Lapinos - Page 148
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Les envahisseurs
Je me souciais de Wikipédia comme d’une guigne jusqu’à ce que je me retrouve cerné de tous les côtés, dans les moteurs de recherche et même sur mon blogue, par des “liens” conduisant automatiquement vers ce machin - pompeusement qualifié d’“encyclopédie”.
Au risque de choquer un peu les fanatiques du consensus, quelques coups de machette dans ce beau projet de savoir universel, quitte à passer pour un ronchon une fois de plus, me paraissent amplement justifiés à ce niveau de prolifération. Et après tout on est mieux entouré au club des ronchons qu’au club des mickeys.
Certains au contraire vont penser que j’enfonce des portes ouvertes, qu’il suffit de lire une ou deux notices de Wikipédia pour se rendre compte que cette encyclopédie est une arnaque.
Je pourrais en effet me contenter de citer Larry Sanger : « En tant que cofondateur de Wikipédia, j'ai pu me rendre compte par moi-même des limites d'une telle encyclopédie créée par des volontaires et sans réel contrôle ou autorité : c’est l'anarchie. »
Larry Sanger est américain ; si même un américain, philosophe de surcroît, est capable de caractériser l’ineptie du “projet”, autant dire que pour un Français, ça tombe sous le sens ! Hélas, enfoncer des portes ouvertes n’est-il pas la triste destinée de l’homme moderne qui refuse de se laisser emporter par la marée démagogique, ne serait-ce que par réflexe ?
Les erreurs factuelles sur Wikipédia, il y en a ; ainsi mon voisin de blogue C. Copronyme en balance sur la notice d’un écrivain qui lui tient à cœur, Béroalde de Verville, une poignée, sans se forcer… Mais c’est l’argument publicitaire qui est le plus significatif, en l’occurrence. Il consiste à rétorquer aux ronchons que ces erreurs seront tôt ou tard corrigées par un “wikipédien” spécialiste de Béroalde de Verville. Car, tenez-vous bien, les wikipédiens sont des millions ! En attendant, combien de dizaines de milliers de naïfs wikipédiens auront été induits en erreurs ? Voilà l’erratum érigé en principe scientifique. Difficile de se foutre de la gueule du peuple avec plus de cynisme !
Lors d’un séminaire, des savants américains se sont penchés sur la question de savoir ce qu’il fallait penser de Wikipédia, “objectivement”. Ceux d’entre vous qui ne sont pas encore "américains" vont comprendre immédiatement la bêtise démocratique contenue dans la réponse de ces savants, incapables de voir plus loin que le bout de leurs microscopes. Ces savants conluent en effet qu’il est de leur devoir de s’intéresser à Wikipédia parce que c’est devenu la source principale de données pour la majorité des étudiants… Pas une seconde ces gugusses surdiplômés n’envisagent de déconseiller ou d’interdire l’accès à cette source pas très claire et d’en recommander de plus sûres aux gamins qu’ils sont censés élever… “Business must go on!”
Abordons maintenant une notion qui a trait au raisonnement scientifique lui-même. Wikipédia, sur un sujet donné, propose le plus souvent une thèse et une antithèse (lorsque la censure n’interdit pas de discuter la thèse majoritairement admise). Ce qu’une véritable encyclopédie comme l’encyclopédie Brittanica (je la cite parce qu’elle a été discréditée indirectement et injustement par Wikipédia) propose, c’est une SYNTHÈSE des connaissances. Aux esprits simples, ça peut paraître plus arbitraire et moins équitable. Et ça l’est. Mais justement, la science n’a rien à voir avec le consensus ni l’équité. La vérité n’est pas à mi-chemin, il faut avoir un esprit mathématique pour le penser.
Prenons un exemple qui “transcende” les opinions politiques, celui de l’homéopathie. Le rôle d’une bonne encyclopédie est d’informer ses lecteurs que l’homéopathie n’a aucun fondement scientifique, que la théorie de Hahnemann sur la similitude en thérapeutique, puis celle de Benveniste sur la mémoire de l’eau ont été tour à tour “réfutées”. Wikipédia précise bien que l’“Académie de médecine” enseigne que l’homéopathie, c’est du charlatanisme, mais cette précision primordiale au plan scientifique est noyée au milieu de tout un tas d’autres détails, rédigés par des défenseurs sincères de l’homéopathie, et probablement aussi des défenseurs du business de l’homéopathie.
Par ailleurs si les thèses de S. Freud n’ont pas plus de consistance au plan scientifique que celles de R. Hubbard, il est à la mode de se réclamer de Freud et de rejeter avec mépris Hubbard, du moins en France. Wikipédia reflète la mode sur ce point comme sur des centaines d’autres.
L’accumulation anarchique/démocratique de ces thèses et contre-thèses a d’ailleurs un retentissement sur la rhétorique elle-même. Elle est parfois complètement nivelée, ce qui donne des notices aussi cocasses qu’imbéciles car elles placent tous les faits touchant un même sujet sur le même plan, quand la véritable rhétorique est une organisation de la pensée. Voir dans l’absence de rhétorique une forme d’honnêteté, de neutralité, ça aussi c’est une idée très américaine. C’est une façon de concevoir la recherche scientifique sans le chercheur.
Évidemment, il peut se faire qu’exceptionnellement une notice soit correctement rédigée et assez complète. J’ai moi-même eu affaire dans le cadre de mes recherches à une notice sur l’école belge de bande-dessinée assez bien faite. Ces exceptions sont d’ailleurs d’autant plus nombreuses que ce système démocratique est truqué, ça va de soi, et qu’il y a en réalité des wikipédiens “de première classe” et des wikipédiens “de seconde classe”, toutes les notices ne sont pas placées au même niveau de fiabilité.
Ce qui rend Wikipédia particulièrement nuisible, alors qu’il existe sur internet des sites pratiques ou intéressants, c’est bel et bien la mégalomanie du projet, sa prétention à l’universalité, à embrasser le savoir dans toute sa largeur en jouant sur les bons sentiments qui sont désormais la chose la mieux partagée du monde sous influence américaine. -
Admiration spontanée
"Ce qu'il fallait déclarer" la semaine dernière c'était que Jean-Pierre Vernant, un ex-colonel de la Résistance agrégé de philo qui venait de casser sa pipe, était un des titans de la pensée contemporaine ! Et tous les gardiens du Temple de la Culture, dans la presse, à la télé, à la radio, de faire chorus.
D'ici quinze jours, gageons que l'indispensable J.-P. Vernant, "Résistant de la première heure", sera déjà tombé dans les oubliettes de l'Histoire ; en attendant, prière de dégainer les superlatifs et de se prosterner à l'évocation de son nom glorieux (D'ailleurs les baveux seraient bien inspirés de réviser un peu leurs superlatifs pour des occasions comme celle-ci, vu qu'en dehors de "génial" et d'"extraordinaire" ils ont un répertoire qui fait pitié.) Spectacle affligeant du bœuf Guillaume Durand meuglant son admiration spontanée sur France 2 ! Prêt à tout pour garder sa place dans la crèche médiatique, que ça soit Ségolène ou Chirac qui soit élu.
