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Mon Journal de guerre - Page 15

  • Barbarie moderne

    Il n'est de société qui ne repose sur la justification d'une certaine barbarie. Le nazisme est on ne peut plus banal de ce point de vue.

    C'est pourquoi il faut surtout se méfier des sociétés et des élites qui déclarent vouloir mettre fin à la barbarie ; l'oeuvre de Shakespeare est largement conçue pour prévenir contre la barbarie moderne.

    A qui Hitler est-il comparable ? Il est comparable à Fortinbras de Norvège, personnage secondaire ; mais les piliers de la barbarie occidentale moderne, ce sont Claudius, Gertrude et Polonius.

    Claudius est l'emblème de la politique qui s'insinue traîtreusement à la place des choses de l'esprit ; Gertrude est l'emblème de la religion stupide qui cautionne cette traîtrise (commettant ce que les chrétiens appellent le péché de fornication) ; et Polonius est l'emblème de la fausse science et de la fausse philosophie modernes, qui tendent au verbiage anthropologique.

    La culture moderne repose sur cette trinité. Et l'on peut dire Shakespeare suspendu au-dessus de la culture occidentale comme une épée de Damoclès.

  • Piège de la Femme

    L'enfer, c'est le couple, c'est-à-dire le coït sacralisé.

    Le salut importe peu sur le plan social - l'enfer exige pour se maintenir d'être peint aux couleurs du paradis.

  • Mot-valise

    Le mot "dieu" est comme le mot "amour", un mot-valise dans le sens où chacun y met à peu près ce qu'il veut. On peut observer que "dieu" et "amour" se confondent tous les deux très souvent avec un certain verbiage.

    Quand Nietzsche dit : "Dieu est mort", du moins a-t-il le mérite de préciser de quel dieu il veut parler, à savoir le dieu de la vertu - à savoir Satan. Le néant l'a remplacé, dit Nietzsche, à savoir le dieu des juifs et des chrétiens, qui n'a jamais existé.

    Nietzsche aurait pu en dire autant de l'amour, à savoir qu'il a été remplacé par la spéculation amoureuse, une sorte de verbiage oscillant entre la stimulation des zones érogènes et la théorie du genre.

    Qui cherche dieu ou l'amour par-delà sa définition changeante, au gré des modes et des cultures, discernera vite la limite des mots et du langage - l'obstacle que le langage peut représenter pour la conscience, à double titre ; non seulement pour la conscience des choses physiques, mais aussi pour l'expérience des choses métaphysiques. En effet, le langage prend des distances avec le monde physique sous la forme d'une métaphysique truquée, mettons d'une "pataphysique" (au sens le plus péjoratif du terme). Au passage on peut remarquer combien la psychanalyse a mal tenu la promesse d'élargissement de la conscience faite par ses inventeurs, jouant en définitive pratiquement le rôle inverse de camisole rhétorique.

    L'obstacle du langage est similaire à celui du plan social, que celui-ci soit pyramidal et statique, ou bien qu'il prenne une apparence plus évolutive, le clergé social (instituteurs, médecins, propagandistes, philosophes, etc.) s'attachant à faire passer cette évolution pour un progrès ou "le sens de l'histoire".

    Ainsi peut-on voir Jésus-Christ, de même qu'il prohibe à ses apôtres toute tentative d'assimiler son message à une doctrine sociale, les mettre en garde contre les effets délétères du langage du point de vue de l'amour. "Les mots qui sortent de la bouche de l'homme, c'est cela qui souille l'homme", dit en effet Jésus-Christ, sachant à quel point le pharisaïsme et le jésuitisme reposent sur les mots.

    Il y a quelque chose dans l'amour, comme dans dieu, qui se situe au niveau de l'expérience et que le langage humain, outil imparfait, peine à traduire.

     

  • Miroir, mon beau miroir...

    Jessica exigeait de son amant qu'il lui dise au moins une fois par semaine : - Jessica, je t'aime. Mais l'amant, qui avait reçu une éducation honnête, rechignait à ce pieu mensonge hebdomadaire comme une femme rechigne le plus souvent au viol, car l'obligation de mentir pour un homme ressemble à l'amour contraint pour une femme.

