Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Mon Journal de guerre - Page 22

  • L'Athéisme

    Bien plus que de ne pas croire en dieu, l'athéisme véritable consiste à ne pas avoir foi dans le bonheur et la jouissance.

    Nietzsche ne se trompe pas (le vrai Nietzsche, pas celui enseigné aux écoliers) quand il voit dans le christianisme la cause principale de l'athéisme moderne, en raison de la dépréciation par le Messie et ses apôtres du dieu commun unique, présidant au destin de toutes les sociétés, franches ou hypocrites - le bonheur. L'antichrist en son prêche se trompe seulement quand il prédit le pire à venir du manque de foi juif ou chrétien, car c'est "le meilleur et le pire" qu'il faudrait dire.

    Le Christ a tiré son glaive, et plus personne ne le lui fera remettre au fourreau, pas même le pape romain le plus fourbe.

  • Propos sur le bonheur

    Au cours de l'enquête qu'il mène sur la jouissance humaine, Jacques Léopardi note la difficulté de l'homme, en comparaison de l'animal, à jouir convenablement. La conscience de l'homme ne favorise pas sa jouissance. C'est toute l'ambiguïté de la psychanalyse, qui se propose de creuser, d'approfondir la question de la conscience humaine, de rendre l'homme plus conscient qu'il n'est en somme, tout en s'offrant comme une solution thérapeutique afin de permettre une meilleure jouissance. La démarche de Nietzsche est plus rationnelle, qui propose de raboter au contraire la conscience humaine, limitant l'activité spirituelle de l'homme à l'art, en niant qu'il y a un autre dieu que la nature vivante, et en posant plus comme un principe qu'il ne le démontre, que la science métaphysique n'est qu'une illusion. La ruse de Nietzsche consiste ici à réduire la métaphysique à des spéculations abstraites, quand bien même la recherche métaphysique s'oppose le plus souvent à l'abstraction (Aristote, Bacon), refusant ainsi d'élever la géométrie algébrique au rang de science fondamentale.

    Léopardi note d'ailleurs que la quête de jouissance comme un souverain bien engendre chez l'homme des comportements erratiques et paradoxaux. L'humour est une telle démarche paradoxale, qui souligne le plus souvent les erreurs de l'homme et son inaptitude à s'amender à travers les âges. Le masochisme est sans doute le comble du paradoxe dans ce domaine. Il ne faut pas s'étonner, dans les cultures masochistes, de voir surgir une vénération et d'un culte idiot pour le monde animal, dans la mesure où celui-ci offre l'exemple de la volonté de jouissance à l'état pur.

    Léopardi observe en outre que le suicide ou la mort, en mettant un terme définitif à toutes les souffrances, physiques ou psychologiques, recèle l'idée du bonheur la plus pure. C'est, d'une certaine façon, une promesse de sérénité définitive, quand le bonheur des vivants est le plus instable, sous la menace permanente du hasard, et sous l'épée de Damoclès de la déchéance physique. L'idée du bonheur dans la mort n'est guère éloignée de la promesse contenue dans les paradis artificiels, produits chimiques ou perspectives des religions animistes sur l'au-delà.

    Léopardi lui-même fut tenté par le suicide pour la plus humaine des raisons :  non pas une souffrance excessive ou l'impossibilité de jouir normalement, mais d'éprouver les limites de sa science. A quoi bon vivre, au fond, si l'existence se résout à la quête des moyens d'être le moins malheureux ? La curiosité scientifique justifie tout autant l'existence humaine que le bonheur, et Léopardi parvint au stade où plus rien ne lui semblait pouvoir étancher sa curiosité scientifique, une curiosité qui le poussait à sonder l'éternité et non à inventer de nouvelles prothèses afin de faciliter l'accès à la jouissance de l'espèce humaine peine-à-jouir.

    Léopardi ne fait donc pas l'apologie du suicide, pas plus qu'il ne condamne le bonheur et la jouissance ; il condamne la quête de la jouissance comme le but ultime de l'existence, et le dieu, le paradis qui ne serait que l'enrobage de cet idéal de jouissance ou de bonheur. Le bonheur ne peut-être poursuivi par l'homme selon Léopardi que comme un moyen, et non comme un but. Léopardi, c'est l'anti-Nietzsche, dans la mesure où ce dernier place au contraire l'art de vivre au-dessus de la science. Léopardi est aussi antisocial, dans la mesure où les doctrines sociales ne peuvent viser comme un souverain bien que la vertu, étant ainsi dépourvues de toute vocation spirituelle.

     

     

     

  • L'Utopie

    L'utopie en général fait l'objet de la condamnation des fainéants, c'est-à-dire de tous ceux dont les efforts sont concentrés sur les moyens d'exister ou de survivre, ne possédant ainsi pas plus d'imagination que l'animal.

    Il reste que la condamnation de l'utopie politique est utile, car cette sorte d'utopie est nécessairement catastrophique. Elle s'ouvre sur l'infini et toutes les choses inconsistantes. Elle s'incline devant le Temps, ennemi de l'esprit humain.

    L'utopie doit rester le domaine réservé de la science.

  • La condition humaine

    Satan, comme explication du monde et de l'incapacité de l'humanité à s'élever au-dessus de la médiocrité, peut sembler simpliste.

