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Mon Journal de guerre - Page 35

  • Le Christ anarchiste

    "L'anarchiste et le chrétien ont une seule et même origine."

    Frédéric Nitche

    Quelle raison peut-on avoir de croire que l'antéchrist dit vrai, et que les représentants officiels des Eglises chrétiennes mentent, lorsqu'ils prônent, tel Joseph Ratzinger récemment, la soumission à César ?

    S'il a trahi le Messie, Judas Iscariote n'avait pas moins bien compris le message évangélique que les autres apôtres. Le plus probable est que Judas Iscariote a trahi "en conscience", tout comme Nitche après lui.

    Le raisonnement et la tactique de Nitche sont les suivants : il n'y a rien en dehors de la raison naturelle, à laquelle le christianisme est indifférent (la morale naturelle païenne est satanique du point de vue chrétien). Le christianisme est donc totalement artificiel.

    Afin d'inciter les puissances hostiles au christianisme à l'éradiquer définitivement, Nitche invente une menace anarchiste plébéienne, alors que le refus chrétien de se soumettre à l'ordre naturel est un refus spirituel et individuel. L'ordre juridique satanique, du point de vue chrétien, est amené à s'écrouler de lui-même.


  • Folie mondaine

    Le personnage d'Ophélie, dans "Hamlet", est caractéristique de la folie mondaine, c'est-à-dire de la démence des castes dirigeantes modernes. Seul cet abruti de Stendhal peut croire Shakespeare un auteur romantique et moderne. En effet Shakespeare met la mythologie en avant, d'une manière bien plus conséquente que S. Freud ou C. Jung, tandis que l'art moderne s'éloigne peu à peu du mythe pour s'abaisser au niveau de ce que l'homme possède en propre : le goût de l'artifice.

    Shakespeare a deviné et montré subtilement que la notion de progrès moderne repose sur le fiasco scientifique. La nécessité pour l'élite aristocratique de se débarrasser du christianisme, prônée par Nitche explicitement (parce qu'il croit le christianisme moribond), est au temps de la Renaissance une subversion active au sein de l'Eglise chrétienne, dont Shakespeare ne se contente pas de témoigner, faute de quoi il ne serait "que" Boccace ou H. de Balzac : une subversion dont Shakespeare fait ressortir la dimension historique et mythologique, c'est-à-dire qu'elle est une clef indispensable pour accéder à la conscience la plus grande, non psychologique mais historique, de l'évolution du monde.

    Le quidam moderne est monté dans un train qui fonce à grande vitesse vers une destination inconnue. Shakespeare révèle le sens de ce mouvement et de la féminisation des esprits avec laquelle ce mouvement s'accorde.

    Le plus énigmatique aux yeux des élites occidentales modernes est sans doute la détermination d'Hamlet, car Shakespeare a conçu là un personnage christique, représentatif de son propre esprit, et qui désavoue l'Occident chrétien d'une manière presque aussi radicale que le Messie désavoua le monde judéo-romain. Les apôtres affirment la résurrection du Messie, Shakespeare nous incite fortement à croire dans la sienne, et l'accomplissement des prophéties chrétiennes.

    Si Shakespeare est en même temps un tragédien aussi peu "confessionnel" que possible, selon la seule et unique logique laïque apostolique possible, individualiste et anticléricale, c'est parce qu'il devine et montre que le problème posé par la science aux élites coïncide exactement avec l'intolérance de ces élites à l'égard de la révélation chrétienne, qui a pour effet d'ôter à celles-ci leur seule légitimité, d'origine naturelle. Il n'y a plus depuis la résurrection du Messie, que des philosophies naturelles truquées, et notamment truquées par des clercs et des hommes d'Eglise, dont Polonius-Copernic est emblématique. La science se heurte comme la révélation chrétienne aux philosophies naturelles les plus antiques et rationnelles, résumées par Nitche dans la formule de l'éternel retour.

    La science désavoue elle aussi la puissance et la tyrannie. Marx est l'héritier direct de Shakespeare quand il montre qu'il n'est pas d'ordre ou de doctrine sociale possible selon la vérité.

    De cela Shakespeare est parfaitement conscient, et sur ce point on reconnaît Francis Bacon Verulam et sa défense de la liberté individuelle contre le Léviathan moderne. Il n'y a que deux choix dans le monde moderne, celui de nier la résurrection du Messie au profit de la philosophie naturelle, à la manière de Nitche, c'est-à-dire de brandir l'étendard de Satan ; ou au contraire de faire la guerre à la suite de l'Esprit et grâce à la parole divine comme Shakespeare. La "modernité", et les masses qui épousent cette détermination, la plus inconsciente, non loin de "l'éthique judéo-chrétienne", service rendu par la tartufferie à la barbarie humaine, peuvent se définir au contraire comme la renonciation à la liberté et l'aspiration à l'esclavage, dans l'espoir de plus hypothétique territoire : le purgatoire.

  • Fin du monde

    "Le monde ne fait que rêver, il approche de sa fin." : François Rabelais annonce la fin du monde en des termes que Karl Marx répète plusieurs siècles après, à la fin d'une vie passée à tenter d'inculquer au peuple la méfiance des idéaux, rêves et promesses des élites.

    Le chrétien a plusieurs raisons de pronostiquer la fin du monde. D'abord elle est pour lui promesse de vérité. Les saints ont les yeux décillés de toutes les raisons sociales, pourrait-on dire, qui empêchent de voir dieu : toutes ces choses qui sont sacrées aux yeux des païens, mais non de dieu : "Satan, famille, patrie, etc." Qui sont sacrées parce qu'elles agissent comme un garde-fou.

    La fin du monde paraît à beaucoup une hypothèse farfelue, bien que les effets catastrophiques de l'enlisement dans le rêve soient de plus en plus palpables - mais les élites n'ont pas d'autre moyen de gouverner les masses qu'en les médusant, c'est-à-dire en les tenant en respect, non plus d'une morale, mais d'un but moral, c'est-à-dire d'un rêve.

    On constate aussi l'attachement grandissant des élites aux valeurs mondaines, à mesure que le monde va de plus en plus mal. Le goût des gadgets technologiques, par exemple, assimilés au progrès scientifique, est un indice que les élites ont perdu le sens des responsabilités.

    L'attachement au monde est presque un réflexe narcissique pour ceux qui ont été élevé dans son culte, et il faut se défier des politiciens qui prétendent oeuvrer pour les générations futures. Ils s'écoutent parler, et l'altruisme est, quand on ignore tout de l'avenir, de fermer sa gueule au lieu de faire miroiter l'avenir.

  • Shakespeare contre Nietzsche

    Nitche s'abuse et il abuse son lecteur quand il dit Shakespeare de la même chapelle que lui. Je fais d'ailleurs le constat que la scolastique française, quand elle a été influencée par Nitche, en dépit du cordon sanitaire stalinien (J.-P. Sartre), en a toujours presque systématiquement répété les erreurs, et écarté les jugements plus sérieux.

    Pas très sérieux, par exemple, le jugement de Nitche sur la tragédie grecque, mais néanmoins colporté par la plupart des conservateurs de musée. La médiocrité des critiques et historiens d'art français, sur le modèle de Diderot, vient de ce qu'ils se prennent eux-mêmes pour des artistes, bien qu'ils le soient rarement d'une manière aussi convaincante que Diderot ou Baudelaire.

    Beaucoup plus intéressants, en revanche, les arguments de Nitche contre l'art et la philosophie modernes. Ils permettent de distinguer, par exemple, que le masque du communisme, de l'athéisme et du progrès, dissimule en réalité un prêcheur judéo-chrétien, J.-P. Sartre, adapté à la réalité de l'Etat providentiel et son culte. Sans doute un artiste français sera capable de flairer assez facilement en Sartre et Beauvoir le type du curé et de sa bonne, mais tout le monde n'a pas le loisir de s'adonner à l'art.

