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politique - Page 6

  • Mythomanie laïque

    D’où vient le tabou ? D’où vient qu’on ne peut pas toucher à la caricature d’Hitler ? C’est qu’il risquerait de se produire la même confusion que la gauche a connu avec Sarkozy, apparu soudain dans le miroir socialiste, avec les mêmes citations de Jaurès, la même compassion pour les immigrés au service du BTP, le même sourire hypocrite de Bernard Kouchner jonglant avec les Droits de l’Homme en publicitaire chevronné.

    On touche là à la mythomanie laïque : rapprocher les deux pôles fait griller le circuit. Comme le schizophrène se réunifie sous l’effet d’un électrochoc. ‘Aut, aut’ dit Karl Marx, démodé jusqu’au sein de la Ligue ex-révolutionnaire qui prône un genre de révolution fonctionnelle, une sorte de balladurisme sans Balladur.

    Sur Hitler comme sur des tas d’autres sujets, l’impérialisme a tout à craindre de la Vérité, qui éclatera comme la tempête d’avoir été trop comprimée, violée, ridiculisée, télévisée.

  • Signes sataniques du Temps

    La "synagogue de Satan" de l'évangéliste Jean n'est pas seulement remplie de faux juifs mais aussi d'une foule de renégats démocrates-chrétiens qui circonscrivent Dieu au cercle des "affaires privées", d'abord, pour mieux le soumettre à la religion laïque ensuite, c'est-à-dire à César.
    Il ne convient pas de parler de "sphère" privée mais de cercles concentriques, car cette géométrie est dans les Temps modernes réservée au seul Dieu. Seul un imbécile pascalien peut commettre une telle erreur mathématique.

    Au premier rang des renégats, il y a bien sûr les journalistes démocrates-chrétiens du "Figaro" ou de "Valeurs actuelles", retranchés derrière Bernanos ou Bloy pour mieux dissimuler leur empressement à servir les robots et la balistique du système Dassault.

    Et que dire du bègue Bayrou ? C'est à croire qu'il le fait exprès avec sa bannière orange. Si l'azur est la couleur de Dieu le Père, le sang celle du Fils martyrisé par les soldats et les prêtres, l'or celle de l'Esprit descendu parmi nous, alors l'écarlate est la couleur du diable. D'où la défiance du Moyen âge rompu au déchiffrage des symboles à l'égard des roux, des renards, et même des citrouilles oranges, ce légume quantique sans saveur qui se résorbe à rien sur le feu.
    Plus récemment c'est le pyralène, l'agent orange répandu par les Rhodaniens dans leur propre fleuve ; beau symbole, puisque chimiquement il ne se mêle pas à l'eau bleue.
    La bête de l'ancien Testament est de couleur pourpre ; elle revêt dans les Temps modernes la couleur écarlate qui s'insinue entre le sang et l'or.

  • Signes sataniques du temps

    Les signes que Frédéric Engels qualifie de "rétrogrades", un catholique ne peut que les qualifier de "sataniques". Que penser par exemple de l'engagement d'un chrétien dans une armée au service des cartels de l'armement, en Irak ou en Afghanistan par exemple, chrétien qui pourra être un jour ou l'autre amené à tirer sur un civil innocent ? Par quels sophismes sataniques faudra-t-il que ce chrétien passe pour se justifier ? Comment le clergé peut-il s'abstenir de condamner ces crimes et ces mensonges ? De quoi le pape a-t-il peur ?

    C'est sans nul doute ce qu'Engels et Marx ont découvert en lisant Balzac. Que les guerres et les charniers, au-delà de la bêtise et du mensonge bourgeois, ont une cause plus profonde : la volonté de puissance excitée par Satan.

    D'ailleurs le principe que Marx définit comme le principe bourgeois essentiel : "Autem, autem", fait référence à la réplique de Jésus au "jeune homme riche", à qui il n'est laissé d'autre choix que de distribuer ses richesses. "Autem, autem" : c'est aussi le principe du diable, contenant son principe d'ubiquité, son caractère binaire c'est-à-dire désincarné, et sa langue fourchue.

    Les deux principaux obstacles au progrès de la Révolution communiste depuis un siècle sont : la manne pétrolière issue du sous-sol et l'électricité produite par le magnétisme ou les forces centrifuges, ou encore par scission de la matière.

     

  • Hybride

    Lu dans "Le Monde diplomatique" un article dont l'auteur propose de chercher des solutions à la crise à la fois chez J.M. Keynes et Karl Marx. C'est complètement absurde ; autant que le rapprochement que font certains universitaires gâteux entre Marx et Hegel (Ce genre de "pondérations" de Marx par Hegel ou Keynes vise bien sûr avant tout à préserver l'honorabilité des carrières des profs qui la suggèrent. Si le slogan des chrétiens est désormais : "Surtout pas l'Apocalypse !", celui du PCF depuis la Libération c'est : "Surtout pas la Révolution !".

    Marx n'a rien à voir avec des crétins comme Keynes ou François Fillon ; le marxisme n'est pas une trousse à outils ; c'est une vision complète de l'homme-artiste telle qu'on n'en avait plus proposé depuis Averroès, saint Thomas d'Aquin ou Raphaël.

    La tentative de réforme du capitalisme par Keynes est à peu près la même que celle qui fut tentée avec le succès qu'on sait par Hitler à partir de 1933 en Allemagne. Elle consiste à essayer de fixer la richesse nationale et à lutter contre la force capitaliste centripète. Toujours ce rythme binaire du capitalisme : sadisme Et masochisme, anorexie ET boulimie, consommation ET épargne, étatisme ET laxisme, Keynes ET Friedman.

