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Lapinos - Page 31

  • Amour est mort !

    Un athée rigoureux se doit de faire la démonstration que l'amour est une illusion ou un point de perspective abstrait, dépourvu de consistance physique ou naturelle comme l'infini ou le zéro.

    Cette démonstration conduit à tenir les espèces animales pour supérieures à l'espèce humaine, puisque les loups ne sont pas victimes de l'illusion amoureuse et des dégâts qu'elle entraîne. Le socialisme se nourrit de l'illusion amoureuse, et tous les régimes totalitaires modernes sont socialistes. L'amour est une arme de destruction massive.

    Le rapport entre l'homme et la femme est analogue au rapport entre la nature et la culture. La culture est faite de ruses, d'astuces ingénieuses pour se protéger de la nature.

    Une telle disposition rend, sur le plan social nécessairement "sexiste", l'amour impossible entre  les sexes opposés. La culture est entièrement paradoxale comme l'espèce humaine, dépendant de la nature en même temps qu'elle souffre à cause d'elle, maudissant et bénissant la condition humaine pratiquement au même instant. L'espèce humaine est répugnante à qui aime la logique, voire la raison, car celle des espèces animales paraît plus droite.

    C'est le fait des cultures artificielles d'abolir la différence sexuelle, c'est-à-dire des cultures où la conscience s'est perdue de la supériorité de la nature sur la culture. Le christianisme, accusé parfois d'être la cause de l'invention du progrès et de cette culture artificielle ne l'est pas. Le christianisme n'est ni sexiste, ni antisexiste, ni conservateur ni moderne, puisque la dernière chose à quoi on peut employer les évangiles, c'est à fonder une société nouvelle.

  • Dans la Matrice

    "Nous, civilisations, savons que nous sommes mortelles." Paul Valéry

    - Nous, chrétiens, savons que l'Occident n'est pas une civilisation et qu'elle n'en sera jamais une. L'Occident est une stratégie de la terre brûlée.

  • Critique littéraire

    Dans un pays comme la France où règle le culte de la littérature, qui comme tous les cultes est excessif, les chefs d'Etat sont amenés à "communiquer" leur passion dans ce domaine. On sait par exemple l'estime de de Gaulle pour l'auteur du "Génie du christianisme", le pédéraste chrétien François-René de Chateaubriand. J'insiste sur la pédérastie de l'auteur, au sens plein du terme, car elle explique pourquoi Chateaubriand trouve du génie à la religion qui en est le plus dépourvue au monde, car elle est la moins providentielle - moins encore que le judaïsme. Pour un artiste un peu plus sérieux ou un savant, le génie est en effet une maladie infantile.

    Georges Pompidou avait des goûts de prof. Mitterrand disait en pincer pour Jacques Chardonne, dont l'esprit n'est guère éloigné de Chateaubriand. Jacques Chirac devait trouver trop efféminé d'étaler ses goûts.

    N. Sarkozy a dit son admiration pour Céline, ce qui est plutôt habile quand on vient d'une banlieue chic, puisque Céline est le dernier grand auteur populaire, ce que l'on reconnaît notamment au fait qu'il est censuré par l'Education nationale. Pour ne pas complètement se couper de Neuilly et du financement du parti, N. Sarkozy a aussi dit admirer Proust. Difficile, là encore, de savoir s'il était sincère, mais il y a bien une commune "recherche du temps perdu" entre Proust et les politiciens modernes, c'est-à-dire une sorte d'activité paradoxale qui consiste à ne pas agir, une sorte d'autofiction pure, les politiciens étant désormais absorbés par l'élaboration de la meilleure image possible d'eux-mêmes.

    N. Sarkozy a émis cet avis qu'il n'est pas nécessaire d'être homosexuel pour aimer la littérature de Proust. Du reste Proust est le type d'homosexuel décrié aujourd'hui, qui refuse de faire son "coming out" pour ne pas choquer sa mère. Cependant, s'il n'est pas besoin d'être homosexuel pour aimer Proust, il faut comme beaucoup de femmes, être fasciné par la mort, et, je dirais, une qualité de plaisir spécifique associée à la mort. En même temps qu'elle en est le produit le plus raffiné, non loin du cinéma, la littérature de Proust traduit la nullité absolue de la culture occidentale et pourquoi Nietzsche la croit condamnée à rejoindre ce néant auquel elle aspire secrètement, comme une jouissance suprême.

    Ce qui manque chez Nietzsche, c'est une explication plausible de comment le prince des poètes, Satan-Zarathoustra, a pu être vaincu par une myriade de petits poètes pédérastiques occidentaux. Qu'est-ce que Satan peut bien avoir en tête quand il donne l'avantage à des guerriers-femelles, incapables d'héroïsme et qui font la guerre en appuyant sur des boutons et des gâchettes, au lieu de permettre aux valeureux guerriers arabes de triompher ? Pourquoi le triomphe de la quantité sur la qualité ? De la hyène occidentale sur le lion d'Orient ? Qu'est-ce que c'est que ce sens merdique de l'histoire ? Pour cela il faut lire les prophètes Paul de Tarse et Shakespeare, qui en savent plus sur Satan que ses lieutenants-généraux eux-mêmes. Chaque manière de faire la guerre indique un état d'esprit particulier de Satan à l'égard de ses créatures, une façon d'en disposer stratégiquement la mieux adaptée aux circonstances de la lutte.

  • Exit Darwin

    La théorie évolutionniste repose d'abord sur une méconnaissance de l'homme, c'est-à-dire une anthropologie erronée. A ma connaissance, Hannah Arendt ne mentionne pas la croyance dans la théorie évolutionniste comme un facteur du totalitarisme, bien qu'elle le soit, contribuant par le raisonnement d'espèce à réduire l'individualisme ; cet "oubli" de Hannah Arendt s'explique par son incapacité à interpréter de façon juste le bouleversement scientifique intervenu au XVIIe siècle, présenté habituellement comme une révolution et un progrès. H. Arendt est ainsi persuadée que la science moderne reflète moins l'homme que la science plus ancienne. Quiconque a un tant soit peu connaissance de l'évolution de l'art occidental devinera qu'il n'en est rien, et que le défaut de l'art moderne pour certains, qui en fait une qualité pour d'autres, est d'être TROP humain.

    La science naturelle antique, plus matérialiste, résiste à la démonstration du transformisme, notamment parce qu'elle est plus matérialiste et n'accorde par conséquent pas au déroulement du temps un rôle positif. Cette science naturelle, qui fut d'ailleurs celle d'hommes bien meilleurs observateurs de la nature que nous le sommes, des écologistes rationnels et non dévots comme ceux que nous connaissons aujourd'hui sous ce nom, s'accordait avec une psychologie plus précise que la psychanalyse moderne, cernant mieux les limites de l'homme. Montaigne s'en fait l'écho, quand il affirme que, se connaissant bien, il connaissance de la mécanique humaine en général, et connaît ainsi tous les hommes. En dépit de sa référence à la mythologie antique, la psychanalyse moderne ne contribue guère à dissiper le mystère humain.

    L'anthropologie erronée qui sert de base aux spéculations de Darwin (plus prudent que les néo-darwiniens, c'est-à-dire mieux conscient de la différence entre l'hypothèse scientifique et la science) est la pire anthropologie de tous les temps, à savoir l'anthropologie chrétienne. Ceux qui en tirent argument, à l'instar de Nietzsche, pour justifier leur combat antichrétien en faveur de la raison, ignorent ou dissimulent que l'anthropologie chrétienne est non seulement irrationnelle au regard des lois naturelles, mais qu'elle est en outre infondée sur le plan scripturaire, ce qui n'est pas la moindre cause de sa nullité scientifique.