    Bien sûr Nitche n'a rien d'un anarchiste, contrairement à ce que certains gugusses colportent, mais sa façon de dévaluer l'ordre moral nouveau au profit de l'ancien fournit quelques arguments à la dissidence théorique de quelques adeptes de la décroissance. Si la gauche et la droite libérales françaises ne sont que tenon et mortaise d'une même politique, il n'y a entre l'extrême-droite et l'extrême-gauche qu'une feuille de papier à cigarette idéologique.

    Si le propos de Nitche permet de le comprendre, c'est en raison de son effort pour ramener la culture à une plus grande simplicité, interprétant à juste titre la complexité apparente de la culture moderne comme un labyrinthe de fausses valeurs judéo-chrétiennes, les plus propices à entraîner la perte de l'humanité. Puisque la "théorie du genre" est à la mode, disons que Nitche est le plus farouche adversaire de cette détermination ultra-moderne, qui traduit l'influence délétère de l'idéalisme judéo-chrétien. Nitche pense en effet que la foi moderne dans l'autodétermination est une pure inconscience.

    L'effort de simplification de Nitche, grâce auquel il fait valoir la beauté de sa prose contre l'exaltation de la laideur par les artistes modernes, comme le propre de l'homme, le fait croire proche de Shakespeare, mais ce n'est pas le cas. Ils sont plutôt dos-à-dos, comme deux duellistes qui s'apprêtent à s'affronter, et dont on ne peut dire lequel l'emportera.

    Vive attaque contre l'idée de progrès chrétien de la part de Nitche, donc, qui trouva dans la littérature française de nombreux échos, avant que l'Etat ne verrouille l'accès à la littérature. Raisonnement implacable et imparable de Nitche, qui projette ici en enfer tous les technocrates après lui, lorsqu'il démontre l'irresponsabilité d'une élite ou d'une aristocratie qui prétend mener le peuple vers le progrès, c'est-à-dire vers un mot, qui n'a que la consistance d'un mot. Le progrès est la négation même de l'aristocratie. La politique le vérifie depuis le XVIIe siècle et le ravalement de l'aristocrate au rang de lèche-cul de l'Etat. Notre monde le prouve plus encore, où l'élitisme consiste à savoir mieux manipuler autrui que son voisin de promotion.

    Du point de vue aristocratique pur défendu par Nitche, le progrès n'est donc qu'un fantasme, propice à s'installer dans un esprit chrétien, faible et efféminé, en un mot raté.

    La position de Shakespeare n'est pas la même. Le progrès que Shakespeare dénonce comme une illusion est le progrès moral ou social, celui-là même que les élites occidentales ont inventé de toutes pièces. Mais Shakespeare n'est pas installé sur le mensonge, qui provoque un certain cafouillage dans le raisonnement de Nitche, selon lequel l'idée du progrès social serait issue des évangiles ou des apôtres, puisqu'on n'y trouve aucun plan de cette sorte.

    Shakespeare est donc conscient comme Nitche que le progrès est la monture la plus dangereuse qu'un homme d'élite puisse enfourcher, qui tôt ou tard le mettra à bas. Mais pour Shakespeare, contrairement à Nitche, ce mouvement est inéluctable et il a un sens, non pas chrétien comme le prétendent Nitche et Hegel ensemble, l'un pour le fustiger, l'autre pour s'en féliciter, mais antichrétien, de sorte que s'oppose au christianisme et au progrès, bien plus efficacement que l'appel à la raison naturelle de Nitche, sa volonté de restaurer la morale dans ses droits, l'apparence du progrès chrétien, exhibant les signes de la foi chrétienne, mais réduisant le plus efficacement les apôtres au silence.

    Le tableau de l'antichristianisme brossé par Shakespeare, et qui coïncide presque avec l'évolution politique de l'Occident, diffère donc nettement de l'athéisme exalté par Nitche comme le moyen de rétablir la paix dans le monde.


     


  • Sociopathie du Français

    La sociopathie est le propre de l'homme, me disais-je hier en remontant en zigzaguant un boulevard parisien encombré de chalands fiévreux à l'approche de Noël. L'argent fait des petits, c'est ça qui rend la femme moderne aussi stérile, promenant son conjoint soupirant de bazar en bazar, en gage de fidélité.

    D'autres époques ont eu à affronter la violence des moeurs, nous avons à affronter le confort, qui ôte la vie avant de l'avoir vécue, la sienne et celle de ceux qui doivent supporter notre dépense.

    Suppôts de Satan, ne soyez pas amers au spectacle de cette déconfiture de la beauté et de tous ces démocrates-crétins qui sniffent la mort. Il reste Jésus-Christ, le plus extérieur au monde et indifférent à son destin, marchant sur les eaux, ce qui fait rire les futurs noyés.

  • Mandela, piège à nègres

    Le décès du leader politique sud-africain Nelson Mandela est l'occasion d'un déferlement de bigoterie religieuse dans la presse capitaliste. Ce dernier adjectif s'impose, car le rôle dévolu à Nelson Mandela, comme Barack Obama, est avant tout de "blanchir" le pouvoir occidental en lui prêtant une intention fraternelle, ou celle de s'amender - bonnes intentions dont l'enfer de l'ordre mondial est pavé.

    Les nègres ne servent pas seulement à faire les sales boulots dont les blancs ne veulent pas, désormais ils servent aussi de paratonnerre au néo-colonialisme.

    Décriée le plus souvent dans les médias, l'éthique judéo-chrétienne continue de servir de modèle à une stratégie de tartuffes. Les partis noirs radicaux ont d'ailleurs été parmi les premiers à prendre leur distance avec Barack Obama et à distinguer non seulement l'arnaque, mais ses dangers.

    D'une manière générale, cette façon de coloniser l'Afrique sans le dire ne fait qu'accroître l'irresponsabilité politique.

    Je décerne la palme du panégyrique le plus crétin au philosophe kantien Luc Ferry, ô combien typique de la tartufferie judéo-chrétienne laïcisée ; ce dernier se félicite du progrès accompli en matière d'antiracisme ainsi : - Nos grands-parents, dit-il, pouvaient tenir autrefois des propos qui relèveraient aujourd'hui des tribunaux... sans d'ailleurs aucune méchanceté.

    L'absurdité du propos de Luc Ferry tient à ce qu'il applique la théorie de la relativité aux valeurs morales (d'une certaine façon, il n'a pas tort, car la théorie d'Einstein n'a de sens que sur le plan moral et non physique).

    Nos aïeux étaient racistes, mais pas méchants. Conclusion logique, sans doute peu kantienne : l'antiracisme est sans effet contre la haine. De fait, les manifestations de haine ne sont pas rares de la part de certains militants antiracistes. D'une certaine façon, l'invention d'un nouveau péché permet de braver l'ancienne précaution morale.

    La réalité du temps de nos aïeux proches dans le temps est celle d'un colonialisme extrêmement brutal (200.000 pour rétablir l'ordre républicain en Algérie), au nom des valeurs républicaines. Bien sûr, la cause de ce colonialisme n'a rien à voir avec les préjugés racistes ; la meilleure preuve en est que les valeurs républicaines se sont imposées dans les provinces françaises avec une brutalité aussi grande.

    Maintenant, disons d'où vient le préjugé raciste, historiquement. Il a bien sûr une cause juridique. Le relever permet de comprendre que ce type de préjugé n'est pas spécialement le fait des classes populaires : il fut inculqué aux classes populaires par leurs élites, afin de les associer à la défense de tel ou tel type de propriété ou de territoire. Si l'on peut entendre certains Israéliens tenir des propos extrêmement racistes, cela n'a rien à voir avec le judaïsme, mais avec le mysticisme patriotique dans lequel l'Etat israélien est englué, et par lequel il se consolide. De même l'encerclement par les Prussiens donna l'idée aux élites françaises d'inculquer au populo la haine du Boche.

    Traduit par des autorités morales dont l'autorité est la plus dépourvue de légitimité, le péché nouveau de "racisme" est interprété comme "la peur de l'autre". C'est parfaitement faux, historiquement : le préjugé raciste traduit essentiellement la peur de l'autre, "en tant qu'il représente une menace pour la propriété".