  • Rêveuse bourgeoisie

    L'intellectuel est pris dans un rêve, comme une mouche dans une toile d'araignée. Le vrombissement que fait la réflexion de l'intellectuel, en produisant son mouvement paradoxal, attire tout un tas de petits moucherons faibles d'esprit à sa suite ; leur vol ressemble au cours du hasard.

    Je tiens la comparaison des intellectuels avec des mouches d'Aristote. Pourquoi Hamlet est-il sans pitié avec Polonius, cette éminence grise ? A cause des dégâts qu'un seul intellectuel peut causer, qui se chiffrent parfois en centaines de millions de moucherons morts ; parce que l'homme de science se doit d'être impitoyable avec ceux qui placent la folie au lieu du savoir, pour le compte de Lucifer.

  • Rêveuse bourgeoisie

    Le rêve de Pierre Drieu La Rochelle (qui intitula un de ses romans "Rêveuse bourgeoisie") fut de n'être pas un bourgeois. En quoi il échoua à moitié, car le suicide n'est pas une réussite complète.

    Le mot "bourgeois" retentit en effet comme le mot "rouille" aux oreilles de l'amateur de beaux outils en fer ou d'un métal plus précieux encore.

    La bourgeoisie qui ne manque pas d'ennemis les a tous vaincus, en apparence, et la bannière du veau d'or continue de flotter triomphalement sur le monde.

    Cependant quiconque recherche sans faiblir la vérité représentera indéfiniment une menace pour le dragon. Fort de la promesse de dieu, les saints finiront par abattre les murs de la bourgeoisie et de la modernité, derniers remparts contre la vérité.

    Armageddon et jugement dernier ne font qu'un.

  • 666 - Number of the Beast

    666 is about DEATH and Agreement with DEATH, especially in so-called 'CHRISTIAN' or 'CATHOLIC' Churches.

    Devilish people are not always as frank as Nazi soldiers were, belonging to Security Squads, with their Skulls & Bones on their shoulders; devilish people are mostly cowards and hypocrits who are hiding their intentions to their own children.

    That is why the Apostle Paul does explain that DEATH is the result of SIN - and Jesus-Christ: 'Let the DEAD bury their DEAD' (Luke IX, 60).

    (For more details, read this blog -in French- or Christian Theologian E. Swedenborg's explanations about the Book of Revelation; E. Swedendorg did not belong to any HUMAN CHURCH)

  • Intellectualisme bourgeois

    - Dans les régimes bourgeois, le prêtre ou l'inquisiteur se dissimule sous le terme générique "d'intellectuel".

    - Ôtez son intellectualisme à la raison et vous la rendrez raisonnable.

    - La modernité n'est pas la civilisation, c'est la civilisation selon les intellectuels, de sorte qu'il ne viendra à personne l'idée de vanter la modernité en dehors d'un salon bourgeois où l'on a confiance dans les élites intellectuelles.

    - L'intellectuel est aussi un censeur : en effet, les critiques de l'intellectualisme ne sont pas rares, et signées des esprits critiques les plus prestigieux : Marx, Nietzsche, Balzac, Orwell, etc. Il faut donc censurer ces critiques sans avoir l'air d'y toucher.

    - Pointer la menace que représentent les intellectuels revient à pointer la menace que représente l'idéologie ; et défendre les intellectuels contre le "populisme" revient à dissimuler que l'intellectualisme est la première cause de l'idéologie, par ricochet du populisme.

    - Détruisez la culture populaire à l'aide de l'intellectualisme et vous obtiendrez le populisme.

    - Le cinéma est un art intellectuel car seuls les intellectuels trouvent un intérêt dans la recherche du temps perdu. Ils en viennent et ils y retournent, remplissent les bibliothèques de leurs travaux sur la quadrature du cercle.

    - Proverbe contre les intellectuels : "Le poisson pourrit par la tête".

    - Comme la légitimité des intellectuels est analogue à celle de la ruse, les intellectuels quand ils sont démasqués scandalisent plus encore le peuple que les tyrans qui le brutalisent.

    - La France offre une meilleure protection contre les intellectuels que l'Allemagne ou les Etats-Unis. Les Allemands qui ont parlé contre les intellectuels ont le plus souvent abjuré leur nationalité allemande (Nietzsche, Marx). Quant à Shakespeare, chacune de ses pièces fournit cent flèches contre les intellectuels.