    Sans une organisation totalitaire telle que le FMI ou le Congrès yanki, les tours de passe-passe monétaires façon Friedman seraient impossibles. La politique de dépenses contrôlées par l'Etat, non seulement n'a pas sorti l'Allemagne nazie ni les Etats-Unis complètement du marasme dans les années 30, mais elle a entraîné ces nations à développer leurs industries militaires.

    Par conséquent on peut dire que Keynes, autant que Hegel, c'est la guerre.

  • Souvenirs du futur

    Le Président Lebrun a laissé le souvenir d'un loufoque à l'Elysée. Sarkozy laissera plutôt le souvenir, lui, d'une loufoquerie interprétée comme une preuve de bon sens par le personnel médiatique.

    Quant au dévôt Fillon avec sa tronche de clystère pour annoncer 0,3 % de croissance en 2009, il agit sur moi comme un répulsif, ou le portrait d'un pharmacien par Flaubert. Me vient à l'esprit en l'entendant cette répartie de cour de récréation : "Touche à ton cul t'auras des verrues."

  • Y'a bon Obama

    En France, l''obamamania' est d'abord une idéologie de blancs. L'industrie militaire, 'via' ses filiales dans les médias, 'Le Figaro', 'Europe 1', en font des tonnes sur le thème de la victoire du gentil métis noir exemplaire.

    Cette idéologie, c'est typiquement l'idéologie bobo à laquelle la droite, en France, a fini par se convertir : elle consiste à abriter les valeurs bourgeoises libérales derrière les bons sentiments à coloration sociale-démocrate.

    On constate que les pays capitalistes qui ont élu en premier des présidents 'noirs' (Obama n'est pas plus noir que blanc) sont les pays où des lois raciales étaient en vigueur récemment. Si on pousse la logique WASP jusqu'au bout, pour avoir un président noir en France le plus vite possible, le meilleur moyen c'est d'abord d'édicter des lois raciales.

    Ou : étant donné que la France a édicté quelques lois raciales dirigées contre les Juifs pendant la brève occupation d'une partie de la France par les WASP allemands, avec Sarkozy nous avons déjà notre président 'noir' : comme quoi la couleur importe peu et la chanson de Brassens ne vaut pas que pour les jeunes cons et les vieux cons, elle vaut aussi pour les pâles cons et ceux café-au-lait.

  • Twin Towers

    Il faut voir tous ces profs d'économie à Paris-Dauphine ou Sciences-po., les énarques libéraux, la légion des fonctionnaires du capitalisme sortir des bureaux ou des salles de cours aseptisés, et envahir les plateaux de télé pour tenter de minimiser la faillite, leur faillite.

    Car la faillite financière est bien sûr secondaire. Au premier chef, c'est une faillite intellectuelle : la chute des cours boursiers entraîne avec elle une quinzaine de prix Nobel d'économie. Non seulement Milton Friedman, mais aussi John Harsanyi, Thomas Schelling, etc., autant de dangereux cinglés nobélisés par les augustes crétins de Stockholm. Le pire d'entre ces prix Nobel est sans doute John Nash, issu de la pépinière de tarés de Princeton, récompensé pour avoir eu l'idée d'appliquer à l'économie les lois du poker.

    A côté de ces criminels de guerre économique, notre cartomancienne nationale Jacques Attali, une carte "plus" dans la manche gauche, une carte "moins" dans la manche droite, peut presque passer pour un véritable savant.

     

     

  • Transparence

    Pour plus de transparence, il serait bon que le président de la télévision publique soit nommé directement par l'Elysée. (Comme s'il n'était pas parfaitement clair que Patrick de Carolis est une caricature de journaliste chiraquien, s'exprimant comme un chiraquien, avec des goûts de chiraquien et une culture de chiraquien, à peine moins caricatural que D. de Villepin et son panache blanc, mi-bière-mi-limonade.) Pour plus de transparence il faudrait aussi que les salaires de Sarkozy, Fillon et Carla Bruni leur soient directement versés par Bouygues, Lagardère, Dassault, etc., et non par le "contribuable".

    Même si Sarkozy reflète bien la bêtise d'un patronnat français qui ne sait même plus choisir ses employés. Il est évident que la gauche, supportée par l'intelligentsia bobo, constitue une meilleure sécurité pour l'oligarchie, qu'elle est plus apte à endormir l'électorat, à bercer les chômeurs d'illusions et de RMI. D'où la métamorphose habile de Chirac dont Sarkozy ne paraît pas capable : en plein braquage de banques par des cols blancs-costards rayés, Sarkozy n'hésite pas à tancer publiquement des fonctionnaires qui réclament deux ou trois pour cent d'augmentation de salaires et à les attaquer sur le terrain de la... morale.

     

     

  • Capitalisme et vaseline

    "L'économie réelle ! l'économie réelle ! l'économie réelle !" : les banquiers et leurs secrétaires n'ont plus que ce mot à la bouche, ces jours-ci, exactement comme les putains ayant fini par conclure un mariage bourgeois et qui n'a plus que la sacro-sainte morale à la bouche. Une façon de s'acheter une conduite à peu de frais.

    Sarkozy, lui, refait le coup du "tonneau des Danaïdes". 360 millions d'euros "de prêt" aux banques : on peut dire que pour une girouette comme Sarkozy, c'est un chiffre symbolique.