    Le racisme n'est qu'un préjugé ; par conséquent, en tant que tel il est superficiel et peut-être remplacé par n'importe quel autre - le sentiment de supériorité du tenant des valeurs laïques, par exemple, à l'égard des mahométans, des chrétiens ou des juifs.

    L'humanisme qui repose sur l'antiracisme est donc le plus frelaté.

    La tactique des idéologues libéraux, dont Luc Ferry fait partie, consiste à noyer le poisson, c'est-à-dire à occulter le fait social de la violence des riches, pointé par Jean-Jacques Rousseau, et d'autre part une erreur dont J.-J. Rousseau n'est pas exempt, bien qu'il n'a pas été témoin du développement de la violence des banquiers et des industriels capitalistes qui fonde les nations post-modernes, à savoir qu'il n'y a pas de remède social à la violence sociale ; c'est à quoi tient le mensonge particulier de l'éthique judéo-chrétienne, d'ailleurs : prétendre qu'il existe un remède social au fait de la haine sociale, alors que les évangiles disent tout le contraire.



  • Europa über alles ?

    L'ex-trublion de Mai 68 Daniel Cohn-Bendit, en fin de carrière politique et reconverti dans le commentaire journalistique, commentait ce matin les remous politiques qui agitent l'Ukraine, dont la population incline du côté de la Russie de Poutine, ou bien du côté du Pacte Atlantique.

    Inutile de dire que Daniel Cohn-Bendit est un fervent défenseur du Pacte Atlantique, à l'instar des élites parisiennes, et suivant un mouvement amorcé depuis la chute du Mur de Berlin. Comme tous les diplomates, les diplomates français jouent un double jeu, étant donné que la puissance de la Russie de Poutine et ses richesses énergétiques sont loin d'être négligeables.

    La ruse diplomatique à elle seule suffit à dissuader de croire dans le motif d'un ordre mondial pacifié.

    Daniel Cohn-Bendit, pour faire la promotion de l'Europe en cette période difficile où une partie de la population ukrainienne est à peu près la seule à exprimer le désir de ralliement à l'Europe, n'a pas hésité à qualifier celle-ci de zone de liberté et de bien-être. On aurait cru une vieille pub des années 80. En fait de bien-être, le marché européen obéit aux contraintes de l'économie capitaliste, régime fondé sur la compétition et la frustration, c'est-à-dire les mobiles probablement les moins pacifistes qu'une population peut avoir, comme la culture de masse permettant aux élites de contrôler les classes moyennes et populaires l'indique. La liberté et le bien-être vanté par Daniel Cohn-Bendit est entièrement publicitaire, et l'humanisme de cet énergumène ne dépasse pas ce niveau.

    L'Europe comme solution de paix est sans doute l'élément de propagande des élites dirigeantes européennes le plus cynique. Non seulement l'idéal européen n'a jamais permis de calmer les haines territoriales entre voisins européens, mais le motif d'une Europe unie et pacifiée se retrouve derrière chacune des guerres qui ont mis les nations européennes, puis le monde, à feu et à sang, depuis le XIXe siècle.



  • Contre Soral

    Je suis d'autant plus gêné de m'exprimer contre Alain Soral qu'il est de nouveau la cible d'un imbécile en la personne du violoniste Alexis Galpérine, petit-fils de Léon Bloy. La Licra, institution certifiée conforme à la République française néo-colonialiste, a demandé et obtenu (!) en référé la censure d'une partie du "Salut par les Juifs" de Léon Bloy. Et ne voilà-t-il pas que ce violoniste, sous le principal prétexte d'une consanguinité avec l'auteur du "Salut", au lieu de fustiger la Licra ou le juge des référés de Bobigny, préfère accuser Soral dans "Le Figaro" (28 nov.) de déshonorer son aïeul et sa famille en publiant Bloy.

    Il ne semble pas venir à l'esprit de ce Galpérine que le catholique Léon Bloy se distingue nettement du cochon démocrate-chrétien abonné au "Figaro", son veau, ses vaches, et ses couvées, ni que les lois et la justice du jour, en dépit qu'elles paraissent exprimer le respect des noirs, des juifs, et de toutes sortes de gens supposés inaptes à se défendre par eux-mêmes, sont d'abord les lois et la justice d'un Etat ploutocratique. Du riche, l'opprimé peut s'attendre à la même protection que l'agneau peut s'attendre du loup. 

    Malgré le soutien d'Emile Zola au capitaine Dreyfus, Bloy ne vit en Emile Zola qu'un hypocrite parvenu, prompt à tirer de la défense du populo des revenus pour s'acheter une villa cossue. En démocratie, comme partout ailleurs, les pauvres mangent les miettes qui tombent de la table des riches, et parmi ces miettes il y a des mots doux, dont l'antiracisme, qu'aucun esprit juste ne prendra au sérieux tant qu'il n'aura pas été mis fin au détournement des richesses de pays tiers par l'Occident, à quoi l'excédent de puissance des nations occidentales tient principalement - le racket à l'échelle internationale.

    Je me limite à dire pour cette fois que le "Salut par les Juifs" fut écrit dans un contexte d'abandon du judaïsme par de très nombreux juifs parvenus, au profit de l'idéologie dominante, dans un souci d'intégration à la République ; un contexte très différent de celui où nous sommes, de "fierté juive retrouvée", manifestation d'un patriotisme dépourvu de lien avec la religion de Moïse. 

    Les jugements de la Licra et du juge de Bobigny relèvent donc du relativisme absolu, c'est-à-dire de l'arbitraire que l'on peut craindre en général de la part d'un tribunal d'inquisition. Les conventions morales d'aujourd'hui, Bloy ne pouvait s'y plier par avance. Si le geste de Soral permet de mettre en lumière le caractère ubuesque de la justice moderne, c'est tant mieux.

    Si le propos de Bloy est condamnable, il ne peut l'être qu'au regard des évangiles, dont la conformité est impossible avec la justice humaine (c'est précisément la raison du caractère particulièrement inique des tribunaux ecclésiastiques d'inquisition, et de toute justice rendue au nom de prétendues "valeurs judéo-chrétiennes"). Il est une image de la justice des hommes rendue au nom de Dieu dans les évangiles, c'est celle du sanhédrin condamnant le prophète Jésus-Christ à mort. Le jugement du procurateur de Judée Ponce-Pilate eût peut-être été équitable, si les tribunaux religieux ne lui avaient pas forcé la main. De là vient que les chrétiens sont portés à prêter à la collusion de l'ordre moral et du pouvoir politique une sinistre signification.

    Probablement l'étrange répétition de ce phénomène dans l'histoire, à savoir la prétention de l'Eglise catholique romaine, puis de l'Occident en général, à dire le droit au nom de Dieu, et donc à inventer de toutes pièces cet ordre divin, ce phénomène n'est pas sans rapport avec le bouquin de Léon Bloy, ni avec Alain Soral lui-même.

    L'ambiguïté d'Alain Soral est la même que celle de Léon Bloy ; ce sont tous les deux des anticléricaux-cléricaux, des dissidents face à un ordre moral dominant hypocrite, qui en appellent à un ordre plus juste. A cet égard, il ne fait aucun doute que Bloy aurait préféré être cité par Soral plutôt que par les actionnaires démocrates-chrétiens du "Figaro", immonde torchon du point de vue catholique. Bloy était du reste assez bien informé du christianisme, pour savoir que la filiation naturelle invoquée par A. Galpérine, est le dernier argument qu'un chrétien peut invoquer.

    C'est l'invocation de cet ordre plus juste qui, de la part de Bloy ou Soral, est contestable et doit être contestée du point de vue chrétien. Le Messie a dissuadé ses fidèles apôtres d'attendre une quelconque récompense dans l'ordre temporel, sur le plan moral ou politique. La doctrine des derniers évêques de Rome est, à cet égard, parfaitement diabolique au regard de la parole divine, en particulier celle de Karol Wojtyla quand il affirme l'importance du temps dans le salut de l'homme. C'est bien sûr en faveur du monde que joue le temps, ce qui explique que le Messie explique à ses apôtres que l'avènement de l'Eglise est pour bientôt.