    - Beaucoup de juifs ne sont pas intellectuels, et nombre de juifs ne sont pas des intellectuels. Typiquement intellectuel, le raisonnement identitaire n'a absolument rien de juif. Ce raisonnement est désigné dans la littérature juive prophétique sous le terme métaphorique : "piège de la femme".

    - L'intellectualisme l'emporte sur l'esprit critique comme la vieillesse l'emporte sur la force et la maturité. Une nation exsangue s'appuiera sur des intellectuels, car ils fournissent des tas de ruses. L'intellectualisme est le signe de la dégénérescence d'une culture ou de son immaturité (Moyen-âge).

    - L'intellectualisme correspond sur le plan artistique au génie. Comme le génie, l'intellectuel n'est pas prompt à reconnaître que l'idée qu'il croit neuve a au moins deux mille ans d'ancienneté.

    - Lorsqu'un abruti qualifie les mathématiques modernes de "science dure", vous savez que vous êtes en présence d'un intellectuel. La science d'Einstein a la mollesse du confort intellectuel.

    - Un statisticien qui se moque d'un astrologue, c'est l'hôpital qui se moque de la charité, ou le fils de son père quand il croit mieux tenir la boutique.

    - L'intellectualisme est le produit d'une confusion entre l'ordre physique des choses et la métaphysique. Ainsi les intellectuels doivent affronter deux sortes de critiques : les artistes, d'une part, aux yeux desquels la métaphysique fait le plus souvent partie des choses improbables ; et les savants d'autre part, pour qui la physique et la métaphysique doivent être méthodiquement distinguées, afin de ne pas prêter vie à des choses éternelles, et de ne pas prêter l'éternité à des choses vivantes.

  • Dans la Matrice

    L'autofiction est exemplaire du mysticisme moderne occidental ; c'est un phénomène plus religieux que littéraire auxquels les éditeurs, face à l'afflux de manuscrits relevant de ce procédé, sont confrontés.

    Dans l'autofiction "pure", il s'agit de se mentir à soi-même, et de faire de ce procédé un art. L'analogie avec le raisonnement altéré d'une personne aliénée permet de jauger la culture bourgeoise bien au-delà des seuls nazisme ou stalinisme désignés pour faire diversion et préserver le jugement arbitraire des élites bourgeoises.

    Ce phénomène, décrit par Nitche comme le cancer de l'art ou l'assassinat de la poésie par l'éthique judéo-chrétienne, est présenté a contrario par les cerbères de la bourgeoisie capitalistes comme un "progrès anthropologique".

    L'autofiction impure seule présente une valeur littéraire, car on ne fait pas de littérature avec de bons sentiments religieux. L'ironie et le détachement de soi, tels qu'on peut les lire dans Voltaire, Rousseau, Céline, traduisent un certain détachement religieux de ces auteurs.

    Voltaire, que Marx décrivit comme le "sommet de la pensée bourgeoise", est même assez peu bourgeois dans la mesure où il exprime son mépris de la fiction, clef de voûte de la culture bourgeoise et du totalitarisme. Le relativisme moderne repose en effet sur une perspective anthropologique truquée, un "néant" présenté comme "quelque chose de positif".

    Céline, lui, a cette exclamation : - Je ne veux pas être une victime !, ô combien significative car la vocation de la pure fiction est d'inciter au sacrifice le plus vain, c'est-à-dire le sacrifice pour une cause sociale. L'autofiction n'est pas loin de la crucifixion. Quoi de plus dangereux que de se mentir à soi-même ? On peut résumer l'oeuvre de Céline comme l'antidote à sa jeune vocation de chair à canon. L'auteur accuse sa propre imbécillité. Céline irritera nécessairement, ou dérangera les plans des partisans de la justice sociale (mélange d'imbéciles et d'hypocrites, puisque la justice sociale est une chose impossible).

    L'autofiction pure porte donc la marque de l'Etat totalitaire et de ses élites intellectuelles. Le cinéma devient un art, en même temps que l'industrie devient une civilisation et que la propagande devient vérité communément admise.

     

  • Barbarie moderne

    Les nations barbares de l'Occident moderne sont gouvernées par les sentiments. On le reconnaît à leur manière de guerroyer, plus féminine et distanciée que la méthode des anciens barbares, mais qui est totale et ne connaît aucune limite, ainsi que les sentiments qui animent les personnes aliénées (à qui l'équilibre du corps ne procure pas l'équilibre de la raison).