  • Demain la Révolution

    Opposer le libéralisme à l'étatisme, c'est comme opposer la télévision publique d'Etat à la télévision privée de Bouygues. Seule une cervelle exposée aux spots télé ou aux clips vidéo durablement peut croire qu'il y a réellement opposition.

    Ce qu'"Arte" dit pour un public d'instituteurs laïcs, TF1 le répète dans le langage du petit peuple des supporteurs de foot.

    La meilleure protection du capitalisme, depuis le début, c'est l'Etat : en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, partout. Sans l'Etat et ses flics, il y a longtemps que les industriels "libéraux" auraient été "raccourcis" par le prolétariat.

    Sans la police chinoise, pas de Jeux Olympiques ni de capitalisme chinois. A tel point que le destin du capitalisme chinois et de la dictature militaire chinoise sont indissociables. Et les Etats-Unis dépendent désormais pour une large part de la capacité de la junte militaire chinoise à endiguer une révolution fort probable des esclaves chinois. On recommande à la junte de faire alors appel à des conseillers très spéciaux comme Guy Sorman ou Jacques Attali.

    Le capitalisme est lié à l'initiative privée, dit-on sur les plateaux de télé. Le panurgisme des yankis est une preuve suffisante du contraire. Sous prétexte qu'il est noir, Obama est un type bien ; sous prétexte qu'il n'est pas blanc, Obama est un sale con : voilà à peu près le niveau de l'initiative privée aux Etats-Unis. Alain Madelin a une gueule d'initiative privée, peut-être ? Il a surtout une gueule de con qui répète la même rengaine depuis trente ans, et qu'on nous ressort avec cette vieille peau imbaisable de Marie-France Garaud, comme si la France ne sentait pas déjà assez le moisi comme ça, après tant d'années de gaullisme.

     

  • L'Essence de la laïcité

    Où la foi laïque, foi de charbonnier, foi de cinéphile, foi d'industriel de l'armement ou du bâtiment, est-elle plus palpable que dans une foire d'art contemporain ?

    Ce qui saute aux yeux dans un tel manège, c'est qu'il est entièrement résumé dans Hegel : la colorimétrie comme le concept, le paysage décharné, et même l'immonde photographie. Comme chez Hegel tout est enfermé dans les interstices ; la supersition du Néant brille sous les lampes électriques. Un laïc qui lit Hegel comme il faut voit sa mort en face comme dans un miroir. Tout est dans Hegel jusqu'au doute que tout ce bazar ait un sens, que nul laïc n'exprimât mieux que Hegel, sauf Hitler peut-être.

    Le combat entre Hegel et Marx oppose les ingénieurs aux artistes et pas seulement les riches aux pauvres.

  • A couteaux tirés

    L'opposition gauche-droite, c'est le moteur à deux temps de la société civile française. La liste des crétins est longue, Jacques Attali en "pole position", de ceux qui proposent d'améliorer le rendement du moteur sur le modèle yanki, en se débarrassant de trublions comme Le Pen ou Besancenot.

    Combien de feuilletons débiles TF1 devra encore diffuser avant de faire de la France un pays de crétins parfaitement homogène ?

    En réalité Sarkozy, en faisant ressortir l'hypocrisie de la gauche, se montre beaucoup plus subversif que Le Pen et Besancenot réunis pour l'instant.

    Si la gauche était au pouvoir, c'est la droite qui feindrait de s'opposer à l'envoi de troupes françaises en Afghanistan, qui s'y collerait à la place d'Arnaud Montebourg (pas très crédible dans le rôle de Jaurès).

    Les médias français financés par les marchands d'armes sont plus nuancés : ils sont plutôt pour la guerre. Le souvenir d'un siège social de style "bauhaus" mis en miettes par des terroristes n'est pas près de s'éteindre. Mais les médias émettent tout de même une réserve : il faudrait que les trouffions français soient mieux équipés ; à côté des armes de frappes chirurgicales yankies, l'armée française à l'air de se battre avec des couverts Guy Degrenne.

     

     

     

  • Marx et Satan

    Je me suis procuré sur un site de vente de bouquins d’occase en ligne un titre amusant : Karl Marx et Satan. L’opuscule date des années soixante-dix et il est rédigé par un pasteur yanki, Richard Wurmbrand, qui entend prouver que Marx n’est autre qu’un suppôt de Satan.

    J’y apprends que le premier ouvrage pondu par le jeune Marx s’intitule : Union du fidèle au Christ.

    La démonstration du pasteur est assez simple : étant donné que le communisme n’est pas le christianisme, et vu qu’on ne peut servir deux maîtres, Marx ne peut être inspiré que par Lucifer himself. Cqfd. Après tout pourquoi pas ? Moi-même je ne suis pas loin de penser que les démocrates-chrétiens, serviteurs de deux religions, la démocratie et le christianisme, adorateurs d’une part de l’Etat laïc, et d’autre part de Dieu, sont perfides si ce n’est bifides. L’épanouissement de nombreuses sectes satanistes aux Etats-Unis, modèle de théocratie laïque, la part de satanisme dans le folklore de ce pays, viennent compléter ma thèse.

    *

    La collection de preuves de l’éducation chrétienne de Marx et de son ami Engels ne trouble pas mon pasteur, au contraire, il en rajouterait même plutôt : un suppôt de Satan qui ne croit pas en Dieu, ça ne se fait pas. On n’est pas très loin ici des accusations de satanisme lancées parfois par les démocrates-chrétiens à l’encontre de Baudelaire.