    On note d'après son Journal que Léon Bloy s'intéresse de près à l'histoire, mais il ne remarque pas ou peu le rôle actif de l'Eglise catholique afin d'étouffer l'histoire au profit d'une théorie impossible de la culture chrétienne et du droit chrétien, c'est-à-dire de l'idée d'un christianisme civilisateur, la plus éloignée du "salut par les juifs" et des épîtres de saint Paul, qui ne cesse de répéter l'accomplissement par le Messie de la promesse contenue dans la loi de Moïse. L'apôtre Paul est beaucoup moins "romain" que les catholiques romains, et c'est ce qui explique la haine de Nitche vis-à-vis de Paul. Celui qui parle au nom de Satan a conscience du danger que représente le catholicisme véritable pour l'ordre providentiel satanique.

    La culture catholique médiévale idéale de Bloy, Soral ou J. Ratzinger est un mirage, dont les tragédies de Shakespeare dissipent entièrement l'illusion. L'entreprise de démolition par Sheakespeare de la culture occidentale judéo-chrétienne ne fait pas de lui un athée. Ce que vise Shakespeare-Bacon, ce n'est pas le christianisme, mais son dévoiement sous la forme de la "culture" ou de l'art prétendument chrétien, qui contient les germes d'un totalitarisme et d'un mal qui, contrairement au propos de la philosophe nazie Hannah Arendt, n'a rien de "banal". La banalité du mal n'est concevable que du point de vue néo-païen technocratique, c'est-à-dire celui dont est issu la violence moderne et la culture de masse. L'exceptionnelle régression de l'Occident dans la guerre civile n'a rien de banal, si l'on se place du point de vue de l'histoire, et non celui de la morale moderne relativiste d'Hannah Arendt.

    - Outre l'étrangeté de la doctrine d'Alain Soral, au regard du message évangélique (ésotérisme que l'on peut soupçonner d'être intentionnel, comme celui de Dante Alighieri), tandis qu'elle résulte chez Léon Bloy de l'influence néfaste de la doctrine maçonnique de J. de Maistre, il y a dans son propos touchant la politique internationale une affirmation qui laisse sceptique. Le pacte entre l'Etat d'Israël et la superpuissance technocratique américaine n'est-il pas d'abord un danger pour les juifs ? C'est la peur qui incite essentiellement à se fier aux institutions d'une nation plutôt qu'à Dieu, à désirer la sécurité plutôt que la liberté. Or la peur est mauvaise conseillère. L'enrichissement fut le facteur principal de la banalisation et de l'intégration des juifs aux valeurs prussiennes de la Mitteleuropa - non seulement l'argent ne les a pas protégés, mais la sagesse juive fait au contraire valoir que l'argent peut être une plaie (cf. Ecclésiaste).

    (C'est même une plaisanterie de faire interdire Drumont, alors que les très racistes Kant ou Montesquieu sont au programme des études universitaires. Montesquieu justifie l'esclavage des nègres par la nécessité de pouvoir se procurer du sucre moins cher ! Et il faut s'empresser d'ajouter que cet aveu est beaucoup plus honnête de la part de Montesquieu que les opérations militaires afin de se procurer du pétrole ou de l'uranium au meilleur prix, au nom des droits de l'homme.)




  • Science sans conscience

    J'explique longuement dans ma précédente note comment la "culture scientifique" revient à ce que Rabelais qualifie de "science sans conscience".

    Un athée tel que George Orwell fut capable de deviner sur quelle imposture scientifique repose la technocratie moderne, et de saisir l'ampleur de cette imposture. Celle-ci mène à une sorte de religion de la science, s'éloignant de plus en plus du rationalisme scientifique pour basculer dans la science-fiction.

    Seul un chrétien peut comprendre le sens historique de cette gigantesque imposture. On a coutume de dire, de croire (ou de récuser) qu'un chrétien est reconnaissable à l'amour ou la charité dont-il fait montre, dépourvue du caractère érotique "nécessaire" ou providentiel (à travers le "providentialisme", le monachisme catholique romain a réintroduit la culture de vie païenne sous l'apparence d'institutions chrétiennes) ; mais, dans le christianisme, amour et vérité scientifique sont indistincts, de sorte qu'on peut dire que c'est le manque d'amour, aussi bien que de science, qui permet à l'humanité de persister, aux yeux d'un historien chrétien tel que Shakespeare. Le monde s'appuie sur l'iniquité, et cette iniquité se traduit dans le domaine scientifique par le monopole des technocrates.

    - La science moderne, en particulier la science physique, est organisée comme une poupée russe ou comme une suite mathématique. Elle tire la plupart de ses "preuves", non d'expériences présentes, mais de démonstrations ultérieures, où la vitesse supposée de la lumière joue un rôle primordial, alors même que cette vitesse est quasiment impossible à mesurer concrètement. Cette science évolue paradoxalement depuis le XVIIe siècle et la révolution copernicienne. Elle progresse contre sa propre logique. Prenons un exemple : les données de l'astronomie moderne contemporaine invalident largement la révolution copernicienne, tout en étant solidaires et consécutives de celle-ci. Cette manière d'évoluer de la science est bien plus typique d'un phénomène religieux que d'autre chose, car on peut dire de la plupart des religions qu'elles progressent en s'adaptant.

    - De ce fait, l'imposture scientifique des élites technocratiques est beaucoup plus facile à discerner dans le domaine de l'histoire, science à laquelle les élites ont substitué, grosso modo, l'idéologie hégélienne, dont le caractère "providentialiste" a l'avantage, pour les élites, de consolider leur position dominante.

    L'histoire est une science plus facile d'accès pour l'homme du peuple que pour l'homme d'élite, pour la raison indiquée par Shakespeare que la conduite des hommes ou la politique implique l'aveuglement ou l'ignorance de certaines réalités sur lesquelles l'historien véritable fait au contraire la lumière. L'historien véritable est très rare : il se caractérise par le refus d'octroyer aux élites dans l'histoire le rôle prééminent qu'elles sont amenées à jouer en politique. En outre, Shakespeare se montre très avisé quant à l'irresponsabilité ou la folie particulière des élites modernes, c'est-à-dire aux conséquences de la révélation chrétienne sur le plan politique.

    On peut observer que l'idéologie hégélienne satisfait aussi bien les exigences d'une élite antichrétienne que d'une élite soi-disant chrétienne, et s'étonner d'une telle "ouverture d'esprit". La raison en est simple : l'idéologie totalitaire hégélienne est élitiste, et c'est tout ce qui importe en l'occurrence.

    G.W.F. Hegel traduit la révolution française d'une manière qui n'a pas l'heur de coïncider exactement avec les préjugés inculqués en France par l'Education nationale sous couvert d'instruction civique. En effet, Hegel traduit la révolution française comme un signe de progrès chrétien. Deux autres versions sont davantage en vogue dans l'intelligentsia française : la première, c'est que la révolution de 1789 est un progrès antichrétien ; la seconde, nitchéenne ou baudelairienne, c'est que la révolution française n'est pas un progrès, mais au contraire une catastrophe.

    L'observation juste est que, plus la taille des nations enfle au cours de l'histoire moderne, plus l'enseignement officiel de l'histoire en leur sein se rapproche de l'idéologie pure. La loi des Etats ploutocratiques modernes (Etats-Unis, Russie, Chine, etc.) ne peut se passer du fanatisme religieux afin de se faire respecter, et par là-même ne peut pas tolérer la critique historique. En termes de propagande de la foi, la supériorité de l'idéologie hégélienne, au contraire des arguments réactionnaires de Nitche ou Baudelaire, est de paraître s'accorder avec l'histoire, exactement comme la démocratie ou la promesse d'égalité.

    La mécanique de base du raisonnement hégélien est presque aussi bête que les mathématiques modernes, et c'est ce qui explique qu'elle fonctionne à plein. En résumé, l'Occident est gouverné par des élites qui entraînent les peuples occidentaux vers le progrès, comme Moïse conduisit les Hébreux jusqu'en Terre promise. C'est l'absence d'esprit critique, notamment à l'égard des élites dirigeantes, qui explique le succès du raisonnement hégélien dans les castes occidentales dirigeantes, aussi bien national-socialistes (Etats-Unis) que soviétiques (URSS/Chine).