Le "Résistant de la dernière heure", même si on ne peut pas présenter les choses de cette façon sans blasphémer, est déjà l'équivalent d'un bienheureux ; alors le "Résistant de la Première heure", lui, c'est carrément un saint de première classe ! S'il a pu toucher une fois dans sa vie la main de Jean Moulin, il bénéficie même de la double auréole.
Jean-Pierre Vernant avait été présenté au "grand public" par Laure Adler sur Arte dans une interview rediffusée en ce week-end de funérailles médiatico-culturelles.
Sur la Grèce antique, Vernant porte un regard de philosophe. La démocratie grecque idéale des animateurs de télé et des instituteurs n'exista pas en réalité. Vernant ne s'en soucie guère. Les Stratèges militaires reprirent vite le pouvoir et Périclès lui-même est avant tout un chef de guerre. Tous les historiens le disent, mais on ne fait pas de la propagande avec des faits historiques.
Plus près de nous, en 1934, Vernant a séjourné en URSS pendant un mois, assez longtemps pour y observer la misère soviétique dans tous les domaines, peu conforme aux descriptions idylliques que le jeune militant du PCF lisait dans L'Humanité. Il a préféré couvrir ces faits. Idem pour les purges de Staline ensuite. Parvenu au terminus de son existence, Vernant a admis qu'il avait mal auguré du rôle que l'URSS pouvait jouer dans l'édification d'un monde meilleur.
Son autocritique ne va pas jusqu'à faire des excuses. D'abord parce que Vernant n'est sans doute pas assez idéaliste pour croire que ce genre de repentance ait une quelconque utilité ; ensuite parce qu'on ne demande pas de comptes aux vainqueurs. -
Commencer par la fin
Quand on tient l'esprit philosophique pour une sorte de maladie mentale, le cas de Gombrowicz, proche de la dépression et du suicide, est assez intéressant.
Il y a une sincérité extrême chez Gombrowicz, qui le pousse à la fin de sa vie à reconnaître que Ferdydurke est un roman beaucoup trop calculé, "prémédité" c'est le terme qu'il emploie, pour être vraiment vivant et donc éternel. Seules les choses vivantes ne meurent jamais, ça Gombro en est finalement convaincu. En même temps, de façon assez puérile, bien qu'il réduise Sartre à un chantre de l'"égotisme bourgeois", Gombro veut qu'on sache bien qu'il avait précédé Sartre dans la voie de l'existentialisme. Drôle de logique.
Ce petit passage dans une préface me fait sursauter :
« Quant à la pensée objective, elle se voit aujourd'hui concrétisée, exprimée avant tout dans le catholicisme d'une part, dans le marxisme de l'autre. Toutefois, de l'aveu de Marx lui-même, le marxisme n'est pas une philosophie ; quant au catholicisme qui s'affirme comme une métaphysique fondée sur la foi, il est assez paradoxalement la conviction subjective que le monde objectif existe. »
Passons sur le paradoxe, très relatif, puisque du point de vue du catholique c'est Gombrowicz qui est subjectif. Ce qui m'étonne beaucoup c'est qu'à soixante-cinq ans un type cultivé, qui a grandi dans un pays catholique, puisse avoir une conception aussi erronée du catholicisme et prétendre qu'il s'affirme comme "une métaphysique fondée sur la foi" ? Drôle de credo. -
L'importance de l'index
Le Journal de l'abbé Mugnier a un avantage sur celui de Claire Fourier, il possède un index ! Je cherche ce que le superficiel abbé* rapporte à propos de Montherlant qui bénéficie de cinq ou six "entrées" dans mon édition.
En 1921 Montherlant a le pressentiment de la deuxième guerre. Elle se dessine dans un délai de cinq ans, pense-t-il. Mugnier ne fait aucun commentaire. Il a beau être plutôt démocrate-chrétien, l'abbé n'est pas dans le même état d'hébétude où sont aujourd'hui les bourgeois de la même espèce, tous à peu près persuadés que le règne de la démocratie durera mille ans et qu'elle nous préserve ad vitam æternam des horreurs de la guerre ; pire, qu'on risque de faire tourner le lait qui permet de fabriquer le beurre catholique si on se déclare inquiet de la bêtise et de la collaboration des clercs.
*Je définis l'abbé Mugnier : "Celui qui sonde le chœur." -
Clin d'œil
Si on me pose la question, je tiens l'existence de cet Éric Baudelaire, artiste-photographe né en 1973 aux États-Unis et ayant émigré en France, pour un clin d'œil de l'Histoire.
Évidemment je souhaite que ce type retourne au plus vite prendre des clichés dans son pays - à coups de pied au cul s'il le faut. On a déjà assez de problèmes comme ça avec certains de nos ressortissants qui se répandent en syllogismes idiots chez Frédéric Taddéi tous les soirs. -
La faute à Baudelaire
Baudelaire et Gautier sont à la limite de ce qu'un profane peut écrire sur la peinture. Baudelaire en a conscience lorsqu'il écrit que la poésie est sans doute le seul biais pour exprimer quelque chose de juste sur la peinture. Néanmoins Baudelaire trouve sa légitimité dans son amour - sa passion même -, pour cet art, qu'il tient de son père. En quelque sorte il s'exprime toujours par hypothèses et se tient prêt à réviser son jugement sur une production dont il n'a qu'une vision extérieure fragmentaire.
Baudelaire franchit la limite lorsqu'il opère une discrimination entre les peintres "dessinateurs" et les peintres "coloristes". Je souligne cette phrase typique : « Les grands coloristes dessinent par tempérament, presque à leur insu. (…) Leur méthode est analogue à la nature : ils dessinent parce qu'ils colorent. » C'est très poétique mais ça n'a aucun sens précis.
La couleur n’est qu’un "effet" en peinture, il n’y a aucun peintre au panthéon des peintres dont l’art n’est pas fondé sur le dessin. En revanche, parmi ces génies, certains maîtrisent plus ou moins bien les effets de couleur, et à juste titre Baudelaire peut-il écrire que les tons de Michel-Ange sont criards ou faux (ce qui pour un sculpteur n'est guère étonnant). Rembrandt préfère jouer sur la lumière qu'il est capable de dessiner sans changer d'outil !
C'est Rousseau qui a raison, condamnant ainsi par avance un impressionniste oisif et crédule comme Monet à rester dans l'Histoire comme un simple peintre expérimental. Ce qui compte aux yeux de l'Histoire, ce n'est pas d'avoir expérimenté mais d'avoir trouvé, n'en déplaise aux journalistes à la mode.
Idem pour cette définition du peintre moderne que Baudelaire tente de forger. Il y a de beaux mouvements, mais la statue ne tient pas debout.
