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  • Ubu roi

    Un mathématicien est attaché à l'infini comme une louve à ses petits.

    Pour l'exemple d'aberration que le sentiment maternel peut provoquer, citons Georges Cantor, qui fait des efforts pour démultiplier l'infini, sans se rendre compte que cela revient au même que d'étirer un point pour en faire une droite.

    Comme à tous les fonctionnaires méritants et des plus burlesques, son pays sait rendre à Georges Cantor un hommage vibrant chaque fois que l'occasion lui en est donnée par une coïncidence de dates.

  • Caritas in veritate

    Tâchons de ne pas perdre trop de temps avec la vaine encyclique de Joseph Ratzinger. Soulignons seulement que :

    - Le Nouveau Testament ne permet de fonder aucun "socialisme" ni "constitution sociale" d'aucune sorte. Jésus n'est pas Jaurès. Au demeurant l'histoire permet de constater les échecs répétés des réformes sociales. Contre les journalistes inféodés aux pouvoirs publics, certains historiens ont même démontré que la plus sérieuse concrétisation d'une politique sociale étatique fut celle accomplie par le régime nazi entre 1935 et 1940 ; afin d'équilibrer le propos, on peut citer aussi les efforts dans le même sens de la RDA après la guerre. Ceux qui objectent que les politiques sociales nazies ou soviétiques n'ont pu se passer de contreparties sanglantes "oublient" que les miettes distribuées aujourd'hui aux pauvres par les capitalistes dans les social-démocraties occidentales trouvent aussi leur contrepoids dans des guerres impérialistes, économiques ou conventionnelles, qui font des millions de morts.

    - Le socialisme, chrétien ou pas, n'est en réalité que la métastase de la "théocratie chrétienne" telle que Joseph de Maistre la définit par exemple, faisant fi de l'histoire comme des Evangiles qui proscrivent absolument l'édification d'un Royaume de Dieu sur la terre. Les pharisiens sont peut-être adeptes du droit canonique et nostalgiques du temps où la Palestine n'était pas soumises à Rome. Le Messie ne fait, lui, que dire et redire son mépris des institutions religieuses, politiques ou morales juives, du début à la fin de sa vie publique. Même Gustave Flaubert, qui n'est pourtant pas docteur de l'Eglise, est capable de remarquer le caractère profondément antisocial du christianisme, que seul un sentiment de peur conduit à "accommoder" en "judéo-christianisme".

    La théocratie chrétienne de Joseph de Maistre, étonnant horloger suisse dont le pendule s'est arrêté au XVIIe siècle, exactement comme le socialisme exige de mettre les faits historiques entre parenthèses. Comme Joseph de Maistre "fantasme" la Révolution française de 1789 sur le mode "C'est la faute à Voltaire !", les leaders socialistes actuels sont obligés de fantasmer l'histoire de la deuxième guerre mondiale sur le mode "C'est la faute à Hitler/Staline !", occultant autant que possible la raison capitalistique des guerres industrielles, quand ce n'est jusqu'à l'évidence que sans l'appui mécanique de l'industrie, ces guerres n'auraient jamais fait autant de victimes.

    - Dernier point qui réjouira les adversaires du marxisme. En aucun cas cette doctrine ne peut être dite "socialiste" ou "théocratique". On ne peut pas bâtir de pont entre l'encyclique de Benoît XVI et Karl Marx ; celui-ci sait parfaitement l'apport indispensable du Capital à l'Etat et vice-versa ; l'histoire de la constitution du grand capital tel que nous le connaissons progresse parallèlement à l'histoire de la centralisation du pouvoir étatique. Marx est en outre parfaitement lucide sur le fait que les "Droits de l'homme" républicains fondent une religion et une liturgie bourgeoises.

    Lorsque Luther produit une critique du mercantilisme, il s'efforce de la fonder sur les Ecritures saintes. Benoît XVI n'est fondé que sur une mauvaise philosophie allemande qui n'a jamais donné aucun fruit.

     

  • Fosse aux hyènes

    Peux pas m'empêcher de voir la rebelle Simone Weil comme une martyre à la merci des hyènes démocrates-chrétiennes. Que ne la laissent-ils pas en paix !

    Le procédé est systématiquement perfide, comme l'attaque de la revue pieuse "Sedes Sapientiae" (n° de mai - revue qui prétend remettre saint Thomas d'Aquin à la mode), après l'attaque de "Famille chrétienne", le prouve.

    Le truc consiste d'abord à dire du bien de cette héroïne, en préambule, dans les termes les plus généraux, de sorte que le lecteur lambda aura de la peine à faire la différence entre Simone Weil et l'une de ces peu indispensables greluches, Edith Stein ou Hannah Arendt, entichées de philosophie nationale-socialiste jusqu'à la tautologie... avant de diffamer S. Weil par derrière et de lui prêter des propos incohérents.