    Il est vrai qu'on peut prendre Darwin pour un païen, de même que Bergson, relativement à Descartes et son puritanisme mathématico-chrétien, puisque l'évolutionnisme replace l'homme dans son contexte naturel. Mais cette idée n'est pas neuve. Les singes ont une âme du point de vue d'Aristote, ce qui n'empêche absolument pas ce savant de faire des raisonnements métaphysiques.

    L'idée qui reflète l'anthropologie chrétienne dans la théorie évolutionniste de Darwin est celle qui consiste à placer l'homme au terme de l'évolution et à en faire l'espèce la plus évoluée - à penser l'animal comme étant prédestiné à devenir homme. C'est cette idée qui se heurte aux preuves et expériences de la science païenne antique, aussi bien celles qui relèvent de la science physique que celles qui relèvent de l'étude de l'homme.

    Nombreux sont les philosophes de l'antiquité qui relèvent la force "surhumaine" de l'homme, qui lui permet de se désolidariser de son espèce, voire des éléments naturels, tandis qu'au contraire la puissance de l'animal réside dépend de l'espèce à laquelle il appartient et d'une science naturelle instinctive. Ulysse est un tel personnage de surhomme antique, sans doute plus détaché encore de la nature que le modèle inventé par Nietzsche du poète doué d'ironie, sachant tirer du caractère définitif de la mort les raisons de jouir "hic et nunc" de sa situation.

     

  • Bonheur contre Avenir

    Plus on est absorbé par le présent, moins l'avenir a de consistance. Ce sont donc surtout les fainéants qui conçoivent l'avenir - les peuples de fainéants comme les Allemands ou leurs cousins d'Amérique qui se déterminent en fonction de l'avenir.

    Les Allemands, et les Yankees plus encore, sont convaincus au contraire d'être actifs, mais ils le sont à la manière de ces femmes qui rangent et nettoient du soir au matin leur domicile en se persuadant de l'utilité de cette tâche ; ou bien encore de ces sportifs qui "s'entraînent dur" pour gagner quelques secondes ou centimètres.

    On éprouve ce sentiment d'immense vanité lorsqu'on vit aux Etats-Unis, et que tout ça ne sert à rien, comme lorsqu'on lit Proust ou Thérèse d'Avila, toute littérature érotique qui vise à remplacer chez des personnes malades ou des intellectuels, des femmes frigides, le plaisir érotique lui-même, que ces personnes ne sauraient éprouver sans défaillir. La littérature de Proust joue un peu le même rôle pour certaines personnes éthérées que le poster d'une femme nue pour le routier enfermé dans sa cabine.

    Si "tout est sexuel", comme dit Freud, alors autant flanquer au feu toute la littérature et fermer les cinémas pour apprendre des manières de jouir un peu moins théoriques. Mais l'humour, par exemple, n'a rien d'érotique, sauf à considérer les plaisanteries de soldats ou de parlementaires comme de l'humour, alors qu'il n'est qu'un simple rappel de leur mobile. La psychologie allemande du "tout est sexuel", à l'instar de la psychologie féminine, ne fait pas de place à l'humour.

    Les Français installés aux Etats-Unis que j'ai rencontrés, en dépit d'un cadre économique favorable, avaient beaucoup de mal à s'y faire à cause du masochisme des Américains et de l'ennui qui règne un peu partout. On devrait forcer les Français qui votent pour l'UMP et ceux qui prennent encore Jacques Attali au sérieux à faire un stage aux Etats-Unis. Ceux qui s'y plairaient pourraient y rester, et les autres pourraient constater à quel point l'économie moderne, loin de reposer sur des lois pragmatiques ou une vision réaliste du monde, est plutôt axée sur le rêve que les adolescents frustrés font d'être satisfaits un jour... d'une manière dont l'homme ne pourra jamais être satisfait.

  • La Femme et l'Evolution

    Une femme me reproche mon manque de délicatesse dans mes propos. La première image qui me vient à propos de délicatesse, ce sont des chimpanzés s'épouillant entre eux, avec une minutie et un amour qui forcent le respect, auxquels tendent à vrai dire nombre de couples modernes, suivant les conseils de leurs psys, sans jamais tout à fait y parvenir.

    La thèse darwiniste repose pas mal sur le hasard et le calcul de probabilité ; mais de mon point de vue, ce n'est pas un hasard si les primates ont d'abord été retenus comme l'étape précédant l'homme. C'est loin de tenir seulement à leur capacité à se tenir debout. Le singe est doté de pas mal de qualités du point de vue féminin, et de beaucoup moins de défauts que le genre humain masculin. Non seulement les hommages de tel ou tel humaniste moderne à l'égard de l'espèce des singes sont sincères, mais en outre ils sont biologiquement fondés.

    Etant donné la proximité démontrée par maints moralistes de l'âme bourgeoise avec celle du cochon, cette dernière espèce aurait pu servir d'appui à l'hypothèse transformiste si les porcs faisaient montre de plus de délicatesse et d'hygiène. On dit d'ailleurs que les hommes qui savent faire rire les femmes détiennent le moyen de les convaincre de s'accoupler avec eux, plus efficace qu'un physique apollinien. Le chimpanzé est inégalable, non seulement pour la délicatesse, mais aussi pour la variété de ses grimaces, en quoi il égale les meilleurs artistes de variété.

    - La seconde image qui me vient à propos de délicatesse n'est pas une image à proprement parler, puisque c'est la petite musique de Proust, poète 100% délicat. La délicatesse, si l'on y regarde à deux fois, est une forme de recherche du temps perdu, qu'il s'agisse aussi bien de l'art le plus délicat de la broderie que de la toilette commune des singes.

    L'indélicatesse est le péché moderne : naître homme vous fait naître pécheur dans le monde moderne, tandis que naître femme vous exonère du péché.

    Plutôt que de souligner ce qui peut inspirer le dégoût de la délicatesse, et qu'il n'est pas difficile de deviner à travers les écrits prophétiques, je préfère souligner ce qui fait le prix si élevé de la délicatesse, au sens figuré comme au sens propre. C'est la même raison qui fait aimer l'opium - la souffrance. L'art moderne n'a de prix qu'aux yeux des personnes souffrantes.

  • Devil and the French Front National

     Let's read (in French) in the anarchist webzine "Au Trou !?" a short dissertation about the Devil and the Front National, its leader Le Pen. They have been playing the role of the Devil in the French Politics and Ethics for about 40 years. During those years, French National Education Service and its two millions Agents lost the Prestige of Clerks and Ethics.

    This phenomenon of constant metamorphosis in the Ethics and the Clergy (The Enlightenment Philosophers took the place of Catholic clergymen in France once) are typical of the 'Western Civilization' that seems to have no fixed anchor point. In the Politics, as much as in the Economy and the Science, this Phenomenon has of course many consequences. Only German G.W.F. Hegel in his scholastic philosophy is trying to make the demonstration that this Phenomenon is Progress toward better Ethics/Spirituality. But both F. Nietzsche and K. Marx made the opposite Demonstration that hegelian idea of 'Progress' has no concrete signification and is entirely rhetoric (Marx is joking about the 'sein und dasein' of Hegel). In his side, F. Nietzsche is showing that modern western culture and modern western art are no culture and no art. And Karl Marx is making the demonstration that modern law and rights are governed by the self-destroying capitalist Economy.

  • Le Diable et la Morale

    A lire dans le webzine anarchiste "Au Trou !?", une note sur l'incarnation du diable par le Front national et son leader dans la vie morale et politique française au cours des 30-40 dernières années, au cours desquelles l'Education nationale et ses fonctionnaires ont perdu le prestige attaché au clergé et à la morale.