Ici on ne peut pas s'empêcher de remarquer que c'est pour ces deux notions, la distinction entre "coloristes" et "dessinateurs" d'une part, et le "peintre moderne" d'autre part, que Baudelaire est surtout "reconnu" aujourd'hui en tant que critique. On a même quasiment érigé ces deux idées en dogmes, alors que Baudelaire est tout sauf dogmatique.
Il faut bien comprendre que la production picturale est placée dans une situation d'infériorité par rapport à la production littéraire au sens le plus large et le plus vil, journalisme et philosophie inclus. Les peintres s'expriment essentiellement de manière abstraite. Leur sort est donc en partie entre les mains des littérateurs. Il dépend de leur intelligence et de leur honnêteté. Dans la société capitaliste, où la publicité joue un rôle déterminant, autant dire qu'il ne faut plus compter sur l'intelligence et l'honnêteté qui ont été reléguées dans les bibliothèques ou les musées.
S'il y a bien quelque chose dont on ne peut faire le grief à Baudelaire c'est de s'être interposé entre le public et l'art pour tenter de sauver celui-ci. Ni d'avoir sonné le tocsin et tiré des fusées éclairantes quand la race maudite des libéraux avec leurs machines-outils ont pris le pouvoir. Il y a cette fameuse trilogie de Baudelaire, le prêtre, le soldat et le poète, en dehors de laquelle il n'y a pas de salut. Ça laisse songeur quand on voit comment les prêtres, les soldats et les poètes sont traités aujourd'hui par les marchands. -
La théorie de Hockney
Bien que l'hypothèse de David Hockney soit fausse, il n'est peut-être pas inutile d'en dire deux mots (Autant prévenir de suite le passionné de cinéma ou de poker qu’il risque de trouver cette bafouille consacrée à "Hockney et la peinture occidentale" un tantinet longuette…)
Pour le béotien, rappelons en quelques mots en quoi consiste la théorie de Hockney, publiée pour la première fois il y a quelques années dans le New-Yorker, un canard qui s’emploie sans beaucoup de succès à essayer d’introduire le snobisme Outre-Atlantique.
Une observation attentive de la peinture occidentale, dans laquelle Hockney prend la responsabilité d’inclure les mièvreries "branchouilles" d’Andy Warhol, a amené Hockney à la conclusion que les peintres utilisent communément pour peindre, depuis le XVe siècle, un dispositif de chambre claire, fait d’une source lumineuse vive et d’une grosse lentille qui projette l’image du modèle et permet au peintre de la "décalquer" sur sa planche. Il va sans dire que "décalquer" est à mettre entre guillemets, car Hockney n’est pas assez "californien" pour penser que du quattrocento jusqu’à Ingres les peintres se sont montrés assez malhabiles peindre de simples décalcomanies. Plutôt que de décalquer, il s’agit de relever les cotes assez rapidement, à l’envers (l’image est projetée à l’envers, si j’ai bien compris le dispositif).
Pour Hockney, il n’y a guère de doute que cet instrument a introduit le réalisme dans la peinture en Occident dès la fin du XVe siècle !
Les arguments de Hockney sont assez empiriques, il ne dispose pas de preuves écrites de l'usage de ce dispositif. Bien entendu ce n'est pas ça qui prouve qu’il a tort. En revanche l’argument qu’il avance pour justifier la difficulté de dénicher des preuves écrites est révélateur : selon Hockney, le goût du secret professionnel de ces peintres serait la cause de cette pénurie… Ça me laisse sceptique : les peintres avaient de nombreux apprentis, et si dans une ville comme New York on arrive peut-être à emporter son secret dans la tombe, dans une ville comme Bruges ça devait être beaucoup plus difficile…
L’autre argument de Hockney justifie à ses yeux que les historiens d’art européens traitent sa théorie par le mépris. Pour ces historiens, suppute-t-il, la chambre claire dévaluerait le génie des peintres européens.
Faux. Ma théorie à moi est symétrique : c’est parce que le talent, le savoir-faire de ces peintres bouleverse tellement Hockney, il lui paraît si invraisemblable, qu’il a inventé cette théorie qui l'aide à accepter la modestie de son talent par rapport à celui de ces surdoués qui le dominent de la tête et des épaules, malgré la sincérité peu commune de Hockney.
En outre, la représentation du peintre comme un type génial et fulgurant est une idée moderne, une idée "de cinéaste", et Hockney est sûrement plus pénétré de cette fausse idée que n’importe quel historien d’art européen. Il convient en effet de distinguer les historiens d’art des guignols comme Catherine Millet, Jean Clair-l’Obscur, Marc Jimenez, Yves Michaud, etc., qui font la pluie et le beau temps auprès du public bobo, dans les médias et les administrations françaises.
L’historien sait parfaitement que derrière chaque surdoué du pinceau il y a un travailleur acharné. Il n'y a pas de miracle. Il y a un monde entre l'artiste expérimental et le peintre expérimenté.
Indéniablement les questions d'optique passionnent les peintres. Cette fascination a fini par se transformer en répulsion, d'ailleurs, lorsque la photographie a commencé de détruire la peinture pan par pan. Le tort d'Hockney est d’isoler une technique précise parmi beaucoup d’autres qui ont modifié au cours des siècles la manière des peintres de synthétiser ce qu’il est convenu d’appeler "la nature" de façon plus ou moins décisive - l'invention de la peinture à l'huile est décisive - et pas irréversible.
Nul n’est mieux placé qu’un peintre pour savoir que la "ressemblance", par exemple, est bien plus à sa portée qu’à la portée d'une machinerie quelconque. Un portrait par Hockney, avec tous ses défauts, est mille fois supérieur à une reproduction d’un visage suivant le procédé photographique.
L’intérêt de la théorie de Hockney, c’est qu'elle est une reconquête de la peinture par un peintre. C'est marre des tartines de Gombrich pour expliquer la permanence rétinienne ou ce genre de phénomène qu'un peintre éprouve directement et que le spectateur ne gagne pas beaucoup à se voir expliqué. Si le point de vue subjectif et suggestif de Baudelaire sur la peinture a de la valeur, c'est en proportion de l'amour que Baudelaire porte à cet art, pratiqué par son paternel qui l'a initié.
On ne peut qu’encourager Hockney à continuer à se pencher sur l’art occidental et ses secrets de fabrication. Bien que cette démarche d’apprentissage soit pénible, vu l'âge de Hockney et sa cote astronomique en dollars, elle est la seule voie qui ne soit pas une impasse. -
American Black Crap
Je ne retiendrai qu'une phrase d'"American black machin truc" de Maurice Dantec, une définition :
« Maxime Brunerie : l'homme qui croyait possible d'atteindre une cible mobile à deux cent mètres avec une 22 long rifle un jour de 14 Juillet. »
C'est pas très malin de la part de Dantec. N'est-il pas justement le Maxime Brunerie de la littérature, "l'homme qui croyait possible d'atteindre un jour la prose d'un honnête auteur de polars avec sa syntaxe mal dégrossie de journaliste à Libé" ?