    Mais dire que la vie est absurde et définitivement incompréhensible, c'est absurde et définitivement incompréhensible, donc simplet. Cette forme de superstition porte la marque des mathématiques modernes. Assez exacte l'expression de "tribalisme mondial", pour décrire l'état actuel du monde : le mathématicien moderne joue le rôle du sorcier. Il est respecté de tous, même si nul ne comprend ce qu'il raconte, et lui-même parfois ne le sait pas.

    La part que l'homme moderne accorde à l'absurdité est ce qui cause insidieusement la ruine de la civilisation moderne. Par conséquent un défaut, et non un excès de science.

  • Satan dans l'Eglise

    S'il n'opérait pas à l'intérieur de l'institution ecclésiastique, l'antéchrist serait impuissant à subjuguer le monde. Les disciples de Jésus-Christ ont été avertis par les évangiles et les épîtres de Paul de cette manifestation occulte de Satan, non pas sous la forme du paganisme traditionnel, c'est-à-dire de la religion du "droit naturel", mais s'avançant masquée derrière la rhétorique chrétienne.

    Même un catholique romain, même le pape ne pourra pas nier que le ou les schismes constituent une preuve de l'activité de l'antéchrist à l'intérieur de l'Eglise - car il justifie le raisonnement de l'athée ou du païen qui dit : - Il n'y a pas de message évangélique, mais trente-six interprétations de ce message propices à justifier trente-six partis différents. Et le païen ajoutera : - La nature, elle, suggère une doctrine bien plus univoque et constante - le droit naturel est dur, mais cette dureté est celle de la vie elle-même, qui ne présente pas de trace d'amour, de liberté ou d'une vérité supérieure au droit naturel. L'abstraction elle-même, où l'homme croit parfois trouver un mode de raisonnement autonome, n'est qu'un référent naturel. Le cosmos est insondable pour l'homme, qui ne peut que le réduire à des schémas, "big-bang" où autres spéculations, pour le confort de son esprit. Les limites naturelles - la mort - sont infranchissables. Il n'y a pas de progrès, seule la jouissance est pour l'homme une perspective raisonnable, et la jouissance est nécessairement inégalitaire." (je résume ici plus ou moins le propos de Nietzsche).

    Mais la vérité est bien plutôt que les doctrines sociales offrent aux chrétiens, comme aux païens ou aux athées, un refuge et une sécurité que la vérité ne procure pas. Traduire le message évangélique en "doctrine sociale" est donc une tentation permanente, la tentation décrite par le Messie lui-même comme la volonté de faire le royaume de dieu sur la terre - en effet, quelle doctrine sociale chrétienne pourrait s'assigner un autre objectif ? La quête de la vertu elle-même répond à un besoin anthropologique et non métaphysique. Nietzsche a parfaitement raison de qualifier la doctrine sociale chrétienne d'irrationnelle, voire démentielle, en tant qu'elle s'abstient de faire l'apologie de la beauté contre la laideur, de la force contre la faiblesse, de l'élitisme contre l'égalité. Mais les chrétiens fidèles n'ont pas plus de raison de croire cette transposition du message évangélique dans l'ordre social, ni l'abaissement de la métaphysique au plan de l'anthropologie pour une volonté divine.

    La faiblesse de la chair est décrite dans l'évangile comme le principal obstacle à la spiritualité chrétienne. Ce n'est pas une innovation ou un parti-pris exclusivement chrétien, puisque plusieurs philosophes antiques, grecs notamment, contrairement aux assertions erronées de Nietzsche sur ce sujet, ont pu concevoir la force de l'instinct comme une limite à l'accomplissement plein et entier de l'homme, le maintenant au stade nécessairement bestial de l'animal politique. C'est un dialogue de sourds entre le Messie et Ponce Pilate, c'est-à-dire en la métaphysique et l'organisation politique.

    La mythologie chrétienne de Shakespeare est la seule mythologie qui prenne en compte la ruse de l'antéchrist et sa manière de subjuguer le monde à l'aide de discours chrétiens. Certain critique a pu reprocher à Shakespeare son manque de simplicité en comparaison de Homère (L. Tolstoï), mais c'est ignorer que la complexité, la soumission au paradoxe présentée comme un progrès de la conscience par le clergé moderne, qui témoigne en réalité de l'arbitraire des lois modernes et non de leur rationalité, cette complexité est généralement le verre d'eau dans lequel se noie l'homme moderne. Autrement dit l'existence se présente comme un labyrinthe bien plus inextricable à l'homme moderne qu'elle se présentait dans l'antiquité. L'intellectuel est une espèce d'homme nouvelle, plus féminin que viril, particulièrement adaptée à l'assignation du néant par la culture moderne. Shakespeare ne pouvait pas ne pas tenir compte de ces circonstances nouvelles, et du progrès de la ruse dans la manière de gouverner les hommes. Cependant ses traits contre les "éminences grises", qui bien plus encore que les tyrans tirent les ficelles du monde, sont sans équivoque. 

  • Djihad chrétien

    J'emploie exprès le vocabulaire mahométan, qui suscite mépris ou effroi dans l'Occident efféminé, retranché derrière la bombe A, les hautes murailles de l'argent, le sentiment de puissance technocratique, le babil de ses pseudo-savants.

    Le djihad chrétien est formulé dans l'évangile de Matthieu, au chapitre X, citant le Messie :

    "- Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je suis venu apporter, non la paix, mais le glaive. Car je suis venu séparer le fils de son père, la fille de sa mère, et la bru de sa belle-mère ; et on aura pour ennemis les gens de sa propre maison. (...)"