    Ce phénomène de métamorphose de l'éthique et du clergé (on vit jadis les philosophes des Lumières investir les positions tenues par auparavant par le clergé catholique) dont les répercussions, tant économiques que politiques et scientifiques sont déterminantes, est un phénomène typiquement occidental. Seule la philosophie scolastique de G.W.F. Hegel s'efforce de démontrer dans ce phénomène culturel, qui présente une analogie avec la force motrice (action-réaction), un progrès vers un plus grand bien ou une plus grande spiritualité.

    F. Nitche et Karl Marx ont fait la démonstration que l'idée hégélienne du progrès est purement rhétorique. De son côté Nitche montre que l'art occidental est essentiellement décadent et incapable de produire les mêmes effets bénéfiques que l'art antique. Quant à Marx, il fait la démonstration d'un droit moderne soumis aux nécessités d'une économie moderne en voie d'autodestruction.

  • Satan dans l'Eglise

    "Il est opportun que les générations d'aujourd'hui expriment leur entière reconnaissance à tous ceux qui ont accepté un sacrifice aussi lourd." J. M. Bergoglio, évêque de Rome

    "Le Figaro" du jour rapporte ces propos du pontife romain à propos de l'anniversaire du débarquement des troupes alliées en Normandie, cérémonie qui relève de la mascarade hypocrite, non seulement du point de vue chrétien, mais simplement d'un point de vue rationnel.

    Tandis que le successeur de Staline, V. Poutine, est vilipendé un peu partout dans la presse selon une stratégie et des moyens qui relèvent de la propagande totalitaire au service du camp adverse, la "Libération" de la France, qui sans le boucher Staline n'aurait pu avoir lieu, est célébrée en grandes pompes. On reconnaît le pharisaïsme au procédé du blanchiment, et en l'occurrence, le moins qu'on puisse dire, c'est que la couche de chaux est épaisse. Les massacres perpétrés en Normandie par les troupes américaines furent d'ailleurs tels que la population locale redoutait les soudards américains plus encore que les soudards allemands. Le moins suspect de compromission avec le nazisme, l'évêque catholique de Munster Von Galen, face aux mêmes bombardements américains aveugles et meurtriers, reconnut qu'il n'y avait pas de différence entre les nazis et leurs cousins d'Outre-Atlantique. 

    Contrairement aux propos mensongers du chef de la secte romaine qui a modelé l'étrange civilisation occidentale, le Messie et les apôtres SONT PARFAITEMENT DISSUASIFS DE SE SACRIFIER POUR UN QUELCONQUE PLAN MONDAIN.

    Le Messie fit comprendre à son apôtre qu'il était inutile de tirer son épée pour le défendre. Mais il serait souhaitable de le faire pour défendre tel ou tel pacte militaro-bancaire ? Et des prêtres chrétiens pourraient légitimement bénir ça ? De qui les catholiques romains se moquent-ils ? Ils se moquent d'abord de leurs propres gosses. Même à un soudard un peu expérimenté, ce type de procédé pourra sembler abject : non seulement de la gnôle, un prime, un uniforme, des putes, tout l'attirail du parfait connard, mais par-dessus le marché des prières de salopes catholiques pour encourager au vice. Les bonnes femmes mènent les hommes à la guerre, et rien d'autre.

    Ceux de la génération d'aujourd'hui feraient mieux d'écraser du talon les vieilles vipères qui prônent le Christ d'une part, et sont revêtus par ailleurs des ornements sacerdotaux du culte de Mithra.

     

  • Doute et religion

    Le doute est la religion moderne, à la fois la plus humaine et la plus religieuse de toutes, un opium circulant dans les veines de l'humanité à toute vitesse. Sans oublier ce sentiment de culpabilité, caractéristique des alcooliques et des drogués. Le courage manque pour se suicider, comme pour chercher un but, alors on danse, on valse-hésite.

     

    Je ne parle pas du doute comme un scepticisme, mais comme une certitude, une certitude qu'il n'y a pas de vérité, où que le hasard est la vérité. Je parle du doute comme la seule certitude proprement humaine, car il n'y aucune certitude véritable qui ne soit fondée dans l'homme. Quand on se tourne vers l'homme, on ne voit que le néant ou les gagdets technocratiques. Les mathématiciens modernes sont des derviches tourneurs qui donnent la nausée.

    Et je parle du doute comme d'une religion, car il vient d'en haut, il vient des élites ; de façon caractéristique des imposteurs qui, dans l'art ou la science prônent qu'ils est plus important de chercher que de trouver, d'errer que de ne pas errer. Qu'y a-t-il là de rationnel ?

  • Catholicisme et pédérastie

    Quelques précisions en préambule : il ne s'agit pas dans cette note d'incriminer quiconque en particulier pour des actes sexuels contraires aux lois pénales, dont il convient de remarquer qu'elles sont évolutives, sanctionnant aujourd'hui ce qu'elles ne sanctionnaient pas autrefois (l'abus sexuel des mineurs), et autrefois ce qu'elles ne sanctionnent plus dorénavant (les pratiques sodomites publiques).

    Il s'agit en revanche d'inculper l'institution catholique romaine en tant qu'institution incapable de soigner un mal qui la ronge ; et de condamner la "mystique de la chair" qui sévit en son sein comme étant caractéristique du péché de fornication décrit par les évangiles, c'est-à-dire non pas une faute morale contre l'homme, mais une faute contre l'Esprit de dieu lui-même et la parole divine.

    Contrairement aux mensonges réitérés de Joseph Ratzinger : le message évangélique n'est pas "anthropologique" et il ne peut pas l'être. Il ne faut absolument pas céder sur ce point à la propagande romaine, comme ont cédé les Eglises dites "protestantes" ou "réformées".

    On se souvient peut-être de la réaction de ce même évêque romain, face au scandale qui a secoué son Eglise à la suite de nombreuses affaires de moeurs données en pâture au public, comportant l'abus sexuel sur des mineurs. Il a pris la décision, conforme à l'esprit du temps et de la presse, de faire appel à l'expertise de psychanalystes pour "évaluer" les séminaristes et futurs prêtres catholiques romains. Il s'agit-là d'une décision parfaitement ubuesque : - d'abord parce que la psychanalyse et les psychanalystes ont oeuvré pour que les pratiques sodomites soient admises dans la société comme des pratiques normales (S. Freud a pris soin de se démarquer de la religion juive de ses ancêtres), et que seule l'hostilité populaire à de telles mesures a empêché que les rapports sexuels entre adultes et mineurs bénéficient du même retour en grâce (les partisans de la légalisation de telles pratiques sexuelles avancent tous des arguments d'ordre psychanalytique).

    En outre la décision du pape n'a aucun fondement évangélique. Le sacerdoce, ainsi que l'explique l'apôtre Paul, est universel, c'est-à-dire que nul ne peut l'interdire à quiconque, et qu'aucun chrétien ne peut s'en dispenser. Le Messie ajoute que celui qui n'est pas avec lui est contre lui. Le principe de la hiérarchie ecclésiastique est rendu impossible par le refus du christ Jésus lui-même de prendre la tête de son Eglise, dans lequel l'évangile invite à discerner le principe du libre consentement.

    La logique de l'évêque de Rome n'est pas spirituelle, elle est institutionnelle. Et comme son raisonnement est ubuesque, on peut douter de son efficacité. En effet, tous les prêtres romains qui transgressent leurs voeux de chasteté, quelle que soit leur préférence sexuelle, sont justifiés par le raisonnement psychanalytique de le faire, consciemment ou pas.

    - Schématiquement, on peut décrire le piège dans lequel se retrouvent les séminaristes catholiques ainsi : en lieu et place du sacerdoce chrétien et de la spiritualité évangélique, ils baignent dans un culte platonicien ou néo-platonicien. Amenés à étudier les écritures saintes chrétiennes, ils les étudient largement à la lumière d'une philosophie platonicienne, bien plus qu'ils ne suivent l'enseignement de Paul de Tarse ou de théologiens avisés du sens caché des textes. On peut constater que Satan n'a plus aucune consistance dans l'enseignement du clergé romain - la raison en est simple : Satan, pour Platon, n'est autre que dieu ou le principe divin. Ainsi l'Eglise romaine est-elle complètement infectée par une idée du beau et du bien empruntée à Platon, complètement étrangère à l'esprit et à la lettre des évangiles.