  • Culture scientifique

    Du point de vue scientifique, l'idée de "culture scientifique" ne veut rien dire. Quel peintre se contenterait du vernis ? Quel savant s'abstiendrait de soumettre à la critique les données de la science ?

    De temps en temps, une étude statistique publiée dans tel ou tel journal sérieux fait état des lacunes des Français en matière de "culture scientifique", de leur retard à adhérer au transformisme darwinien, par exemple, voire à ce qu'il est convenu d'appeler la "révolution copernicienne". En somme, de nombreux Français "mal éduqués" s'en tiennent à l'observation de la course du soleil et prêtent peu l'oreille aux explications avancées par Galilée de la stabilité des choses terrestres, en dépit d'une vitesse de rotation de la terre hallucinante.

    Un tiers des Français pencherait plutôt en faveur de l'immobilité de la terre ; d'ailleurs, je crois qu'on pourrait aussi compter un autre tiers de Français, en quelque sorte le "ventre mou", qui adhèrent à la révolution copernicienne comme à un article de foi, ignorant le détail des "preuves" fournies par Galilée. Je mets "preuves" entre guillemets, car il s'agit d'une démonstration théorique, et non d'une preuve expérimentale, contrairement à celle de la rotondité de la terre. Le physicien moderne H. Poincaré indique même que Copernic ne fournirait qu'une méthode de calcul. 

    Ces statistiques sur la culture scientifique ont le don de déclencher des réactions mi-inquiètes, mi-vexées, de la part des autorités en charge d'inculquer aux Français une culture scientifique digne de ce nom. Elles fournissent l'occasion à ces élites françaises d'enfourcher leur dada favori : les problèmes de méthode et de pédagogie. Mettez trois ou quatre bonnes femmes un peu cultivées ensemble, et très vite elles se mettront à disputer de questions pédagogiques, comme si la pédagogie était une science.

    - Qu'est-ce qui cloche dans la méthode ? Il ne vient pas à l'esprit de ces élites qu'il s'agit peut-être là d'un problème de discipline, primo, et secundo que la discipline, si elle est une vertu sur le plan culturel, n'est pas forcément une qualité scientifique. Les Français manquent peut-être de discipline en comparaison, mettons, des Japonais ? Vu le goût pour les gadgets dans cette nation, et la cohésion sociale dont elle fait preuve, à la limite du fanatisme, je parierais que sa "culture scientifique" est exemplaire.

    Les élites françaises ont souvent un raisonnement qui devrait les inciter à se déporter aux Etats-Unis, au Japon ou en Allemagne.

    *

    Plus sérieusement, le crédit accordé à la "culture scientifique" est une caractéristique du totalitarisme. Tout en rejetant le monopole scientifique du clergé catholique romain, à travers l'idée de "culture scientifique" se perpétue le même mouvement de développement conjoint de la science et de la religion ou de la morale. Le "comité d'éthique scientifique" n'est que la reformulation du tribunal d'inquisition. On comprend pourquoi, depuis l'Egypte antique, les élites considèrent le langage comme une chose sacrée : il leur permet de projeter un monde à leur image, et de soumettre le peuple à cette cinématographie.

    Le comité d'éthique scientifique représente, à l'instar de son modèle, une double menace pour la morale et pour la science. Sur le plan scientifique, il fait germer l'idée que le progrès scientifique coïncide avec le progrès technique. Sur le plan moral, il remet les rênes entre les mains des élites politiques, dont les intérêts économiques et stratégiques sont primordiaux.

    La science humaniste authentique contient une mise en garde contre l'art et la technique que la science moderne s'est efforcée d'occulter, ainsi que l'aspect chrétien de la volonté de progrès scientifique, qui reflète le caractère apocalyptique du christianisme, la dimension de révélation ultime de celui-ci. Si un chrétien ne peut croire un seul instant dans l'idée de progrès social, c'est parce qu'il croit dans la science et au dépassement nécessaire de la technique et du plan social culturel. Ainsi le savant humaniste Francis Bacon fait observer que le progrès technique n'est qu'une question de temps, et qu'il n'est donc pas un véritable progrès.

    La science moderne a pris un chemin de traverse extrêmement dangereux en prenant à la fois ses distances avec le rationalisme païen, d'une part, qui visait un ordre politique équilibré, appuyé sur une philosophie naturelle cohérente, et récuse l'idée de progrès scientifique ou social, et d'autre part avec la logique chrétienne apocalyptique, insouciante des sciences humaines ou morales. De là l'absurdité particulière du savant moderne et des théories scientifiques modernes, relevée par exemple par George Orwell dans sa critique du totalitarisme. Dans le domaine de l'art, on a pu observer ce phénomène avec les "surréalistes" débiles, ou d'un cynisme exacerbé comme Salvador Dali. S'il y a un courant artistique qui correspond à l'idée de "cancer artistique", c'est celui-là. Il y est fait moins de publicité, mais l'on retrouve dans la science une même tendance "surréaliste".

    Nitche, au nom de l'antichristianisme, fut capable de discerner et qualifier la culture moderne de "culture de mort", mais non de s'y opposer efficacement ou d'en élucider le sens véritable.

  • Enfer et anarchie

    Défendant le point de vue de l'ordre naturel et de la morale rationnelle (non-abstraite et non-féministe) qui en découle, F. Nitche identifie Jésus et ses apôtres à des anarchistes. Tantôt Nitche distingue les chrétiens authentiques, fidèles aux évangiles, des chrétiens de culture (bourgeois capitalistes), tantôt il fait comme s'il n'y avait pas de différence.

    Cela fait partie d'une stratégie de combat, puisque Nitche entend éradiquer le christianisme afin de restaurer une culture païenne qui, là encore, demeure relativement mal définie, Nitche niant le rôle historique du peuple hébreu dans l'Antiquité (La sympathie de nombreux juifs renégats pour Nitche vient de là, comme il y a pu avoir des catholiques "maurrassiens", ravis dans le fond que Maurras insulte les apôtres chrétiens, et ne retienne du catholicisme romain que l'appareil judiciaire.)

    La vision chrétienne authentique de l'enfer est celle du monde où nous sommes. Non seulement le purgatoire n'a pas de fondement scripturaire, mais "l'au-delà" n'a qu'une consistance sociale - traduisez : il n'y a "d'au-delà" qu'en tant que prolongement d'une société donnée. Où se situe l'au-delà dans les sociétés "post-modernes" athées ? Sur un plan identitaire ou personnel, dans les différentes séquences de l'âme. Sur le plan collectif, dans les utopies millénaristes nationales-socialistes, communistes ou démocratiques. Toute la difficulté, déjà rencontrée par l'Eglise catholique romaine autrefois, est d'adapter un système providentiel de droit païen, essentiellement élitiste, à la rhétorique démocratique égalitaire moderne.

    Les martyrs chrétiens ou les apôtres fidèles ne représentent donc pas un danger pour l'art ou la civilisation, mais ce danger vient bel et bien des politiques, des morales ou des doctrines sociales chrétiennes. On comprend aisément sur le plan artistique la difficulté que représente le fait de produire un art chrétien qui contourne les vérités essentielles du christianisme - à quel point cet art s'expose à ressembler à un échangeur autoroutier.

    - Avant de décréter l'assassinat par la voie légale du Messie, le procurateur romain semble hésiter, tant le danger ou la menace que celui-ci représente, et qui sera théorisée dans les siècle suivants par de nombreux "historiens païens", tant cette menace lui paraît inconsistante. Cependant, devant l'insistance des chefs religieux juifs, il finit par passer outre le droit (c'est-à-dire ce qui est censé servir de règle de conduite à un Romain) et ordonner l'exécution. C'est la meilleure illustration qu'on puisse proposer des rapports de la sphère privée et de la sphère publique selon les tartuffes laïcs démocrates-chrétiens. L'ignominie que la "sphère politique" hésitait à commettre, la sphère religieuse la persuada de l'accomplir.