    Le coup bas le plus facile, Hervé Pasqua qui signe l'article dans SS ne manque pas de le porter : "Simone Weil est morte d'anorexie". Sans aucune preuve et alors qu'on peut penser que Simone Weil souffrait d'une maladie qui l'empêchait peu ou prou de s'alimenter.

    Purement gratuite aussi l'assertion suivante de ce Pasqua que la philosophie de Simone Weil est "mortifère".

    On comprend que Pasqua ait donné "pasquinade" ! En effet, ce gugusse est par ailleurs l'auteur d'un bouquin sur Nicolas de Cues ("Krebs", en allemand), fameux branleur qui contredit complètement Aristote, et, partant, un péripatéticien même imparfait tel que saint Thomas d'Aquin. Voilà le niveau de cette revue, celui de la "docte ignorance" prônée par le "crabe" de Cues.

    On m'a déjà du reste auparavant transmis un article du même niveau tiré du même torchon, article vantant la théorie cabalistique et parfaitement lâche de Rémi Brague sur l'Europe et le tour romain qui la caractériserait.



  • Un peu d'art pour tous

    Le rapport est étroit entre l'architecture et l'âme, ses différentes conceptions. On peut dire que la longue leçon d'esthétique "judéo-chrétienne", "laïque" ou "nationale-socialiste" (les trois qualificatifs sont mérités) de G.W.F. Hegel, est dominée du début à la fin par l'idée d'architecture. Comme Hegel ne veut pas qu'on se rende compte de sa pirouette, il dissimule l'architecture à la fin derrière la poésie et la philosophie, produits politiques plus subtils et plus difficile à définir que l'architecture. Si la roue de Hegel pouvait tourner ou qu'on pouvait lui ajouter un rayon, il lui faudrait revenir au point de départ : l'architecture.

    La conception de l'âme a bien sûr varié sensiblement au cours du temps, connu des états différents, y compris pendant le laps assez uniforme entre le XIXe et nous. On peut dire qu'à l'âme gothique correspondent les cathédrales, et qu'à l'âme "freudienne" ac tuelle correspond l'architecture de Jean Nouvel, dont l'uniformité saute aux yeux. On dirait que les éléments d'architecture contemporaine sont faits surtout pour être embotés les uns dans les autres. Pour reprendre un terme algébrique - et comment parler du totalitarisme sans parler de mathématiques -, il s'agit d'une architecture de type cellulaire.

    Qui est déjà entré dans une maison habitée par une maîtresse de maison en ayant l'impression de pénétrer son âme comprendra ce que je veux dire. Certaines femmes interviouvées après un cambriolage parlent même du sentiment d'avoir été "violées" ; une femme a rarement du "viol", soit dit en passant, une idée concrète, physique, mais pense plutôt à la souillure ou au déshonneur moral.

     

  • Printemps des antipoètes

    Très rares sont les poètes qui comme Goethe savent définir les frontières de leur art. "J'honore le rythme comme la rime par lesquels seulement la poésie devient poésie, mais ce qui produit vraiment un effet profond, pénétrant, le véritable élément formateur et fructueux, c'est ce qui reste du poète lorsqu'il est traduit en prose."

    Le mérite de Goethe est d'autant plus grand que l'art boche s'élève rarement au-dessus du niveau de la ceinture. J'y vois l'influence de Shakespeare, qu'on ne traduit comme un auteur lyrique ou baroque que pour mieux le trahir. La poésie, c'est Caliban ou Ophélie.

  • Indulgent Saint-Simon

    Je suis frappé à la première lecture de Saint-Simon (l'Ancien) par l'indulgence de ses portraits. Probable que ceux qui jugent Saint-Simon sévère ne veulent pas admettre non plus que "Tartuffe, c'est nous.", malgré la démonstration de Sollers.

    J'ai décidé de zapper plus ou moins le XVIIe siècle, qui a beaucoup trop de style pour être honnête. Mais je profite de ce qu'on m'a demandé de surveiller quelques neveux qui s'ébrouent dans un rivière pour lire d'un oeil quelques portraits de cour. Heureux gosses à peine sortis de la caverne et qui ne se doutent pas de la menace qui plane, de l'engloutissement possible du monde en quelques secondes...

    - Indulgent parce qu'il trouve des excuses à la bigoterie insupportable de l'infirmière de Louis XIV : l'état de nécessité dans laquelle elle a vécu longtemps. Il est certain, pour le traduire dans la langue du jour, que nécessité rend con.

    - Indulgent aussi parce qu'il explique que la stupidité de Louis XIV a été entretenue par son entourage, et qu'il reconnaît au roi, malgré sa bêtise, un penchant pour le savoir et une bonne capacité à l'augmenter.

    - Indulgent par les portraits vivants qu'il fait de femmes très laides qui n'auraient pas sans lui trouvé de peintre.

    Mais un de mes neveux manque de se noyer et, par acquit de conscience, je me sens tenu de plonger à l'eau pour le ramener au bord. Il faut que je lise Saint-Simon à mes neveux avant qu'ils ne voient à la télé quelque documentaire débile de Stéphane Bern sur le "Roi Soleil", la fermette de Marie-Antoinette, et toutes ces niaiseries de boy-scout.