    Le terrorisme, quelle que soit la revendication ou le masque qu'il porte, est caractéristique de la violence moderne occidentale, qui vise autant à frapper les esprits qu'à blesser les corps. Dans le "terrorisme islamique", l'aspect moderne l'emporte sur l'aspect coranique ; l'aspect moderne, c'est-à-dire identitaire et donc anthropologique, à travers lequel un lecteur de la bible reconnaîtra la fausse religion et le faux dieu d'Adam et Eve, qui a marqué leur destin du sceau de la mort. L'argument social ou anthropologique est à quoi on reconnaît que la démocratie-chrétienne est un plan machiavélique de Satan.

    L'emprunt par des mahométans à l'Occident de ses méthodes d'oppression subtile peut leur valoir des victoires plus nombreuses, mais elle leur vaudra la malédiction de dieu s'ils se laissent entraîner dans cette voie, comme les démocrates-chrétiens seront maudits d'avoir baisé le sol de la terre et fait passer leur religion ploutocratique pour celle de Jésus-Christ. Le plan de Satan, à l'instar des politiciens, est de diviser les hommes pour mieux régner, et qui entrera dans son plan fera partie de Satan - les signes de la mort ou du hasard peu à peu marqueront son corps, et il finira plus ou moins égaré.

    Mahométans, croyez le chrétien qui vous dit qu'il y a plus de danger dans "Le Marchand de Venise" pour les nations démocrates-chrétiennes qu'il n'y en a dans tous les attentats terroristes contre ces nations. Quel danger ? Le danger que représente la vérité pour les menteurs, et la divulgation du plan de Satan, car il est écrit que les nations ne peuvent être conduites que par des menteurs, et que plus ces nations grossiront, plus le mensonge devra être subtil.

  • Rêveuse bourgeoisie

    La prière du bourgeois : "Mon Dieu, donnez-nous notre punition quotidienne !".

    Le remède le plus efficace contre une existence bourgeoise, véritable pensum, est le suicide ou le "jihad" (pour ceux qui se tiennent au courant de la mode). C'est pourquoi la société bourgeoise est environnée des cadavres de ceux - artistes, enfants, âmes viriles -, qui n'ont pu se résoudre à son train de vie morose, et n'ont pas trouvé la force, comme Hamlet, de zigouiller les actionnaires du léviathan bourgeois.

  • Rêveuse bourgeoisie

    Accomplir son rêve c'est faire le bilan, comme Napoléon, qu'en définitive on n'a rien fait. Le rêve accompli n'est qu'un élastique détendu.

     

  • Psychologie française

    Molière a su montrer que l'esprit du monde est plus vivace dans le misanthrope que dans un esprit mondain déclaré, bien qu'il soit dissimulé chez celui-là.

    Adolf Hitler, par exemple, était un misanthrope qui finit par être ravi par le suffrage universel et les bains de foule. Je prends cet exemple car la misanthropie est une disposition d'esprit que l'on retrouve souvent chez les tyrans ou tyranneaux des temps modernes.

    Le mépris du monde n'est qu'une affectation, une pose de la part du misanthrope, ce qui rend le propos des auteurs misanthropes un peu creux. Sans doute Molière visait-il les jansénistes, dont le propos théologique est doublement creux et mondain, comme un problème de mathématique. Le jansénisme est une religion mondaine française portant le masque de la misanthropie.

    La Bruyère n'est pas misanthrope, car il trouve sincèrement dans la solitude le bonheur et la possibilité d'écrire, dont une vie mondaine l'aurait privé. La Rochefoucauld est un misanthrope supérieur, qui sait qu'il est misanthrope et n'a pas de prétention à la profondeur.

    Léopardi pour sa part a compris très tôt que la vie sociale divise autant les hommes qu'elle les unit ; elle n'offre ainsi aucun remède véritable à la solitude. On est moins seul quand on est seul, dit en substance Léopardi, car au moins cela permet de mieux se connaître, tandis que la société vous contraint à jouer un rôle et ignorer qui vous êtes.

    La dissimulation de l'esprit mondain chez le misanthrope évoque fortement la dissimulation de l'appétit de la chair chez le puritain ; nombre de puritains sont d'ailleurs d'anciens libertins fatigués.