  • Le Dieu hasard

    "Nécessairement, le hasard a beaucoup de pouvoir sur nous, puisque c'est par hasard que nous vivons." Sénèque

    "Le hasard est le dieu des imbéciles." Bernanos ; celui-ci aurait pu ajouter aux imbéciles, les foetus, les statisticiens et les vieillards.

    Le monde moderne insinue une idée de la liberté proche du hasard, admettant ainsi l'ignorance au rang du savoir, et la barbarie au rang de l'humanisme.

  • Jésus contre Socrate

    La référence à Socrate ou Platon est un des éléments de la subversion païenne à l'intérieur du christianisme. Détournant le christianisme à leur profit, les élites occidentales, notamment au moyen-âge, ont théorisé à l'aide de clercs renégats la convergence du christianisme et de la philosophie de Platon.

    Si cet office est le plus sinistre du point de vue chrétien, déclenchant la colère du Christ Jésus contre les pharisiens et la synagogue, c'est parce qu'il revient à abolir progressivement la notion juive essentielle du péché originel. Un blogueur catholique romain, Yves Daoudal, impute cette négation du péché originel au "socialisme" : le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il fait preuve de très courte vue ; dans la mesure où les évangiles ne permettent de fonder aucune doctrine sociale - aucun parti, aucune magistrature, aucune nation ne peut revendiquer la caution de la parole divine -, dans cette mesure ce blogueur catholique romain a raison : le socialisme ne peut s'enorgueillir du point de vue chrétien que de la bêtise d'Adam et Eve. Mais ce blogueur est totalement aveugle en ce qui concerne une dimension historique essentielle : la doctrine catholique romaine est la matrice de toutes les doctrines sociales modernes, y compris dans leur formulation laïque ou athée.

    Qu'est-ce qu'un athée qui se prosterne devant les "droits de l'homme" et la démocratie, si ce n'est un imbécile, ignorant qu'il n'y a là que le produit dérivé des valeurs dites "judéo-chrétiennes" occidentales ; c'est-à-dire que le mouvement d'abstraction éthique ou esthétique moderne n'aurait pu avoir lieu sans le préalable de la doctrine catholique romaine.

    J'ai coutume de le dire, et je le répète, que le totalitarisme est une formule de la tyrannie, adaptée au fait nouveau de la révélation chrétienne. Cette dernière permet aux hommes de bonne volonté de s'affranchir de leur condition naturelle d'esclave, d'une manière plus radicale encore que le judaïsme. Pour les élites politiques et morales, dès lors, le christianisme se présente comme un obstacle insurmontable afin de bâtir un monde reflétant l'architecture du système solaire (résumée par le nombre 666).

    Pour prendre l'exemple le plus contemporain : l'objectif de la paix mondiale, fondée sur des valeurs (judéo-chrétiennes) modernes, cet argument qui sert d'étendard aux puissances occidentales, s'accompagne du mensonge, au sein de ces nations, selon lequel ces valeurs éthiques les plus abstraites, et à vrai dire recevable d'un seul point de vue animiste, résultent de l'accomplissement des valeurs anthropologiques judéo-chrétiennes ou de "l'esprit des Lumières". Cela même alors que le christianisme est le moins susceptible de fonder un jugement de valeur quelconque, et que le christianisme est la moins anthropologique des religions, puisqu'elle fournit d'emblée une réponse mythologique aux questionnements psycho-sociaux : le péché originel. A la vertu platonicienne, qui a valeur d'absolu sur le plan social, le christianisme n'accorde qu'une importance relative.

    *

    La question des philosophies, des arts ou des sciences "pré-chrétiens" est une question critique. En principe, la philosophie antique est démoniaque du point de vue chrétien, c'est-à-dire qu'elle véhicule une philosophie naturelle où la mort prend place. Tandis qu'il n'y a pas de bonne mort ou de mort honorable du point de vue chrétien.

    Il reste que quelques philosophes ou poètes antiques ont conçu qu'il n'était pas impossible pour l'homme de surmonter sa condition d'être mortel et sa bêtise naturelle ou héréditaire, à force de sagesse, contrairement aux autres espèces.

    Sans indiquer malheureusement une direction, le poète Baudelaire est un des derniers poètes occidentaux à avoir exprimé la raison profonde qui empêche les chrétiens d'adhérer à l'hypothèse de l'évolution, ainsi : "Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan."

    Il faut préciser que la postulation vers le bien moral représente la postulation vers Satan. Satan est le bienfaiteur de l'humanité, ou se pose comme tel. Il guide naturellement l'homme d'élite, ou celui qui, issu de la plèbe, est animé par la volonté de s'élever. On voit de la première ligne à la dernière des évangiles, le Christ Jésus manifester son désintérêt absolu pour tout ce qui est éthique ou ne l'est pas du point de vue social. C'est toujours vis-à-vis de Satan qu'un criminel de droit commun s'endette en perpétrant son crime, tandis qu'il n'y a du point de vue chrétien d'attentat véritable que contre la vérité. Autrement dit, l'amour chrétien se présente comme une transgression sociale et une menace pour les élites.


  • Culture de masse

    La culture de masse - en l'occurrence la coupe du monde de football - et le totalitarisme sont indissociables. Autrement dit, je suis conscient de vivre dans une époque totalitaire, du fait de l'omniprésence de la culture de masse. Je suis également conscient qu'entre un régime tyrannique "oedipien" classique ou pyramidal et ce qu'il convient de qualifier de "totalitarisme", s'insère l'événement essentiel de la révélation par le Christ Jésus.

    C'est cet événement qui détermine le changement de nature de la tyrannie, qui ne peut plus procéder depuis la résurrection du Messie des chrétiens du droit ou d'une philosophie naturelle classique, mais qui est contrainte de s'y adapter. Pour prendre une métaphore parlante, un transatlantique ne navigue pas de la même manière avec une voie d'eau sous la ligne de flottaison. 

    Quand la métaphysique rend mieux compte de l'histoire et de la science que la géométrie, il faut être un forcené et non un homme rationnel pour persister dans des explications qui, au demeurant, relèvent plus aujourd'hui de la pataphysique (voyage dans le temps, Boson de Higgs, mondes multiples, matière noire théorique) que de la science physique véritable.

    La littérature de Shakespeare-Bacon est la révélation de cette révélation. Shakespeare a mis le pied dans la porte étroite qui mène au salut, en vérité, afin qu'elle ne puisse être refermée par les actionnaires du monde.

    Un phénomène observable à propos de la culture de masse, c'est qu'elle n'est justifiée par personne, nul ne la revendique, en même temps qu'elle joue un rôle de sidération massif à l'échelle mondiale. Par "personne", je veux dire personne, hormis les tocards en état d'ébriété sous son charme, et une poignée d'intellectuels-journalistes incapables d'émettre autre chose que des truismes, dans le genre de Stendhal. Stendhal fait en effet l'éloge de l'opéra, qui contient la recette de la culture de masse telle qu'on la connaît aujourd'hui. Pour une raison aristocratique et artistique, Nitche a quant à lui fait machine arrière et modéré son enthousiasme primitif à propos de Wagner et de son art d'adjudant boche. On retrouve plusieurs caractéristiques de la culture de masse dans l'opéra, dont l'emprunt à la culture populaire de thèmes, vidés de leur sens la plupart du temps, et réduits au stimulus. Vue sous un autre angle, la culture de masse est la transmission du goût bourgeois au peuple, faute morale majeure que l'aristocrate s'interdit (Nitche), voyant bien la conséquence d'empoisonnement qui en résulte.