Après avoir dit tout le mal qu'il faut penser du bouquin de J. Littell, il n'aurait pas été honnête de ma part de me taire à propos du pavé de Dantec - de pas le resituer lui aussi dans le contexte de la littérature pour faire du pognon, même si Dantec ne sera jamais retenu pour le Goncourt, ça reste un gagne-petit à la merci d'un bide complet.
Avant de l'oublier définitivement, encore un mot sur Littell. L'autre jour je vais aux chiottes, et malheureusement ces chiottes n'étaient pas équipés de W.-C. à la turque comme je les aime, qui permettent de faire un peu de sport en même temps et accélèrent le transit final, mais d'une petite cuvette de pédé avec un tout petit trou pour les crottes de biques. Ça n'a pas manqué, je l'ai bouché ! J'ai dû plonger les bras jusqu'aux épaules dans la tuyauterie, vu que j'ai été bien élevé et qu'on m'a appris à pas laisser mon prochain dans la merde, pour purger ça. Eh bien ce que j'ai fait pour ces chiottes, je n'aurais pas été capable de le faire pour Les Bienveillantes de Littell ; non, ça m'aurait retourné le cœur. Je suis donc bien content qu'un autre ait fait ce sale job. Il s'appelle Éric Janin. Il a fait une liste non exhaustive des fautes de français commises par le nègre de Littell, une par page, ce qui fait à peu près un millier quand même. Si vous avez un beau-père, un beau-frère ou une belle-sœur qui vous a cassé les couilles avec les Bienveillantes dans un repas de famille, vous voyez le genre, je vous encourage à télécharger la "liste de Janin" (www.blanrue.com) et à vous venger. Pire, si on vous l'a offert à Noël, l'hypothèse n'est pas exclue vu le nombre de chalands que j'ai aperçu avec l'objet du délit sous le bras ces derniers temps, pieux bourgeois qui mériteraient qu'on leur botte le cul sévèrement, vous pouvez peut-être tenter un échange en vous appuyant sur ce document. J'ai essayé de dénicher l'adresse de ce Janin pour le remercier, mais je ne l'ai pas trouvée… -
Toujours des petites phrases
Les petites phrases de la semaine :
• Une vendeuse de la Fnac : « - Vous cherchez quelque chose ?
La cliente : - Je cherche un livre pour moi… Elle montre du doigt : Ça j’ai bien aimé ! ça j’ai bien aimé !… ça aussi j’ai bien aimé ! Je voudrais un truc… plutôt bien écrit si c’est possible. »
• Un écrivain aussi célèbre qu'hypocrite : « Pour vivre cachés, vivons heureux. »
• Un ami écrivain en herbe à la terrasse d’un café : « Mon ambition littéraire se borne à faire mieux que Philippe Sollers. »
• Un jeune homme au MacDo à une jeune fille qu'il abandonne après l'avoir draguée un peu : « Et une bonne fin d'appétit ! »
• Marie-Cécile, 21 ans, qui répond à la question du jour du quotidien Métro, "Quel vêtement regrettez-vous d'avoir acheté ?" : « Une ceinture, car je n'en ai hélas jamais eu besoin ! » (Quid de la démocratie de proximité dans les villes où Métro n'est pas distribué gratuitement ?)
• Jean-Jacques Rousseau : « Quel peintre serait assez dépourvu de sentiments et de goût pour borner stupidement au physique de son art le plaisir que nous fait la peinture ? »
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À l'heure où…
À l'heure où Jacques Chirac s'apprête à faire don de sa personne à la France coûte que coûte, à l'heure où un type de l'envergure du Premier secrétaire du PS est en grand danger de se voir bientôt confiné à des tâches ménagères, à l'heure où un chef de parti peut se faire piquer sa gonzesse par un vulgaire marchand de lessive, à l'heure où F. Bayrou commence à croire en "ses chances", à l'heure où Le Pen et Dieudonné bousculent la morale en s'embrassant en public, à l'heure où Yann Arthus-Bertrand peut passer pour un artiste, à l'heure où le droit de faire des promesses extravagantes à ses électeurs est en passe d'être inscrit dans la Constitution, à l'heure où on ne fait plus nettement la différence entre Alphonse Allais et Alain Finkielkraut, à l'heure où se brosser les dents deux fois par jour est un acte existentialiste - surtout si on coupe le robinet pendant ce temps-là -, à l'heure où je vous parle, je juge qu'il est temps de prendre des MESURES DE SÉCURITÉ pour mon blogue.
Car il n'est plus assailli seulement par les classiques athées, laïcards, partisans anarchistes, trotskistes et autres agnostiques de tout poil, que l'on connaît par cœur et à qui on peut faire des réponses automatiques, mais aussi désormais par des philosophes, des théologiens, des cinéphiles, des démocrates-chrétiens, des malthusiens, des murayo-finkielkroto-steineriens, des raéliens, bref de NOUVEAUX BARBARES ! Si je les laissais tous pomper un peu de l'air qui circule sur ce blogue, nous finirions par étouffer sous le blabla !
Mais trêve de justifications, voici les nouvelles règles en vigueur. J'ai élaboré un test d'une vingtaine de questions qui me permettra de contrôler quasi-scientifiquement à la frontière de mon blogue si ceux qui désirent y laisser un commentaire n'ont pas été contaminés, sciemment ou pas, par l'idéologie ambiante (Il faut savoir que le taux d'irradiation de la société française est un des plus élevé au monde, puisqu'il est de 8 sur l'échelle de Marx corrigée qui en compte 10, juste derrière la société nord-américaine, à égalité avec la Russie.).
Évidemment cette méthode n'a rien d'égalitaire mais au moins les personnes honnêtes et qui ont quelque chose à dire de positif seront les seules habilitées à pouvoir s'exprimer ici, autrement dit le contraire des règles d'un débat télévisé.
Ce test sera disponible sur mon blogue dès que j'aurais eu le temps d'avaler un parisien, ce qui ne devrait pas me prendre des plombes… -
"Êtes-vous contaminé(e)…
… par l'idéologie dominante ?" : le TEST !
- Bien entendu le barème et les réponses au test restent secrets. Répondez par courriel (xjassu@hotmail.com) et votre "indice de contamination" sera calculé, puis un quota de commentaires mensuel en corrélation avec cet indice vous sera attribué.
- Les candidats peuvent toujours essayer de tricher, ce test est un test scientifique conçu pour privilégier justement les gens sérieux qui essaient de tricher ; à l'inverse les "idéologues" qui seraient tentés de m'abuser ne feront qu'aggraver leur score.
- Les femmes - y compris celles qui sont bien roulées et qui peuvent le prouver en m'envoyant leur photo (Le cas s'est déjà produit, aussi ridicule que ça puisse paraître, et même si la gonzesse était plutôt blonde et jolie [13/20], je me suis montré intraitable avec elle) -, les femmes ne sont donc absolument pas dispensées d'effectuer le test ; elles véhiculent autant l'idéologie que les hommes, si ce n'est plus.
