romains. Les meilleurs d'entre les Boches sont français. Montaigne a deux siècles d'avance sur ses cousins germains et il ne s'exprime pas de façon entièrement conventionnelle. Sans le côté "autodidacte" qui fait son charme buissonnier, Montaigne serait aussi scolaire que Nitche.

  • Partis génitaux

    Si "Mort à Crédit" n'était qu'un règlement de compte familial, ça serait "Le Temps retrouvé". Mais il y a quelque chose chez Céline qui n'est pas seulement d'ordre pédérastique ou génital, mais apocalyptique.

    Céline est aussi ambigu que Voltaire ou Baudelaire, puisque le communisme autant que le nazisme séduisit le martyr athée de la Butte, saint Ferdinand : pour ma part je vois plutôt "Le Voyage" comme un roman "nazi" (à cause notamment de la description de New York en métropole nationale-socialiste, dressée contre le Ciel, et puis parce que le genre romanesque n'est pas communiste ; encore parce que le "mouvement" est vu par Céline comme "moderne") ; tandis que "Mort à Crédit" est plus "balzacien" ou "marxiste".

    Le personnage de Courtial des Pereire incarne en effet le charlatanisme capitaliste, qu'on retrouve dans tous les domaines de la science. Quand je vois Max Gallo à la télé, je ne peux pas m'empêcher de penser à Courtial des Pereire ; idem quand je vois l'astrophysicien Brahic ; Yves Coppens ou Pascal Picq sont encore Courtial des Pereire. Des bricoleurs partout, intitulés "experts".

    L'historien F. Furet lui aussi a relié le capitalisme naissant en Angleterre au début du XVIIe siècle à l'ingéniérie, même s'il n'a pas vu comme Céline le caractère fondamentalement bordélique et insane de l'ingénieur laïc. Furet oublie aussi de préciser qu'au stade "métaphysique", de Galilée à Newton en passant par Descartes et Blaise Pascal, il n'y a plus que des ingénieurs, dès le XVIIe siècle.

    *

    Complètement univoque en revanche est le dernier entré à l'Académie des vieillards cacochymes qu'on dit "française", je veux parler de l'écrivain boche François Weyergans, antépénultième ersatz de Proust. Fils de Franz Weyergans, qui fit carrière dans le "moralisme bourgeois", François W. n'a fait que reprendre la boutique familiale en repeignant l'enseigne chrétienne aux couleurs libérales, pour ne pas se laisser dépasser par la mode. Quand Baudelaire conchie la Belgique, ce sont sûrement des types comme Weyergans qui l'inspirent.

    Céline a fait de sa propre famille le protype de la famille petite-bourgeoise républicaine, mais ce n'était pas pour reprendre ensuite le flambeau académique comme Weyergans.

  • Le Retour d'Alain

    Au programme cette semaine à la télé : le retour d'Alain Juppé ; ça ressemble à une mauvaise blague, je me frotte les yeux, mais non, pas de doute, cette hyridation de la mâchoire de Chirac avec les locutions de Giscard, pas de doute, c'est le modèle Juppé, "tête de promo".

    Alain Juppé pense qu'il a un problème de communication ?! Du coup il se lance dans des demi-confidences sur les scènes de ménage entre ses parents, les bons conseils et les petits plats de sa légitime, en pensant que ça va nous intéresser et le rendre plus humain. C'est là qu'on voit que Juppé est à peu près dépourvu d'intelligence. Ce genre de truc ne marche réellement qu'à condition de s'épancher en détails réellement sordides, comme l'ont fait Yann Moix, Franz-Olivier Giesbert, et, le meilleur d'entre tous, Houellebecq, la bagarre animée avec sa daronne :

    - "Ma mère n'est qu'une pute, une gauchiste irresponsable..."

    - "Approche-toi un peu petit con que je t'en mette une bonne au coin de la gueule, pour t'apprendre à vivre !"