     

  • Une France d'Epinal

    Dieu préserve bien sûr d'adorer une idole aussi ésotérique que la "nation", non pas seulement parce qu'on ne peut servir deux maîtres à la fois, mais parce que les slogans appelant à saigner des Prussiens indiquent même au crétin le plus farouche quel "maître" se cache derrière la nation. D'ailleurs du sang versé dans la terre ne naissent que de mauvaises idées.

    Pire encore que le nationalisme sur le plan intellectuel, il y a la franchouillardise gaulliste. Le football, l'affaire est entendue, vise à maintenir les employés du Capital dans un état d'abrutissement aussi complet que possible ; mais la franchouillardise gaulliste est plus grave, car enseignée à l'école aux gosses. Raisonnablement, on peut établir ce classement des chefs d'Etat occidentaux par ordre d'intelligence :

    - n° 1 : Lénine ; pour son rôle politique, mais aussi en raison de sa prescience des événements, prévision quasiment inédite dans l'histoire des Etats de type "jacobin" de la part d'un homme politique aux commandes (Lénine est si intelligent d'ailleurs, qu'il échappe presque à la définition de l'homme politique.)

    - n° 2 : Churchill, à égalité avec Staline, pour avoir contribué à tirer leurs pays de situations très délicates ; mention spéciale à Churchill, peut-être, qui parvint à dissimuler le rôle mobilisateur joué par l'Angleterre impérialiste dans le déclenchement de la 2nde Guerre mondiale, se jouant notamment du médiocre personnel politique français et de la naïveté d'Hitler.

    - n° 4 : Roosevelt : en engageant son pays dans la guerre après qu'elle fut déjà perdue par l'Allemagne, contre la tradition "girondine" des Etats-Unis, il a relancé l'industrie de son pays en plein marasme en procurant assez de commandes et d'emplois militaires, établissant les Etats-Unis première puissance impérialiste mondiale.

    - n° 5 : Franco, pour son extraordinaire aptitude - il est sans doute le plus grand stratège du XXe siècle devant Pétain et quelques maréchaux allemands - en partant de rien à conquérir tout, sorte de Don Quichotte sanglant absurdement triomphant.

    - n° 6 : Hitler - limité comme Robespierre par des idées républicaines latines trop étriquées, et jouet de la bourgeoisie qui ne lui a jamais pardonné son jusqu'au-boutisme (même s'il reste sans doute en Allemagne des nostalgiques du "panache" d'Hitler, comme il y a en France assez de nostalgiques du "panache" de Napoléon, trempé dans le sang.)

    - n° 7 : Mussolini : le même qu'Hitler en moins naïf et dans une nation sans doute plus intelligente et moins encline à se précipiter derrière le premier chef d'orchestre venu.

    Et, aussi peu sympathique soit la figure du chef de l'Armée rouge, Trotski, on est obligé de s'incliner devant son talent politique à réorganiser une armée russe complètement désorganisée en un laps de temps très court. Bref il n'y a aucune raison sauf la franchouillardise de faire figurer de Gaulle dans les dix ni même les vingt premières personnalités politiques, en incluant les représentants des autres continents - aucune raison militaire, politique ou autre ; il a été la baderne la plus habile à manoeuvrer politiquement au bon endroit et au bon moment, voilà tout.

    Il est vrai que je rédige aussi cette note pour me faire pardonner d'un péché de jeunesse : avoir dit du bien de de Gaulle dans une copie du baccalauréat pour être sûr d'obtenir une mention, alors que cet éléphant horrible et sa valetaille m'inspiraient déjà la plus vive aversion (on peut haïr de Gaulle aussi bien que Cohn-Bendit et trouver leur "réconciliation" post-mortem parfaitement logique) ; sur le fond ça ne change rien, de Gaulle reste un des symboles de la manière dont la bourgeoisie française s'auto-congratule depuis cinquante ans pour des bienfaits qu'elle n'a jamais commis et ne commettra jamais plus.

  • Sous les jupes de l'âme

    Non seulement le maquillage et les bijoux, mais aussi le goût pour le vêtement et la décoration d'intérieur, la décoloration de la peau ou son bronzage, traduisent le supplément d'âme des femmes. Quelle femme n'a jamais rêvé d'être aussi bien habillée qu'une panthère ou un phénix ? Ou brûlé sa garde-robe pour devenir un homme, ce qui revient au même.

    Aussi ne faut-il pas s'étonner de voir tous les "gens de robes", les calottes, les jupons et les toques, se liguer contre la science matérialiste et la transparence de sa méthode.

    Avec le matérialisme, ç'en est fini de jouer à trompe-la-mort : plus d'inconscient, ni le vieux Purgatoire.