- Enfin, je conserve le pouvoir totalement discrétionnaire de délivrer des passeports permanents à ceux qui m'ont d'ores et déjà prouvé qu'ils savent garder la tête froide au milieu de ce maelstrom d'idées plus polonaises les unes que les autres. À première vue je ne vois que Claire Fourier qui le mérite pour l'instant, certes nitchéenne sur les bords, mais qui a nonobstant un bel aplomb et une expérience de la vie indéniable.
CULTURE
1- Quel est votre peintre préféré dans cette liste ?
a. Rembrandt.
b. L.-F. Céline.
c. Léonardo.
d. Vermeer.
e. Un autre peintre moins connu.
2- Quelle est votre citation préférée parmi celles-ci ?
a. "La seule faute qui soit impardonnable, c'est la faute de goût." (Lapinos)
b. "Un exemple ancien de décision démocratique : la décision de grâcier Barrabas." (S. Weil)
c. "L'or est le souverain des souverains." (Rivarol)
d. "Des idées ne peuvent jamais mener au-delà d'un ancien ordre du monde, elles peuvent seulement mener au-delà des idées de l'ancien ordre du monde. Des idées ne peuvent absolument rien réaliser. Pour réaliser les idées, il faut les hommes qui mettent en jeu une force pratique." (Karl Marx)
e. "Les citations sont une façon de se dispenser de penser par soi-même." (Anonyme)
3- Quel est votre "Tintin" préféré dans cette liste ?
a. "Tintin chez les Soviets".
b. "Tintin en Amérique".
c. "Tintin et les Picaros".
d. "Tintin et l'Alph'art".
e. Pas lu Tintin mais Spirou.
4- Quelle est la citation qui vous paraît la plus stupide ?
a. "Camenbour : style de blagues qu'on aime bien faire entre la poire et le fromage." (A. Finkielkraut)
b. "Peu importe l'éléphant, pourvu qu'on ait l'ivoire !" (Lapinos)
c. "Mort à Crédit" est le seul et unique roman communiste, mais il n'y a que les lecteurs de droite qui peuvent le comprendre, les communistes sont trop cons." (L.-F. Céline)
d. "Les cimetières sont les boîtes de nuit du néant." (Yann Moix)
e. "Je connais des gens qui n'ont d'esprit que ce qu'il leur faut pour être des sots." (Prince de Ligne)
5- Pourquoi la critique littéraire est-elle nulle en France aujourd'hui ?
a. Parce que les critiques littéraires disent du bien de tous les bouquins.
b. Parce que les critiques littéraires disent du mal de tous les bouquins.
c. Parce que des bouquins comme celui de Johnatan Littell les dissuadent de faire leur boulot sérieusement.
d. Parce que les critiques littéraires ne sont que des écrivains ratés.
e. Je préfère me fier à l'image sur la couverture du bouquin.
POLITIQUE
6- Qui risque de perdre la présidentielle 2007 ?
a. Arlette Laguiller.
b. La France, quoi qu'il arrive.
c. Sarkozy.
d. Le Pen.
e. Je m'en fous, je ne vote pas.
7- Qu'est-ce qui vous choque le plus dans les mœurs des Yankis ?
a. La peine de mort.
b. Les très nombreuses erreurs judiciaires commises par les jurys populaires.
c. Les fast-food.
d. La ségrégation raciale.
e. Sans hésiter : George Bush Jr !!
8- Quel est la nation qui risque de concurrencer sérieusement l'Empire nord-américain à moyen terme (20 ans) ?
a. L'Europe.
b. La Chine.
c. L'Inde.
d. La Russie.
e. Je ne suis pas cartomancien(ne).
9- Quelle est la meilleure définition du "bobo" selon vous…
a. Quelqu'un qui veut mettre un peu de bohême dans sa vie bourgeoise.
b. Quelqu'un qui préfère qu'on le traite de "bobo" plutôt que de "sale bourgeois", "cochon", "privilégié", ou "suppôt du capitalisme bancaire".
c. Un donneur de leçons dans le genre de Delerm.
d. Un Parisien qui déménage souvent.
e. Je n'accepte que les définitions "ontologiques".
10- Quel est de ces candidats à la présidentielle le moins démagogique ?
a. Nicolas Hulot.
b. Jean-Marie Le Pen.
c. Arlette Laguiller.
d. Jacques Chirac.
e. Ah, quel dommage que le Général/le Maréchal ne soit plus là !
ÉCONOMIE
11- Les crises (cycliques) de l'économie capitaliste (décrites par Marx) sont dues principalement…
a. À l'augmentation des salaires.
b. À l'accumulation de capitaux qui produisent peu d'intérêts.
c. Au manque d'innovations techniques.
d. À la pression fiscale.
e. Je suis une femme, je passe.
12- Pourquoi "Le Monde" est-il encore vendu en kiosque ?
a. Pour ne pas rompre avec la tradition de la presse dite "d'opinion".
b. Parce que la publicité ne suffit pas à couvrir tous les coûts.
c. Parce que le distribuer gratuitement coûterait plus cher en personnel.
d. À cause de la pression des NMPP (Nouvelles messageries de presse parisiennes).
e. Je ne comprends pas cette question.
13- Pourquoi les employés de la Fnac font-ils le "réassort" des rayons pendant les heures d'ouverture du magasin contrairement aux autres grandes surfaces, dans l'"alimentaire" notamment ?
a. Parce que les stocks s'épuisent à toute vitesse.
b. Pour emmerder les clients.
c. Parce que leur convention collective les dispense de se lever avant neuf heures.
d. Pour pouvoir renseigner les clients en même temps.
e. Je ne fréquente jamais la Fnac.
14- À qui devons-nous l'essor d'internet ?
a. À la prostitution en ligne.
b. Au savoir-faire technologique nord-américain.
c. Aux vendeurs d'ordinateurs.
d. À Google.
e. À un dénommé Loïc Le Meur.
15- D'où le Vatican tire-t-il principalement ses ressources financières ?
a. Des dons des catholiques d'Amérique du Sud.
b. De la mafia italienne.
c. De l'Opus dei.
d. Des dons des catholiques nord-américains.
e. Des droits d'auteur de Michel-Ange.
HISTOIRE CONTEMPORAINE
16- Pinochet était-il…
a. D'origine française.
b. Un dictateur bonapartiste comme De Gaulle.
c. Un dictateur fachiste.
d. Un bienfaiteur.
e. Je ne suis pas un spécialiste de la politique sud-américaine.
17- Le gouvernement qui a inventé les camps de concentration était-il…
a. britannique.
b. allemand.
c. soviétique.
d. français.
e. C'est un détail de l'Histoire.