    Or, contrairement au sacerdoce chrétien qui n'a pas de fondement érotique ou sexuel, le sacerdoce moral, politique ou philosophique de Platon comporte bien une dimension sexuelle. L'homosexualité est, selon Platon, propice pour se consacrer à l'étude de la philosophie et de la politique, contrairement à la charge de famille, tenue par Platon pour un office subalterne en comparaison du premier. C'est un trait assez courant chez les sages grecs que celui qui consiste à souligner la faiblesse des hommes mariés ou des pères de famille.

    Sans parenté directe avec le mouvement américain de "fierté homosexuelle" que l'on connaît aujourd'hui, qui consiste dans l'instrumentalisation à des fins bassement politiciennes de jeunes gens réduits à consommer et être consommés, la culture des élites grecques antiques ne connaît pas pour autant le tabou de l'homosexualité. On sait même que les Spartiates l'encouragèrent à des fins militaires.

    Un tel tabou n'a pas de sens dans la philosophie païenne de Platon, qui comporte un aspect de mysticisme sexuel, tandis que l'amour chrétien exclut absolument cette dimension. On pourrait même dire que l'amour homosexuel selon Platon est l'expression d'une mystique sexuelle, telle que celle dénoncée comme catastrophique par Shakespeare dans "Roméo et Juliette" ; c'est précisément le caractère stérile sur le plan naturel des amours homosexuelles qui leur confère une dimension d'amour mystique.

    C'est donc une culture platonicienne "explosive" sur laquelle s'appuie l'Eglise romaine, c'est-à-dire d'excitation sexuelle privée d'objet, incitative à une sexualité qui ne peut trouver d'accomplissement que sous la forme d'une transgression. Une culture dans laquelle la chasteté et la pureté chrétiennes, entièrement dépourvues de vocation sociale, font office de verrou. La théologie du corps de Jean-Paul II est foutaise. Une nonne telle que Thérèse d'Avila, ses écrits en témoignent, est en proie à l'aliénation mentale et au sacrifice de soi le plus vain, à un délire sexuel proche de l'anorexie. Ce genre d'auto-immolation a d'ailleurs le don de fasciner les sadiques. Molière ne s'est pas trompé dans son tableau du libertin et de la nonne qui lui court après.

     

     

     

  • S. Weil ou H. Arendt ?

    J'ai une prévention particulière contre les femmes juives ou chrétiennes "identitaires", c'est-à-dire qui propagent une doctrine païenne sous couvert de la foi juive ou chrétienne.

    Elles constituent un danger d'autant plus grand pour l'esprit que, comme chacun peut l'observer, les femmes bénéficient sur le terrain social d'une position dominante (99% d'hommes peuplent les prisons, tandis que 200.000 crimes ou délits d'avortement demeurent impunis, les miséreux sans-logis sont surtout des hommes, la modernité est un féminisme, etc. ; bien sûr, les hommes qui bénéficient de meilleurs revenus sont principalement mus par la volonté de plaire ainsi aux femmes).

    - Un Américain, mais non aliéné mental/patriote comme les Américains de souche sont ordinairement me disait récemment : - Lapinos, comment peux-tu être misogyne ? Ne vois-tu pas que les femmes sont beaucoup plus fortes que les hommes ? Et moi de répliquer : - C'est précisément à cause de cette force néfaste que je suis misogyne. Les Juifs et les chrétiens sont misogynes contre la puissance matricielle du monde. Les Américains sont efféminés ou mondains parce qu'ils sont soumis à la puissance matricielle du monde. Le totalitarisme est un féminisme, car le totalitarisme est un prolongement du monde au-delà de ses limites raisonnables, à l'exemple d'un vieillard qui s'accroche à la vie sans aucune raison de s'y accrocher, alors même qu'il ne tire plus la moindre joie de sa vie."

    La philosophie nazie de Heidegger, amant et maître de Hannah Arendt est confuse et contradictoire, comme l'est nécessairement le néo-paganisme. En effet, la doctrine païenne de l'identité et de l'enracinement se heurte à la réalité politique de l'enracinement de l'homme moderne dans l'argent et non plus dans la terre et un territoire donné, ce qui fait de l'homme moderne en citoyen du monde, en raison de la circulation de l'argent à cette échelle, qu'il le veuille ou non. Que Heidegger, Arendt, ou même Hitler ne le veuillent pas n'y change rien, puisqu'ils sont incapables d'imposer à l'échelle politique ou morale une nouvelle donne ; et c'est exactement sur ce terrain-là aussi que le marxisme-léninisme a échoué. Autrement dit, les régimes nazi et fachiste sont des régimes bourgeois libéraux ordinaires - leur mystique païenne est superficielle. Elle est confuse comme la mystique d'un néo-païen qui tenterait de concilier le paganisme avec le cinéma, alors que ce dernier est un art enraciné dans l'argent. Si Nietzsche est beaucoup plus français et beaucoup plus clair, c'est parce qu'il pousse le raisonnement néo-païen jusqu'au bout, jusqu'à l'autodafé de tout ce qui représente à ses yeux la modernité, comme on tranche des membres gangrenés. On discerne chez Heidegger le bourgeois, à sa manière de tergiverser.

    Cependant Hannah Arendt a tenté de comprendre le totalitarisme, rejoignant ainsi Simone Weil, auteur d'une même tentative "Des Causes de l'oppression", qu'elle a dit à juste titre son meilleur ouvrage. On ne peut manquer de voir derrière ces efforts une façon d'interroger la féminité, puisque le totalitarisme se présente comme un régime d'oppression occidental et féminin - que l'on peut ainsi opposer au modèle égyptien de la tyrannie antique, orientale et virile.

    Hannah Arendt pose de bonnes bases pour un essai de compréhension du monde moderne, mettant ainsi en cause la culture de masse et l'extraordinaire instrument d'aliénation qu'elle représente, dissimulé derrière l'argument culturel et l'office public sinistre du ministère de la Culture ; de même H. Arendt pointe du doigt l'envahissement par le mobile politique de toutes les autres déterminations humaines, d'une manière plus radicale que ce fut le cas dans l'antiquité. Alexandre a beau être un tyran, il n'envisage pas d'exercer sa tyrannie dans le domaine de la poésie, de la science physique ou métaphysique. Alexandre envisage les limites de la tyrannie, bien plus que l'homme moderne n'envisage les limites de l'Etat moderne, notamment en termes de liberté.

    Pour tout défenseur chrétien de la vérité, la tournée des popotes parlementaires, allemandes, françaises, belges, etc., par l'évêque de Rome Benoît XVI est un véritable scandale. Absolument rien de chrétien ne justifie un tel activisme politique ou diplomatique, et toutes les ignominies justement imputées aux Eglises chrétiennes ont pour cause cet activisme politique et diplomatique.

    La limite de la critique du totalitarisme proposée par Hannah Arendt est d'ignorer, voire d'occulter la dimension intellectuelle ou rhétorique du mouvement totalitaire. Ainsi le débordement des considérations politiques et morales sur des considérations étrangères à la politique et à la morale n'est pas tant imputable aux politiciens. Ainsi que le souligne Arendt, la vérité ne peut pas entrer en ligne de compte politique. Par conséquent c'est aux savants, aux philosophes ou aux penseurs de ne pas se soumettre aux calculs politiques.