  • Mathématique des tubes

    La loi Hadopi est typique de l'aptitude de la bourgeoisie au rapt de ce qui ne lui appartient pas. L'accaparement féodal de la terre, la bourgeoisie industrielle ne s'en satisfait pas ; elle le proroge par le vol du mobilier, sous couvert d'emprunt. La "plus-value" prise sur le salaire, et maintenant ce "droit de la propriété intellectuelle", qui marque la pénétration de l'Etat policier jusque dans les esprits des particuliers... au nom de la liberté de concurrence, c'te bande de chacals ! S'ils se contentaient juste de taxer le mensonge, les caisses de l'Etat et de ses banques seraient pleines des recettes générées par ses grands et petits fonctionnaires.

    Conçu au départ sous le prétexte hypocrite de protéger les écrivains, le droit de la propriété n'a jamais servi de fromage qu'à des rats serviles, en fait d'écrivains. Ont-ils l'air d'être affranchis et indépendants, tous les Besson, les d'Ormesson, les Sollers, les Houellebecq ? Plates crêpes mortuaires bien repassées, oui, voilà ce que tout le monde peut constater de la franchise littéraire actuelle.

    Plutôt marrant, après le pilleur de tombes André Malraux, de voir la propriété défendue par un cinéphile tel que Frédéric Mitterrand. S'il y a bien un procédé de rapine, l'ultime parodie, c'est le cinoche ! Qui laisse les champs qu'il traverse saccagés, et les gosses avec un goût plus fadasse encore que la semence de Proust dans la bouche.

    Frédéric Mitterrand aurait tout du chant du cygne déposé à la SACEM, d'ailleurs, s'il ne ressemblait pas plutôt à une vieille grue rouillée.

  • Rabbi Maurras

    De tous les rabbins, celui que je connais le mieux, c'est Charles Maurras. "Politique d'abord" : les loups le pensent, mais les loups n'écrivent pas. Il est extrêmement difficile de faire changer les maurrassiens d'avis car ce sont des ânes qui n'admettent que le bâton et la carotte. On ne trouvera pas bien sûr, chez Maurras, de raison à sa détestation des Juifs : elle est épidermique, et en ce sens il est tout à fait innocent au regard de l'Ancien Testament.

    Mais le pire n'est pas chez Maurras son paganisme incongru et moins pervers que celui de Hegel, car inscrit en grosses lettres sur le front de Maurras (les ecclésiastiques qui se sont occupés de démontrer que la doctrine de Maurras est luciférienne n'ont pas eu beaucoup d'efforts à faire). Non, ce qui est vraiment agaçant chez Maurras et ceux de son espèce, c'est cette manière qu'ils ont d'assimiler la Grèce à Rome et de foutre en l'air ainsi la science historique. Dès qu'il commence à entrer dans la distinction entre la philosophie romaine et la science grecque, un savant commence à être intéressant. D'autant plus que cette différence est à peu près la même entre le moyen âge et la Renaissance, d'abord, puis entre la Renaissance et la période baroque ensuite.

    Certains vont dire : "Comment peut-on être un rabbin et antisémite en même temps ?". Ils n'ont qu'à observer comment Maurras déteste les Boches, outre les Juifs, alors qu'il n'y a pas plus germaniques que ses principes.

     

     

     

  • L'Aréopage

    Blaise Pascal est comme ces philosophes épicuriens et stoïciens de l'Aréopage d'Athènes qui, lorsque saint Paul leur parle d'immortalité, haussent les épaules et s'en retournent à leurs spéculations quotidiennes (Actes des apôtres). Pascal ne conçoit rien qui ne soit extérieur à lui-même.

  • Bacon et la scolastique

    François Bacon (1561-1626), savant qu'on ne peut dire "anglais" tant le système impérialiste britannique qui s'est développé au XVIIe siècle s'en éloigne, est victime aujourd'hui de ce qu'il détestait le plus : le commentaire scolastique. Il s'applique désormais à ses propres ouvrages, dans lesquels il est permis de voir la quintessence de l'esprit européen, n'en déplaise à ceux (Hobbes, Descartes, Leibnitz, Hegel) qui ont pu voir dans la barbarie romaine un modèle de civilisation.

    Etudier Bacon permet d'ailleurs de constater à quel point la science laïque contemporaine est une mauvaise parodie de celle du moyen âge, le XVIIe siècle obscurantiste ayant largement contribué à ce mouvement rétrograde (Ainsi B. Pascal a près de deux mille ans de retard sur le plan scientifique et traite de problèmes de robinets ou de pipes déjà résolus par Euclide dans l'Antiquité ; Descartes, lui, invente les "trous noirs" en tentant de résoudre des problèmes posés par Aristote, dont le sens et le but lui échappent.)

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    On pourrait faire tout un florilège des opinions prêtées sans fondement par l'Université laïque à Bacon, sous prétexte d'attirer Bacon à sa cause. De toute évidence, la science laïque est encore plus compartimentée, segmentée, que ne l'était la science au moyen âge, et ses tabous plus nombreux. Or Bacon ne divise pas, il hiérarchise.