    Le Messie ne cache pas dans ces paroles que le combat contre Satan est un combat sans merci et sans trêve. La violente iniquité du monde est la première raison pour le Messie d'offrir un glaive à ses disciples.

    L'Eglise romaine a pour mission d'empêcher le djihad chrétien, en lui substituant une "culture de vie" païenne, suivant une expression que les prêtres romains, profitant de l'imbécillité et de l'ignorance de leurs ouailles, n'hésitent pas à employer publiquement. Si on la rapporte au texte évangélique, on voit combien l'idée de paix civile mondiale, objectif des nations unies, non seulement heurte la culture païenne, au regard de laquelle la guerre est un élément fondateur de la culture, mais également le christianisme. A travers la "politique chrétienne", la morale soi-disant "judéo-chrétienne" des "grandes démocraties modernes", l'Antéchrist introduit donc un élément de zizanie majeur.

    L'évangile a une dimension tragique, que l'on retrouve chez Shakespeare, seul et unique tragédien chrétien, qui met en évidence l'ultime complot catholique des pharisiens (Polonius) et des veuves (Gertrude), Shakespeare qui déchire par avance le voile de l'occultisme technocratique. La culture moderne, quant à elle, peut se résumer à une tentative d'ensevelir la tragédie sous le divertissement et la propagande, le cinéma, afin que l'homme ne sache même pas pourquoi il est né.  Or, si l'on tire sur le fil de la modernité, qui consiste essentiellement à trouver refuge dans le temps, à faire le calcul d'une perspective infinie offerte à l'humanité, on remontera à la source de la philosophie catholique et des mathématiques chrétiennes. La modernité est pourtant une notion entièrement dépourvue de sens sur le plan historique. La parole divine juive ou chrétienne nous dit que les buts du progrès sont métaphysiques, et qu'à ce titre il ne peut y avoir aucun progrès sur le plan social, celui-ci étant le plus imperméable à la métaphysique. De quoi sont coupables les pharisiens et les veuves aux yeux du Messie ? D'avoir tiré une doctrine sociale de la loi de Moïse - d'avoir transformé un message spirituel en message anthropologique.

    - Ce qui différencie le djihad chrétien du djihad musulman, c'est non seulement la dénonciation de la croisade comme une entreprise satanique, les documents attestant des pratiques rituelles sataniques des prétendus "croisés chrétiens", mais aussi la mise en évidence de la stratégie de l'Antéchrist pour maintenir son emprise sur l'humanité, le plus souvent possible.

    A ma connaissance l'islam et le coran ne contiennent pas d'élucidation, comme les épîtres de Paul ou l'apocalypse, du piège tendu par Satan aux hommes. Au contraire, il me semble que pour lutter contre l'oppression de la culture occidentale, les moyens mis en oeuvre par les djihadistes musulmans sont recopiés sur la culture occidentale. La résistance par la terreur et l'assassinat des élites capitalistes trouve bel et bien sa justification dans la culture occidentale, bien avant la révolution française. A ma connaissance le coran et la religion mahométane ne contiennent pas d'avertissement, contrairement aux prophéties juives, contre la manière, voire la ruse du clergé, qui consiste à façonner une idée de dieu propice au clergé.

    S'inspirant de méthodes révolutionnaires en usage en Occident, les djihadistes qui se préoccupent sincèrement de dieu feraient bien de constater à quel point les révolutions occidentales ont peu contribué à faire reculer la bestialité, mais contribué seulement à Occident qui dissimule ses moyens d'oppression derrière des arguments de tartufe démocrate-chrétien. 

     

     

  • Trompe-la-mort

    L'existence de la plupart des hommes se passe à essayer de tromper la mort. En cela l'homme ne diffère guère de l'animal, plus habile même que l'homme sur ce terrain. Les questions métaphysiques : amour, liberté, vérité, ne troublent jamais en effet l'animal, elles n'altèrent pas sa volonté.

  • Théorie du bonheur

    L'intérêt d'une théorie du bonheur, c'est que l'idée du bonheur occupe la même place dans les régimes totalitaires que l'idée de dieu dans les régimes tyranniques (théocratiques). Nitche, sachant que le sentiment religieux n'a pas décliné, mais qu'il est au contraire en plein essor, aurait pu ajouter : "Dieu est mort... l'idée du bonheur l'a tué." Nitche décèle en effet le masochisme dans le comportement moderne, mais le masochisme est lié à l'idée d'un bonheur, d'une jouissance pure.

    Ainsi la promesse d'enrichissement faite aux classes défavorisées par leurs leaders (Guizot, Obama, etc.) est une promesse de bonheur indirecte ; la publicité, première religion mondiale, s'occupe ensuite de poser l'équivalence de l'aptitude à consommer toujours plus et du bonheur.

    Derrière l'illusion égalitaire se cache aussi une idée du bonheur : il s'agit encore, aussi incongrue soit cette idée, de jouir "à égalité". En réalité, la souffrance est beaucoup plus commune, égalitaire et démocratique que la jouissance. C'est ce qui rend le satanisme de Nitche, apologie de la jouissance et quête raisonnée de celle-ci, incompatible avec les valeurs modernes, que celles-ci soient dites "de gauche", ou bien "de droite".