    Là ça fonctionne. Les confidences à moitié crapuleuses seulement, c'est crétin. Est-ce que Juppé s'imagine qu'une pute BCBG va raccoler comme raccole un pute normale ? Quant au registre du délayage d'une vie de fonctionnaire ou de rentier dépourvue de faits saillants, on peut penser qu'il restera à jamais l'apanage de Marcel Proust, et que ses fans ne le lâcheront pas pour Alain Juppé.

    Juppé n'a aucun problème de communication ; les Français sont juste parfaitement au courant désormais que l'élite politicienne est une élite autoproclamée ; que la "prospective" des experts-comptables est à peu près aussi foireuse que celle des cartomanciennes ; de ce point de vue, on ne peut pas en vouloir à Mitterrand d'avoir fait plus confiance à Elisabeth Tessier qu'à Jacques Attali ou Jean Guitton. Si Juppé arrivait à nous persuader qu'il n'est pas complètement dépassé par les événements comme ses collègues de travail, c'est là qu'il aurait un problème de communication ! 

     

  • De Jaurès à Le Pen

    - Si le Parti socialiste avait voté CONTRE l'envoi de troupes françaises en Afghanistan pour assister les Etats-Unis dans leur stratégie d'acheminement des "tankers" remplis de pétrole du tiers-monde pauvre vers le tiers-monde gavé, alors il pourrait reprocher à Le Pen de "récupérer" le pacifiste Jean Jaurès. Mais il a voté POUR.

    - Si le Parti socialiste avait un électorat populaire, et non un électorat composé en grande partie de fonctionnaires intéressés à la survie de l'Etat jacobin, et donc du capitalisme, alors il pourrait reprocher à Le Pen de comparer son parti à celui de Jaurès.

    - S'il est vrai que les "200 familles", pour reprendre l'expression de Jean Galtier-Boissière, manipulent indirectement le parti de Le Pen, comme elles manipulent indirectement le parti de Besancenot, quant au Parti socialiste, lui, c'est DIRECTEMENT qu'il est actionné par ces "200 familles".

    Qu'est-ce que le conseiller économique du PS, Jacques Généreux, trouve à dire à l'occasion de la crise ? Que "C'est la faute à Sarkozy" et que "Les courtiers en banque n'ont pas une morale très reluisante".

    1. "Exit" le constat que la crise correspond au schéma marxiste décrivant une concentration du capital entre trop peu de mains, cause que les banques sont CONTRAINTES de jouer à la loterie et gaspillent l'argent comme aucun service public n'oserait le faire, c'est-à-dire par paquets de cinq ou dix milliards d'euros d'un coup.

    2. "Exit" le constat que le capitalisme a été préservé jusqu'ici de l'absurdité totale et de la paralysie générale par la manne pétrolière et l'arme nucléaire, celle-ci étant un moyen pour tenir en respect le tiers-monde ouvrier - deux "faits extérieurs" que Marx n'avait pas prévus.

    3. "Exit" cette vérité que le PS a mené une politique capitaliste active, probablement encore plus efficace que celle des gaullistes, car plus rusée (Fabius et Rocard, par exemple, se sont montré des dirigeants capitalistes extrêmement habiles si on les compare à Alain Juppé ou Dominique de Villepin, François Fillon).

    Maintenant, ce que Le Pen comme le PS occultent carrément, et ce n'est pas le moins important, c'est l'Histoire : le fait que depuis Jaurès la division du travail à l'échelle internationale, mouvement centrifuge décrit par Marx et qui finit par arracher les rênes des mains des industriels capitalistes eux-mêmes ("Le pire ennemi du Capital c'est le Capital lui-même."), ce mouvement a mis fin à la lutte des classes en Europe. A vrai dire la fin de la lutte des classes en France remonte même avant Jaurès : elle remonte selon Marx à 1850, c'est-à-dire à l'élection par la France rurale de Napoléon III, représentant de la bourgeoisie industrielle ; on verra ce type d'élection bizarre se répéter ensuite : c'est le cas notamment de l'élection d'Adolf Hitler en Allemagne dans des circonstances qui rappellent celles de l'élection de Napoléon III. C'est le cas de toutes les élections à la présidence de la République sous la Ve. Il y a selon Marx, de la "classe sociale" au simple "sentiment d'appartenance à une classe sociale", un fossé historique.