    On va même jusqu'à attribuer à Bacon (pas plus "anglican" que "catholique romain") sur le plan chrétien d'être "continuiste" - entendez continuité de l'Ancien Testament et du Nouveau -, ce qui est aussi grotesque que d'en faire le père ou le parrain de la franc-maçonnerie, puisque cette doctrine étrange du "continuisme" n'a jamais existé dans les Eglises chrétiennes, en dehors de Mgr Barbarin, plus soucieux de flatter que d'autre chose. Même saint Augustin, adversaire de Marcion, ne peut être accusé de "continuisme" et disserte même assez longuement sur l'ineptie qu'une telle doctrine continuiste constituerait.

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    Une erreur plus "sérieuse" et plus intéressante est celle qui consiste à opposer la science matérialiste d'Aristote à celle de Bacon. D'abord il convient de dire que la science d'Aristote est beaucoup plus "expérimentale" que celle des laborantins d'aujourd'hui, l'oeil collé au microscope et qui manient l'extrapolation à tout bout de champ. Un savant contemporain - Claude Allègre, par exemple - qui reprend à son compte cette fantaisie de la "théorie du battement de l'aile d'un papillon", n'a rien d'expérimental ; l'idée que les calculs statistiques participent de l'expérience scientifique est complètement étrangère à Bacon, pour ne pas dire à la science quand on constate le nombre de prétendus savants englués dans les statistiques. A quoi il faut ajouter les spéculations fumeuses issues de la physique quantique, dont les frères Bogdanoff signalent le caractère entièrement médiatique. Et ce n'est pas un hasard si la thèse de l'univers plat des Bogdanoff rappelle la théorie de la terre plate de quelque moine débile du moyen âge. Les récentes "avancées" de la physique quantique dans le domaine de la cryptographie auraient sûrement suscité le plus grand mépris de la part de Bacon qui utilisait les chiffres pour coder ses... missives.

    Ce que Bacon déteste, ce n'est pas tant Aristote, bien sûr, que ses commentateurs médiévaux qui en ont fait une sorte d'idole. Ceux-ci se concentrent d'ailleurs non pas tant sur la science physique ou naturelle d'Aristote que sur sa métaphysique et ses méthodes d'analyse. Comme Aristote, Bacon condamne le raisonnement rationnel, quantitatif, et relègue les mathématiques au rang inférieur de simple outil. S'il a pu être "méthodiste" sous l'influence de Platon, l'intérêt du Stagirite s'est tourné ensuite vers la forme physique et une doctrine artistique comme celle de Bacon.

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    Trois aphorismes tirés du "Novum Organum" de Bacon permettent de voir que le matérialisme de Bacon n'est pas ou peu divergent de celui d'Aristote :

    - (n°5) : "Mécaniciens, mathématiciens, médecins, alchimistes et magiciens se mêlent de pénétrer la nature (au niveau des oeuvres) ; mais tous (en l'état actuel) sans grand effort et pour un succès médiocre." : Bacon ne rejette pas complètement les mathématiques ni l'alchimie, mais il sait leur impuissance à pénétrer les formes de la Nature ; Aristote pour sa part méprise justement Pythagore et Thalès, leur secte de "scientologie" fondée sur les rapports algébriques. Un moine contemporain de Descartes emploie le mot juste pour qualifier Pythagore : c'est un législateur et non un savant naturaliste. S'il y a une "loi naturelle", ce qu'un chrétien ne peut pas croire (et Bacon est chrétien), cette loi est "pythagoricienne", fondée sur les "oeuvres", c'est-à-dire la génération et la corruption dont Aristote soupçonne le caractère d'artifice. Bacon, comme nul matérialiste avant ou après lui ne croit que la jurisprudence ou les mathématiques possèdent un caractère divin ou surnaturel.

    - (n°13) : "Le syllogisme n'est d'aucun emploi pour les principes des sciences et en vain l'applique-t-on aux axiomes moyens, puisqu'il est loin d'égaler la subtilité de la nature. C'est pourquoi il enchaîne l'assentiment, mais non les choses." : le combat de François Bacon contre le syllogisme rappelle non seulement celui de Roger Bacon d'Oxford (1220-1292), mais il est aussi proche de la volonté d'écarter les mathématiques du Stagirite (en dehors de la géométrie qui traite de l'aspect qualitatif et de la forme - Aristote connaît la différence contrairement à Descartes ou Fermat entre la perspective et la science des formes). Aristote souligne précisément dans sa physique la nature "syllogistique", si on peut dire, de l'algèbre, et qu'elle appartient au domaine de la démonstration/rhétorique (en décortiquant les fameuses démonstrations mathématiques de Zénon d'Elée). C'est à cet aspect de la science d'Aristote que Descartes s'est heurté sans le comprendre. Descartes a donc "aboli" une différence qu'Aristote et Bacon se sont évertués à souligner.