    Simone Weil a indiqué de façon plus concise et plus radicale, dans ce qui est son meilleur bouquin ("Causes de l'oppression"), l'évolution d'une oppression primitive naturelle vers une oppression finalement culturelle, le moyen de défense imaginé par l'homme pour se défendre contre la nature, c'est-à-dire la culture ou la religion, devenant à son tour un instrument d'oppression. Le totalitarisme ou la démocratie est donc un situation d'oppression à caractère anthropologique, de l'homme par l'homme, tandis que la tyrannie ancienne, la monarchie de droit divin égyptienne ou "oedipienne", était un principe de soumission au droit naturel.

    Simone Weil n'a pas non plus clairement indiqué le rôle actif subversif du catholicisme romain dans cette transition vers le socialisme moderne, le rôle de matrice du droit moderne totalitaire de l'Eglise romaine, mais tout en admirant le christ Jésus, et voulant l'imiter, elle a refusé de se convertir au catholicisme romain comme on refuse de boire une eau trouble que l'on devine infectée.

     

     

     

  • Le pape et la morale

    Un magazine mondain consacrait récemment une enquête au pape François. Quelques journalistes mondains y donnent leur avis sur le catholicisme et le dernier pape.

    Le catholicisme romain n'est "la foi du charbonnier" qu'en vertu des cartels dévolus à l'extraction de ce minerai précieux et des curés/journalistes/publicitaires/communicants qu'ils embauchent. Ne doutons pas que l'Esprit de dieu puisse aider les fidèles apôtres de la parole divine à triompher de cette fourberie. Hannah Arendt n'est pas chrétienne, cependant elle dit justement que, si la politique peut étouffer la vérité, pendant un laps de temps plus ou moins long, c'est-à-dire y mettre une vérité institutionnelle à la place, et faire passer cette vérité institutionnelle pour une vérité universelle, la politique est impuissante à remplacer la vérité. C'est cela même qui, selon les chrétiens, condamne le monde. Malgré tous les efforts de celui-ci pour éviter le jugement dernier, il ne l'évitera pas. Et l'évidence est, sous nos yeux, que le monde est en train de crever de ses propres apories, comme un serpent qui se mord la queue.

    Il est évident aussi que le pape François, comme ces prédécesseurs, donne dans l'activisme politique, activité où l'on ne surprend jamais le Messie et ses apôtres.

    En lisant la prose des derniers évêques de Rome, on comprend vite pourquoi Karl Marx parle de déphilosopher. La philosophie chrétienne est, en effet, la plus mauvaise du monde.

    - Ainsi le pape François déclare vouloir se montrer dur pour le péché, mais tendre pour le pécheur. Sur un tel propos, on ne peut fonder aucune vertu véritable, au sens profond et univoque de la vertu et de la culture de vie païenne à laquelle la vertu est liée. La véritable vertu implique le principe inverse de sévérité vis-à-vis du pécheur, et de tolérance à l'égard du péché et de sa cause naturelle. La saine anthropologie païenne vise le bien social, tout en s'inclinant devant le principe de l'éternel retour et de la mort.

    Une telle formule du pape justifie les violentes diatribes de l'antichrist Nitche, car il y a bien dans une telle formule le fondement de la moraline et de tous les décrets juridiques qui n'en sont pas, mais des ruses de tartuffe. Cette formule a bien une source évangélique, mais elle n'a pas un sens moral. On ne peut fonder aucune anthropologie ou science humaine dessus. Comme le dit Paul, Dieu ne demande pas à l'homme de se justifier par ses oeuvres morales, mais de s'essayer à l'amour, dont il est humainement incapable.

    On peut vérifier que la colère du Messie est dirigée contre les pharisiens, voire ses apôtres, non pas parce qu'ils portent atteinte à la vertu, mais parce qu'ils s'entêtent dans l'erreur et les doctrines sociales. Ils plaquent un raisonnement éthique sur la logique chrétienne et l'enseignement de leur maître, qui n'est pourtant pas venu comme le bouddha leur enseigner des règles de vie.

  • Vérité et politique

    "L'objet de ces réflexions est un lieu commun. Il n'a jamais fait de doute pour personne que la vérité et la politique sont en assez mauvais termes, et nul, autant que je sache, n'a jamais compté la bonne foi au nombre des vertus politiques. Les mensonges ont toujours été considérés comme des outils nécessaires et légitimes, non seulement du métier de politicien et de démagogue, mais aussi celui d'homme d'Etat. Pourquoi en est-il ainsi ? (...)"

    Hannah Arendt, in "La Crise de la culture", titre original : "Entre passé et futur", trad. française 1972)

    Dans ce chapitre, Hannah Arendt se réfère un peu plus loin à l'adage latin : "Fiat justitia, et pereat mundus", attribué à Ferdinand Ier, qui résume l'impossibilité de concilier politique et vérité. H. Arendt multiplie les exemples de défenseurs de la vérité, persécutés par la puissance publique. Elle mentionne l'idée ancienne de Platon selon laquelle la vérité ne peut être communiquée à une masse de personnes humaines, où transparaît que la République et la démocratie selon Platon n'ont rien de commun avec le système républicain et les démocraties libérales modernes, fondées sur le principe quantitatif inverse.

    Curieusement, dans le chapitre intitulé "Vérité et politique", Hannah Arendt ne mentionne pas directement le judaïsme ou le christianisme, religions que F. Nietzsche a maudites et justement qualifiées d'"anarchistes", précisément parce qu'elles sont "décalées de la vertu" et du rapport que l'institution politique entretient nécessairement avec la nature (physique). Les évangiles prétendent enseigner une vérité incompréhensible du point de vue social. Le néant est pour le chrétien la clef de toutes les doctrines sociales, par conséquent celles-ci contribuent toutes à entretenir l'erreur et le péché ; avec une mention spéciale, ainsi que le souligne Shakespeare, pour les doctrines sociales chrétiennes, qui comportent nécessairement un degré de mensonge supplémentaire. Shakespeare fait de la culture chrétienne, c'est-à-dire la subversion du christianisme, l'élément crucial de la tragédie du monde moderne. Si certains ont pu croire dans l'athéisme de Shakespeare, se fondant sur sa critique radicale de la culture médiévale chrétienne, c'est parce qu'ils ignorent que la religion chrétienne est la moins susceptible, en principe, de fonder une culture, et ne l'a jamais fait, comme une étude approfondie de la culture occidentale permettrait de s'en rendre compte, que par la "christianisation" d'institutions païennes, ce qui du point de vue chrétien authentique est le pire des péchés, qualifié de "fornication". "Roméo et Juliette" est ainsi une pièce dont le thème principal n'est pas la "passion amoureuse", comme certains critiques superficiels ont pu le penser, mais une pièce qui porte, bien plus profondément, sur la christianisation de l'institution païenne du mariage, dont Shakespeare fait voir de la manière la plus moralement incorrecte pour son époque les tenants et aboutissants.

    L'omission d'Hannah Arendt est d'autant plus surprenante que le totalitarisme est son sujet principal d'étude, c'est-à-dire une forme de tyrannie inédite dans l'antiquité, révélatrice du sens de la politique moderne.

    Ce chapitre sur la vérité et la politique aurait dû entraîner rapidement Hannah Arendt à deux conclusions : premièrement à énoncer le rôle-clef des "politiques chrétiennes" dans le totalitarisme (la doctrine satanique ou antichrétienne de F. Nietzsche s'articule autour de cette idée). On voit bien en effet que, dans la démocratie-chrétienne, la perversion est double : elle l'est par rapport à la conscience ancienne, mise en avant par H. Arendt, du mariage entre la politique et la vérité ; et la démocratie-chrétienne est perverse par rapport au christianisme, dont elle renverse la signification, alors même que les chrétiens devraient en principe être les mieux éclairés quant à la nature mondaine ou temporelle de la perspective démocratique.