18- Quand peut-on parler le plus justement de "génocide" ?
a. Lorsque toute une population a été décimée.
b. Lorsqu'une bonne partie d'une ethnie a été éliminée.
c. Dans le cas de l'élimination des Juifs par Hitler.
d. Dans le cas de l'élimination des Indiens d'Amérique par les colons européens.
e. Quand on est fils de déporté.
19- Quand vous entendez l'expression d'"historien révisionniste", vous pensez à…
a. Robert Faurrisson.
b. Pierre Vidal-Naquet.
c. Jules Michelet.
d. Olivier Pétré-Grenouilleau.
e. Thucydide.
20- Qu'est-ce qui manque selon vous à l'Europe ?
a. Un type viril comme Saddam Hussein pour la commander.
b. Une bonne constitution.
c. Des frontières extérieures imperméables.
d. Un rappel de son passé chrétien.
e. Un rappel de son passé révolutionnaire.
FEMMES
21- Pourquoi le droit de vote a-t-il été accordé aux femmes en France en 1946 ?
a. Parce qu'elles étaient censées voter plus à droite que les hommes.
b. Parce qu'elles étaient censées voter comme leurs maris.
c. Pour faire comme les autres pays.
d. Parce que c'était une étape nécessaire sur le chemin de la démocratie.
e. Parce que les hommes politiques se préoccupent de tout sauf des vrais problèmes.
22. Toutes tranches d'âge confondues, il n'y a que 5 % des femmes à avoir des rapports sexuels avec une capote. Où passe la surproduction de capotes ?
a. Elle est absorbée par les homosexuels qui font l'amour beaucoup plus fréquemment.
b. Les ados font des bombes à eau dans les lycées avec.
c. La surproduction est expédiée dans le Tiers-monde.
d. Les fabricants refondent leurs stocks pour fabriquer la collection printemps-été 2007.
e. Seule la méthode des glaires de Billings est vraiment naturelle, toutes les autres ne m'inspirent que du dégoût !
23- Quel genre de femme un chevalier français du XIIe siècle désirait-il par-dessus tout épouser ?
a. Une bonne chrétienne.
b. Une femme riche.
c. Une femme soumise.
d. Une femme issue d'une famille aussi prestigieuse que possible.
e. Une femme "bien sous tout rapport".
24- On observe que les femmes brillent rarement dans le domaine des Arts et des Lettres (et des sciences) Pour quelle raison, selon vous…
a. Parce que l'impéritie des hommes laisse peu de temps aux femmes pour taquiner la muse.
b. Parce que le cerveau féminin est inversé (par rapport au cerveau masculin).
c.
d. Parce que les femmes sont faites pour être des Muses.
e.
25- Qu'est-ce qu'un attrape-minette ?
a. Un hypocrite.
b. Un dragueur du XVIIIe.
c. Rien d'autre qu'un attrape-couillon.
d. Une voiture décapotable.
e. Un attrape-minon. -
Ceci n'est pas une parodie
Le gel pour les cheveux a-t-il des effets secondaires ? : ma parole, mais on dirait le titre d'un conte drôlatique d'A. Allais ! Et un peu plus bas : « Humain, en effet, est l'être qui peut fermer la porte derrière lui. » : encore du Allais !? Pas tout à fait : du Finkielkraut.
Pour le 1 % de Français qui n'a pas la télé, par conviction religieuse ou par snobisme, quelques mots de présentation de Finkielkraut :
Alain Finkielkraut est un philosophe engagé d'origine polonaise - quinze ans au Monde, dix ans à France-Culture, suivis d’une promotion sur France 2 environ une fois par semaine, et un petit stage dans les Balkans comme tout le monde. Comme on voit, c'est pas le quart de la moitié d'un trublion, cet artiste. On l'imagine mal se produisant au Chat Noir comme ce vieil Alphonse.
Alain Finkielkraut fait partie de cette école de philosophes qui divergent un peu sur les solutions à la crise palestinienne mais qui ont en commun de se prendre tous très au sérieux et attendent conséquemment qu'on ait la même attitude respectueuse envers eux.
Quand Finkielkraut dit ou écrit des choses drôles, il ne le fait pas exprès. Jamais. Du coup son rendement est beaucoup moins élevé… Mais, à un amateur du genre très spécial de "comique involontaire" que Finkielkraut produit, j'ai promis de dénicher un ou deux petits passages croquignolets…
Ni une ni deux, je suis allé chercher directement dans une sorte de Journal, intitulé Le Présent imparfait. Mauvais titre puisque l'auteur tente de démontrer que le présent dans lequel nous nous (é)mouvons est très loin d'être parfait, mais on ne badine pas avec la règle du calembour depuis que Lacan l'a érigé en science exacte. Oui, dans son journal d'abord, car dès qu'un philosophe polonais met les pieds dans la réalité, il fait penser à Buster Keaton.
Voyez un peu la conviction que Finkielkraut met à défendre les pauvres vaches abattues après le début d'épidémie d'encéphalopathie spongiforme bovine :
« Deux millions de vaches inutiles* doivent être ainsi tuées, broyées, moulues et incinérées en cette première année du nouveau millénaire.
Prudence tardive ? Insuffisante ? Excessive ? Démagogique ? Trop coûteuse ? Prudence dénuée de prévenance en tout cas. Ce n'est pas avec les vaches qu'il a été décidé de prendre des précautions. Le principe de raison les avait expulsées du monde de la vie. Le principe de précaution leur donne le coup de grâce en leur fermant la porte du scrupule et de la sollicitude (…) Pas une larme pour les vaches ! »
Honnêtement, chers amis amateurs de comique purement involontaire, n'est-ce pas à meugler ?
*Souligné par l'auteur.
**J'ai d'autres passages du même tonneau sous le coude. Pour l'instant je ne les publie pas vu que mon but n'est pas humilier les militants de l'UMP qui ont cru pouvoir se décharger de penser par eux-mêmes sur Finkielkraut, ou bien qui se disent que citer Péguy ça fait trop "pétainiste", mais si ces militants viennent me faire chier ici - en plus de la vraie vie -, en me disant que je n'ai rien compris au système de Finkielkraut vu que je ne me suis pas tapé tous ses pensums de A à Z, alors je balancerai tout. C'est mon petit côté fachiste, comme dirait l'autre. -
Mort aux cons en 2007 !
En redescendant du sanctuaire de Montmartre où j’avais décidé d’aller réciter deux dizaines d’avés pour le salut de l’âme du raïs Saddam Hussein - cet homme a fait montre d’une dignité exemplaire, surtout dans les derniers mois, une dignité à laquelle nous ne sommes guère habitués sous nos latitudes -, en redescendant par Pigalle, surpris par la tiédeur des marchandes d’amour surchargées, aussi par celle de cette nuit de la Saint-Sylvestre, je songeai à mes vœux du Nouvel An. Pas très original…
On peut penser dans un premier temps : “À quoi bon appeler de ses vœux l’abolition de la peine de mort pour les assassins si c’est pour désapprouver ensuite mollement qu’on pende le premier aristocrate persan gênant après un simulacre de procès ? Cette coutume des vœux ne fait qu’ajouter aux mille petites hypocrisies d’une époque qui ne songe qu’à se décerner des satisfecits en bouffant de la dinde ! Point à la ligne.”