    - (n°14) : "Le syllogisme est composé de propositions, les propositions sont composées de mots ; les mots sont les tessères des notions. C'est pourquoi, si les notions elles-mêmes (qui sont la base de l'édifice) sont confuses et sont abstraites des choses de manière hasardeuse, on ne trouve rien de ferme dans ce qui est construit sur elles. C'est pourquoi il n'y a d'espoir que dans l'induction vraie." : cet aphorisme permet de comprendre la distance entre Bacon et le fameux "c.q.f.d" utilisé par les savants laïcs. L'induction de Bacon n'a rien d'ésotérique. Elle n'est ésotérique que pour un savant laïc qui ne conçoit que l'approche légale ou mathématique de la physique ; exemple fameux : la théorie d'Einstein, sophisme emberlificoté si on le compare à celui de Zénon d'Elée (et qui vise à démontrer le contraire). La leçon d'Aristote de l'inertie des mathématiques se trouve confirmée (involontairement) par Einstein, puisque avec le même outil réthorique, en jonglant avec des vecteurs, Zénon et Einstein aboutissent à deux "solutions" diamétralement (c'est le cas de le dire) opposées (le théorème de Zénon conservant quand même la supériorité dans le domaine de l'élégance, cher aux troudiseurs d'étronimes sottises en forme de noeud papillon).

    Difficile de ne relever au passage la parenté de cet aphorisme avec la dialectique de Karl Marx, qui constitue une véritable remise en cause de la grammaire. Marx a d'ailleurs mis en exergue que la pyramide du droit national-socialiste de G.W.F. Hegel est fondée sur le syllogisme (le fameux "sein-dasein", sorte de retour de la fonction courbe sur elle-même), de sorte qu'on peut quasiment dire que le progrès selon Hegel est trigonométrique/mécanique.

    On peut aussi ajouter qu'il n'y a pas de savant matérialiste sérieux qui ne récuse l'emploi du syllogisme, jusqu'à effondrer de pieuses cathédrales fondées sur l'anthropologie s'il le faut. De fait l'architecture -réelle ou spirituelle- doit beaucoup au syllogisme.

    Impossible par ailleurs de comprendre et expliquer Bacon sans tenir compte du fait que c'est un savant chrétien, vu que sa hiérarchie scientifique (antipolitique, quasiment) repose sur la foi de Bacon dans le Saint Esprit (que la théodicée celtique ou germanique a pour effet de réduire à la grâce, c'est-à-dire au néant). Si Bacon rejette la philosophie païenne en effet, pour se concentrer sur la science et les fables des Anciens, contrairement au moyen âge (Thomas d'Aquin), c'est qu'à ses yeux la philosophie païenne est une menace beaucoup plus grande pour la théologie que l'étude de la nature créée par Dieu. Le rejet ultérieur de Marx de la philosophie, s'il n'a pas un mobile chrétien comme le rejet de Bacon, a la même conséquence : purger la science de ses raisonnements anthropologiques.

    (La seule critique sérieuse de Bacon dirigée contre Aristote l'est contre la théorie du mouvement d'Aristote, mais il n'est pas certain que Bacon ait eu accès à une bonne traduction de la "Physique" en son siècle crucial.)

  • Fier d'être misogyne

    On peut comprendre l'inversion de notre époque par ce biais : l'attribution aux hommes de vertus féminines telles que le goût pour le sexe et la guerre. "Génération et corruption" : en un titre, l'élève d'Aristote peut tout saisir de la raison totalitaire que nous subissons, au point pour les plus tarés de leur faire désirer la mort.

    Bien sûr, il y a des femmes plus viriles que des hommes, même si l'exemple de Simone Weil est le seul qui me vienne à l'esprit, et des hommes plus femelles que des femmes. Le grammairien judéo-boche Frédéric Nitche témoigne qu'il est le produit de l'angoisse vaginale, en concluant que seules sa mère et sa soeur auraient pu lui faire renoncer à son idée d'"éternel retour". Toutes les aberrations scientifiques participent d'ailleurs pour partie du raisonnement "génétique".

    Quelle signification peut avoir un "principe féminin" distinct d'une femme en particulier ? "Notre sainte mère l'Eglise" est de ces principes féminins, qu'il serait un peu long à disséquer. Elle est la première grande "personnalité morale" de l'ère moderne. Et lorsque des hommes politiques, Le Pen ou Kouchner, dépeignent les Etats comme des "monstres froids", il convient de rajouter que ces monstres froids auxquels sont dévoués les hommes politiques sont des femelles. Le capitalisme est un autre système féminin dominé entièrement par les cycles et la génétique, la recherche du temps perdu.

    C'est en appliquant la même logique aristotélicienne que Karl Marx a anéanti simultanément l'Eglise, l'Etat (national-socialiste) et le capitalisme afin de sauver de leurs griffes la Vérité, devant laquelle les femmes tournent le plus souvent les talons lorsqu'elles l'aperçoivent. Le prince des poètes, Baudelaire, pas très loin de l'homosexualité comme Nitche, conçoit même l'art comme une protection contre la vérité - étant donné qu'il fait aussi l'éloge du maquillage des femmes, on pourrait dire : comme un "masque de beauté". Le grand mérite de Baudelaire étant, contrairement au clergé actuel, de ne pas cacher qui lui inspire ses vers.