    La crise mondiale qui replace Marx "sous les feux de la rampe" est-elle l'occasion de redécouvrir ou de découvrir Marx ? On voit bien que non. Les médiats, la presse, font tout pour que cela n'arrive pas. J'ai dû entendre au total à la télévision et à la radio depuis le début de la crise deux personnes qui tenaient un discours marxiste cohérent.

    L'Etat laïc n'a jamais eu d'ennemis plus acharnés que Marx et Engels puisqu'il n'est à leurs yeux en quelque sorte rien d'autre que la structure religieuse du capitalisme. On peut même voir qu'il y a deux structures religieuses successives ; celle qui correspond au capitalisme industriel, phase au cours de laquelle le discours religieux est tenu par les instituteurs et les professeurs, que Péguy (le vrai, pas celui de Finkielkraut) appelle "hussards noirs" ; et celle que nous connaissons actuellement, depuis que les "services" se sont substitués à l'industrie, phase où les hussards noirs ont été destitués de leur rôle moral au profit des journalistes et des médiats, le cinéma y compris. Pourquoi les hussards noirs ont-ils été destitués au profit de ceux qu'on appelle "journalistes", mais qui ne sont en réalités que des mercenaires. Tout simplement parce que vendre des services plutôt qu'une production industrielle, étant donné la nature subtile de beaucoup de services, impose de la part des médiats une ruse et des accommodements avec la morale et la vérité plus grands encore.

    Pour quelle raison le marxisme est-il donc malvenu jusque dans le parti d'Olivier Besancenot ? Parce que la science marxiste est extrêmement dérangeante pour une grande majorité de Français qui préfère largement se vautrer dans des petits discours existentialistes à deux balles. Qu'est-ce qu'un ouvrier français syndiqué aux yeux d'un esclave chinois ? Un privilégié, comme le patron de cet ouvrier. On ne pas demander à un esclave chinois d'entrer dans des nuances trop subtiles. Parmi les aristocrates privilégiés qui furent exécutés au cours de la Terreur déjà, certains étaient beaucoup moins privilégiés que d'autres. Quand la misère explose, elle ne fait pas dans le détail.

    Le combat marxiste ou même "jaurèsien" n'a donc plus de sens désormais qu'en faveur du "haschich-prolétariat" de banlieue et des esclaves qui, dans le tiers-monde, fabriquent pour les privilégiés des gadgets en plastique et alu.

  • Internet et la censure

    Internet commence à poser des problèmes au gouvernement  de Sarkozy. D'une situation où l'UMP s'était adjoint les services du crétin blogueur-vedette Loïc Le Meur, on est passé assez rapidement à une situation de "dissidence larvée" des blogues qui commence à poser un problème institutionnel, ne serait-ce qu'à cause des millions qu'un gouvernement démocratiquement élu, quel qu'il soit, au moins depuis Goebbels, est obligé de dépenser dans la propagande, rebaptisée "communication".

    Autrement dit à quoi sert "Le Point", à quoi sert "Le Monde", si les blogues contredisent pour pas un rond des journalistes grassement payés à bourrer le mou de l'opinion publique dans TOUS les domaines.

    Et la situation de la France est plus "avancée", dans la mesure où le nombre de blogueurs est très supérieur à celui de tous les autres pays, compte tenu de l'individualisme des Français et de leur niveau élevé d'équipement (tous les services gouvernementaux répètent en boucle depuis cinq ans que les gamins qui n'apprennent pas à se servir d'un ordinateur sont voués à l'arriération mentale, contre la plus élémentaire vérité que l'humanisme vrai se passe aussi bien d'ordinateurs que de la machine à calculer de Blaise Pascal.)

    On avait prévu les profits de la pornographie en ligne (l'essai du "Minitel rose" aidant), ceux des services marchands, même s'ils s'avèrent beaucoup moins juteux que la traite des Hongroises ou des Slovaques par dizaines de milliers, mais on ne se doutait pas qu'il y aurait des blogueurs, autant de blogueurs.