Soit, il y a un fond de vérité là-dedans, je n’en disconviens pas, mais l’éducation modérée que j’ai reçue me pousse toujours, après avoir jeté l’indispensable anathème : “Mort aux cons !”, à y ajouter un bémol. S’il y a des vœux pieux, à hauteur de 99,9 % environ, qui n’engagent à rien ni personne, c’est pas une raison pour oublier les 0,1 % restants.
Ainsi, je ne peux m’empêcher de souhaiter à mes quelques lecteurs sincères d’être, en 2007, beaucoup moins approximatifs qu’en 2006. De grâce, arrêtez de vous payer de mots, ou faites-vous poètes, bordel (mais attention, c’est une profession encore plus sinistrée que celle de pute) !
Je m’engage à vous y aider le plus possible - disons autant qu’il est permis à un esprit peu patient de faire avancer une mule rétive à travers un col escarpé à l’aide d’une carotte et d’un bâton virtuels.
Le premier exercice que je vous demande, dès aujourd’hui, c’est de fuir les salles de cinéma où sont diffusés des films français, les pires, et celles où sont diffusés des films américains. Il faut commencer par garder la tête froide, et puis ensuite, des faits, des faits, et encore des faits !
Beaucoup plus pieusement cette fois-ci, je souhaite qu’après une année 2006 plus favorable encore que les précédentes à la catégorie de "ceux qui ont eu raison après tout le monde" (de Philippe Sollers à Jean Clair en passant par Norman Finkelstein, Guy Sorman, Max Gallo, Renaud Camus, Philippe Muray, Dieudonné, etc.), l’année 2007 soit enfin dédiée aux authentiques pionniers : de Jean Madiran à Nabe en passant par Simon Leys, Tintin, Dominique Venner, Louis-Ferdinand Céline, François Brigneau, Maurice Mazo, Jacques Tati, Baudelaire, Evelyn Waugh, Ezra Pound, sans oublier Karl Marx… il y en a pour tous les goûts, toutes les bourses, y compris les moins déliées.
Certains de ces "authentiques pionniers" sont décédés, diront les plus attentionnés avec dégoût. Ça prouve bien qu’ils n’ont pas attendu 2007 pour avoir raison, et c’est pas parce qu’ils sont morts qu’il faut les enterrer ! -
No future!
« L'Amérique tout entière est un asile d'aliénés. » (E. Pound) -
Encore des petites phrases
Les petites phrases de la semaine :
• Deux chalands quadragénaires à la Fnac :
- L'un : « Eh, t'as vu le titre de ce bouquin : Les femmes qui lisent sont dangereuses… Ah, ah ! »
- L'autre : « Ah, ah, ouais… Mais regarde, il est écrit par une femme ! »
• Une femme russe de la "jet set" : « Si tu te débarrasses de l'homme, tu te débarrasses du problème. »
• Une chalande à la Fnac qui cause fort dans son téléphone transportable : « Ouais, là je suis au bureau en ce moment… (elle jette un regard autour d'elle) Enfin, c'est-à-dire que je suis à la Fnac en train de regarder un peu les bouquins, tu vois… »
• Un pote qui a lu Céline à moitié, faute de temps, et un centième de Tocqueville, faute de temps aussi : « À chaque nouvelle élection, les Français font preuve exactement de la même bêtise qu'à la précédente. »
• Un comique noir : « Ras-le-bol de tout cet humour blanc ! »
• Alphonse Allais : « Pour la chasse aux lions : vous achetez un tamis et vous allez dans le désert. Là, vous passez tout le désert au tamis. Quand le sable est passé, il reste les lions. » -
Salut les "copains" !
Pierre Delanoë est décédé. Il paraît que ce monsieur était "chansonnier". Quoi qu'il en soit, sa mort ajoute une énigme de plus à la déjà longue liste des "Grandes énigmes du XXIe siècle". Après :
• "Comment peut-on ne pas être élu quand on est socialiste ?" ;
• "Comment peut-on être noir et serrer la main de Le Pen ?" ;
• "Comment dire du mal de Chirac qu'on a élu avec 80 % des voix ?" ;
• "Comment peut-on s'inviter chez les pauvres quand on est riche ?" ;
• "Comment peut-on encore se cailler les miches alors que les pôles fondent à plein tube ?", voici maintenant la dernière : "COMMENT PEUT-ON ÊTRE RÉAC ET AVOIR DU TALENT ?"
Selon son interprète Georges Moustaki, Pierre Delanoë n'était pas "réac" mais plutôt "gâteux". Selon moi, si Moustaki était "métèque" autrefois, tout indique qu'il est désormais complètement "affranchi". -
Parti des SDF
On s'était tous réunis au Chat-qui-pisse-de-travers, rue Oberkampf, autour de Julien. C'est ce cadre ô combien non-conformiste qui avait été retenu pour présenter le programme du nouveau "Parti socialiste de figuration", autrement dit le "Parti SdF", à la presse.
Après quelques picon-bières dégueulasses, Julien se racla la gorge bruyamment car le journaliste de "Libé", Laurent Temouillepas, du service politique, était visiblement ailleurs… sans doute préoccupé par la revente du quotidien au groupe Lagarde & Publicains ? Si Arnault Ledur-Delabranche, son PDG, était connu pour être incapable de la moindre opinion politique ou religieuse, ce qui faisait bien les affaires de Temouillepas, en revanche il s'était taillé la réputation de n'accorder à ses cadres que des augmentations de salaire très parcimonieuses…
Le programme du "Parti SdF" pouvait se résumer à ce slogan : "Quelques jours de bohême dans une vie bourgeoise". Concrètement il s'agissait d'aller camper entre des SDF et de partager leur existence d'exclus pendant quelques nuits - de vrais SDF bien entendu, hors de question de payer des figurants et de retomber dans les vieux travers d'autrefois.
« D'une, argumenta Julien, les Français raffolent du camping ! Deuxio, j'ai choisi l'emplacement du canal St-Martin : en cette saison, lorsque le soleil s'éteint sur les reflets d'inox du canal, on dirait une aquarelle d'Henri Harpignies… ou d'Utrillo si vous préférez ; tertio, nous respecterons la "trêve des confiseurs" pour que tout le monde puisse passer les fêtes de fin d'année en couple… » (La dialectique marxiste avait donné le goût à Julien des plans en trois points.)
C'est alors que la voix suraiguë et éraillée d'un mauvais esprit s'éleva dans l'assemblée, près du bar, suggérant qu'on devrait peut-être inverser la tendance et abandonner complètement la vie bourgeoise pour opter pour la vie de bohême !