    Je ne peux que tenir pour nulles et non avenues les preuves manifestement inspirées par le puritanisme de l’auteur : Marx avait les cheveux excessivement longs et il buvait beaucoup de vin.

    Je ne résiste pas au plaisir de citer ici un extrait d’un poème pie de Frédéric Engels :
    « Jésus-Christ, Seigneur, Fils Unique de Dieu,
    Daigne descendre de Ton trône des cieux
    Pour venir sauver mon âme.
    Descends avec toutes tes bénédictions,
    Toi, Lumière de la Sainteté du Père !
    Permets que je Te choisisse.
    Oh ! qu’elle est aimable, belle sans ombre de tristesse,
    La joie avec laquelle, ô Sauveur,
    Nous faisons monter vers toi notre louange. »


    Même Mauriac n’aurait jamais osé écrire un truc pareil ! Il avait trop de respect humain. Pas plus qu’on n’imagine Mauriac distribuer son pognon avec largesse à ses amis, comme Engels fit.

    Et pas mal de perles encore dans cette brochure où Darwin, Mai 68 et même Giscard-d’Estaing sont évoqués.
    Mais la meilleure, à mon sens, c’est le patronyme de l’auteur lui-même : Wurmbrand. Lorsqu’on porte un telle blaze, qui peut se traduire par “La marque du serpent”, on prend un pseudo pour écrire sur le satanisme de Marx.

  • L'honneur bafoué de Georges Bernanos

    La meilleure façon de bafouer l'honneur de Georges Bernanos ? Il suffisait de le transformer en hypocrite penseur démocrate-chrétien gaulliste sur le modèle de François Mauriac.

    Le soixantième anniversaire de la mort de l'écrivain catholique est prétexte dans Le Figaro, Famille chrétienne ou Valeurs actuelles, à de petites notules niaises et consensuelles ne ménageant pas les "Bernanos éternel" par-ci, "Bernanos prophète des temps modernes" par-là, et patati et patata. Pour le fond les abonnés de ces gazettes sont aimablement renvoyés aux volumes de la Pléiade ou aux propres délayages de ces embaumeurs de première classe.

    Tant qu'à faire j'aime encore mieux, poursuivant le même but, l'exégèse délirante que Les Temps modernes ont donnée du célèbre "Hitler a déshonoré l'antisémitisme" de Bernanos. Interprétation des Temps modernes (sic), comme tout droit sorti d'un conte d'Alphonse Allais, de Villiers de l'Isle-Adam ou du Meilleur des mondes d'Huxley qui vise à faire de Bernanos un écrivain philosémite comme tout le monde : quia absurda est.

    La déception de Bernanos fut en vérité à la mesure de sa naïveté, lorsqu'il revint d'exil pour servir de caution à un régime gaulliste à peine sorti des règlements de compte sordides et des procès politiques qui n'en finissent pas. Il ne suffit pas que les ex-soixantuitards à bout de souffle chantent tout compte fait les louanges de De Gaulle, il faudrait de surcroît que des écrivains comme Brasillach, Céline, Drieu ou Aragon, du séjour des morts, joignent leurs voix à ce concert de faux-culs ! Néron n'en demandait pas tant.

    Aussi naïf fut-il, Bernanos ne mit pas longtemps à découvrir les véritables mobiles de la clique gaulliste. Même lucidité chez Simone Weil dont les critiques sont à peu près impubliables aujourd'hui tant elles écornent le mythe gaullien.

    "Il y a eu des collaborateurs mais la collaboration était un mensonge. Il y a eu des résistants mais la résistance était un autre mensonge. Il y a eu la victoire, qu'on a tout de même pas osé appeler Victoire, par un reste de pudeur, mais Libération.

    Et cette libération était aussi un mensonge, et le plus grand de tous...!" G. Bernanos

    *

    La franchise, le ton radical de Bernanos est son plus grand mérite, car pour ce qui est de l'anticipation, La France contre les robots, n'importe quel authentique lecteur ne peut manquer d'y voir une adaptation française de la critique marxiste du capitalisme. Sans qu'il fut nécessaire à Bernanos pour écrire son pamphlet d'avoir lu Marx. E. Waugh ne l'avait pas lu non plus ; il n'est pas certain qu'Ezra Pound s'y soit intéressé de très près. On sait que ce fut le cas de Céline, mais assez tardivement. Pourtant le lien de cœur entre ces écrivains est évident.

     Qu'un baveux du Figaro comme Sébastien Lapaque, employé par conséquent d'un fabriquant d'armes de destruction massives qu'on est occupé en ce moment à fourbir, que ce genre de pion puisse se prévaloir de La France contre les Robots, voilà qui illustre bien le principe démocrate-chrétien à la perfection. Lorsqu'on a une bille à servir de cible à un pamphlet comme Sébastien Lapaque, on ferait mieux de planquer ses bajoues dans une compagnie d'assurance, derrière le guichet d'une banque, où elles peuvent jouer leur rôle rassurant, plutôt que de s'en servir pour pipeauter de cantilènes gaullistes les vieillards paranoïaques qui lisent Le Figaro entre deux madeleines trempées dans la tisane.