    Surtout on ne se doutait pas qu'ils ne se contenteraient pas tous de recopier les articles de "Libé" ou du "Figaro" tels quels, ou de commenter le dernier épisode de "Plus Belle la Vie". On ne s'attendait qu'à des blogueurs dans le style de Jean d'Ormesson ou de Laurent Joffrin.

    Bien sûr les blogues sont "a priori" beaucoup moins dangereux que des radios ou des télévisions libres, susceptibles d'ameuter rapidement des foules d'auditeurs. Mais on peut poser l'axiome suivant que, dès l'instant où la vérité sera publiée sur internet et que cette vérité sera accessible facilement à travers le dédale de "sites" (la "Propaganda Staffel" en est réduite, paraît-il, à acheter des mots-clé dans "Google" pour tenter d'étouffer la contradiction !), un groupe de députés réclamera alors qu'une forme de censure efficace soit mise en place sur le ouaibe, car les blogueurs ne vérifient pas leurs informations, tandis que les baveux officiels, eux, disent la vérité, toute la vérité et rien que la vérité que le ministère de l'Intérieur leur livre gratuitement. Jamais un bobard dans la presse officielle. Ou très peu. Si peu que les lecteurs ne s'en rendent même pas compte.

    Il y a un an ou deux, la journaliste de télé Marie Drucker s'inquiétait qu'on puisse parler librement sur internet de la choa, jusqu'à débattre de ses modalités ou de ses mobiles, auprès de Serge Klarsfeld, célèbre chasseur international de nazis. Comment pouvait-il laisser s'ébattre tous ces petits Le Pen librement sans rien faire ?

    Celui-ci lui fit cette réponse tolérante que les discussions sur le ouaibe peuvent être assimilées à des correspondances privées. Je signale de nouveau cette "jurisprudence" à l'attention de quiconque serait attaqué en justice pour des propos tenus sur internet et "passant la mesure" de ce qu'on peut écrire dans un pays démocratique, libéré de son passé clérical et monarchique, où brille le soleil de la liberté d'expression.

    Serge Klarsfeld n'est pas magistrat, ni rabbin, ni curé, certes, mais sans conteste il fait partie des plus hautes autorités morales du pays et il est un des défenseurs de la communauté des Français la plus sensible aux attaques et à l'humour noir. Faut bien sûr pas se faire trop d'illusions. Un chasseur de nazis qui ne changerait pas d'avis ne serait qu'un imbécile comme tout le monde.

    Comment elle fait cette phrase de Voltaire, au fait. Ah oui : "Je ne suis pas d'accord avec vous, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ?" Une référence un peu dépassée. On venait alors à peine de sortir du Moyen-âge.

  • Printemps des antipoètes

    Minorité impuissante et asservie de mon pays ! Artistes brisés par lui, hors-la-loi, égarés dans les villages, on ne vous croit pas, on parle contre vous.

    Amoureux de la beauté, affamés, contrariés par les systèmes, impuissants contre le Pouvoir, vous qui ne pouvez pas vous épuiser à trouver le succès, vous qui ne pouvez que parler, qui ne pouvez vous astreindre à la réitération ;

    Vous les trop subtils, brisés par le faux Savoir, vous qui savez par instinct, on vous hait, on vous écarte, on ne vous croit pas :

    Apprenez ceci :

    J'ai affronté la tempête, j'ai fait taire mon exil.

    (Ezra Pound, antipoète maudit.)

  • Histoire de pute

    Baudelaire, le plus révolutionnaire des poètes, signale déjà que l'honnêteté, chez un commerçant, ne va pas au-delà de l'intelligence, de la bonne compréhension des règles du métier. La banqueroute des industriels et des banquiers imbéciles ratifie le jugement de Baudelaire ; ça permet même d'espérer que les supermarchés se casseront la gueule à leur tour un jour proche, tant les principes qui régissent la grande distribution sont stupides.