    Ironiquement, on pourrait dire qu'il n'y a pas de démocratie-chrétienne qui puisse être fondée sur les évangiles et les apôtres, en raison de la défiance exprimée par les apôtres vis-à-vis des banques, qui n'ont jamais eu un poids politique aussi important que dans les nations démocrates-chrétiennes.

    Hannah Arendt cherche dans son essai "Entre passé et futur" à mesurer ce qu'il reste dans le monde moderne de cette ancienne conscience antique de l'opposition entre le plan politique et une vérité moins relative, c'est-à-dire qui ne serait pas conditionnée par les besoins humains temporels, comme l'est la politique.

    Mais, si le jugement porté par Hannah Arendt sur la culture moderne est sans doute juste et aussi sévère que ceux d'Orwell, K. Marx, Nietzsche, ou encore Simone Weil - H. Arendt échoue dans la mission qu'elle s'est fixée d'élucider les raisons de l'inquiétante faiblesse de la culture moderne (pour parler comme Nietzsche). Ses explications sont assez confuses, et on ne peut s'empêcher de voir dans cette confusion la marque, précisément, de la culture moderne.

    Hannah Arendt achoppe notamment sur la notion de science, dont elle est capable de discerner qu'elle a pris, dans les temps modernes, une pluralité de significations incohérentes, parfois contradictoires entre elles. Comme elle ne le dit pas assez radicalement, la science moderne n'est pas pensée, comme fut la science antique par Aristote, ou la science chrétienne humaniste de la Renaissance par Francis Bacon ("Novum Organum") ; elle n'est pas pensée, c'est-à-dire qu'elle n'est pas hiérarchisée. H. Arendt cite même des exemples d'une science évolutive, dont les données présentes contredisent celles qui faisaient foi naguère, et semblent ainsi vouées à se démoder ; cela implique de ne rien prendre pour fondamental et établi dans la science moderne, où le changement fait donc seul office de dogme. C'est ce qui explique que les néo-darwinistes ou les transformistes n'hésitent pas à proclamer "scientifiques" des études portant sur la nature qui comportent de très nombreuses lacunes, quand ces lacunes devraient scientifiquement disposer au scepticisme et à la prudence. On trouve d'ailleurs dans la science évolutionniste cette caractéristique à la fois moderne et religieuse : elle accorde au hasard la valeur de la science. Ainsi la "science économique" peut-elle parallèlement, sans rire, être proclamée une "science". De la même façon, il suffirait de parier sur dieu pour qu'il existe. La conviction que le monde moderne s'appuie sur des vérités scientifiques est une pétition de principe. Pratiquement, c'est le résultat d'une propagande. Mieux que Hannah Arendt, on peut dire que la science moderne fait une très large place à l'hypothèse scientifique, ce qui est le signe d'un mouvement religieux, comme la démocratie l'est sur le plan politique.

    Si Hannah Arendt n'est pas loin de l'intuition de Simone Weil que la science physique moderne n'est qu'un tissu d'inepties, d'équations qui ne veulent rien dire, l'explication qu'elle donne à la révolution scientifique qui s'est produite au XVIIe siècle est largement erronée et pleine de contradictions. On voit ainsi Hannah Arendt souligner la difficulté grandissante de la communauté scientifique à fournir des explications sur ses travaux, difficulté dans laquelle elle n'est n'est pas assez débile pour voir une preuve de progrès scientifique : "Il mériterait d'être noté que, parmi les savants, ce furent principalement des hommes de la vieille génération comme Einstein et Planck, Niels Bohr et Schroedinger qui s'inquiétèrent le plus vivement de cet état de choses AVANT TOUT PROVOQUE PAR LEURS PROPRES TRAVAUX." Je souligne ici la seule partie vraiment intéressante de cette remarque, qui pointe le manque de lucidité ou l'inconscience d'Enstein, Planck, Niels Bohr, etc. - et "a contrario" la lucidité plus grande d'une non-spécialiste, Hannah Arendt, capable de comprendre ou deviner que la science moderne se perd dans des détails, et qu'elle prend la précision de ses instruments pour une avancée scientifique fondamentale.

    Cependant, tout en critiquant la science moderne et interrogeant l'étrange phénomène psychologique au sein de la communauté scientifique (comparable à celui de l'abstraction dans le domaine artistique), Hannah Arendt accorde à celle-ci le penchant naturel pour la vérité, qu'elle refuse aux institutions politiques. En dépit de l'enjeu extraordinaire que la technologie représente en termes de pouvoir et de domination d'une nation sur une autre, H. Arendt ne voit pas de raison de se méfier de la communauté scientifique. De même, H. Arendt rend hommage aux techniciens et ingénieurs, grâce à leurs applications scientifiques, de fournir une preuve du progrès scientifique que les théoriciens purs ne fournissent jamais. Cette manifestation du progrès scientifique sous la seule forme d'avancées techniques doit au contraire conduire à soupçonner la théorie pure qui lui est associée d'être une pataphysique, et non une véritable science fondamentale.

    Le plus grave contresens, Hannah Arendt le commet à propos de la science du XVIIe siècle et des savants qui ont contribué à l'avènement des mathématiques modernes. Elle croit en effet cette science mathématique nouvelle, de Copernic, Newton ou Galilée, "purgée de tout élément anthropomorphique", de sorte que le géocentrisme, précédemment, d'Aristote ou Ptolémée, aurait consisté à projeter sur l'univers des catégories mentales naturelles. C'est le contraire qui est vrai : la métaphysique d'Aristote consiste dans un effort pour penser le cosmos en dehors des catégories naturelles auxquelles l'homme est soumis. Il est assorti d'une critique du langage et des figures de la géométrie algébrique qui incitent à croire vraies des notions comme l'infini, alors que celle-ci a une fonction, elle est "efficace", mais c'est une catégorie mentale dont on ne trouve pas d'équivalent dans la nature. Pour Aristote, l'infini est précisément une catégorie mentale. Le géocentrisme, auquel est lié l'idée d'univers fini, est donc une vision scientifique moins anthropomorphique que les modélisations mathématiques modernes de l'univers, qui évoluent constamment, au gré des caprices de la communauté scientifique. La "théorie des cordes", à la mode il y a dix ans, est désormais désuète. 

    Le propos de Hannah Arendt sur ce point, suivant celui de Max Planck, est saugrenu, car il revient à faire de l'art abstrait l'art le moins humain qui soit. Or c'est exactement l'inverse. Humaines, trop humaines les mathématiques modernes pour servir de base à un discours scientifique conscient. "Comme le dit Erwin Schroedinger, le nouvel univers que nous tentons de "conquérir" n'est pas "inaccessible pratiquement", il n'est même pas pensable, car de quelque manière que nous le pensions, il est faux ; peut-être pas aussi absurde qu'un "cercle triangulaire", mais beaucoup plus qu'un lion ailé."

    Les paradoxes qu'engendrent un tel discours, parfaitement ubuesque, est particulièrement anthropomorphique, l'homme étant sans doute de toutes les espèces la plus paradoxale.

    Suivant un préjugé élitiste, Hannah Arendt absout les intellectuels et les universitaires du processus de décadence de la culture, contre l'évidence que le poisson pourrit par la tête et que la culture de masse est un moyen élitiste de domination. Ainsi il n'y a pas de cinéma "populaire", il n'y a qu'un cinéma bourgeois libéral, ou bien populiste.

     

  • Queue de l'Athéisme

    Depuis une cinquantaine d'années, voire un peu plus, l'athéisme est entré dans une phase religieuse extrêmement inquiétante, qui d'après moi correspond à l'avènement du cinéma et de la culture de masse, c'est-à-dire d'un moyen de sidération massif au service de la bourgeoisie libérale.