  • Football et laïcité

    On entend souvent des sociologues, des plus ou moins chercheurs au CNRS ou à l’EHESS, affirmer que le football est “révélateur de notre société”. Est-ce que ce genre de tautologie mérite vraiment d’être financée par une bourse d’étude ?
    Si l’on dit que la peinture de la Renaissance est révélatrice de la société de la Renaissance, ou que le théâtre grec en dit long sur la société grecque, on a tout dit et rien dit.
    Le plus stupide des supporteurs du PSG est capable de voir que le football n’est pas du sport, mais que c’est une activité régie par d’autres règles.

    *

    La question du football est liée indirectement à celle du mythe. Le mythe a pour but de compléter et de nourrir la logique. On ne peut pas dissocier la mythologie grecque de la philosophie grecque. Elles se complètent. Le mythe grec excède même la pensée rationnelle grecque d’Aristote. On peut dire en quelque sorte que la raison grecque vient du mythe et qu’elle y retourne. Aristote traduit en raisonnement l’<I>Iliade</I> et l’<I>Odyssée</I>, mais sans en résoudre complètement le mystère.
    Ce qui peut apparaître aujourd’hui comme un récit fantaisiste et incohérent, les “aventures d’Ulysse”, et des penseurs ineptes comme Nitche ou Freud ont contribué à répandre ce préjugé, est en fait la base d’une des civilisations les plus fécondes.

    De même la logique juive, le Talmud, vient du récit biblique et y renvoit. Le Nouveau Testament fonde aussi un imaginaire et une logique complètement différente.

    Dans ce qu’il faut bien, objectivement, considérer comme une religion, la laïcité, même si la foi de chaque laïc, subjectivement, est plus ou moins profonde, les “Droits de l’homme” occupent la place du mythe. Ils sont à la fois la source des règles juridiques morales et politiques laïques, et en même temps son horizon indépassable. Autrement dit les “Droits de l’homme” et le droit public international fixé par l’ONU sortent du droit commun.

    *

    La spécificité du mythe laïc par rapport au mythe grec, juif, musulman ou chrétien apparaît clairement, même s’il est sans doute possible d’établir des analogies entre la logique juive, musulmane ou chrétienne et la logique laïque (La religion laïque n’est pas une religion “vétéro-testamentaire” pour rien.) : le mythe laïc n’est pas imagé ; il n’est pas, ou très peu, narratif. De là la difficulté du clergé laïc à inventer des cérémonies religieuses originales. Le régime national-socialiste s’y est bien employé avec une conviction particulière, mais les grand-messes nazies et le bric-à-brac de la symbolique mi-viking mi-hindoue ont laissé une impression de pacotille, tout comme la ferveur militaire de l’Empire napoléonien dont les défilés du 14 Juillet, avec leur pompe ostentatoire, sont le reliquat.
    Même Hegel, bien que théoricien de l’Etat et du progrès laïc, goûtait assez peu l’art de son époque.

    Il n’est donc surprenant que la religion laïque, bridée dans son imagination, s’invente des modes de pensée ou des cérémonies plus concrètes, ne serait-ce que pour satisfaire le goût populaire qui ne jouit guère de l’art laïc du musée Pompidou, même si le populo singe parfois le bobo.
    L’emprunt par Darwin à Lamarck de sa théorie imaginative, renforcée d’extrapolations algébriques, remplit à peu près le même office : permettre aux fidèles laïcs de se projeter au-delà de leurs principes théoriques. Si cette projection a pu séduire aussi bien le IIIe Reich nazi que les Yankis ou l’Europe laïque contemporaine, malgré la découverte récente d’indices infirmant la science téléologique de Darwin, l’hostilité de l’imaginaire juif, musulman ou chrétien, à cette transcendance-là, est tout ce qu’il y a de plus logique.
    Il n’est pas d’exemple dans l’histoire d’une superposition de plusieurs mythes qui n’ait abouti à la soumission de l’un à l’autre, non à la somme ou à la division géométrique de ces mythes.

    Profitons-en pour signaler la déficience profonde de la pensée laïque de Maurras, derrière le style "cicéronien", puisqu’un énergumène tel que Régis Debray, cahin-caha vient de ressusciter Maurras. Cette thèse laïque ignore absolument cette réalité que la religion laïque est d’ores et déjà issue d’un amalgame d’exégèses bibliques marquées par l’autosuggestion. Maurras et Debray veulent rajouter du christianisme à un pastis déjà coupé au christianisme. Ce n’est pas le “retour vers le futur” mais le “grand bond en avant vers le passé”. Il est étonnant que Debray n'ait pas songé, plutôt qu'à la démocratie-chrétienne, à une religion plus jeune comme l'islam pour son Etat laïc. Quitte à faire une cure, autant qu'elle soit de rajeunissement.
    Il convient donc pour faire la lumière de classer Maurras et Régis Debray, avec Freud, Nitche et Darwin, dans la catégorie des “penseurs métèques”.

  • Marx pour les Nuls

    Compter sur les résultats d’un match de foot pour rééquilibrer la balance commerciale d’un pays, voilà qui résume bien l’esprit du capitalisme ; c’est cocasse lorsqu’on sait que la plupart des matchs sont truqués.

    Les Français, qui veulent “moraliser” le capitalisme, lutter contre le dopage, refusent d’admettre que le capitalisme repose sur la tricherie. La “concurrence loyale” est un fantasme de crétin.
    Les “économistes” français Claude Bébéar et Philippe Manière doivent bien faire rire à leurs dépends dans les salles de marché yankies. Ces deux lascars partent du constat que “Wall Street” blanchit des milliards d’argent sale chaque année et qu’il faut par conséquent redresser ce système mafieux pour éviter sa chute.
    Dans le même ordre d’idée géniale, on pourrait aussi réformer la roulette au casino, afin que chacun ait une chance raisonnable de remporter le “jack pot”.