    Aucun doute que c'est la cause aussi qu'une pute de quartier passe désormais, à juste titre, pour une commerçante plus estimable qu'un assureur ou un journaliste, un agent immobilier. Elle n'a pas volé son pognon, comme on ne peut plus dire du banquier.

    Qu'on s'imagine avoir deux gosses, une fille et un garçon, par exemple. L'une veut devenir pute pour payer ses études, l'autre courtier à Londres après qu'il aura terminé son école, pour payer sa dette. Sacré dilemme moral pour les parents ! Surtout s'ils sont chrétiens ou musulmans.

  • Brave New World

    Qu'il y ait des vaches charolaises qui acceptent qu'on les trimballe au Salon de l'Agriculture, c'est encore quelque chose que je peux comprendre ; ou même des putes virtuelles au Salon de la Pute virtuelle. Mais que peut faire un écrivain dans un Salon du Livre ??? Qu'est-ce que c'est encore que ce gadget boche ?

    C'est pour moi une énigme qui ressurgit chaque année quand je vois les affiches publicitaires pour ce salon-là dans le métro. Sans doute parce que je vois la littérature comme un truc très très individuel et qui demande de la concentration, à mille lieues du foot ou du cinoche.

    J'imagine que ce salon du Livre est surtout fréquenté par des lectrices qui espèrent coucher avec leur(s) écrivain(s) préféré(s) ? J'essaie de trouver une explication humaine. Quand j'étais gosse, mon paternel m'a emmené à un salon de la bande-dessinée ; c'était un peu dégueulasse (il y avait pas mal d'adultes), mais c'est compréhensible qu'un gamin veuille qu'on lui fasse un petit dessin, rien que pour lui.

    Il n'y aurait pour moi qu'une seule bonne raison de me rendre au "Salon du Livre", c'est de pouvoir y casser la gueule de Yann Moix, ou celle de Karl Zéro, qui sont les deux Français connus que je déteste le plus. C'est-à-dire que si on me lançait le défi suivant : "Tu es chrétien et dois donc pardonner aux deux personnes que tu détestes le plus, qui sont elles ?", je citerais Karl Zéro et Yann Moix, deux véritables suppôts de Satan.

    Il arrive que la laideur physique soit compensée par la beauté morale, et vice-versa,  mais là c'est un comble ! Ou plutôt deux. Mais le risque du corps-à-corps et de l'échange copieux de bourre-pifs est de se réconcilier immédiatement après, de faire tomber la tension (c'est même ce qui fait que les gonzesses préfèrent les poisons lents aux bourre-pif, dans leur grande majorité). Et dans mon combat contre des salauds comme Moix ou Zéro, pas question de fléchir, je serai inflexible.

     

  • La grande diversion

    Il est significatif qu'en s'efforçant de tuer le temps par toutes sortes de divertissements, on ne fait qu'entrer dans son jeu, baiser la mort sur la bouche. Voilà à quoi la religion laïque ou démocrate-chrétienne, vautrée dans le cinéma, fait penser : un ballet macabre de femelles prédisposées à la branlée.

    L'ennui, l'acédie, la mélancolie... autant de vocables pour dire la dépossession de soi au profit de Satan. Il est à peu près sûr que Baudelaire ou le romancier anglais E. Waugh, qui souffraient d'ennui, aient su la cause profonde de leur tourment ; dans le cas de Baudelaire, ça ne fait même aucun doute.

    S'il est hâtif de la part de Verlaine de faire de Watteau un peintre "mélancolique", c'est que la pure mélancolie se traduit par l'absence d'érotisme. Par principe l'art n'est pas mélancolique, c'est la musique qui l'est, qui oscille entre guerre et existentialisme, cruauté et masochisme. Même s'il a peint beaucoup la soldatesque, ne pas confondre Watteau avec Blaise Pascal, génie malfaisant ! Le romantisme, c'est l'assassinat d'Eros, étouffé dans une capote anglaise ; la mort du Sexe et par conséquent celle de la Science : on en est là.