     

  • Poème en prose

    Curés et poètes -et toi Claudel aussi, qui sait, espèce de Ponce-Pilate !- vous êtes des tournesols et finirez comme eux : huile de friture ou de moteur.

    Vous avez joué votre âme aux dés, mis le soleil au centre de vos réflexions : nul n'a cure de vos sacrés coeurs fumeux hors le vautour. On ne peut défier Satan aux jeux pythiques sans se consummer.

  • Régicides

    Althusser a tué sa femme parce qu'un curé janséniste marié, c'est impossible. Il a commis là comme un régicide. Jean Guitton, lui, s'est abstenu, parce qu'il aurait fallu pour cela la toucher.

  • L'Optique de Sartre

    L'optique de Sartre, somme de mots-chiffres, réfléchit la grande architecture de l'Univers pour mieux la résoudre à Néant. On peut interpréter cet exercice spirituel de deux façons : ou bien comme l'abandon par la fonction publique enseignante d'un fameux principe de la franc-maçonnerie ; ou, plus justement, comme l'aptitude du clergé à retourner sa veste/son âme.

    D'ailleurs on voit bien que Sartre ne pisse sur Chateaubriand sur le conseil de sa femme de chambre que pour mieux dissimuler sa parenté avec son illustre prédécesseur impuissant, auteur de contes pour les enfants de choeur. Aux nonnes frigides qui les entourent, on reconnaît aussi l'accointance de système entre les deux starlettes. Don Juan vit au milieu des femmes parce qu'elles ne détestent rien tant que la vérité.

  • Marie, reine des Cieux ?

    Comme le chanoine Crampon le note, dont les travaux présentent un caractère de sérieux indéniable si on les compare aux foucades gnostiques de feu Mgr Lustiger, ou encore aux pirouettes télévisées du Père La Morandais, la femme de la vision de saint Jean n'a jamais été tenue pour Marie, mère de Jésus, par les exégètes, mais, au regard des symboles que comporte sa description, pour une figuration de l'Eglise elle-même (sous réserve des nombreuses définitions de l'"Eglise" au cours de l'Histoire moderne).

    Le nationalisme démocrate-chrétien a imposé sa relecture de l'Evangile concernant ce passage comme d'autres depuis Crampon et Bloy. La dévotion à Marie a pris même au cours du XIXe siècle un tour plus qu'étrange, le Capharnaüm de Lourdes étant loin d'être un exemple isolé. Le jansénisme s'est d'ailleurs toujours accompagné, hier comme aujourd'hui, de manifestations superstitieuses et hystériques de dévotion comme de la sympathie des banquiers.

    Cette substitution de la Vierge Marie à l'Eglise dans la "foi du charbonnier", désormais commune à la plupart des chrétiens de France, au point qu'on entend certains parfois en faire une caractéristique du catholicisme (!) afin de se mieux disculper de leur tare, cette substitution a eu pour effet de renforcer le culte de l'Eglise catholique pour elle-même, esprit qui anime généralement les sectes.

    Le "culte des saints", qui fut autrefois une face du catholicisme plutôt sympathique et offrant prise à la littérature populaire, a pris une tournure qui relève presque, là encore, du culte de l'Eglise par elle-même. Quel sens peut avoir la canonisation de Jean-Paul II, par exemple ? Johnny Halliday n'a pas une croix pectorale moins imposante, il y a autant de monde à ses concerts qu'à ceux du pape, et pourtant personne ne songe (encore) vraiment à le canoniser !?

    Là encore il n'est pas difficile de comprendre qu'on est en plein processus de justification sectaire. Les arcanes de la procédure de canonisation ont d'ailleurs un aspect tout à fait démoniaque. Pourtant, si "la loi ne justifie pas" (saint Augustin), la canonisation encore moins.

     

  • Foi et raison

    Aussi sûrement qu'au bout de la logique il y a Dieu, le terme de la raison c'est Satan ; peinte dès l'Antiquité, l'abîme ou l'abysse de réflexion ; et l'âme est un jardin fertile pour les jonquilles. Les grands sorciers animistes ont toujours bâti le monde à la mesure de leurs âmes, petits lacs tièdes.

    Répété dans la Genèse, le rapport entre la foi et la raison, par la métaphore du figuier, arbre de la connaissance du bien et du mal, arraché par le Sauveur à cause de sa stérilité.

    La place des poètes et des curés est au Purgatoire : ils feraient bien de vérifier la solidité des voûtes de ce temple avant de s'y précipiter avec le désir sado-masochiste qui est le leur...

    Qu'on se le dise ou qu'on le vérifie en lisant le Nouveau Testament, les moralistes mettent en colère Jésus car c'est la volaille de Satan.