    *

    Il y a pourtant une fable de La Fontaine qui prévient aussi contre le libéralisme, c’est Pérette et le pot-au-lait. Voilà ce que les adhérents de l’UMP feraient mieux de lire plutôt que les niaiseries de Nitche ou de Heidegger.
    On peut voir aussi le libéralisme comme une sorte de pari pascalien sur l’avenir. Le blasphème qui consiste à parier sur l’existence de Dieu, l’idéologie libérale le remplace par un autre, contre la réalité cette fois.
    On aurait tort de croire qu’il n’y a aucun rapport. Au plan psychologique, c’est la même démarche. L’idéologie libérale, comme celle de Pascal (auquel les capitalistes français ont justement rendu hommage en imprimant sa face de renégat sur leurs billets de banque), repose sur l’algèbre et la géométrie euclidienne, c’est-à-dire sur des extrapolations.
    L’illogique pascalienne, l’illogique libérale, ce raisonnement de croupier, est né dans la peur.
    Jérôme Kerviel est bien un bouc émissaire. On initie hic et nunc dans certaines universités françaises de jeunes veaux aux “mathématiques financières”. A côté des “mathématiques financières”, l’astrologie est une véritable science ! Au moins elle inclut un phénomène concret : le mouvement des astres, tandis que les mathématiques financières sont purs jeux de l’esprit excluant l'histoire et la géographie.
    Cette angoisse que Pascal entend diminuer, au bout du compte ce scélérat ignorant des plus élémentaires recommandations évangéliques, cette angoisse il ne fait que l’accroître vu que l’algèbre et la géométrie sont des systèmes parfaitement incohérents. Le garde-fou se dérobe et le néant s’ouvre sous les pieds du barbare janséniste, libéral, gaulliste, laïc ou démocrate-chrétien.

  • Brave New World Today

    L'essence de la laïcité, c'est donc la négation. Non pas la négation de Dieu, mais la négation de la religion. Les laïcs nient que toutes leurs fêtes, leurs dogmes, leurs saints, leurs martyrs, leur mythologie, leurs sacrements, les Droits de l'Homme virtuels, ces principes qu'ils partagent et font parfois partager par la force, ils nient que tout cela constitue une religion.

    Lorsqu'il insulte l'islam à la Une du Figaro, avec le soutien du ministère de l'Intérieur et de toute la presse laïque et libérale, Robert Redeker ne s'exprime pas au nom de la religion laïque qui est pourtant la sienne, mais au nom de la "neutralité", de l'"indépendance", voire de la "liberté de penser". Et tous les pasteurs de la religion laïque de même, les BHL, Finkielkraut, Fourest, Régis Debray, Max Gallo : tous prétendent qu'ils se situent "au-dessus" de la mêlée religieuse. On ne peut pas le dater avec précision, mais il y a un moment où on a basculé dans le "Meilleur des Mondes", c'est une certitude. Cette absurdité qui n'est encore qu'une anticipation chez Alphonse Allais, Jarry ou Aldous Huxley, ça y est, on y est, en plein dedans.

    Le fanatisme laïc est d'une violence extrême précisément en raison de cette négation.

    *

    Personnellement je me considère comme une victime, un rescapé du fanatisme laïc. Depuis mon plus jeune âge, à chaque fois que j'ai souhaité progresser sur le chemin de l'art, de la science ou de l'histoire, j'ai buté sur le fanatisme laïc, pétri de syllogismes et d'algèbre, les deux armes favorites du totalitarisme. Et je suis d'ailleurs tombé plusieurs fois dans les chausse-trappes de la rhétorique laïque.

    *

    Je ne peux pas évoquer la laïcité et le totalitarisme sans évoquer la pensée démocrate-chrétienne. Car si elle est désormais à la remorque de la pensée laïque et se contente d'en transposer les principes dans le microcosme chrétien, la pensée démocrate-chrétienne a beaucoup contribué à forger la religion laïque. S'il fallait citer cinq des plus grands docteurs de l'Eglise laïque, on ne pourrait manquer d'inclure Kant, Feuerbach et Hegel, du plus aveugle au moins aveugle.

    Si j'aime bien prendre le cardinal Barbarin comme exemple de pasteur démocrate-chrétien, incarnant le mélange étrange entre la religion laïque et la religion chrétienne, même si Mgr Lustiger n'était pas mal dans le même genre, c'est bien sûr à cause de son patronyme. "Barbarin" rend l'idée d'une barbarie, mais discrète, comme raffinée : on ne peut mieux dire que le "barbarinisme démocrate-chrétien".

    Logiquement au coeur de l'idéologie de Mgr Barbarin, il y a aussi une négation. "Rendez à Dieu ce qui est à Dieu..." : ce fameux passage de l'Evangile de Matthieu où Jésus, confronté aux Pharisiens qui veulent le piéger, le compromettre avec les autorités romaines ou avec le nationalisme juif, ce fameux passage dans lequel Jésus interdit de rendre un culte à César, c'est précisément sur ce passage que les démocrates-chrétiens fondent leurs principes laïcs !