    Molière a aussi montré que libertins et puritains exercent les uns sur les autres une fascination mutuelle. Le libertin est persuadé de jouir d'une liberté dont la puritaine ne bénéficie pas ; et la puritaine est persuadée de jouir d'une liberté dont le libertin ne bénéficie pas. Mais tous deux confondent liberté et jouissance et se nourrissent de la même illusion.

    On peut faire le constat que, sur le plan social, libertinage et puritanisme sont aussi nécessaires l'un que l'autre ; le libertinage pour servir de tempérament au masochisme ou au féminisme, et le puritanisme ou le féminisme sont utiles afin d'exercer une contrainte au devoir social sur la partie de la population vouée au service de l'autre. Quand les femmes veulent obtenir le statut des hommes, il se produit alors une petite révolution ; et quand les peuples veulent obtenir les mêmes droits que l'aristocratie, alors il s'en produit une plus grande. L'obsession de la jouissance a pour effet d'accroître la concurrence entre les hommes et d'accroître leur frustration. L'incitation à la modération est inaudible, à cause du profit que l'Etat totalitaire moderne retire, en termes de coercition, de l'incitation de ces citoyens au sacrifice. Quel est le type de comportement masochiste le plus répandu ? L'exposition à la publicité commerciale des enfants. C'est une manière de fabriquer des citoyens soumis désormais plus efficace que l'école laïque républicaine ; et, par la suite, des adultes irresponsables car pris dans l'engrenage de la nécessité économique.

    C'est bien la publicité aussi qui entretient en permanence la confusion entre jouissance et liberté.

  • Dans la Matrice

    Dans la matrice, tout concourt au divertissement. Mais ce qui consolide la matrice est aussi ce qui la rend fragile.

  • Science consciente

    Qu'est-ce que la science consciente ? Réponse : la science consciente est celle qui consiste à se méfier du "parallaxe humain", c'est-à-dire d'un réflexe qui consiste pour l'homme à tout rapporter à lui-même, jusqu'à prêter parfois à l'univers entier les bornes de sa propre condition.

    De même l'homme s'est construit des dieux à sa mesure au fil du temps, dont l'Etat moderne est le plus facilement identifiable comme tel.

    "Science humaine", "sociologie", "anthropologie" sont autant d'expressions faites pour travestir le discours religieux en discours scientifique ; la plus ridicule d'entre ces expressions : "science dure", pour désigner les mathématiques modernes largement fondées sur des paradoxes inconsistants (i.e. l'infini, notion secondaire dans l'ancienne géométrie).

    D'une certaine manière, l'accès de l'homme à la vérité lui est barré par sa propre tendance à l'idolâtrie, à se mirer dans la nature. Si l'on n'y prend garde, on finira par placer le parallaxe ou le biais lui-même à la place de l'objet de la science, et la recherche scientifique finira par ressembler à un jeu de miroirs comme on en construit dans les foires afin de permettre aux enfants de jouer à se perdre.

    On reconnaît le parallaxe ou le biais humain dans un science à ce qu'elle est paradoxale, comme l'homme lui-même. Ainsi de la théorie de l'évolution (qui fait de l'homme l'animal le plus évolué, bien qu'il n'évolue pas lui-même) ; de la relativité (qui formule comme un absolu le fait qu'il n'y a rien d'absolu) ; de l'hypothèse copernicienne (qui ne peut se passer du postulat d'un univers fini, en même temps qu'elle ne peut s'accorder avec) ; du "big-bang" (qui prétend répondre à la question de l'origine de l'univers, tout en repoussant à l'infini cette question).

    La culture moderne est celle de la "science sans conscience". Le raccourci suivant permet de le comprendre : celui qui ignore la différence entre la technique et la science, tel le citoyen lambda d'un Etat moderne, ignore la déviation possible de la science vers la religion. A contrario, on peut comprendre que la technique est une science biaisée par la volonté et la nécessité humaines.

    Les temps dits "modernes" coïncident avec une faillite de l'esprit critique ou scientifique. [Qui lit cette ligne avec une moue sceptique pourra vérifier la censure, le sabotage ou l'amputation dont font l'objet divers philosophes ou essayistes dont la conclusion n'est pas toujours aussi radicale, mais qui posent des jalons dans ce sens ; dans un ordre de radicalité décroissante, citons K. Marx (la science décline à mesure que l'idéologie libérale progresse), F. Nietzsche (la culture moderne est irrationnelle), G. Orwell (le totalitarisme est un intellectualisme), S. Weil (les physiciens modernes disent n'importe quoi), H. Arendt (la culture de masse est un signe d'irresponsabilité des élites), G. Bernanos (la mécanique s'est substituée à la pensée)].