Malgré la discipline républicaine qui règne généralement chez les socialistes, cette "sortie" prouvait qu'il y avait de la marge : des citoyens qui buvaient et qui fumaient encore au sein des "forces de Progrès"…
Sans l'avoir formellement identifiée, Julien aurait pu jurer que c'était cette chieuse de Julie Vallès, l'arrière-arrière petite-fille de l'écrivain, qui venait de lui couper la parole. Qu'importe, il avait même prévu ce coup-là et il reprit le fil de son raisonnement :
« Non, en faire plus pour les SDF pourrait effrayer nos électeurs. Ça ressemblerait à une révolution, une révolution avec un grand "r". Nous devons leur prouver au contraire que le parti est capable de gouverner ! La révolution, oui, naturellement, mais le pouvoir d'abord, pour faire cette révolution ensuite, voilà l'idée moderne ! En outre, nous ne devons en aucun cas nous prêter à des actions qui pourraient ressembler à de la charité ou à des soupes populaires… Nous sommes des progressistes, oui ou merde ?! Ou des vieilles bigotes ? »
C'était dit sans trop de convictions, bien sûr, mais il s'agissait juste de faire taire cette conne de Julie… pour le reste, on était entre copains.
Pour conclure cette soirée, Julien qui avait hésité entre entonner L'Internationale ou Le Temps des cerises opta finalement pour Le Temps des cerises.
Deux heures plus tard il quittait le chauffeur de taxi (un G7, par superstition) qui l'avait raccompagné devant son domicile situé un peu plus dans le centre, en lui laissant une pièce de deux euros. Il était de bonne humeur. Il sentait qu'il tenait enfin sa revanche. Son physique un peu ingrat avait toujours privé Julien d'une victoire dans un scrutin majeur. Mais là, on ne pourrait faire moins que lui accorder un gros ministère dans le prochain gouvernement d'union de la gauche, si tout se passait bien. Et vu la bande de bras cassés, pas un pour rattraper l'autre, qui défendait le candidat d'en face, sûr que ça allait bien se passer ! -
Conte de Noël
Il n’est certes pas permis à tout le monde, par les temps qui courent, de jouir le soir même de Noël de la quiétude et de la solitude propices au recueillement. Mon propre degré d’exclusion sociale n’est pas tel, hélas, que j’ai pu avant-hier, 24 décembre, me dispenser des agapes obligatoires du réveillon : une invitation de dernière minute…
J’en suis donc à l’apéritif, servi après la messe de Minuit vers dix heures, à dissimuler mon dépit de n’être pas au plumard avec un bon bouquin dans un verre de porto médiocre. Comme la conversation tourne autour du sermon du curé, lui-même assez vague, je songe à l’astuce de mon pote Émeric qui consiste à planquer un roman policier dans les chiottes de son hôte dès son arrivée, sous le prétexte d’une envie pressante ; plus tard dans la soirée, sous le même prétexte déjà utilisé plus tôt mais que personne ne songe sérieusement à discuter, mon pote rejoint son bouquin dans les lieux d’aisance et n’en ressort plus guère avant les adieux traditionnels. Que n’ai-je l’audace d’Émeric dans la muflerie au lieu de n’être qu’un petit goujat sans envergure !
Je suis placé à table à côté d’une jeune personne que je découvre pour la première fois. Il m’est arrivé ainsi de parvenir à tromper l’ennui dans un dîner pendant deux heures d’affilé rien qu’en contemplant le profil d’une femme bien pourvue sous cet angle, assise à quelques mètres de moi, à mille lieux de se savoir ainsi épiée…
Mais mon voisin n’est pas si bien fait que je consacre plus de cinq minutes à son examen. Celui-ci a vingt-trois ans depuis trois jours et poursuit des études poussées dans le domaine des sciences exactes, et, tandis qu’il avoue sans qu’on le force trop ses brillantes capacités intellectuelles et ses solides diplômes, je me frotte les mains intérieurement. Après les philosophes, les scientifiques sont en effet les gens les plus involontairement comiques que je connaisse !
Petit à petit je pousse Alain, c’est ainsi que se prénomme mon jeune voisin, à s’aventurer en dehors des généralités, seul terrain sur lequel les "hommes de sciences" sont à l’aise hormis celui des nombres comportant une virgule :
« - Fort bien, fort bien, mais ça ne nous dit pas quel plaisir particulier vous tirez de l’observation de ces minuscules particules ? À la longue ne risquez-vous pas de trouver tout ce bazar bien futile ?
"Futile", Dieu sait que les scientifiques ne peuvent pas blairer cet adjectif et qu’il les fait sursauter. J’ai visé juste vu la tête d’Alain…
- Hein ? futile ? ça m’étonnerait… Je peux même dire que c’est ça justement, oui, c’est ça qui me me motive le plus, de savoir que je participe au progrès de la science, depuis que je suis tout petit ça m’a toujours…
- Au PROGRÈS de la science ? Mais la science est en plein RECUL au contraire, Alain, depuis cent-quarante et un ans au moins !
- En plein recul !?
- Eh bien oui : tous les progrès formidables accomplis dans un premier temps par les scientifiques ne les ont amenés qu’à mieux apprécier la distance qui leur reste à parcourir jusqu’à la connaissance complète de l’Univers en définitive. Toutes les énigmes qui paraissaient jusque-là à peine plus compliquées qu’un problème de sudoku aux “chercheurs” : le cerveau humain, la vie extra-terrestre, l’usure des tissus et des organes, l'origine de l'homme, toutes ces énigmes sont désormais comme des trous noirs encore plus insondables… Et, si elle s’éloigne de son but, je vous mets au défi de nier que la science ne recule pas, mon jeune ami ! »
Je ne jetai pas mon défi à la légère tant les lacunes des scientifiques d'aujourd'hui dans le domaine de la rhétorique sont grandes.
On peut trouver peu "charitable" ma façon d’abuser de la crédulité d’autrui, particulièrement le soir de Noël… Une petite explication psychologique s'impose, je crois : mes études à moi, le moins qu'on puisse dire est qu'elles ne furent pas très brillantes. Aurais-je eu ne serait-ce que le baccalauréat si je n'avais pas flagorné certains de mes examinateurs, brossé leurs idées dans le sens du poil ? C'est peu vraisemblable. De là à dire que je me venge de mon échec scolaire sur les têtes pensantes lorsqu'il en passe une à ma portée, en profitant de l'effet de surprise, il n'y a qu'un pas que je dois franchir, pour être honnête.
Mais après tout la Nativité n'est-elle pas aussi la revanche des humbles sur les puissants, des bergers sur les Rois mages ? -
Pourquoi pas ?
Après tout pourquoi les enfants ne croiraient-ils pas au Père Noël ?... Il y a bien des adultes qui croient en Nicolas Sarkozy.
-
Shocking!
Pris dans l'empressement des Parisiens à célébrer avec tout le faste démocratique le fameux "solstice d'hiver", je me surprends à souhaiter un réchauffement vraiment significatif et brutal de la planète.