    La culture de masse est une raison d'estimer la démocratie libérale ou chrétienne comme un régime plus totalitaire encore que le nazisme ou le communisme soviétique, à l'inverse de ce que certains universitaires spécialisés dans le blanchiment prétendent. La gabegie économique des élites libérales n'est rien à côté de leur gabegie morale. Bien entendu le dérèglement économique n'est que la conséquence de cette dernière. "Marx s'est trompé, le capitalisme lui survit", entend-on répéter des spécialistes autoproclamés de l'économie, c'est-à-dire du néant. Cela revient à déclarer vivace un vieillard en proie à la maladie d'Alzheimer. Tous ces économistes chargés de "missions de réforme" sont aussi ridicules que les médecins de Molière. On a atteint le point, en politique comme en art, où l'aliénation préside à la vocation politique. Cela a toujours été le cas, diront certains, attentifs à la philosophie et sa remarque ancienne selon laquelle les hommes politiques agissent toujours avec une certaine dose d'inconscience. Cela a toujours été le cas, mais autrefois les politiciens ne prêtaient guère l'oreille aux discours confus de leurs médecins.

    Par "phase religieuse" athée, je veux parler d'un athéisme culturel entièrement dépourvu de la dimension critique qui détermina la pensée athée au cours des siècles précédents. La plupart des athées aujourd'hui, à l'inverse de Diderot, d'Holbach, ou encore Feuerbach et Nietzsche plus récemment, s'opposent à un christianisme dont ils ignorent à peu près tout. La volonté de purification de la foi que Simone Weil discerne chez certains athées, c'est-à-dire un mouvement athée plus spirituel que le mouvement religieux, a pratiquement disparu aujourd'hui.

    Ce état actuel de l'athéisme est inquiétant à double titre. Des pans entiers de la culture occidentale sont occultés, c'est-à-dire aperçus presque exclusivement sous l'angle esthétique. L'université moderne mérite les mêmes sarcasmes que ceux adressés par les humanistes de la Renaissance à la culture médiévale. Exprimant des convictions, voire une intuition athée, le citoyen laïc moderne ne s'aperçoit pas que, loin d'hériter de l'esprit critique de l'humanisme ou des Lumières, il prolonge l'ancienne bigoterie dont il se croit émancipé. Il se rend au bureau de vote pour voter, sans se poser plus de question qu'un dévot sur le rituel auquel il assiste.

    Le danger de cet athéisme, nettement dominant dans la société civile, et d'ailleurs complémentaire de la démocratie-chrétienne (de nombreux laïcs français présentent la théocratie américaine comme un modèle du genre "avenir", et sociologiquement ce sont à peu près les mêmes qui vantaient naguère l'URSS officiellement athée) est comparable au danger de la technique confondue avec la science. Le confort de l'esprit est synonyme de fanatisme, et il s'appuie dans cette mouture athée ultime sur la position dominante scolastique et la négation de l'esprit critique. De façon frappante, cette arrogance athée, équivalente de l'arrogance cléricale du XVIIe siècle, est le fait principalement des élites intellectuelles. Elle est d'ailleurs dirigée, non pas tant contre le christianisme que contre tout ce qui n'est pas moderne, en termes de culture. Dans le reste de la population, l'ignorance est à peu près la même, entretenue par l'institution scolaire et sa manie du calcul mental, mais l'arrogance est bien moindre, le dialogue possible.

    Un dernier chapitre sur Michel Onfray, qui s'adresse à des milieux populaires et à qui sa contestation de certaines doctrines officielles a valu les foudres du haut clergé. Malgré un effort critique, Michel Onfray reste assez confus (Diderot l'était aussi), passant de l'apologie de Nitche à celle de Proudhon, presque à l'opposé. Il a fallu également beaucoup de temps à cet érudit populiste pour comprendre que le psychanalyste joue aujourd'hui le même rôle social que le curé jouait autrefois, et que d'une certaine façon les dernier prêtres catholiques romains sont bien plus liés à la psychanalyse qu'à la lettre et à l'esprit de l'évangile. Proposer comme il le fait de substituer une psychologie nitchéenne à la psychologie freudienne revient pratiquement à faire l'éloge du catholicisme romain contre le protestantisme, ou du moins d'une religion plus concrète que la pure rhétorique chère aux Allemands. On pourrait aussi imaginer des thérapeutes nitchéens pour les hommes, et des thérapeutes freudiens pour les femmes ; quoi qu'il en soit, c'est une critique d'une portée très limitée, un amendement venu du bas-clergé à la ligne culturelle définie par les quelques évêques qui disent aux Français ce qu'ils doivent croire.

     

  • Le Christ anarchiste

    Nietzsche s'élucide par Maurras et Hitler, et vice-versa. Ainsi Hitler ne peut se montrer trop nietzschéen, en raison de la germanophobie viscérale de Nietzsche, aux yeux de qui les Allemands sont des femelles chrétiennes (= sa mère, sa soeur et son père). Mais la doctrine politique contre-révolutionnaire nazie, néo-classique en matière d'art, sont sans aucun doute représentatifs de la volonté nietzschéenne de retour à la culture de vie païenne.

    Contrairement à Nietzsche, l'Autrichien Hitler et le provençal Maurras ont été contraints de composer avec la culture catholique et protestante. La doctrine de Nitche est plus pure, car ce n'est pas un démagogue. Hitler ne peut se passer des crétins bavarois catholiques, et Maurras des crétins français catholiques. On constate d'ailleurs que Hitler sait faire la différence entre les juifs sionistes, convertis aux valeurs nationalistes et au culte identitaire, et les juifs authentiques, fidèles aux prophètes, incarnation de l'anarchie et du bouc émissaire. Il sait la faire comme Freud sait la faire, ou encore Nitche.

    Nécessairement machiavélique, Maurras insulte les apôtres du Christ avec discrétion.

    La raison de l'antichristianisme et de l'antijudaïsme forcenés de Nitche est une cause institutionnelle. D'une part, mieux que les évêques de Rome et la doctrine catholique moderne, Nitche sait le christianisme inconciliable avec quelque doctrine sociale que ce soit. La sympathie de Nitche pour l'Eglise romaine s'explique parce qu'il considère que le clergé romain, comme les pharisiens auparavant assassinèrent Jésus, ont tué le message évangélique "dans l'oeuf", si on peut dire. En cette occasion, Nitche manifeste sa haine de Luther.

    A cela il faut ajouter que le mépris juif ou chrétien des institutions civiles, est la contrepartie selon Nitche de l'allégeance à un maître dont la divinité relève du fantasme. L'éternel retour est la seule explication de l'architecture cosmique selon Nitche, c'est-à-dire dans cette loi que l'Evangile de Jean désigne comme le nombre d'homme 666, régissant toute forme d'art.

    Jésus-Christ n'est, selon Nitche, qu'un doux dingue efféminé dans le meilleur des cas, et certainement une vermine anarchiste à éliminer, ainsi que ses apôtres, par mesure de salut public.

    - Cohérente sur le point de l'incompatibilité du christianisme, selon sa lettre et son esprit, avec une quelconque manifestation culturelle ou identitaire, la doctrine de Nitche "prend l'eau" sur plusieurs points décisifs. De moraline ou d'éloge de la faiblesse, on ne trouve aucune trace dans les évangiles ni chez Paul de Tarse. Le droit moderne absurde a plus de rapport avec l'ancienne tyrannie qu'il n'en a avec le christianisme, pur de toute considération juridique ou anthropologique. Autrement dit, le christianisme est plus éloigné de la culture protestante du père de Nitche que Nitche lui-même, en dépit de ses efforts pour l'anéantir.