    La thèse opposée à celle du déclin de la pensée scientifique dans l'Occident dit "moderne" peut être énoncée de la façon suivante : l'anthropologie marque un progrès de la science. Autrement dit, la défense de la culture moderne ne peut se passer de cet argument anthropologique.

    A cet égard, le christianisme ou la culture chrétienne jouent un rôle décisif, trop souvent ignoré en France. La science moderne prend racine dans le XVIIe et une poignée de savants chrétiens fort éloignés de distinguer suivant une classification récente (on ne peut plus spécieuse) le domaine de la science de celui de la religion ; ces savants sont enseignés aujourd'hui comme les pères de la science moderne, et les élèves contraints de se prosterner devant leur "génie", tenus dans l'ignorance que la science ne doit pas grand-chose au génie. Dans ce domaine, la légende dorée est monnaie courante, s'agissant de Galilée, Newton, Descartes, etc.

    La doctrine de Nietzsche ou la critique de Marx nous orientent vers "l'origine chrétienne" de cette déviation anthropologique. Nietzsche est on ne peut plus clair : la culture moderne a le grave défaut, en comparaison de la culture antique, d'être entièrement arbitraire, et cet arbitraire vient du christianisme. Quant à Marx, il a lu Feuerbach et n'ignore pas que l'athéisme moderne est très largement le produit de ce que Chateaubriand a qualifié de "génie du christianisme" ; autrement dit, on peut concevoir les sciences sociales de manière positive comme un aboutissement du christianisme (en aucun cas Marx n'est un "sociologue"), ou de façon négative comme la maladie d'Alzheimer de la philosophie occidentale.

    La question qui se pose est : comment la culture chrétienne a-t-elle pu entraîner un tel désaxement de la science ? (accusation à laquelle l'évêque de Rome fournit d'ailleurs dans une récente encyclique une réponse nulle, c'est-à-dire purement rhétorique). La réponse de Nietzsche est : en substituant le néant à la nature. La réponse de Nietzsche n'est qu'à moitié vraie ; il est exact que les évangiles "abolissent" la servitude de l'homme vis-à-vis de la nature, sur laquelle les religions païennes de la nature étaient fondées, et leur philosophie naturelle. C'est ce qui explique que Nietzsche veuille restaurer la physique contre la métaphysique, synonyme à ses yeux de mysticisme truqué.

    Cependant, en aucun cas le christianisme n'abolit la servitude des sociétés. Il n'y a pas de doctrine sociale chrétienne possible d'après les évangiles, dépourvus d'ambiguïté sur ce point. Bien qu'elle a souvent été présentée traîtreusement comme une concession faite au peuple, la doctrine sociale chrétienne résulte de la nécessité pour les élites occidentales chrétiennes de justifier leur position ; ne le pouvant d'après les évangiles, les princes chrétiens ont élaboré une culture arbitraire et fragile, en perpétuelle mutation. Ainsi Nietzsche amalgame deux choses opposées dans sa polémique antisémite et antichrétienne : la doctrine sociale chrétienne, d'une part, et les apôtres et les évangiles d'autre part. De surcroît il est inexact de prétendre la culture grecque antique "dionysiaque" et opposée à la métaphysique.

    Autrement dit : la doctrine sociale chrétienne est l'axe de la modernité, et cela n'est pas sans conséquence sur le plan de la culture scientifique, c'est-à-dire des idées scientifiques communément et superficiellement partagées par le plus grand nombre. On ne sera pas surpris que certains savants évolutionnistes invoquent la démocratie, bien que celle-ci soit de l'ordre de la foi du point de vue scientifique, à l'appui de la thèse évolutionniste. Ou encore que d'autres aient cherché à consolider les thèses raciales nazies à l'aide de l'évolutionnisme ; ou encore à consolider le dogme économique libéral à l'aide du darwinisme. Ils font ce qu'ils s'interdisent de faire : mélanger la foi -sous couvert d'éthique ou d'anthropologie- et la recherche scientifique. D'ailleurs la foi, au sens le plus banal du terme, mettons bouddhiste, est assimilable à une "recherche", bien plus qu'à une révélation.