  • Philologie

    La "philologie" est une passion romaine déguisée en sagesse grecque. Derrière le fétichisme délicat de Jacques Lacan ou Roland Barthes, Philippe Sollers ou Frédéric Nitche, se cache l'extrême violence de la bourgeoisie. Il n'y a qu'un seul philologue vraiment sensible, c'est Alphonse Allais. Chacun sera jugé sur ses oeuvres, les branlements ne comptent pas.

  • Ara breton

    Je constate dans une librairie que le dernier bouquin du navigateur Kersauzon est mis en avant. M'étonne pas que ça cartonne : c'est exactement le genre de propos doux-amers qui sont faits pour plaire aux gonzesses qui lisent les nouveautés. Une qui lit Kersauzon trouvera son "alter ego" dans le gonze déplorable qui, lui, lit "L'Equipe".

    Quel Breton n'a pas été abusé par sa mer ? C'est ce qui les rapproche des Juifs. Le rapport des Bretons aux femmes est d'ailleurs assez semblable : ambigü, limite incestueux. Quand Lévi-Strauss dit cette énorme connerie que la fin de l'inceste marque le début de la société, il ne fait comme Freud que se déterminer "par rapport à la religion juive" ; ça explique aussi pourquoi le cléricalisme a persisté plus longtemps en Bretagne, terre archaïque, et notamment sur les côtes. Expliquer à un Breton à quel point le clergé est une organisation désuète, c'est "mission impossible". Rabelais se ferait virer à coups de sabots au derrière s'il se pointait en Bretagne, idem pour Molière. D'ailleurs il y aurait aussi pas mal de trucs à dire sur "la Bretagne et Satan". En revanche, la femelle Chateaubriand ou la femelle Proust, il y a un public pour ça en Bretagne.

    Dire de Kersauzon que c'est un "Juif antisémite" me paraît être une bonne définition, extensible à beaucoup de Bretons. Quand j'étais en Bretagne, j'ai remarqué que si les Bretons, par principe, sont plutôt hostiles aux Juifs, la religion juive au contraire leur plaît beaucoup, ainsi que les "télécommunications", autre point commun.

    Drieu La Rochelle, homme sensible et doux égaré parmi les brutes, a dit que les Allemands n'ont aucun sens de la politique. Juste remarque. On a vu à quel point les Boches se sont fait berner par les Anglais en 1940. Pour les Juifs et les Bretons, c'est exactement la même chose : la plupart du temps, ils iront là où c'est le plus dangereux pour eux, confiants dans leur bonne étoile (qui est une Méduse, en réalité).

    Le Pen est un bon exemple de verbe politique gâché par une vue d'ensemble défaillante. Et je suis sûr que, secrètement, il y a plein de Juifs qui admirent Le Pen, à commencer par les Juifs les plus authentiquement Juifs. Proust aurait adoré Le Pen. Si Serge Dassault avait pu se payer Le Pen, par exemple, au lieu de Chirac ou Sarkozy, tous ces minables scribouillards du "Figaro", quelle fête pour son "trust", quelle avance pour ses idées pythonesques !

    Sans oublier la grosse contribution des Bretons à la connerie capitaliste, bien sûr, de Bolloré à Pinault, en passant par PPDA, Edouard Leclerc, vulgaires exploitants dépourvus du sens de l'économie. La baderne de Gaulle a noté pour s'en plaindre qu'elle n'avait été ralliée instinctivement à Londres que par quatre Juifs et deux Bretons.

  • Pour un art communiste

    Vu une sorte de dame-patronnesse sur "Arte" attaquer l'art contemporain : Aude de Kerros. Est-il besoin de se saper comme une poule de Cranac'h pour dénigrer l'art capitaliste ? La gonzesse était en effet coiffée d'une sorte de couronne d'étoffe de style troubadour XIXe qui aurait fait pouffer Balzac. Cette Kerros imprime d'ailleurs elle-même des eaux-fortes coloriées comme on pouvait en voir à la Fiac en 1982. Complètement dépourvue d'érotisme.

    Sérieusement, le pire ennemi de l'art capitaliste, c'est le Capital lui-même ; d'ailleurs sans le krach boursier, jamais la Kerros n'aurait été autorisée à exprimer son opinion réactionnaire dans l'émission de propagande télévisée d'Isabelle Giordano.