    Mais, à l'exception de Stendhal et de quelques cas isolés, la critique est la réaction la plus courante, que le point de vue soit moral, politique, philosophique ou artistique. Cependant la culture de masse continue d'opérer, et les critiques demeurent, elles, inefficaces à endiguer la culture de masse, sur le plan moral ou politique ; y compris la critique radicale de Nitche, relativement cohérente, qui consiste à prôner l'éradication pure et simple du judaïsme et du christianisme afin de restaurer la civilisation et l'ordre naturel dont celle-ci découle. "Relativement cohérent", car aucune ligne du nouveau testament, ni aucune ligne de Shakespeare, d'ailleurs, ne permet de fonder une "culture chrétienne". Par conséquent Nitche, tel Don Quichotte, affronte un phénomène qui n'est qu'un leurre, dont il situe l'origine dans le témoignage des apôtres, alors que ce n'est pas son origine. Erreur volontaire de la part de Nitche ? C'est probable, en raison de contradictions majeures dans son étude du christianisme.

    Une critique plus récente et plus cynique (j'y reviendrai), typique de l'intellectuel "post-moderne", consiste à assimiler la culture de masse à la culture populaire, c'est-à-dire à faire croire que la culture de masse répond à un besoin ou à une volonté populaire. On se situe là au stade ultime de la chiennerie libérale. La culture de masse n'est pas moins fastueuse et somptuaire que les jardins suspendus de Babylone ou le château de Versailles, ce qui est parfaitement dissuasif d'attribuer l'organisation de la culture de masse aux classes laborieuses.




  • Athéisme

    Ce que les femmes aiment, ce ne sont pas les hommes mais leur capacité à faire la guerre. Ce que les hommes aiment, ce ne sont pas les femmes, mais leur incapacité à faire la guerre bien qu'elles soient douées pour la provoquer "par amour", disent-elles.

    Si l'on s'en tient à cet examen objectif des faits, l'Amour n'est pas, mais seulement la Nature, recouverte d'une couche de confiture sociologique.

    Il y a donc une sorte de science qui mène à l'athéisme. Mais le Christ Jésus lui aussi manifeste le plus profond mépris de la société, ses contrats, ses taxes, ses fêtes, son architecture... et pourtant il n'est pas athée.

  • Connerie la guerre

    La guerre répond à un besoin naturel et l'armistice correspond à l'épuisement des forces physiques. Malgré tout il y a encore des connards à être écologistes.

  • Le hasard, dieu, la science

    A propos d'une interview du philosophe de plateau télé Luc Ferry, en duo avec les savants de plateau télé Igor et Grichka Bogdanov sur le hasard, dieu et la science (Figaro magazine, 25 oct. 2013).

    Je qualifie Luc Ferry de "philosophe de plateau télé" puisqu'il pratique une discipline proche du yoga ou du sermon du curé en chaire le dimanche : les philosophes sont hors du jeu technocratique et n'ont qu'une influence marginale désormais ; tout au plus ils lui fournissent une caution intellectuelle, en parfaits irresponsables, jouant ainsi le rôle de bouffons du souverain peuple, dépourvus d'effet comique. Appelé aux fonctions de ministre de l'Education naguère, L. Ferry y a joué son rôle de ministre d'une grande nation technocratique : il a prononcé des discours.

    Si j'estime juste de réagir, c'est parce que ce digne représentant de l'ordre public, athée comme il se doit (ou c'est préférable), répand un certain nombre de mensonges sur le christianisme, avec la caution de prélats catholiques romains. "Le Figaro magazine" est d'ailleurs depuis une quarantaine d'années un repaire d'occultistes, portant différents masques, tantôt ouvertement satanistes comme feu Louis Pauwels, tantôt démocrates-chrétiens, se servant du christianisme comme d'une propagande au service des élites capitalistes françaises.

    - Le mérite des frères Bogdanov, tout d'abord est de rappeler, s'agissant d'Albert Einstein, que celui-ci, lorsqu'il mentionne "dieu", évoque une sorte de "grand architecte de l'univers" ; A. Einstein est allemand et non juif comme certains propagandistes tentent de le faire croire, un descendant de Pangloss-Leibnitz et non un disciple de Moïse.

    Il ne peut d'ailleurs en être autrement, s'agissant d'un mathématicien ou d'un juriste. Et Luc Ferry tente de faire passer pour chrétienne une "idée de dieu" juridique, introduite frauduleusement par les clercs du moyen âge et perpétuée ensuite par le philosophe allemand E. Kant. Du préjugé mathématique ou juridique découle une conception uniforme de l'univers, régi de la particule aux astéroïdes les plus importants par des lois ou une architecture en principe univoque (666). Tandis que pour les juifs et les chrétiens, a contrario, l'antagonisme des forces cosmiques empêche de déduire des lois mathématiques de la nature uniformes ou une philosophie naturelle éternelle, telle que celle des anciens égyptiens, des brahmanes indiens suppôts de Satan (ou bien encore de F. Nitche).

    - "Le hasard se définit par opposition au déterminisme (...)" L. Ferry

    Faux : les lois mathématiques, probabilités ou statistiques, ne peuvent se passer de la notion d'aléa. Or ce sont des lois qui permettent, à l'instar de l'astrologie auxquelles elles se sont substituées dans le registre moral ou politique, de prévoir ou de prédéterminer les événements. Autrement dit l'idée de destin antique (sur lequel s'appuie le culte de Satan), liée à l'astrologie, a pris dans les temps modernes technocratiques l'aspect des statistiques mathématiques modernes. Contrairement à l'affirmation du philosophe kantien, hasard et déterminisme sont liés. Luc Ferry défend ici subrepticement une conception totalitaire de la liberté, comme étant liée au hasard.

    - "Mais le front du hasard recule à mesure que la science progresse. (...)" Grichka Bogdanov

    Plus logiquement, les frères Bogdanov défendent dans un premier temps une conception matérialiste du hasard proche de celle d'Aristote : plus la science progresse, plus la "part de hasard" diminue. Aristote fait en effet valoir que la science naturelle, c'est-à-dire l'observation attentive de la nature, réduit d'autant plus la croyance dans le mécanisme du hasard, tant la nature paraît organisée de façon à ne laisser aucune place à l'indétermination ou au hasard (c'est tout le problème de la science naturelle évolutionniste : la place qu'elle accorde au hasard et à l'idéologie mathématique en fait une parente de l'idéologie kantienne - en principe un savant naturaliste doit se montrer le plus réticent à l'explication du hasard). Le hasard est donc lié à l'imperfection du prisme humain et sa difficulté à ne pas succomber à des mirages.

    Mais cette conception justifie de la part d'Aristote la méfiance vis-à-vis des spéculations algébriques ou mathématiques, nécessairement hasardeuses. L'indétermination n'est pas "une marge de liberté" selon Aristote, comme elle l'est pour L. Ferry, mais le résultat de l'ignorance. Les frères Bogdanov, pour leur part, ne paraissent pas se douter qu'une science qui veut réduire la part de hasard au maximum, doit se baser sur l'induction et non sur l'outil mathématique spéculatif. Expérimentalement, ceci ne veut pas dire grand-chose : "ce que l'on appelle l'espace-temps résulte du big-bang qui s'est produit il y a 13 milliards 820 millions d'années" ; cela n'explique en rien comment la matière peut-être issue de ses conséquences, que sont le temps et l'espace.

    - "Pouvoir choisir entre le bien et le mal implique qu'il y a des possibles dans le monde, la tradition chrétienne arguera donc de la Providence, l'histoire répondant au dessein de Dieu, lequel a eu cette bonté vis-à-vis des humains de leur accorder une marge de liberté (...)." L. Ferry

    Ici Luc Ferry s'exprime de façon lapidaire sur des notions qu'il ne maîtrise ni ne définit, et prête au christianisme un raisonnement qui n'est pas le sien. On pourrait ironiser sur la démocratie de la même manière : la démocratie implique qu'il y a des possibles, c'est ce qui explique que les démocrates s'accommodent d'Etats providentiels totalitaires, dans lequel l'individu n'a même pas le choix des arts ou des sciences qu'il souhaite étudier. La notion de providence est une notion essentiellement païenne et non chrétienne. Ici L. Ferry confond, sans doute intentionnellement, la subversion du christianisme par les élites occidentales, avec le christianisme lui-même. Il est facile de vérifier en lisant le nouveau testament qu'il est pur de toute notion éthique ou providentialiste. L. Ferry fait d'ailleurs référence à une conception hégélienne de l'histoire ("l'histoire répondant au dessein de dieu"), sans aucun rapport avec le nouveau testament, mais beaucoup plus conforme au millénarisme national-socialiste ou démocrate-chrétien. L'ex-évêque de Rome Joseph Ratzinger était imbibé d'une telle philosophie : si elle engendre aussi bien des croyants comme J. Ratzinger, que des athées comme Luc Ferry, c'est avant tout parce que le raisonnement hégélien, comme tout raisonnement providentialiste, a pour effet de cautionner l'élite intellectuelle et politique. 