    Il est intéressant de voir comment ils s'y prennent pour subvertir l'Evangile. La doctrine catholique authentique interprète ce passage comme l'établissement d'une hiérarchie. Le Royaume de Dieu prime sur le Royaume des hommes ; la confusion des deux, qu'on pourrait qualifier de "théocratie", est exclue. A cet ordre les démocrates-chrétiens substituent un parallélisme. C'est le raisonnement algébrique des deux sphères, la sphère laïque et la sphère privée, l'une à côté de l'autre. Premier dérapage volontaire. Le second consiste ensuite, comme fait un jongleur, a faire passer la sphère publique au-dessus de la sphère privée.

    L'Evangile devient, au terme du tour de magie : "Il faut payer l'impôt à César !" Invraisemblable, n'est-il pas ? Une telle interprétation est impossible, autant que son contraire "Il ne faut pas payer l'impôt à César !", car dans l'un ou l'autre cas cela signifierait que Jésus est tombé dans le piège des Pharisiens.

    Les démocrates-chrétiens fondent la démocratie, c'est-à-dire la théocratie, sur le passage de l'Evangile qui l'interdit. Difficile de faire plus bifide, plus "pharisien".

    Une dernière observation importante : la démocratie-chrétienne, qui se présente souvent comme un "retour à la lettre des Evangiles", commence par en bafouer l'esprit pour, au bout du compte, en modifier la lettre avec un sang-froid qui a de quoi glacer les âmes encore vivantes.

    C'est à saint Marx et presque à lui seul que je dois d'avoir échappé à l'hérésie démocrate-chrétienne et laïque. Aussi ne puis-je m'empêcher de l'en remercier aussi souvent que je le peux.

     

  • Le choix des mots

    L'idée de Besancenot d'un grand parti anticapitaliste part d'un bon sentiment. La propagande a de plus en plus de mal à dissimuler que la richesse matérielle de l'Occident et des Etats-Unis repose sur un déséquilibre économique à l'échelle mondiale. Pour l'instant, le reste du monde, le couteau sous la gorge, accepte ce "rackett"... mais demain ?

    Même Chirac avait pigé ça ! Peut-être inspiré par ce que les Etats-Unis ont fait du Japon : un "no man's land".

     Mais ce qui manque visiblement à ce projet anticapitaliste, ce sont des idées marxistes. Che Guevara ne suffit pas. La dénomination même de parti "anticapitaliste" est trop lâche. Derrière l'économie, il y a des hommes ; c'est tout le subterfuge des libéraux et de leurs acolytes démocrates-chrétiens qui tiennent l'encensoir que de dissimuler cette réalité derrière la spéculation, les statistiques et le droit.

    "Antilibéral" serait plus franc, voire "antilaïc", "antitotalitaire". Il est impossible de dissocier le libéralisme de la laïcité et du capitalisme. Ce serait mépriser la vérité historique. Et c'est précisément ce que nous reprochons aux libéraux de tous poils : d'être des menteurs.

    Le libéralisme n'est pas une recette économique, c'est une superstition religieuse, et c'est en tant que telle qu'elle doit être combattue. C'est parce que le parti communiste est devenu un parti comme les autres, un parti de vieillards fétichistes, qu'il a crevé. A l'inverse Le Pen doit son succès dans les milieux ouvriers au fait qu'il a à plusieurs reprises su trouer le rideau de velours de la propagande libérale, faire tomber les masques.

    Le choix des mots, simple pinaillage sans intérêt ? Pas si sûr. Besancenot ou qui que ce soit mènera le combat antilibéral avec sincérité, s'il veut éviter d'être manipulé par Sarkozy ou le PS, dont la ruse consiste à jouer les moins pauvres contre les plus pauvres en agitant la promesse d'une poignée de dollars en prime, devra commencer par piétiner la propagande et les fétiches laïcs. Le combat doit se faire au nom de la vérité et non du relativisme libéral.

    C'est là que réside la principale différence entre Karl Marx et Hegel, Hegel le grand penseur du nazisme, le régime laïc le plus altruiste de l'histoire, le moins anarchique, mais qui, n'en déplaise à la bourgeoisie libérale, aux industriels démocrates-chrétiens, aux laïcards nostalgiques, ne reviendra pas. Le combat de Hegel est placé sous le signe du mythe et des fétiches. Celui de Marx est placé sous les auspices de la Vérité. Elle seule rend libre. Tout le reste n'est que tactique (Jauger Besancenot et son parti anticapitaliste ne prendra pas longtemps.)

     

  • L'essence de la laïcité

    Pour les candides qui se font encore des illusions sur la prétendue “neutralité laïque”, cette affaire de mariage musulman annulé, qui a mobilisé comme un seul homme le rouleau compresseur médiatique, est une véritable "leçon de chose".

    Car que s’est-il passé, derrière l’écran de fumée des syllogismes juridiques et de la propaganda télévisée ? C’est pourtant simple, des lobbys laïcs, relayés par des médias laïcs, ont annulé une jurisprudence laïque, au mépris de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice, grand principe constitutionnel laïc.
    Si on peut dire, l’empiètement des lobbys et des médias sur le pouvoir judiciaire ou législatif est tellement peu laïc que la Constitution n'a même pas songé à parer ce danger ; c’est pourtant ce qui vient de se passer, les médias ont ordonné à la Garde des Sceaux de changer la jurisprudence, au vu et au su de tout le clergé laïc, avec son approbation.
    (A ma connaissance, seule la presse étrangère, britannique, a relevé ce fait évident.)