    Si l'on peut dire la quête de Nitche "raisonnée", c'est notamment parce qu'elle est détachée de l'obsession sexuelle, qui caractérise la morale moderne. Empêché de jouir sexuellement en raison d'une santé défaillante, Nitche est convaincu, à juste titre, que l'art ou la poésie sont une source de jouissance plus sûre que la sexualité, et que l'aptitude d'un impuissant sexuel tel que lui à s'épanouir n'est pas moins grande que celle d'un homme moins naturellement chaste. Il est vrai cependant que Nitche a lutté toute son existence pour atteindre le bonheur, dont l'accès lui était rendu difficile par la maladie. C'est l'aspect le plus moderne de Nitche : il est malade, physiquement et psychiquement.

    La doctrine de Nitche exclut l'amour, comme une notion métaphysique improbable ou irréelle, ainsi que toutes les notions métaphysiques que sont la liberté et la vérité. Le mérite de cette doctrine est de réduire à la ruse ou à l'imbécillité toutes les représentations frelatées de l'amour, sentimentales ou romantiques. L'idéalisation de la sexualité dans la culture moderne est parfaitement symétrique de l'idéalisation de l'argent, comme un moyen de parvenir au bonheur.

    Il n'y a rien à espérer de la démocratie en termes de bonheur suivant Nitche, qui prédit un destin catastrophique à ce type de régime - destin déjà partiellement accompli. Cependant le citoyen lambda ne se déplacerait pas pour participer aux grand messes électorales, s'il n'espérait pas que la démocratie tiendra un jour sa promesse de paradis sur terre.

    On peut voir aussi à travers l'idée, la représentation du bonheur moderne, largement inoculée par la publicité aux gosses dès le plus jeune âge, véritable fléau moral, une représentation féminine du bonheur et de la jouissance ; il y a dans le masochisme une aspiration irrationnelle au bonheur, et c'est celle de la femme ou de l'homme moderne. On la reconnaît aisément à la place que la sécurité prend dans l'idéal du bonheur totalitaire. Les femmes conçoivent aussi généralement le bonheur d'un manière plus quantitative que qualitative. Le bonheur, pour les hommes, est vital, constitutif de la volonté, relatif. Pour les femmes il est macabre, absolu, plus proche de l'état d'inertie. La mort est en effet le seul état théoriquement pur de toute souffrance. Et Nitche parle justement à propos de la société moderne de culture de mort. L'expression de "culture de vie" dans la bouche du clergé catholique, est entièrement dépourvue de signification. Il est question exclusivement de "vie éternelle" dans les évangiles, et celle-ci est dépourvue de toute dimension culturelle, artistique, politique, et bien sûr charnelle. 

    Le paradoxe est donc que le bonheur n'a jamais une si grande valeur, une valeur infinie, que pour ceux qui en sont le plus éloignés.

    A titre personnel, si je me sens "qualifié" pour parler du bonheur, c'est parce que je ne me suis jamais senti aussi heureux. Cela étonne parfois certains de mes proches, en même temps qu'ils ne peuvent que faire le constat de mon excellente santé et dynamisme. Sans doute je ne ris pas souvent, car mes contemporains m'en donnent très rarement l'occasion, occupés surtout à chercher le bonheur là où il n'est pas - l'amour, l'argent, un métier stupide dans le secteur tertiaire, etc.

    A quoi tient mon bonheur ? J'ai mesuré la chance de naître français en visitant les Etats-Unis, où la société la plus laide et la plus féminine est implantée dans des contrées magnifiques ; je compte bien sûr les dons qui m'ont été accordés par la nature, même s'il ne faut pas les surestimer, car la morale moderne est capable de transformer un homme convenablement pourvu en plaie vivante ; mon mépris de l'éthique moderne, assez précoce, m'a évité de tomber dans les pièges que la société moderne tend aux jeunes gens afin de mieux les soumettre. Je dirais que mon premier mouvement de rébellion fut contre l'école : j'avais le sentiment que la culture, l'art, la science, pouvaient être des choses intéressantes, que l'école prenait un malin plaisir à rendre ennuyeuses, scolastiques.

    Bien sûr, étant heureux, on a mieux conscience des limites du bonheur et de la relativité de cet état. La volonté de suicide n'émane pas forcément d'un homme malheureux, et certains philosophes antiques prônent le suicide comme un moyen de remédier, le cas échéant, à la souffrance, telle que celle que la vieillesse peut engendrer, par exemple.

    La psychanalyse moderne est inférieure à la morale antique, car elle signale moins les limites du bonheur. L'usage de la psychanalyse et des psychanalystes par l'appareil d'Etat totalitaire est destiné à surseoir à la carence du clergé catholique.

    La métaphysique est sans consistance, dit Nitche - il n'y a rien en dehors de la nature. On peut prendre cette déclaration comme une pétition de principe : tant qu'un individu n'a pas atteint un niveau de jouissance suffisant, la métaphysique n'est rien à ses yeux, toute sa force et toute sa volonté concourent à atteindre un niveau de jouissance acceptable. Autrement dit, l'individu qui souffre raisonne uniquement en termes de besoin. Il peut, à cette fin, croire en des dieux abstraits ("Dieu est un point", dit Pascal), dont la fonction est uniquement de les aider à prendre patience et à endurer la frustration. La musique est une telle pataphysique, qui s'est substituée dans les temps modernes à la métaphysique véritable, qui ne prend pas sa source dans l'âme, mais dans le cosmos.

    La caractéristique de l'amour, de la vérité et de la liberté, est de ne répondre à aucun besoin humain. En politique, ce qui ne répond à aucun besoin humain, n'est d'aucun usage et n'existe donc pas. Comme le souligne H. Arendt, l'intérêt de l'institution étatique et des fonctionnaires de l'Etat moderne pour la science est on ne peut plus suspect (de machiavélisme), car quel pourrait bien être, sur le plan politique, l'usage de la science ?