    - "D'un point de vue épistémologique, la causalité n'est donc qu'une méthode de travail scientifique, et non pas ontologique (...)" L. Ferry

    Ici L. Ferry aborde un sujet qu'il maîtrise un peu mieux ; un sujet primordial sur le plan de l'histoire des sciences. L'ontologie est bien abandonnée au profit de l'étude des causes, mais non pour une raison "scientifique" comme le prétendent Ferry et Karl Popper (exemple type du faux savant ou de l'imposteur faisant foi dans l'université), mais pour des raisons TECHNOCRATIQUES. La science polytechnique ou technocratique n'a d'autres finalité que l'efficacité. L'assimilation de la technique à la science est une ruse des élites occidentales. Par conséquent la scission entre l'ontologie et la science résulte d'un artifice, et non d'une démarche scientifique. Le polytechnicien ou l'ingénieur, au contraire du savant véritable, s'accommode de l'idée d'infini ou d'indéfini.

    (A SUIVRE)

     

  • Athéisme

    Si "dieu est mort", comment se fait-il que la morale antiraciste, féministe, démocratique, "moderne" en un mot, comment se fait-il que cette morale subsiste, alors qu'elle est essentiellement "judéo-chrétienne", c'est-à-dire inconcevable dans le cadre d'une religion païenne ? Cherchez l'erreur.

  • Art et vérité

    De nouveau dans une lettre adressée à son amie d'enfance Simone Saintu (en 1916), L.-F. Céline signale que l'homme est enclin à prendre pour la réalité et proclamer tel ce qui n'est qu'illusion. Les hommes réagissent différemment face à la catharsis qui pourrait leur faire perdre leurs illusions, ajoute Céline, évoquant le cas des artistes et le sien.

    Si la question de la catharsis chrétienne n'est pas abordée par Céline directement, celle de la vérité l'est. Cela revient au même. L'hiatus entre la vérité et l'art existe bien, d'où la prohibition juive de l'art, ou l'entreprise de démolition de la culture occidentale par le tragédien chrétien W. Shakespeare. Le christianisme ôte les illusions, notamment l'illusion païenne ou sociale de "l'au-delà" ; c'est ce qui explique la subversion courante du christianisme. Bien qu'athée, Céline avait compris et le loue pour cette raison, que le christianisme est peu propice au socialisme, moyen pour les élites rusées d'entraîner avec elles le peuple vers le néant. Car les élites sont nécessairement orientées vers le néant, et tout ce qui, en matière de philosophie naturelle, conforte l'hypothèse du néant (comme l'improbable "boson de Higgs").

    Céline est du reste plus juif que de nombreux juifs qui ne se méfient pas de l'art, comme M. Proust ou J.-P. Sartre.

    Céline cite quelques vers d'Alfred de Musset dans sa lettre :

    "Quand j'ai connu la Vérité

    J'ai cru que c'était une amie

    Quand je l'ai comprise et sentie

    J'en étais déjà dégoûté -

    Et pourtant elle est éternelle

    Et ceux qui se sont passés d'elle

    Ici-bas ont tout ignoré -"

    Et Céline ajoute ceci : "Les hommes célèbres n'ont point jugé bon de poursuivre ce dangereux sentier qui fait perdre les illusions nécessaires aux enfantements - artistiques. Les cancres dans mon genre n'ont rien à y perdre, c'est pourquoi je ne saurais vous conseiller ma méthode - à vous qui êtes vierge d'abord, ce que je ne suis plus depuis presque autant que vous l'êtes, qui êtes femmes, ce que je regrette de ne point être, et qui êtes artiste surtout, ce que je ne serai jamais..."

    Il y aurait quelques commentaires à faire sur le féminisme de Céline, et celui des hommes en général, qu'on ne peut guère qualifier autrement que de "galanterie". 

  • Ponce Pilate et la laïcité

    Comme je vais le démontrer ci-dessous, le discours laïc est assimilable à la tartufferie.

    Premier constat : la théorie laïque fait consensus, au-delà des tenants de valeurs républicaines prétendument accordées à un ou des mobiles scientifiques, dans des milieux chrétiens ou juifs renégats. "Renégats" s'entend ici au sens où Moïse comme Jésus-Christ, ont clairement exprimé que ceux qui ne sont pas avec eux, sont contre eux.

    "Renégats" s'entend au sens de la "démocratie-chrétienne", c'est-à-dire d'une doctrine dont on ne trouve pas les premiers linéaments dans les évangiles.

    "Renégats" s'entend encore au sens où ces soi-disant "juifs" et "chrétiens" mènent un combat positif de subversion du judaïsme et du christianisme, à travers diverses publications largement subventionnées.

    Ce constat signifie qu'aucun chrétien ne cautionne le principe de laïcité républicaine, en réalité, mais seulement les tenants d'une vague "culture chrétienne" de leur propre invention. Le chrétien ignore les limites légales, éventuellement totalitaires, au témoignage que le Messie exige de lui.

    Plus étonnant encore, ce type de renégat admet le principe d'un divorce de la théologie et de la science, ce qui traduit de sa part l'ignorance que ce divorce répond au besoin de la science technique, mais non à ceux de la science ou de la théologie.

    La laïcité n'a rien de "neutre" sur le plan historique, puisqu'elle résulte de l'impossibilité de fonder une théocratie sur le christianisme, contrairement à toutes les religions païennes. 

    Ajoutons que l'idéal ou l'utopie démocratique, au point où nous sommes rendus de déni concret et apparent, ne peut plus passer, comme dans le marxisme, pour une émancipation de l'individu de la matrice institutionnelle. La démocratie paraît aujourd'hui ce qu'elle est, à savoir un régime démocratique libéral de compétition, qui pourrait bien avoir à rougir de la comparaison avec le nazisme.

    Si la conscience des Français avait été imperméabilisée contre l'histoire, comme celle de leurs cousins germains, plus "philosophique", les Français seraient au même point d'ignorance que l'éthique n'a jamais permis à l'humanité d'accomplir aucun progrès contre la barbarie.

    La prétendue "neutralité laïque" ne se conçoit en réalité que d'un point de vue moral, et ce point du vue moral impartial recoupe celui du curé-tartuffe. La loi républicaine est parfaite parce qu'elle justifie le curé, et celui-ci est parfait parce qu'il fait oeuvre de justification de la loi à l'aide de syllogismes.

    Le point de vue laïc est officiellement neutre... à ce détail près que la loi républicaine évolue d'une façon qui dément l'argument de la neutralité. La loi républicaine évolue en effet en fonction d'un rapport de forces ; cette évolution n'a rien du triomphe d'un point de vue scientifique ou critique supérieur.

    Pratiquement, c'est le régime de consommation, c'est-à-dire le principe religieux le plus actif, dont la position dominante est consolidé par ce sacro-saint principe laïc.

    En résumé :

    - la laïcité ne répond nullement à une exigence scientifique, mais religieuse ;

    - elle est liée au monopole renforcé de l'Education nationale, injustifiable en termes de liberté ;

    - elle est le terme d'une sécularisation des valeurs "judéo-chrétiennes" occidentales, c'est-à-dire une forme de théocratie larvée ;

    - elle repose sur une philosophie naturelle hasardeuse, voire ubuesque ;

    - elle est inefficace à enrayer des phénomènes religieux vivaces tels que l'alcoolisme, l'occultisme, le culte fanatique de la personnalité de vedettes de la télévision, etc.