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    Par-delà même ces deux négations, c’est la théorie laïque (algébrique) du cantonnement de la religion dans la sphère privée qui vient d’être bafouée ouvertement.
    L’avocat du couple musulman, Me Labbée, avait bien pris soin d'emprunter les fourches caudines du droit laïc. Il ne s’agit pas ici d’un père de famille musulman ou catholique "intégriste" qui ramène de force à son domicile sa fille émancipée légalement. La forme laïque et ses circonvolutions a été scrupuleusement respectée.

    Le caractère fourchu de cette théorie algébrique qui met en parallèle les sphères privée et laïque a surgi. Encore une fois c’est un cas d’école. La fiction de la sphère privée a été démantelée pour pouvoir s’attaquer à la religion musulmane qui s’y était réfugiée.
    Le sophisme, présenté comme une vérité universelle, utilisé communément par les laïcs pour traquer les religions dans la Cité et les en expulser, en affirmant que la virginité n’est pas un motif subjectif, que les seuls motifs subjectifs valables sont des motifs laïcs, les lobbys laïcs ont fait voler en éclat. Ils l'ont écarté pour mieux s’en prendre à l’islam, dans la vie privée, trahissant ainsi le véritable mobile laïc.

    La négation de la jurisprudence d’un tribunal laïc, la négation du principe de séparation des pouvoirs, la négation de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, tous ces reniements accumulés ne signifient qu’une seule chose : le superfanatisme de la religion laïque spéculée.

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    Ici j’en profite pour faire observer une chose à mes frères musulmans respectueux de la loi divine, et qui refusent de se prosterner devant des idoles laïques comme le football ou le cinéma. Une chose qu’ils ne sont peut-être pas les mieux placés pour observer : le fanatisme laïc, décrit par Marx comme un opium surpuissant, emprunte les voies du droit et de l’algèbre ; ce n’est pas un hasard si la réalité objective est subvertie par ces moyens. Car il n’y a pas de hasard, pas plus qu’il n’y a de fatalité.
    Le paganisme laïc, pas plus que l’hérésie démocrate-chrétienne qui le sert, n’étaient inscrits dans les gènes de la France. Les musulmans ne doivent donc pas s’interdire de comprendre l’esprit de l’Occident pour mieux éviter le piège mortel dans lequel celui-ci est tombé.

  • L'essence de la laïcité

    « Rien qui ne devienne vénal, qui ne se fasse vendre ou acheter ! La circulation devient la grande cornue sociale où tout se précipite pour en sortir transformé en cristal monnaie. Rien ne résiste à cet alchimie, pas même les os des saints, et encore moins des choses sacro-saintes, plus délicates, res sacro-sanctae extra commercia hominum. De même que toute différence de qualité entre les marchandises s’efface dans l’argent, de même lui, niveleur radical, efface toutes les distinctions. Mais l’argent est lui-même marchandise, une chose qui peut tomber sous les mains de qui que ce soit. La puissance sociale devient ainsi puissance privée des particuliers. Aussi, la société antique le dénonce-t-elle comme l’agent subversif, comme le dissolvant le plus actif de son organisation économique et de ses mœurs populaires.* La société moderne qui, à peine née encore, “tire déjà par les cheveux le dieu Pluton des entrailles de la terre”, salue dans l’or son Saint-Graal, l’incarnation éblouissante du principe même de sa vie. » Karl Marx, Le Capital, livre I. *« Rien n’a, comme l’argent, suscité parmi les hommes de mauvaises lois et de mauvaises mœurs ; c’est lui qui met la discussion dans les villes et chasse les habitants de leurs demeures ; c’est lui qui détourne les âmes les plus belles vers tout ce qu’il y a de honteux et de funeste à l’homme, et leur apprend à extraire de chaque chose le mal et l’impiété. » (Sophocle : Antigone. Note de Karl Marx)

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    Accuser Marx de manquer de spiritualité, c’est exactement comme accuser Balzac de manquer de poésie - un reproche qu’on entend parfois ici où là. C’est la haine du romantisme vis-à-vis du classicisme, la haine d’Alexandre Dumas vis-à-vis de Racine. Dans la même veine sournoise, il y a les efforts de la critique contemporaine pour réduire les peintres de la Renaissance, puissants, beaucoup trop puissants et populaires, beaucoup trop populaires, pour les réduire à des géomètres-experts ou à des magiciens et les ramener ainsi à la mesure du bourgeois amateur de gadgets conceptuels. Le fétichisme des mots contre l’art. L’orthographe contre la syntaxe. Le haïku contre la Bible.
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    Non seulement ceux qui accusent Marx d’être dépourvu de spiritualité sont des ignares, mais ce sont des ignares qui entendent le demeurer. C’est parce que la question de la foi est un question bourgeoise que Marx ne l’aborde pas. Le pilier ne doute pas de la voûte. Marx est bien placé pour connaître cette hypocrisie, lui qui a démontré que la laïcité était une fiction ; par conséquent la foi démocrate-chrétienne, chrétienne-démocrate, la foi athée qui en découlent, sont des fictions elles-aussi. À moins de nier la liberté individuelle, ce que Marx ne fait pas, ces fictions qui se présentent comme des angélismes, sont librement consenties. Étant donné que l’essence de la religion laïque, c’est la négation, en théorie aucune autre religion ne devrait accorder plus de place au doute. Or dans les faits, il n’est que de voir ses représentants les plus médiatiques, perpétuellement à la chasse aux sorcières, pour constater qu’on est en présence de fanatiques. La laïcité, c’est le fanatisme du doute.