     

  • Dans la Matrice

    Âpre débat avec un catholique romain (par courrier) ; celui-ci croit et dit s'appuyer sur une doctrine, mais en même temps il est trop cultivé pour ignorer que c'est l'absence de doctrine qui caractérise le mieux l'Eglise romaine. C'est sa souplesse et ses facultés d'adaptation qui ont permis à l'Eglise romaine de durer, non sa rigueur doctrinale. Le satanisme est plus rigoureux doctrinalement que le catholicisme romain.

    Le débat entre conservateurs et modernistes à l'intérieur de l'Eglise romaine illustre cette absence de cohérence. L'institution romaine ne peut pas être totalement conservatrice, sans quoi elle dévoilerait qu'elle est satanique, à l'instar de Nitche ; elle ne peut pas non plus être totalement moderniste, sans quoi elle dévoilerait qu'elle est un pur mobile social, donc dépourvue de sens spirituel (nul texte ne souligne en effet autant que les évangiles la vanité du plan social).

    Ce même catholique romain m'avouait, auparavant, qu'il détestait la philosophie ; c'est dire son ignorance de sa propre religion, puisque le catholicisme romain est une religion essentiellement philosophique et médiévale.

    Dès lors qu'on propose, en historien, comme Boccace ou Shakespeare, une peinture vraie d'un moyen-âge en proie au vice, ou ne serait-ce que "médiocre", comme son nom l'indique, on a beaucoup contribué à réduire le catholicisme à la nostalgie d'un état de grâce qui n'a jamais existé. "Déphilosophons !" : le mot d'ordre de Marx ou Nitche est largement un slogan anticatholique ; et si l'on examine qui, aujourd'hui, tente de nous persuader du bienfait de la philosophie, on retrouvera les héritiers du clergé romain, se dissimulant derrière l'argument laïc afin de mieux tenter d'imposer au monde entier leurs concepts creux. J'explique ici que le catholicisme romain, sous une forme larvée ou inconsciente, est bien plus répandu qu'on ne le croit.

    Il est donc très difficile de causer doctrine avec un catholique romain, car il n'y a pas de doctrine catholique romaine solide. On définira mieux l'adhésion au catholicisme romain ou la séduction qu'il peut exercer sur certaines personnes athées par un motif psychologique : - Maman a toujours raison. Un catholique romain semble chercher toujours des excuses à sa mère, y compris quand elle est inexcusable. Prenons, par exemple, les cérémonies de repentance de l'Eglise romaine pour ses crimes passés et torts à l'égard des juifs (avérés ou non, peu importe). D'un point de vue évangélique, ou même théologique, elles sont aberrantes ; mais du point de vue du catholique qui ne tolère pas qu'on puisse dire que sa mère s'est vautrée dans les fossés de la diplomatie ou de la politique, ce genre de cérémonie devient logique.

     

     

     

  • L'Hypothèse

    LE PEUPLE SOUVERAIN : - ...et l'hypothèse de dieu ?

    LE BOUFFON : - L'hypothèse de dieu, mesdames et messieurs, c'est l'Etat, donc c'est vous. 

  • Dans la Matrice

    Un chrétien peut s'exprimer sur l'art, mais dans le fond ce qui intéresse vraiment le chrétien, c'est la science.

    La culture ultra-moderne prouve ceci : dieu est mort, mais la religion n'en demeure pas moins omniprésente. L'esprit critique n'est pas plus répandu dans les sociétés démocratiques athées qu'il ne fut dans les sociétés théocratiques autrefois. L'idée du progrès qui prévaut dans la culture ultra-moderne est elle-même une idée religieuse.

    La caractéristique des sociétés totalitaires qui consiste à accorder au langage une valeur supérieure, c'est là le facteur de la superstition moderne. Le langage est utilisé par les élites dans les sociétés totalitaires comme un instrument de sidération du peuple. En enfermant dieu dans des définitions abstraites, la théologie catholique a accompli les trois/quarts du chemin en direction de la culture athée ultra-moderne.

    L'athéisme que Simone Weil perçoit comme pouvant "purifier la foi", c'est celui de Nietzsche, ou encore du jeune Marx ; ou bien encore de la jeune Simone Weil ; mais dans la société occidentale désormais, on ne rencontre pas cet athéisme-là ou presque, mais la soumission à une norme laïque admise comme un dogme par le citoyen lambda.

    La religion moderne ouvre sur un nombre de perspectives infini, tandis que la science réduit le nombre des perspectives. Les esprits scientifiques, contrairement aux esprits sentimentaux, ne caressent pas de vains espoirs toute leur vie.

    Si Shakespeare a prédit l'oppression totalitaire, c'est aussi parce qu'il a prédit le nivellement de la conscience au niveau des sentiments (Roméo & Juliette), et le rôle des clercs dans cet entreprise barbare d'asservissement. La moraline destructrice des vraies valeurs dont parle Nietzsche, n'est pas le produit du christianisme ; elle est le produit de la ruse de Satan, possédant les clercs chrétiens comme il posséda auparavant les juifs.

  • Science sans conscience

    Pour tenter d'expliquer que la science moderne n'est pas une science, dès lors que je rencontre un esprit curieux de science (ce qui m'est arrivé trois ou quatre fois dans ma vie à tout casser), je dis ceci : l'aspect de "poupées russes" est repérable dans la science moderne ; il se traduit, de façon moins imagée, par le fait que la réponse à une question débouche sur un nouveau questionnement ; par la suite la nouvelle réponse apportée, a pour effet de dévaluer la réponse n-1.