    Qu'est-ce qu'un "trou noir" en astronomie, si ce n'est la projection du destin chaotique de l'homme moderne sur le cosmos, déployé comme un écran ? On objectera les photographies de "trous noirs", qui viennent appuyer la démonstration sophistiquée (mieux vaut dire "les dizaines de démonstrations parallèles et contradictoires", formant une nébuleuse). Mais l'appareil photographique est-il parfait au seul prétexte que l'homme l'a fabriqué ? N'y a-t-il pas de nombreux biais possibles dans la photo ? Et qu'est-ce que la photo a d'expérimental ? L'expérience scientifique ne consiste-t-elle pas justement à explorer au-delà de la surface des choses ? Le fait que les mathématiques modernes et le cinéma ou la photographie se confirment mutuellement ne signifie pas qu'ils sont des méthodes scientifiques.

  • De la Tragédie (2)

    Pourquoi Shakespeare est chrétien tandis que Racine ne l'est pas ? Parce que Racine prêche pour sa paroisse au contraire de Shakespeare, théologien qui sait que les sermons divisent autant qu'ils unissent.

  • De la Tragédie

    Le seul trait d'union véritable entre le monde moderne et le monde antique, ce sont les tragédies chrétiennes de Shakespeare, c'est-à-dire l'art le plus subversif.

  • Idéologie et mathématiques

    La notion difficile à définir d'infini est le cadre nécessaire à toute idéologie. C'est pourquoi il n'est pas rare de voir les savants ou les philosophes réalistes contester le pouvoir des mathématiques de traduire la réalité.

    Karl Marx à propos du calcul indique qu'il consiste à définir les choses par ce qu'elles ont de moins essentiel ; on comprend ainsi pourquoi la démocratie libérale totalitaire est une culture relativiste, farouchement hostile à l'individualisme.

    L'Etat protège l'idéologie libérale à travers l'enseignement du calcul et des mathématiques modernes, enseignement présenté comme "fondamental". La culture moderne repose largement sur les mathématiques modernes, dont on pourrait dire qu'elles sont l'avenir de l'homme, comme la femme.

  • Léopardi seul contre tous

    Au lecteur moderne, Léopardi peut paraître inhumain ; mais il n'est pas moins humain de se défendre contre la société que de déployer des efforts pour s'y intégrer.

    Comme le discours contre la famille, le discours contre la société semble même plus humain. Quel autre animal peut promulguer des décrets contre son espèce, vouloir s'isoler pour penser plus à l'aise ?

    La barbarie pour Léopardi consiste à faire partie de la société, et l'on peut constater les ravages des doctrines du progrès social, du temps de Léopardi et après lui au cours du XXe siècle.

    L'idée de péché, attachée à celle de société dans le christianisme, a sans doute marqué Léopardi. La pierre angulaire de toute société, de toute architecture humaine, c'est ce que les juifs et les chrétiens nomment "péché". Aussi les chrétiens renégats, disciples de Judas, afin de prendre pied dans la société, ont-ils dû trahir la notion de péché. Le théâtre de Shakespeare s'articule autour de cette trahison, matrice de la culture moderne.

    L'hostilité de Léopardi à toute idée de progrès social, on peut aussi la comprendre de la façon suivante : Léopardi est assez lucide pour voir qu'il n'y a derrière un tel idéal qu'une motivation assez mesquine, et un principe intellectuel aussi ténu que l'espoir.

    Tandis que Nietzsche rejette l'idée de progrès social sous prétexte qu'il s'agit d'un idéal judéo-chrétien débile, Léopardi se contente de tenir la foi dans le progrès social pour une sorte de tare de l'esprit.

     

     

  • Humain, trop humain

    Un catholique romain m'a dit un jour : "Le protestantisme est la religion du divorce." ; c'est sans doute en partie vrai, puisque l'Eglise romaine se montre plus tolérante avec cet acte civil depuis que l'influence de l'idéologie protestante sur la doctrine romaine se fait sentir.

    Cela dit, si le catholicisme romain est la religion du mariage, cette religion ne présente pas plus d'intérêt que la religion protestante.

    D'ailleurs Luther empêche autant le divorce qu'il le permet, en énonçant que le mariage chrétien est dépourvu de fondement évangélique.