    Les deux arguments du "business" quand il est attaqué, même faiblement, en l'occurrence la Giordano avait invité deux galeristes un peu plus sexy que Mme de Kerros (Judith Benhamou et Magda Danysz), les deux arguments sont toujours les mêmes : le bon vieux coup du fachisme, d'abord - car Hitler ne s'est pas contenté de déshonorer l'antisémitisme, Bernanos aurait pu ajouter qu'il a aussi déshonoré la critique d'art.

    Et l'argument rhétorique dit "des Médicis", genre : "Certes, Pinault et Arnault sont des crétins mal dégrossis, mais les Médicis l'étaient tout autant." Bien sûr à chaque fois on cite les Médicis et pas François Ier, lui-même poète et dessinateur, ou l'empereur Rodolphe, versé dans de nombreuses sciences. Je ne peux pas m'empêcher d'imaginer à chaque fois la gueule que font les Médicis quand on les compare à deux tronches chefs de rayon comme Pinault & Arnault. Pour que l'argument fasse mouche, il faut toute la stupidité du public d'Isabelle Giordano. Un peu comme si on disait : "Certes, Houellebecq est un auteur pessimiste et qui n'incite guère à la consommation, mais Dante déjà avant Houellebecq était pessimiste." 

     

  • Le Koh-I-Noor

    Mais si je devais choisir un diamant pur pour le mariage de Claudius avec la reine Gertrude, autrement dit du diable avec l'Eglise, je ne choisirais pas Nitche, trop mal taillé par une brute maladroite.

    Je ne choisirais pas Einstein non plus, qui fait trop strass, camelote de chez Tiffany. Je crois que je prendrais Bachelard. Il est pour l'heure ce que j'ai pu trouver de plus régulièrement et précisément taillé dans le mensonge. Bien sûr, Pythagore a beaucoup plus de gueule, Pythagore c'est le Koh-I-Noor comparé à Bachelard. On peut même dire de la théorie de Pythagore qu'elle tient entièrement dans une pierre précieuse. Comme il s'agit d'un mariage bourgeois, et que l'Eglise est une mariée beaucoup trop anémique pour pouvoir porter Pythagore au doigt, je choisis Bachelard, petit ruisseau qui se jette dans la Méditerranée.

  • Le peintre et les poètes

    "Je n'avais pas encore vingt ans que j'avais déjà compris l'aspect le plus mystérieux de l'oeuvre de Frédéric Nitche, que j'avais déjà compris toute la musique et toute la littérature classique, toute la philosophie ancienne et moderne. C'est seulement plus tard que j'ai réellement commencé à comprendre le mystère de la grande peinture."

    Propos de Georges de Chirico tiré de son Journal ; propos "typique" d'un peintre honnête, et à peine exagéré. On peut se demander quand même ce qu'il y a de bien mystérieux chez Nitche ? Il paraît au contraire encore plus transparent que Kierkegaard ou Schopenhauer. De là vient sans doute que je ne m'intéresse pas à la peinture de Chirico, très peu érotique.

    Quand un crétin nullibiste comme Richard Feynman dit : "La physique quantique ne peut pas être expliquée, elle est incompréhensible", eh bien on peut être sûr qu'on touche presque au zéro et à la transparence totale. Le moindre arbrisseau renferme plus de mystère que Nitche (le bien nommé) ou toute la physique quantique compilée (de toutes les fractures à réduire, c'est certainement la plus facile).

    Car si la vérité est une pierre, le mensonge, lui, est comme un diamant pur. Il faut chercher les diamants au fond de la mer et près des volcans.

     

  • Trop de coïncidences

    On voudrait nous faire croire à la coïncidence de la "Journée de la Femme" et de la baisse de la virilité au Danemark. Un homme qu'on force à baiser avec une capote ce n'est plus un homme, c'est juste une femme en moyenne mieux payée que les autres. Une journée du sexe ou de la science serait plus appropriée.