  • Punctiforme

    Collaborateur du magazine "Le Point", à l'usage des cadres français un peu écaillés par la crise, Patrick Besson, sous prétexte de causer de Louis-Ferdinand Céline et d'une énième biographie signée Yves Buin, Besson illustre les efforts qu'un baveux suspect d'avoir eu des idées vaguement communistes ET réactionnaires doit accomplir pour se faire accepter dans le sérail sarkozyste. La rumeur -vraie ou fausse-, d'une aventure entre Besson et Carla Bruni, aurait dû contraindre le renard serbo-croate à forcer son talent pour amadouer le daguet hongrois. On peut constater qu'il n'en est rien. Il faut dire que, talent ou pas, ce n'est pas les lecteurs du "Point" qui risquent de faire la différence.

    Quelques-uns des "passages obligés" :

    - "Yves Buin est psychiatre. Pour Céline, c'est mieux." : la couardise de Besson a tout de même un prix puisqu'il n'aura pas la chance de se faire refaire le portrait comme Sartre par Céline "himself".

    - Blablabla habituel sur les éditeurs-si gentils-et-pleins de mérite-sans-qui-on-n'aurait-pas-la-chance-de pouvoir lire les bouquins des journalistes du "Point" ou du "Figaro" : faut avoir le cul bien merdeux jusqu'aux yeux à plus pouvoir s'asseoir pour aimer se faire lécher le cul par une langue aussi grosse que celle de Patrick Besson.

    - "Céline a repris en 1932, dans "Voyage au bout de la nuit", l'invention de Proust : l'autofiction." : sans commentaire ; j'aime mieux partir du principe que mon blogue, contrairement au "Point", n'est pas lu que par des illettrés au point de croire que le petit Proust a inventé l'autofiction (même le coup du "voyage autour de ma chambre en passant par les waters" a déjà été fait avant Proust. Seulement une précision : "Voyage au bout de la nuit" n'est pas ce que les profs de lettres appellent une "autofiction", mais un roman ; c'est "Mort à Crédit" qui relève de ce genre.

    - Céline est antisémite : (bis repetita) la vraie question qui se pose à propos de l'antisémitisme de Céline, c'est de savoir s'il était plus à la mode de se dire antisémite avant l'Occupation ou bien judéomane aujourd'hui. Lequel des deux rapporte le plus ? Les Juifs que fréquente Besson doivent être d'une insondable connerie, de parfait Béotiens n'ayant même jamais lu "Le Corbeau et le Renard". Patrick Besson est désormais mûr pour être embauché à "Famille Chrétienne".

  • Grand-mère des nations

    Il convient, qu'on soit chrétien déclaré ou anticlérical de naissance, de prêter à l'Eglise catholique, grand-mère cacochyme des nations au coin de l'âtre -où la fumée a remplacé les braises-, cette inoffensive aïeule qui ne prodigue plus que vieilles légendes ou conseils moraux désuets, et n'a même plus cent sous à léguer, toutes sortes de pouvoirs magiques.

    Certifié non-conforme par la Fnac, Michel Onfray avance même : "Ne serait-y pas qu'elle aurait inventé Jésus-Christ, la mère l'Eglise ?", afin de mieux fourguer son "Da Vinci Code" philosophique. Vu les dents de la "vieille", Onfray purge par là-même l'anticléricalisme de tout courage et inverse le cours de l'Inquisition.

    Une opinion entendue souvent dans la bouche de doctes ignorants médiatiques, c'est que l'Eglise catholique fut et demeure "dogmatique", la plus dogmatique de toutes. Aucune affirmation n'est plus suspecte d'avoir été entièrement fabriquée par le XIXe siècle.

    On peut même, en fait, inverser la proposition et dire que la condition de la survie de l'Eglise catholique au cours des siècles fut son absence de dogmatisme. Rigide, elle n'aurait pas passé les ans et serait morte bien avant le XIXe. C'est son extraordinaire faculté d'adaptation à des doctrines venues de l'extérieur qui l'a animée. Adaptation au millénarisme, à la Réforme, aux droits de l'Homme plus récemment, sans compter l'usage que saint Augustin fait de la philosophie gréco-romaine pour tenter d'interpréter le problème de la Trinité. La pente dogmatique empruntée par Rome au XIXe siècle évoque bien plutôt la tendance des personnes gâteuses aux redites et à camper sur leurs positions au bord du gouffre.

    On voit bien ce que le dogmatisme doit au sectarisme en général, au jansénisme en particulier ; de là vient l'interprétation que l'Eglise, c'est-à-dire l'assemblée des chrétiens, est destinée à défendre une idée ou un concept pur. Et rien n'est plus divisible qu'une idée, en autant de chapelles qu'il y a de tempéraments. A la fin on finit par fourguer de l'air des Pyrénées en boîte à des grenouilles de bénitier en guise de théologie (cf. la gazette papiste "Famille chrétienne" et sa promotion d'un catholicisme "au-dessous de la ceinture".)

    On est d'ailleurs au stade où l'Université laïque fait preuve du même dogmatisme que l'Eglise naguère, et où on ne voit pas quelle religion pourrait remplacer la religion actuelle de l'Etat et de la Banque.