    Autrement dit, on décèle sur le raisonnement scientifique moderne l'influence des mathématiques (géométrie algébrique). Les savants matérialistes les plus éminents, partisans de l'expérimentation scientifique par ailleurs, en lieu et place des hypothèses et démonstration trop générales, ont indiqué à quel point la tentative d'élucider la cause première ou la cause dernière reflète, non pas l'objet de la science, mais le besoin de l'homme de tirer des lois de la nature et de son observation. Par conséquent, pour ces savants matérialistes (Aristote et Bacon), les mathématiques ne sont pas une science fondamentale et les ingénieurs ne sont pas véritablement des savants.

    Cet aspect de "poupées russes" est caractéristique de l'institution politique. Or, la caractéristique des régimes totalitaires où nous sommes, dit justement Hannah Arendt, est de ne pas concevoir l'antagonisme des démarches scientifique et politique, et que la science ne répond pas aux besoins auxquels la politique est censée répondre.

    Où Hannah Arendt commet une grave erreur d'appréciation, s'agissant de l'évolution de la science moderne, et on sent d'ailleurs à la lire une hésitation et une dose de perplexité, c'est lorsqu'elle se figure la science moderne plus froide, plus "objective" (je mets entre guillemets ce mot à triple sens), sous l'influence des mathématiques. C'est tout le contraire, et il manque un chapitre chez Nietzsche afin de fustiger les mathématiques comme une science "humaine, trop humaine", ainsi qu'il le fit à propos de diverses spéculations morales modernes marquées par la philosophie médiévale, CARBURANT PRINCIPAL DE L'ANTICHRISTIANISME (car effort discret et sournois pour dénaturer la notion de péché originel).

    J'invoque Nietzsche ici car il me paraît évident qu'il a influencé un certain nombre de critiques du totalitarisme moderne, dont Hannah Arendt, peut-être plus encore que Karl Marx en raison du cordon sanitaire disposé autour de K. Marx par les élites soviétiques ou staliniennes. L'esprit moderne n'est pas satanique, au sens de la culture de vie païenne prônée par Nietzsche. Mais il n'est pas "judéo-chrétien" non plus, contrairement à ce que prétend Nietzsche, car la prétention du clergé catholique à proposer une quelconque doctrine sociale ne résiste pas à la confrontation aux évangiles. La doctrine sociale chrétienne est exactement ce que les évangiles qualifient de "fornication" - on voit d'ailleurs Jésus-Christ se comporter toujours au cours de sa vie publique comme si la plus grande menace pour le salut devait venir du sein de l'Eglise, et non des païens comme Ponce Pilate.

    Les chrétiens ont été avertis par leur Sauveur du complot permanent contre l'esprit de Dieu jusqu'à la fin des temps. Toute tentative de s'organiser politiquement sous des symboles chrétiens nous renseigne sur le poids extraordinaire que Satan pèse sur la conscience des hommes. La limite de cette influence est marquée par la science (non réflexive) ou la métaphysique. Si Nietzsche fait autant d'efforts pour la nier, quitte à mentir parfois de façon grossière, c'est parce qu'il sait très bien que la métaphysique constitue une brèche dans l'ordre naturel des choses, et qu'il est impossible de concevoir la métaphysique comme le prolongement de la physique.

     

  • Place du chrétien

    La mort de l'art est la rançon de la démocratie. Il n'y a que dans les "grandes démocraties modernes", régimes d'oppression sournoise, que l'expression de l'aliénation est justifiée comme l'art, ou encore l'expression du désir sexuel, de la peur, de l'angoisse.

    Il n'y a qu'en démocratie que l'on ne se pose pas la question : - si l'aliénation a sa part dans l'art, qu'en est-il du domaine de la science ? Est-ce que nous ne subissons pas les conséquences de l'aliénation de certains prétendus savants ? Pour être juste, certains esprits critiques se sont posé la question, tels que Simone Weil, Georges Bernanos, Hannah Arendt, Georges Orwell, de la fiabilité de la science moderne, mais aucun n'y a répondu comme Hamlet, de façon catégorique, en transperçant Polonius.

    La place du chrétien semble introuvable, puisque celui-ci ne se situe ni dans le camp, conservateur, de l'art, ni dans le camp de la démocratie, plus moderne ; ni dans la prison du passé, ni dans celle de l'avenir. Le chrétien voit dans l'art comme dans la démocratie, deux formes de satanisme, non pas opposées mais tributaires l'une de l'autre, opérant ensemble diversion. La première, l'art, plus pure, plus franchement hostile à l'idée de révélation chrétienne, posant le principe des limites de la nature vivante à l'aspiration chrétienne à connaître dieu et l'éternité. Le second antichristianisme, plus sournois, ne serait-ce que parce que portant le plus souvent l'étiquette "judéo-chrétienne", acharné à poser l'équation du temps et de l'éternité, à travers les trois discours de l'art, de la philosophie et de la science modernes.

    Le satanisme de l'art s'oppose au judaïsme et au christianisme sous la forme d'une philosophie naturelle. Le satanisme de la démocratie s'oppose au christianisme sous la forme de l'artifice. Artifice de la démocratie, assez facilement discernable et auquel l'esprit français, moins spéculatif, a le don de s'opposer (même Tocqueville n'est pas assez sot pour avoir une foi aveugle dans la démocratie), mais aussi artifice de l'art, de la philosophie et de la science qui justifient la démocratie, tous trois sous l'empire de la notion d'infini, la plus artificielle qui soit.