    - Le point où Nitche est démenti de la manière la plus éclatante est stratégique. Le moment n'est pas éloigné pense Nitche, comme Hitler et Mussolini, voire Staline, où l'humanité renoncera définitivement à la religion truquée chrétienne et ses symboles macabres. Or il n'en est rien : le Pacte atlantique, les Russes, bref toutes les nations ploutocratiques qui dominent le monde continuent d'arborer des insignes chrétiens. L'éloge de la faiblesse est la morale des puissants - de ceux qui possèdent les armes et les richesses.

    On en revient donc à Shakespeare, car lui seul sait pourquoi les bannières chrétiennes flottent en tête des nations maudites par l'Esprit de Dieu, et que cela est conforme aux prophéties chrétiennes.

     

     

  • Rome et Israël

    On peut observer que l'étrange religion juive moderne, entièrement détachée des prophètes juifs, et dont le mobile politique et moral est primordial, cette religion se présente à la manière du catholicisme romain autrefois comme un droit d'ingérence extérieur. On qualifiait au XIXe siècle d'"ultramontains" (au-delà des montagnes) les catholiques romains exhibant leur fidélité à Rome et heurtant ainsi le sentiment national français ou républicain.

    Les divisions et schismes au sein du christianisme ont toujours une cause politique et morale, quand bien même le message évangélique n'a aucun caractère moral ou politique.

    Les soi-disant juifs aujourd'hui, affiliés à une étrange religion où les victimes juives de la shoah ont pris la place qu'occupait un christ défiguré par le catholicisme romain dans ce culte, ces soi-disant juifs se retrouvent dans la même posture que les catholiques romains autrefois. Cette étrange culture judéo-chrétienne concerne en réalité bien plus que la minorité de quelques centaines de milliers de Français, descendants de la diaspora juive.

    Cette posture est parfaitement ubuesque et caractéristique du culte identitaire moderne. En principe le judaïsme et le christianisme proscrivent toute revendication d'ordre identitaire, tout raisonnement en termes de "racines". Les Juifs et les chrétiens sont des déracinés volontaires. Le pire péché qu'un chrétien puisse commettre est de se mêler de questions temporelles et d'imposer ses vues dans cette matière à des gouvernements nécessairement temporels.

    L'apostasie discrète de la démocratie-chrétienne et des évêques de Rome ne fait que continuer l'apostasie flagrante de la monarchie divine chrétienne, culte solaire à peine dissimulé. La morale judéo-chrétienne, dorénavant, est entièrement une opération de blanchiment des valeurs bourgeoises.

     

  • Athéisme

    L'homme antique est trop peu replié sur lui-même pour douter de dieu, et baigne ainsi dans l'évidence d'une ou de plusieurs forces cosmiques supérieures - évidence qui n'a rien de rassurant, puisqu'elle peut inciter au suicide quand la vertu n'est plus possible.

    Le problème du salut, c'est-à-dire de la part de l'homme à l'éternité, est une question beaucoup plus épineuse et pour ainsi dire le point de départ de la pensée proprement humaine. Beaucoup d'hommes ne se la posent jamais et demeurent pour ainsi dire au stade animal ou politique.

    La pensée antique nous touche directement sur ce point de l'éternité et du salut. Pour le reste, les considérations d'ordre social ou purement humain, comme Virgile et le latin, l'antiquité est morte.

  • Contre Chesterton

    On peut considérer le point de vue de G.K. Chesterton comme radicalement opposé à celui de Shakespeare. Ce dernier s'est en effet employé à discréditer, non pas tant l'Eglise catholique romaine que la théorie de l'institution chrétienne en général, prévoyant l'éclatement de l'Eglise romaine en Eglises nationales, affectées de la même tare anthropologique. On comprend grâce à la formidable démonstration de Shakespeare que l'athéisme occidental moderne est le pur produit d'une morale judéo-chrétienne truquée, substituant au christianisme la philosophie de Platon. Des raisons sociales et uniquement des raisons sociales, montre Shakespeare, ont conduit à une traduction sociale du message évangélique.

    - Le constat de la mort de dieu a donc été tiré par Shakespeare bien avant Nitche, puisque pour le tragédien anglais, la culture médiévale est une culture athée, les édifices architecturaux ou littéraires, philosophiques, du moyen-âge, ayant seulement l'apparence chrétienne.

    Autrement dit, entre Dante Alighieri et la thèse de la possibilité d'un Occident chrétien, d'une part, et de l'autre Shakespeare et sa démonstration de l'impossibilité d'une quelconque doctrine sociale chrétienne, c'est-à-dire de l'accomplissement de la Révélation chrétienne dans le temps, il faut choisir - plus exactement, seules les écritures saintes permettent d'aider le fidèle à trancher entre ces deux propositions opposées.

    Converti au catholicisme romain, G.K. Chesterton s'est curieusement fait l'apologiste de l'Eglise romaine. "Curieusement", car défendre le point de vue catholique romain, ces derniers temps, revient pour un architecte à préférer les ruines à l'architecture. La puissance judiciaire de l'Eglise romaine a peu à peu décliné au cours des derniers siècles, et son droit canonique est devenu langue morte. Cela explique largement l'inflation des procédures de canonisation : quand un droit est dépourvu de portée immédiate, il devient virtuel, comparable au "désir d'avenir" stupide des bonnes femmes allemandes. S'agissant de cette puissance législative perdue, on pense aussi à la métaphore de la peau de chagrin.

    Chesterton a d'ailleurs la réputation d'être paradoxal, ce qui n'est pas bon signe quand on est chrétien ; on peut dire en effet la logique chrétienne dressée contre le paradoxe social. Qui aime la société ne peut en effet aimer la vérité, dans la mesure où celle-ci est le principal dissolvant de la société. L'athée, produit d'une société totalitaire judéo-chrétienne, afin de n'être pas démasqué par une invocation directe du mensonge, se retranchera derrière l'apologie d'une vérité paradoxale. Aucune culture n'est sans doute plus paradoxale que la culture anglaise, et dominante en vertu de ce paradoxe. Quelle nation sait mieux jouer de la tradition et de la modernité en même temps ? Chesterton est donc le pur produit de la culture anglaise - exactement le contraire de Shakespeare, donc, qui défie l'Angleterre comme Hamlet défie le Danemark.

    "Faire partie de l'Eglise romaine est encore le meilleur moyen de ne pas faire partie de son temps." énonce Chesterton, ce qui est une affirmation plus contraire à la vérité historique que la thèse de Nitche. L'Eglise romaine a au contraire inventé le truc de la modernité qui consiste à vouloir être de son temps. Les tenants de la modernité sont des catholiques romains qui s'ignorent, et leur conscience est entièrement prisonnière d'une manière de penser médiévale. C'est une erreur d'attribuer au seul protestantisme l'impulsion moderne, comme si le protestantisme était opposé au catholicisme. La meilleure preuve en est que les derniers pontifes romains (K. Wojtyla, J. Ratzinger) ont rallié des positions institutionnelles et philosophiques protestantes sans coup férir (démocratie, laïcité), bien mieux adaptées à l'état du droit moderne. Aussi inexacte et approximative l'idée que le protestantisme est un terrain plus favorable au capitalisme.

    La remarque de Chersterton ne vaut partiellement que pour l'Eglise romaine actuelle, qui semble une nef coulée dans sa rade, ou que l'on peut comparer encore à une femme stérile.

     

  • Doctrine sociale...

    mon cul.

    Rien de grand n'est accompli dans ce monde sans l'aide de Satan, dans le domaine de la politique ou celui de l'art. Aussi les nostalgiques des anciennes civilisations antiques, aussi denses et franches que l'Occident moderne est creux et habile, n'hésitent pas à se prosterner devant Satan, dispensateur de l'authentique vertu.

    De même rien n'est accompli pour l'amour du Christ Jésus dans ce monde, qui ne vise à faire choir Satan.

    Rions avec Shakespeare de la chute en avant de l'homme civilisé dans le purin de la démocratie-chrétienne.