    Pourquoi la démocratie est condamnée à échouer ? Parce qu'elle est une perspective exclusivement humaine, par conséquent essentiellement athée, dépourvue de but anthropologique véritable. L'art vise lui, la jouissance, et la démocratie détruit l'art au profit de concepts religieux athées. Si la démocratie selon Marx est moins absurde, c'est à cause du but scientifique que Marx lui assigne, par-delà le motif strictement anthropologique du bonheur. La démocratie selon Marx n'est pas une fin en soi, mais un moyen d'accéder à la vérité. La démocratie selon Marx n'est pas un état de droit égalitaire - elle diffère en cela du principe démocratique totalitaire. Où le raisonnement démocratique de Marx est juste, c'est sur l'aspect de l'anti-élitisme, précisément le point où il a été trahi par la doctrine sociale léniniste. Marx observe justement, bibliquement, qu'une élite politique, quelles que soient les valeurs éthiques qu'elle défend, conservatrices ou modernes, poursuit nécessairement un but institutionnel et n'a pas intérêt à découvrir la vérité, à une vérité qui, si elle est métaphysique, a le don de dévaluer le plan institutionnel et social. Un homme de loi rationnel, désireux de consolider les lois humaines, est contraint de dire : il n'y a pas de vérité métaphysique, il n'y a que des vérités naturelles. Il est une manière, démocratique et moderne, de faire obstacle à la vérité, c'est de simuler un plan métaphysique dans le droit et les institutions, c'est-à-dire de promulguer des lois artificielles, pleines de promesses qui ne seront jamais tenues, des lois qui prétendent inclure l'amour et la liberté, mais ne visent en réalité qu'à les galvauder. 

     

  • Soumission

    Le bonheur consiste principalement dans la maîtrise de ses émotions. Dans les régimes totalitaires, le citoyen est soumis à celles-ci, ce qui explique largement le développement d'une économie irrationnelle, ne visant pas d'abord la satisfaction des besoins ; les gosses sont encouragés par divers moyens pernicieux à cultiver leurs émotions - les épidémies de drogue et de suicide sont des dommages collatéraux de ce qu'on ose nommer "Education nationale", vaste entreprise de dévirilisation.

    Le terme de "matrice" est judicieux pour indiquer la nature de l'oppression moderne, car de fait une mère tiendra ses enfants sous sa dépendance en leur enseignant à se soumettre à leurs émotions.

    Le terrorisme vise naturellement le talon d'Achille de la société occidentale totalitaire, prédestinée à imploser sous l'effet d'une peur excessive.

  • Dieu et l'amour

    Il en va de l'amour comme de dieu : avant de connaître l'amour, il faut détruire de nombreuses représentations erronées de l'amour - de nombreuses idoles placées par Satan en travers du chemin de l'amour.

    Mon succès auprès des femmes m'a tôt enseigné à quel point l'amour est une chose rare dans le monde, plus rare que les filons d'or. En effet, quand une femme disait m'aimer, je devinais sans trop de peine qu'elle n'aimait en moi que ce qui pouvait la faire rêver, y compris d'ailleurs l'aspect le moins flatteur. Bref, le malentendu qui est la loi commune des histoires d'amour, a très tôt été pour moi particulièrement évident, et il l'aurait été encore plus tôt si je n'avais pas reçu une éducation féministe.

    A l'hystérie de dieu : "Allah akbar !", c'est-à-dire une forme de volontarisme de la foi, répandue dans les pays pauvres, correspond une hystérie de l'amour dans les pays riches démocratiques. Impossible de faire le recensement des films et des chansons d'amour débiles en vogue dans les pays Occidentaux, tant il y en a. "L'islam est la religion la plus conne.", maugrée le pauvre type à la recherche de la "femme de sa vie".

    L'amour est une religion de riches parce qu'il coûte beaucoup plus cher que dieu. Les émotions sexuelles que procurent la guerre pour le service de dieu sont d'un coût faible en comparaison de la dépense capitaliste.

    Satan est le grand ordonnateur de la plupart des cultes, et il agit comme les hommes qui lui ressemblent le plus - il divise pour mieux régner. Jusqu'où Satan peut-il aller dans la division, le choc des cultures, la règle du "Je", sans entraîner la fin du monde ?

     

  • Le Christ dans le métro

    Je croise dans le métro, ligne 8, un jeune chrétien qui prêche intelligemment à la rame. - Jésus-Christ, dit-il, n'est pas venu fonder une religion, mais les détruire toutes. La trentaine ou un peu moins, l'apparence et le costume d'un VRP, calme, pas d'effet dramatique dans son discours, ni d'indice de folie - originaire du Maghreb.

    Les robots qui se rendent au boulot prêtent un peu l'oreille, pour ceux qui n'ont pas un casque à diffuser de la musique sur la tête, délivrant un ordre de mission cool. La santé mentale apparente du prêcheur est ce qui plaide le plus en sa faveur.

    L'indifférence reprendra ses droits dans une, deux ou trois stations. Il n'y a pas d'amour, mais de l'indifférence, dira l'athée, justifié par la plupart des faits et gestes de ses contemporains ; de l'indifférence et de l'appétit. Le prêtre chrétien ne doit pas s'attendre à ce que son prêche ait un effet de masse, surtout dans les derniers temps de la terre et de l'humanité, de l'avènement de l'antéchrist.

  • Moyen et but

    La volonté n'est rien au regard de la vérité.

  • Fornication catholique

    Le péché de fornication est la pire chose dont on puisse accuser un chrétien. La colère du Christ Jésus est chaque fois déclenchée par elle contre ses disciples ou les Juifs, tandis que Jésus n'a pas de réaction en face du blasphème des païens.

    Le clergé romain est le principal responsable de l'occultation de ce péché contre l'esprit de dieu, afin de retarder l'apocalypse pour le compte de la bête de la terre. En faisant croire que l'on peut prévenir la fornication par la morale sexuelle, alors que la fornication EST la morale sexuelle.

    Idiot utile, le "père" Alain de La Morandais (tu n'appelleras "père" que ton dieu et ton dieu seul, dit l'écriture sainte), est convoqué par les chaînes de propagande capitaliste, télévision ou radio, dès qu'il s'agit de fournir une explication aux paroles de l'évêque de Rome, son chef, en matière de morale catholique. Les authentiques chrétiens n'ont pas de chef et sont responsables de leur propre salut, et M. de la Morandais s'exprime au nom de son club de branleurs capitalistes, et en lui seul. De même quant un éditorialiste du "Figaro" a l'audace de se dire "chrétien", ne voyez-là qu'une manifestation de la ruse de Satan.

    Le divin La Morandais, prêt à toutes les galipettes pour cinq minutes dans la lumière des projecteurs, déclare à des centaines de milliers de Français, voire des millions, que "le plaisir sexuel est un don de dieu" (!) ; la preuve, il l'a lu dans un traité du pape Karol Wojtyla. Sans rire. Bien sûr le fromage et le pinard des moines sont un cadeau de dieu, à ce compte-là. Voilà comment on efface les paroles du Messie sur la faiblesse de la chair dans l'Eglise catholiques - exactement comme on vend des savonnettes à la télé. Spirituellement, il n'y a aucune différence entre ces deux propositions.

    Si j'avais dix-sept ans aujourd'hui, l'âge pas très sérieux où les sociétés totalitaires s'efforcent de maintenir leurs citoyens, je me convertirais sans attendre à l'islam, équivalent du catholicisme en moins femelle (comparez l'équipement du croisé chrétien aujourd'hui, et celui du djihadiste musulman). Et pourquoi ça ? Parce que la violence est une source immense de plaisir, et que ce plaisir vient de dieu, disent les crétins, en trempant leur biscuit dans une tasse de thé.

    Dix-sept ans est sans doute l'âge mental de M. La Morandais, car son idée du plaisir traduit cet âge, exactement comme les types de dix-sept ans appellent "amour" le coït, ce qui est une manière de le diviniser, à un point jusqu'où le paganisme n'a pas osé aller. Petit Roméo va en enfer guidé par un prêtre, nous montre Shakespeare, et cette leçon-là vaut soixante dix-sept fois sept fois les babils de La Morandais et du pape Wojtyla à l'attention des jeunes paroissiennes en fleur. 

  • L'athéisme

    Je distingue habituellement deux sortes d'athées. Ceux qui sont sentimentaux, et ceux qui ne le sont pas ou peu. Ainsi, le peu d'intérêt que j'ai pour la littérature de Houellebecq vient de ce que son auteur est manifestement du type sentimental, un sentimentalisme analogue à celui du misanthrope. En disant qu'il est "un écrivain qui vit avec son temps", Houellebecq trahit qu'il est un écrivain entièrement charnel.

    Molière nous montre à travers Don Juan le type de l'athée supérieur ou dominant, entièrement dépourvu de sentiments. Cette sorte d'athée connaît souvent une mort brutale et soudaine, la plus désirable quand on ne nourrit pas d'autre espoir que l'espoir de jouissance. Plus désirable, certainement, que le suicide lent et vaguement masochiste qu'acceptent des athées moins raffermis en guise d'existence. 

    Dans sa critique radicale de la société, il était logique que Molière imagine un personnage tel que Don Juan, beaucoup moins ridicule que tous les autres types sociaux, car se comportant rationnellement et avec courage, n'hésitant pas de temps en temps à défier la mort, bref jouant beaucoup moins la comédie que les personnages qu'il croise ; Don Juan joue seulement la comédie de l'amour, car l'amour est du registre exclusif de la comédie.

    Il est tentant de croire que Molière fait l'apologie de Don Juan ou qu'il est derrière ce personnage, comme Shakespeare derrière Hamlet. Mais ce n'est pas le cas, faute de quoi Molière n'aurait pas pu écrire "Don Juan", mais seulement des ouvrages tels que ceux produits par le marquis de Sade.

    La démocratie est la victoire de Sganarelle sur Don Juan, ou plus exactement le prolongement de celui-ci par celui-là. La culture bourgeoise prolonge la culture aristocratique comme Sganarelle prolonge Don Juan. La culture bourgeoise a dieu et maître à la fois, comme Sganarelle. Le bourgeois invoque de temps en temps le nom de dieu ou de quelque succédané comme la paix dans le monde, l'égalité des hommes, avant de se remettre au travail sous l'effet d'un coup de pied au cul, flanqué par quelque esprit plus rationnel et indépendant. Mais comme le nombre des sganarelles ne cesse de croître, et celui des don juans de décliner, la bourgeoisie est condamnée à la panique générale et au chaos.